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La souveraineté nationale et le droit de vote |
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La Souveraineté nationaleLe principe de la souveraineté nationale est celui en vertu duquel tous les pouvoirs dans l'Etat émanent de la nation.• Définition de la nation. - La nation, dans le sens où nous l'entendrons ici, est une société d'hommes soumis à une autorité commune et vivant sous l'empire des mêmes lois générales. On a ainsi pu dire qu'entre la nation et l'Etat il y a la même différence qu'entre les membres d'une société commerciale et la société elle-même, considérée comme personne morale.Origine historique.Le mot « nation » peut aussi être pris aussi dans un autre sens; il est employé comme synonyme de « nationalité ». On dit alors qu'une nation est une réunion d'hommes ayant la même origine, les mêmes traditions, les mêmes moeurs, les mêmes aspirations. De ce point de vue ont peut parler de nations sans Etat et d'Etats sans nation correspondante. Le principe de la souveraineté nationale a été proclamé pour la première fois au XVIIIe siècle par J.-J. Rousseau, dans son célèbre, ouvrage du Contrat social. D'autres théories ont essayé de déterminer le fondement de la souveraineté : l'une est connue sous le nom de système évolutionniste ou matérialiste, une autre est le système spiritualiste; on mentionnera aussi la théorie positiviste. Système
de Rousseau.
D'après Rousseau, les hommes auraient d'abord vécu dans l'état de nature, sans lien entre eux, sans subir d'autorité supérieure, en possession d'une indépendance absolue. Plus tard, fatigués de cette liberté et de ses inconvénients, ils ont voulu former une société, et, pour cela, ils ont fait un contrat, le contrat social. Ils ont alors abandonné leur ancienne liberté pour fonder la nouvelle société; la souveraineté a été constituée par la somme de toutes les libertés individuelles. En échange de son abandon, chaque homme a reçu une parcelle de la souveraineté. Malgré cela chacun d'eux est tenu de se soumettre à la volonté générale du corps social dont l'expression constitue la loi. Mais tandis que l'unanimité est nécessaire pour la formation du contrat social, la majorité suffit pour faire les lois parce que la majorité est seule capable de dégager la volonté générale du pays. Les minorités se trompent toujours; la majorité, au contraire, est toujours infaillible. Depuis longtemps, cette conception d'un état de nature ayant précédé l'état social a été démontrée inexacte; l'existence des sociétés étant inhérente à la nature de l'homme qui n'apparaît nulle part vivant d'une façon solitaire. En admettant même la conception du contrat social on peut objecter ceci : C'est que ce contrat ne liait que les hommes qui l'ont formé, non les générations futures. Dès lors ceux qui préfèrent reprendre leur liberté native devraient pouvoir le faire; sinon l'unanimité que Rousseau déclarait nécessaire à la formation du contrat social n'existerait plus; mais alors la souveraineté n'est plus qu'un vain mot puisqu'on peut la changer.Quoi qu'il en soit le principe de la souveraineté nationale que Rousseau avait dégagé de prémisses reconnues fausses aujourd'hui, est considéré comme une règle essentielle du droit public moderne. Toutes les constitutions en France depuis 1789 l'ont adopté. Ce principe était d'ailleurs consacré dans la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, mise en tête de la Constitution de 1791 : « Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément. »Seule la charte de 1814 a refusé de l'admettre en déclarant dans son préambule que l'autorité tout entière réside dans la personne du roi, qui tient lui-même sa couronne de Dieu, dont il est le représentant sur la terre. Système
évolutionniste.
Système
spiritualiste.
Théorie
positiviste de Duguit et Jèze.
Fondement de la
souveraineté nationale.
Le motif rationnel est que l'organisation politique des sociétés est établie dans l'intérêt de tous ceux qui les composent; elle a pour but d'assurer le salut et le bonheur de la nation. Dès lors, il est logique que tous les citoyens participent à l'exercice de la puissance publique, sauf a subir la loi de la majorité. L'observation des faits démontre que la souveraineté ne s'exerce efficacement que si elle s'appuie sur l'opinion publique du pays et sur l'adhésion du plus grand nombre. La force matérielle est insuffisante pour en assurer le respect d'une façon permanente et durable. Dès lors, reconnaître la souveraineté nationale c'est tout simplement conformer le droit au fait. Caractères
de la souveraineté.
1°
La souveraineté est-elle illimitée?
Rousseau et les partisans du contrat social considèrent que la souveraineté est illimitée; il n'y a pas de droit contre la loi. Ce que le plus grand nombre décide est bon et légitime. C'est la négation des droits individuels. L'école spiritualiste donnait deux limites à la souveraineté : 1° le respect des lois divines, supérieures aux lois humaines;La conception laïque de l'Etat, telle qu'elle existe en France, apparaît comme une forme de mixte entre les deux conceptions précédentes : il n'y a pas de droit contre la loi, mais celle-ci trouve ses limites dans les principes énoncés par une loi fondamentale, la Constitution, dont la déclaration des droits de l'homme et du citoyen est le préambule. Lorsque ces limites sont dépassées, l'individu aurait la faculté de résister à l'autorité, soit en refusant d'obéir (résistance passive), soit en repoussant la violence par la violence (résistance défensive), soit en organisant l'émeute contre le gouvernement établi (résistance agressive). La Constitution de 1793 reconnaissait formellement comme sanction aux droits individuels le droit d'insurrection, « le plus sacré et le plus légitime des devoirs ».2° La souveraineté est-elle inaliénable? Cette question est résolue différemment suivant les auteurs. Rousseau déclarait la souveraineté inaliénable, parce que la souveraineté n'est que la volonté générale, qui ne peut ni se transmettre ni s'enchaîner. D'autres ont soutenu, au contraire, que la souveraineté est aliénable. Dans une monarchie héréditaire et absolue la souveraineté ne pourrait pas être retirée au roi par la nation, soit parce que, d'après les uns la souveraineté appartiendrait au monarque et non à la nation, par droit divin, soit parce que, d'après les autres, la souveraineté aurait été transmise au monarque par un contrat de sujétion passé envers lui par la société. Il y a cependant cette différence entre le système du droit divin et le système de la sujétion, c'est que, dans le premier, la nation ne peut jamais enlever au monarque l'exercice de la souveraineté dont il est le titulaire direct, même lorsqu'il abuse de son pouvoir et se conduit en tyran; au contraire, les partisans du contrat de sujétion reconnaissent à la nation le droit de reprendre l'exercice de la souveraineté lorsque le monarque abuse de son pouvoir et le fait dégénérer en tyrannie.Enfin, un système éclectique distingue : la souveraineté ne peut être aliénée. Le principe que la souveraineté nationale est inaliénable a été ainsi proclamé par la Constitution de 1791 et par celle de 1848. • La Constitution de 1791 dit : La souveraineté réside toujours dans la nation, mais la nation peut en confier l'exercice à une assemblée de représentants élus pour un temps déterminé. C'est ce qui est pratiqué dans la plupart des Etats modernes.« La souveraineté est une, indivisible, inaliénable et imprescriptible ; elle appartient à la nation », titre III, article 1er.• La Constitution de 1848, article 1er, dit :« La souveraineté réside dans l'universalité gis, citoyens français. Elle est inaliénable et imprescriptible. » • La souveraineté nationale est-elle compatible avec la monarchie? Il paraît bien difficile de les concilier ensemble. En effet, pour que le principe de la souveraineté nationale soit respecté, il faut que les représentants auxquels est conféré l'exercice de la puissance publique soient responsables devant le pays, auquel ils doivent rendre des comptes et qui doit conserver le droit de ne pas les réélire à la fin de leur mandat. Or, un semblable pouvoir échappe à la nation à l'égard d'un monarque, la monarchie fût-elle simplement élective et viagère, au lieu d'être héréditaire.3° La souveraineté est-elle imprescriptible? Pour Rousseau, la souveraineté étant inaliénable est, par voie de conséquence, imprescriptible. Il est, au contraire, des auteurs qui, assimilant la souveraineté à la propriété, admettent la prescription comme mode d'acquisition de la souveraineté. Enfin, dans un troisième système, on distingue et on dit : la souveraineté ne peut pas être prescrite, elle réside toujours dans la nation, mais l'exercice de la souveraineté peut être prescrit sous certaines conditions. Par exemple, si un usurpateur s'empare du pouvoir et qu'il l'exerce pour le bien commun sans soulever d'opposition sérieuse de la part du plus grand nombre, on devra considérer sa situation comme légitime et normale. 4°
La souveraineté est-elle indivisible?
L'opinion commune, aujourd'hui, admet que la souveraineté est indivisible dans son principe, mais que son exercice doit être confié à des pouvoirs distincts. Comment s'exerce
la souveraineté nationale.
1° Soit directement par la participation effective de tous les citoyens à la conduite des affaires publiques;Dans le premier cas, on se trouve en présence du gouvernement direct; dans le second cas, on est en face du gouvernement représentatif. Le droit de voteRéglementation générale du droit de vote.Quelle est la véritable nature du droit de vote. Sur ce point deux opinions ont été soutenues. Dans le système de Rousseau, le droit de suffrage était un droit individuel dont personne ne devait être exclu, ni les femmes, ni les mineurs, ni les indignes. Au contraire, d'après le système exposé par Barnave à l'Assemblée constituante, l'exercice du suffrage constitue une véritable fonction sociale; dès lors, il importe de déterminer les conditions d'aptitude nécessaires pour l'exercice de cette fonction et l'exercice de cette fonction peut être déclaré obligatoire. Le suffrage peut être organisé de façons bien différentes : il peut être universel ou restreint; direct ou indirect. Suffrage universel.
Avantages
du suffrage universel.
1° Il assure une grande égalité dans l'établissement de l'impôt;Inconvénients du suffrage universel. On a voulu voir dans le suffrage universel plusieurs inconvénients. Le principale est qu'il donne la même portée au vote de des électeurs différemment impliqués dans la vie démocratique, et pouvant user aussi très différemment de leur sens critique. Ce qui ouvre la voie à la démagogie et aux sophismes chez le personnel politique. Correctifs
au suffrage universel.
1° Le vote plural. - Le vote plural consiste à donner plusieurs voix à certaines catégories d'électeurs, dans le but d'assurer la prépondérance à la famille, à la fortune ou à l'instruction. • Le vote plural avait été établi sous la Restauration par la loi du 29 juin 1820. Cette loi établissait deux collèges électoraux : 2° Le vote multiple. - Le vote multiple est le système qui consiste à permettre à un électeur de voter dans plusieurs circonscriptions en raison des attaches qu'il peut avoir avec chacune d'elles. Mais le système du vote multiple est anti-démocratique. Il assure une influence prépondérante à la fortune et particulièrement à la propriété foncière.a) un collège d'arrondissement, dans lequel votaient tous les Français de 30 ans payant 300 francs d'impôts directs;Les collèges d'arrondissement nommaient 2 députés; les collèges de département en nommaient 172. Sous l'Empire de cette législation le vote plural existait, puisque les électeurs du collège départemental votaient deux fois une fois dans le collège d'arrondissement et une seconde fois dans le collège de département. Cette loi connue sous le nom de loi du « double vote » avait été faite dans une pensée de réaction sous le coup de l'émotion produite par l'assassinat du duc de Berry, que les royalistes attribuaient au réveil des idées libérales. 3° Le vote indirect. - Le vote indirect, ou à plusieurs degrés, est celui d'après lequel les électeurs ne désignent pas directement les représentants de la nation; ils nomment un certain nombre d'entre eux qui seront chargés d'élire les députés. Il peut être combiné avec le suffrage universel ou avec le suffrage restreint. D'autre part, les électeurs du premier degré peuvent être nommés spécialement en vue de l'élection des représentants, ou bien ils peuvent être élus à d'autres fins que l'élection, qui ne forme qu'une partie de leurs attributions. • Le vote indirect a été en vigueur en France pendant la période révolutionnaire. Il fut organisé notamment par la Constitution de 1791 et par celle de l'an III ; mais ce fut surtout la Constitution de l'an VIII qui assura le triomphe complet de ce procédé d'élection. De nos jours, le vote indirect au 2e et même au 3e degré fonctionne encore pour l'élection des sénateurs.On mentionne parmi les avantages du vote indirect les suivants : 1° Il remet l'élection définitive à un collège électoral plus impliqué dans la vie politique et assure un meilleur choix des élus;On a peu aussi noter que le vote indirect est un moyen employé pour écarter le peuple du pouvoir et pour assurer la majorité dans le Parlement à une classe privilégiée, soit à la bourgeoisie comme pendant la Révolution, soit à l'aristocratie de fortune ou de naissance comme sous la Restauration. 4° Représentation des intérêts ou représentation professionnelle. - Ce système, qui a connu un regain d'intérêt à la fin du XIXe siècle, consiste à répartir les électeurs en un certain nombre de groupes, suivant la profession qu'ils exercent (agriculteurs, industriels, rentiers, professions libérales, etc.), et à donner à chacun de ces groupes une représentation distincte. Ce système aurait, prétendait-on, l'avantage de faire élire les députés par les éléments les meilleurs de la population qui sont actuellement noyés dans la grande masse du suffrage universel. Il y avait aussi de nombreuses objections à l'adoption d'un pareil système. D'abord, des objections d'ordre pratique : comment établirait-on ce groupement des intérêts? Y aurait-il un groupe unique pour l'industrie ou bien faudrait-il faire autant de groupes que d'industries distinctes? Et, dans le groupe unique ou dans les groupes multiples, donnerait-on une représentation unique aux patrons et aux ouvriers, ou bien y aurait-il un groupe patron et un groupe ouvrier? D'autre part, une semblable organisation ne tendrait à rien moins qu'à nous ramener aux pratiques de l'Ancien régime où l'individu n'était rien par lui-même et n'apparaissait que comme le représentant d'un groupe social déterminé : clergé, noblesse ou tiers état. On aboutirait à l'oppression des individus par des groupes trop puissants et à une lutte à mort des différents groupes les uns contre les autres. 5° La représentation proportionnelle des minorités. - C'est un système électoral opposé à celui qu'on appelle le système majoritaire ou système de la moitié plus d'un. Il consiste à accorder à la minorité d'avoir dans le Parlement des représentants en nombre proportionnel à celui de ses membres, afin de ne pas être étouffée par la majorité. Parmi les avantages du système proportionnel sur le système majoritaire, on mentionnera : 1° Le régime majoritaire est peu rationnel parce qu'il peut amener l'élection d'un Parlement qui ne soit pas l'image fidèle du pays. Avec un semblable système, on ne peut pas dire que les lois en France soient l'expression exacte de la volonté du pays. On éviterait cet inconvénient avec la représentation proportionnelle des minorités. La Chambre serait une image fidèle du pays politique et la volonté qu'elle exprimerait correspondrait exactement à la volonté du pays.Des objections peuvent aussi être soulévées : 1° On a dit que la représentation proportionnelle était incompatible avec le régime parlementaire, parce qu'elle aboutissait à l'émiettement et au morcellement des partis et entraînait par voie de conséquence l'instabilité des ministères.Différents systèmes de vote majoritaire ont été proposés. • Système du vote limité. - Chaque électeur ne peut voter que pour un nombre de députés inférieur a celui des députés à élire dans la circonscription, par exemple 4 sur 6; de cette façon la majorité ne pourra, faire passer que quatre candidats; les deux autres sièges seront réservés à la minorité. Ce système soulève plusieurs objections : d'abord il a le tort de fixer à l'avance d'une façon empirique la proportion entre les représentants de la minorité et ceux de la majorité. Et puis, si la majorité est nombreuse et disciplinée, elle peut réussir à ne laisser passer aucun candidat de la minorité.6° Le vote obligatoire. - C'est un système qui oblige l'électeur à remplir son devoir électoral, sous la menace d'une peine. Le but est de combattre les abstentions et de contraindre l'électeur à s'intéresser à la direction des affaires politiques du pays. On a soulevé différentes objections contre ce système : Quoi qu'il en soit, le système du vote obligatoire fonctionne en Belgique depuis 1893.1° On a dit : l'électeur a un droit dont il peut user ou ne pas user à sa fantaisie; Le suffrage restreint.
• La fortune. - L'idée odieuse qui sert de base à cette limitation du suffrage est que ceux qui n'ont pas de biens et qui ne paient pas d'impôts ne sont pas intéressés à la bonne administration des affaires publiques.Forme moderne du gouvernement direct. Le référendum. La forme moderne la plus usitée du gouvernement direct est le référendum. Le référendum est le système consistant à consulter le peuple sur les résolutions prises ou à prendre par l'assemblée législative. Diverses
sortes.
1° On peut poser au peuple la question de savoir s'il y a lieu de réviser la constitution en vigueur. Le référendum vise alors une loi à intervenir dans la suite; on l'appelle référendum consultatif; • Le référendum obligatoire consiste à soumettre toutes les lois votées par l'assemblée législative à la ratification populaire. C'est le système préconisé par J.-J. Rousseau, au nom du principe de la souveraineté nationale. |
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