| Pertharite est une tragédie de Corneille représentée d'abord en 1652. La représentation de Théodore n'avait été qu'un demi-échec; Pertharite, roi des Lombards, échoua complètement. Corneille, découragé, resta ensuite éloigné du théâtre pendant sept années. Cette tragédie en cinq actes, qui n'eut, d'après Voltaire, qu'une seule représentation, est tirée des Gestes des Lombards de Paul Diacre (livres 4 et 5) et de l'Histoire des invasions de l'Italie par les Barbares d'Erycius Puteanus. Le poète nous donne les raisons de la chute : « On n'y a pu supporter qu'un roi dépouillé de son royaume, après avoir fait tout son possible pour y rentrer, se voyant sans forces et sans amis, en cède à son vainqueur les droits inutiles, afin de retirer sa femme prisonnière de ses mains On n'y a pas aimé la surprise avec laquelle Pertharite se présente au troisième acte, quoique le bruit de son retour soit épandu dès le premier, ni que Grimoald reporte toutes ses affections à Eduige, sitôt qu'il a reconnu que la vie de Pertharite, qu'il avait cru mort jusque-là, le mettait dans l'impossibilité de réussir auprès de Rodelinde (Examen). » Pertharite, roi des Lombards, a été chassé de son trône par un usurpateur, Grimoald, comte de Bénévent, qui s'est épris de sa captive Rodelinde, femme de Pertharite. Bien que ce dernier passe pour mort, Rodelinde refuse sa main à Grimoald et s'indigne des prétentions d'un vainqueur qui n'avait aucun motif légitime pour envahir le royaume, bien qu'il prétendît soutenir les intérêts d'Eduige, soeur de Pertharite et légitime héritière de la moitié du royaume. Eduige, jalouse de l'amour de Grimoald pour sa belle-soeur, accable ce dernier de reproches et lui donne un conseil ironique qu'il rejette son infidélité sur le désir de se concilier l'affection des Lombards en épousant leur reine, dont le fils deviendra ainsi son successeur. Grimoald met aussitôt cette idée à profit et propose à Rodelinde, pour qu'elle consente à l'épouser, d'assurer le trône au fils qu'elle a eu de Pertharite. Rodelinde accorde sa main au tyran, mais à la condition qu'il immole de sa propre main le fils de Pertharite; elle veut ainsi rendre l'usurpateur odieux au peuple et rendre possible une révolution. Grimoald, qui est un bon tyran, s'y refuse. Sur ces entrefaites apparaît Pertharite. Grimoald, persuadé que ce n'est qu'un imposteur, le menace du supplice. Pourvu qu'on lui rende son épouse, Pertharite consent à laisser son trône à l'usurpateur. Convaincu par Eduige qu'il se trouve en présence du véritable Pertharite, Grimoald renonce à Rodeliude et promet à Eduige de l'épouser. Malgré les conseils d'un perfide ami, il refuse de faire mettre à mort le roi dépossédé ; il lui rend même sa femme et retourne définitivement à Eduige, autrefois aimée. Enfin, l'amour cédant tout à fait à l'honneur, il reconnaît hautement comme roi de Milan l'époux de Rodelinde et va partager avec Eduige le trône de Pavie. Par cette série d'invraisemblances, Corneille prétendait montrer la puissance de la volonté sur le coeur qui ne sait plus qu'obéir. Le public ne goûta pas cette façon de soutenir la thèse. Cependant Corneille croyait à l'excellence de sa pièce, comme le prouvent ces quelques lignes de l'Examen : « J'ajoute ici, malgré sa disgrâce, que les sentiments en sont assez vifs et nobles, les vers assez bien tournés, et que la façon dont le sujet s'explique dans la première scène ne manque pas d'artifice. » A vrai dire, malgré les invraisemblances et les défauts, bien des passages sont dignes de l'auteur de Cinna. (H. Clouard). | |