| Les Infants de Lara sont une légende espagnole du Moyen âge. On la place à la fin du Xe siècle, au temps du comte Garci Fernandez de Castille et du roi de Léon, Bermudo II. Suivant la Chronique générale et le Romancero, comme Ruy Velazquez épousait doña Lambra, en la ville de Burgos, une querelle survint entre celle-ci et sa belle-soeur, doña Sancha, femme de Gonzalo Gustios de Lara, seigneur de Salas. Les deux femmes s'insultèrent publiquement. Un des sept fils de doña Sancha, le plus jeune, Gonzalvico, outragea doña Lambra, la menaçant, disent les romances, de lui couper les jupes au-dessus du genou, une palme et plus encore. A l'annonce de l'injure faite à son épouse, Ruy Velazquez jure de la venger. Il simule une réconciliation avec les infants et leur père, Gonzalo Gustios. Quelque temps après, l'implacable doña Lambra pousse un esclave à jeter sur Gonzalvico un concombre plein de sang « vivant ». Les infants poursuivent l'esclave et viennent le daguer jusqu'aux pieds de sa maîtresse. Là-dessus, seconde réconciliation. Ruy Velazquez propose aux infants une chevauchée en terre infidèle et les livre aux musulmans qui finissent par les exterminer avec leur ayo Nuño Salido, après une lutte furieuse. Pendant ce temps, Gonzalo Gustios que le traître avait envoyé à Cordoue, sous prétexte de porter un message au roi Almanzor (l'hadjib AI-Mansour de l'histoire), était retenu prisonnier par le musulman qui lui faisait servir en un festin les sept têtes de ses enfants et celle de leur ayo. Emu par une si grande infortune, le roi maure rendit la liberté au Castillan. En quittant Cordoue, Gonzalo Gustios laissait enceinte une soeur d'Almanzor. La Sarrasine mit au monde un fils, Mudarra; l'enfant fut élevé parmi les infidèles. Ayant appris le sort de ses frères et le secret de sa naissance, il partit pour la Castille, à la recherche de Ruy Velazquez, le tua et vint présenter la tête à son vieux père. Gonzalo Gustios reconnut le bâtard, le fit baptiser et armer chevalier par Garci Fernandez. Dans la suite, Mudarra brûla vive doña Lambra. (D'aucuns disent qu'elle fut lapidée.). C'est de Mudarra que prétendaient descendre les Manrique Lara. Cette tragique légende qui repose probablement sur quelque fait historique altéré, a longtemps passé pour vérité prouvée. Mariana la rapporte encore en détail dans son Histoire d'Espagne. Elle a inspiré aux poètes du Moyen âge et de la Renaissance une trentaine de romances fort populaires et dont plusieurs ont tous les caractères de l'ancienneté (L'histoire de la littérature espagnole et le Romancero general de Duran, t. I). Juan de La Cueva, Lope de Vega, Matos Fragoso et Félicien Mallefille l'ont mis en drame. Victor Hugo a imité, dans la Romance mauresque de ses Orientales, un des plus beaux chants du Romancero des sept infants, celui où le bâtard Mudarra tue Ruy Velazquez à la chasse. (Lucien Dollfus). | |