| Matamore, mot espagnol qui veut dire dompteur de Maures (Mores), et par lequel on a désigné, au théâtre d'abord, puis dans le monde, les bravaches et les fanfarons. La fanfaronnade étant de tous les temps et de tous les pays, le fanfaron a eu son nom dans chaque langue. La comédie de Plaute intitulée : Miles gloriosus (le Soldat fanfaron), nous montre un Pyrgopolinice (vainqueur des tours et des villes), guerrier invincible et homme à bonnes fortunes, type emprunté à la Grèce, où des aventuriers qui avaient servi en Asie racontaient avec emphase leurs exploits lointains. Dans l'Eunuque de Térence figure un personnage du même genre, Thrason, emprunté, nous dit l'auteur, à Ménandre, et qui se distingue des caricatures triviales de la fatuité militaire par une certaine prétention au bon goût et au bel esprit. Voilà les premiers modèles du Spavento milanais et du capitaine Fracasse imaginé par Théophile Gautier, officiers vantards qui ont été fort à la mode dans les lettres au XVIe siècle et au commencement du XVIIe, et que l'on rencontre dans le Brave de Baïf, dans le Pédant joué de Cyrano de Bergerac, dans l'Agésilan de Colchos de Rotrou, dans le Jodelet duelliste de Scarron. Mais c'est surtout du Matamore castillan que notre vieux théâtre s'est emparé : ce personnage figure avec son nom étranger dans l'Illusion comique de P. Corneille (1636), et il fut outré encore dans l'Artabaze des Visionnaires de Desmarest de Saint-Sorlin (1639). Le soldat fanfaron s'est maintenu sur la scène jusqu'au seuil de l'époque contemporaine : on le retrouve dans le Don Annibal de l'Aventurière, comédie par Émile Augier, jouée en 1848. Il a passé le Rhin, et a été adopté en Allemagne; là, André Gryph ou Creif l'a appelé Horribilicribrifax, et en a fait la personnification des officiers rentrés dans la vie civile après la guerre de Trente Ans. (B.). | |