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La physiologie
de l'organe de la vue repose sur les propriétés mêmes
de la lumière. L'oeil est essentiellement
formé d'une membrane nerveuse impressionnable
à la lumière, la rétine,
et de milieux transparents placés devant elle pour modifier convenablement
la marche des rayons lumineux. La rétine, le cristallin
et le corps vitré sont d'ailleurs
enveloppés par la choroïde qui constitue
autour d'eux une véritable chambre noire. Imaginons un corps placé
devant l'oeil et lui envoyant soit sa propre lumière, soit de la
lumière réfléchie, comme cela se passe le plus communément.
Évidemment aucun rayon ne pénétrera. dans l'oeil s'il
ne tombe pas sur la cornée transparente.
Mais parmi ceux qui rencontreront ce premier milieu transparent, les uns
serviront à la vision, les autres seront éliminés
: tous cependant subiront un changement de direction; une réfraction.
Il est facile, avec les plus simples notions d'optique, de comprendre que
la convexité de la cornée aura pour effet de disposer à
la convergence les rayons plus ou moins divergents qui pénètrent
dans sa substance. Cette déviation des rayons lumineux se
détruirait si, au sortir de la cornée, ils cheminaient dans
un milieu aussi peu réfringent que l'air; mais l'humeur aqueuse
a un pouvoir réfringent considérable et peu inférieur
à celui de la cornée elle-même, et maintient ainsi
la plus grande partie de la déviation imprimée par la cornée.
Brewster
qui a mesuré le pouvoir réfringent de la cornée a
trouvé, que par rapport à celui de l'air, il était
de 1,386, et celui de l'humeur aqueuse de 1,337. En un mot, la cornée
et l'humeur aqueuse forment un premier système convergent qui réunit
et dirige vers l'iris, et surtout vers la pupille,
les rayons incidents reçus par la cornée. C'est dans ce pinceau
de rayons que l'iris sépare les plus centraux que leur direction
rend aptes à produire une vision distincte. Ce diaphragme membraneux
(l'iris) réfléchit, en effet, tous les rayons tombés
sur lui-même et laisse pénétrer plus avant dans l'oeil
ceux là seulement qui sont dans le champ de l'ouverture pupillaire.
En le franchissant, ils pénètrent dans la chambre postérieure
de l'oeil, où déjà le pigment noir absorbe et éteint
tous ceux qu'une direction trop oblique enverrait se réfléchir
contre les parois de cette chambre. Mais, en face de l'ouverture
pupillaire est le cristallin qui reçoit ainsi tout un faisceau choisi
de rayons lumineux.
Ce milieu lenticulaire biconvexe est un
instrument de convergence parfaitement comparable, dans sa forme et ses
effets généraux, aux verres biconvexes de nos instruments
d'optique. Doué d'un pouvoir réfringent que Brewster
a évalué à 1,384 (celui de l'air étant de 1,000),
le cristallin fait converger vers l'axe de
l'oeil les rayons déjà réunis
par la cornée et l'humeur aqueuse. Cette convergence est complétée
par l'action du corps vitré placé au delà, qui, moins
réfringent que le cristallin (1,339), exerce une influence analogue
à celle de l'air sur les rayons lumineux qui sortent de nos lentilles
optiques. Il se formera donc un foyer comme avec ces appareils de convergence;
seulement l'humeur vitrée étant pour sa réfringence
un milieu moins différent du cristallin que l'air ne l'est par rapport
au verre, le foyer se forme à une distance un peu plus grande derrière
le cristallin, que si les circonstances se rapprochaient plus des conditions
de nos instruments d'optique. Quoi qu'il en soit, déviés
vers la convergence depuis la cornée jusqu'à la rétine,
les rayons lumineux viennent agir sur cette membrane, et y produisent des
impressions nettes, parce que la formation des foyers sur la rétine
a pour résultat que tous les rayons émanés d'un même
point de l'objet, et qui parviennent sur cet écran nerveux, le frappent
en un même point au lieu d'être dispersés comme ils
le seraient sur tout autre point du trajet de la lumière. En même
temps que la netteté résulte de cette action des milieux
de l'oeil, l'impression lumineuse y gagne aussi en intensité, puisque
bon nombre de rayons qui eussent été perdus pour la rétine
y sont ramenés par l'action convergente de ces corps diaphanes.
Formation des images au fond de l'oeil. ab, objet; cd, écran qui représente les procès ciliaires et porte en son centre la lentille convergente (cristallin) ef; om, surface impressionnelle de la rétine; a'b', image formée par foyers conjugués, sur la rétine. Pour se faire une idée plus précise de la marche des rayons lumineux dans l'oeil, il suffit d'expliquer la figure ci-dessus. Soit un objet ab; de chacun de ses points partent les axes secondaires, aa', bb'. Dès lors, tous les rayons qui, partis du point a, traversent les milieux de l'oeil, viennent former leur foyer en a', sur la rétine, de même les rayons partis du point b le font en b', et ainsi des autres points. Mais une difficulté se présente ici : de cette théorie même il résulte que les foyers sont disposés de façon à donner sur la rétine une image de sens inverse à celui des objets, renversés, par exemple, pour les objets droits. Un pareil résultat pourrait faire douter que la marche des rayons lumineux soit bien celle qui vient d'être indiquée. On a donc cherché, à le constater par l'expérience : si l'on prend un oeil de boeuf ou de lapin, encore bien frais, et qu'après avoir suffisamment aminci la partie postérieure de la sclérotique pour la rendre à peu près transparente, on adapte, l'oeil, ainsi préparé à l'orifice d'une chambre noire, on voit alors nettement se former des images inverses en direction aux objets qu'elles représentent. Plusieurs autres, observations du même genre ont mis ce fait hors de doute, et confirmé les déductions des principes fondamentaux de l'optique appliqués aux fonctions de l'oeil. Ce fait, lui-même créé une difficulté nouvelle dans l'explication des phénomènes de la vision; si la rétine, reçoit, une image renversée, comment voyons-nous les objets, dans, leur position réelle? Cette question a longtemps embarrassé les physiologistes, et montre que les phénomènes d'optique ne représentent qu'un aspect du mécanisme de la vision; une explication complète doit aussi prendre en compte la manière dont le cerveau analyse et intègre l'information lumineuse, qui lui est transmise à partir des yeux via le nerf optique. Quoi qu'il en soit de ce problème relatif au mécanisme de la vision, on a conservé l'habitude de désigner sous le nom d'image la série des points de la rétine que la lumière impressionne. L'impression est d'autant plus nette que les rayons émanés d'un point de l'objet frappent un seul et même point de la membrane nerveuse; on explique cette condition de la vision précise sous le nom de netteté ou clarté de l'image. Cette netteté est d'autant plus grande que la rétine est plus exactement à la distance focale des milieux réfringents de l'oeil. Il faut en outre une quantité convenable de lumière, et la mobilité de l'orifice pupillaire a pour but de réaliser cette condition. Trop de lumière éblouit et rend la vue douloureuse et confuse; elle perd également toute netteté par défaut d'intensité lumineuse. Aussi voit-on au grand jour la pupille se resserrer considérablement pour diminuer la quantité de rayons lumineux qui pénètrent dans l'oeil; tandis que dans les lieux obscurs ou peu éclairés, la pupille se dilate énormément. Il est certaines propriétés de l'oeil qui en font un instrument d'optique extrêmement perfectionné. Ainsi son aptitude à accommoder, c'est-à-dire à former sur la rétine une image distincte des objets, à quelque distance qu'ils soient placés de nous. Il n'en est pas de même de nos lunettes, et l'on sait que pour les adapter, à des distances très différentes il faut en faire varier très notablement les dimensions. Une autre perfection de ce même organe n'a pas moins fixé l'attention, c'est son achromatisme. Les lentilles ne donnent d'image à peu près blanche que lorsqu'on reçoit les images précisément à la distance focale; dans l'oeil humain, toutes les images, à peu près sont incolores et dépourvues de ces franges colorées que montrent les images formées par les lentilles ailleurs qu'à leur foyer. Cet achromatisme a pour cause la diversité des milieux de l'oeil et les relations de leurs formes extérieures. Le concours des deux yeux, dans la vision mérite aussi d'être considéré à part et commenté en quelques mots. D'après ce qu'on a dit plus haut de la marche des rayons lumineux à travers les milieux de l'oeil, il est clair que les rayons les plus rapprochés de l'axe de l'oeil, c'est-à-dire de la ligne qui joint le centre de la pupille au centre du globe oculaire, sont aussi ceux qui impressionnent le plus nettement la rétine. Lorsqu'on regarde avec les deux yeux, chacun d'eux fait percevoir une image un peu différente dans ses contours, mais représentant le même objet; il faut donc que les axes des deux yeux aillent converger sur l'objet que l'on regarde. On a pensé que les variations même de l'angle qui devaient former ces deux axes nous permettaient, par les diverses positions de l'oeil, de juger relativement les distances de divers corps. On conçoit, en effet, que l'angle des deux axes visuels étant plus ouvert pour un objet rapproché que pour un objet éloigné, nous ayons conscience d'une modification dans la position des yeux l'un par rapport à l'autre, et nous en tirons une notion comparative de la distance. Une autre conséquence de l'emploi des deux yeux dans la vision paraît être une plus exacte perception du relief des objets. Ce concours des deux yeux exige une singulière concordance dans le jeu des muscles de l'oeil : les élévateurs et abaisseurs fonctionnent ensemble; ceux, au contraire, qui portent l'oeil en dehors ou en-dedans agissent alternativement, puisque pour, regarder à gauche, par exemple, nous tournons l'oeil droit en dedans et l'oeil gauche en dehors. Le strabisme ou loucherie a pour cause une anomalie dans l'action des muscles de l'oeil; le strabisme en dedans est le plus commun. (Ad. F.). |
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