| La légende raconte que Siegfried, palatin de Simmorse au pays de Trèves, ayant épousé Geneviève, fille du duc de Brabant, dut quitter sa femme presque au lendemain de son mariage, pour aller rejoindre l'armée de Charles-Martel en marche contre les Sarrasins. Geneviève était enceinte, mais ne s'en doutait pas encore au moment de la séparation. Siegfried avait chargé son intendant, Golo, de veiller sur la princesse. Or, le pervers s'éprit de la femme de son maître. N'ayant pas réussi à la détourner de ses devoirs, il la prit en haine et, quand elle eut mis au monde un fils, il se rendit auprès de Siegfried et accusa Geneviève d'adultère. Le palatin ordonna à son infidèle serviteur de faire mourir sa femme. La princesse et son enfant furent conduits dans une forêt sauvage. Mais les bourreaux, pris de pitié, se contentèrent d'abandonner les malheureux à leur sort. Geneviève trouva un abri dans une caverne, vécut de fruits et de racines et parvint à apprivoiser une biche dont le lait nourrit son enfant. Plusieurs années se passèrent ainsi, quand, un jour, Siegfried étant à la chasse poursuivit la biche familière jusqu'à la caverne où se trouvait Geneviève. Il reconnut sa femme, qui lui prouva son innocence et rentra triomphante à la cour. Golo fut écartelé. Mais la princesse, dont la santé était minée par les privations, mourut peu de temps après; elle fut inhumée prés de Niedermendig, dans une chapelle qui est aujourd'hui encore un lieu de pèlerinage. Voilà la légende. Quelle part de vérité contient-elle? Il est impossible de le dire. Le premier texte qui en fasse mention est probablement celui de Matthias Emich, qui vivait au couvent des carmes de Boppard vers 1472. Freher croit qu'elle existait déjà vers 754. On a signalé une certaine analogie. assez vague, du reste, entre l'histoire de Geneviève et celle de la duchesse Hirlanda de Bretagne, rapportée par le Breton Cerisiers. Quoi qu'il en soit, cette touchante tradition s'est conservée intacte quant au fond, mais avec, des détails très variés, suivant les pays. La poésie s'en est emparée et elle est devenue populaire dans toute l'Europe. Elle a fait éclore des romans, comme ceux de Dupatel (1805) et Dubois (Paris, 1810); des pièces de théâtre comme celles de Blessebois, La Chaussée, Cécile en France; de Tieck et de Raupach en Allemagne, et inspiré de nombreux artistes. La belle estampe Geneviève de Brabant, gravée à Paris en 1789 par Legrand, est surtout célèbre. (E. H.). | |