| Les Confessions, de Saint Augustin. - En faisant l'histoire des erreurs de sa jeunesse et de sa conversion, Saint Augustin, a écrit celle d'une âme éloignée de Dieu par l'emportement des passions, et ramenée par la puissance de la grâce. Ce récit est destiné aux chrétiens de tous les âges; l'idée est venue de la charité, non de l'orgueil ni du besoin d'apologie. Les aveux d'Augustin lui sont inutiles à lui-même; mais ils ne le seront peut-être pas aux âmes qui, accablées du poids de leurs péchés, seraient tentées de désespérer. Il veut leur inspirer l'amour de la bonté de Dieu, leur faire goûter la douceur ineffable de sa grâce : les justes même ont plaisir à apprendre les fautes des pécheurs, non par malignité, mais parce qu'ils sont heureux de la conversion et du repentir. Tel est le fond et l'esprit des Confessions de Saint Augustin. Aussi, les anecdotes et les détails qui ne regardent que la curiosité et l'amusement occupent-ils peu de place dans son livre. S'il raconte qu'il a été, dans son enfance, paresseux et gourmand comme on l'est souvent à cet âge, que l'amour du jeu et des fables lui donnait de continuelles distractions, et qu'il priait rationnant Dieu de le préserver du fouet, c'est pour nous apprendre ou nous rappeler que l'enfance, conçue dans le péché, est sujette au péché jusque sur le sein de la nourrice; elle a besoin de la grâce avant même les premières lueurs de la raison. Aux fautes de l'enfant succèdent celles du jeune homme, et ce sont ces peintures éloquentes et chrétiennes des égarements de la jeunesse qui font surtout la réputation des Confessions de Saint Augustin auprès de ceux qui ne les ont pas lues. Dans la maturité de sa vie et dans la paix d'une conscience purifiée, Augustin pleure les égarements d'un âge impétueux; il en accuse les fautes avec un touchant repentir, une franchise toujours pleine de chasteté et de pudeur, qui ne porte jamais atteinte à la discrétion de l'honnête homme, ou, pour mieux dire, du chrétien pénitent; de tous les noms qui purent être mêlés à ses erreurs, il ne nous apprend que celui de son fils Adéodat. Enfin, dans le récit pathétique de ces faux plaisirs, "semences d'amertume qui le fatiguaient à n'en pouvoir plus", il ne cesse de faire remonter à Dieu la grâce de sa conversion. Pourquoi s'accuse-t-il de l'ardeur et de l'orgueil qu'il portait dans le plaisir? C'est pour remettre devant nos yeux l'abîme de la corruption humaine, et le besoin où nous sommes de crier incessamment vers Dieu pour en être retirés. Aussi les Confessions de Saint Augustin sont-elles plutôt le livre de l'homme et de l'humanité que l'histoire personnelle d'un homme. On y rencontre, tantôt développées, tantôt effleurées, toutes les grandes questions philosophiques et pratiques de la vie. Élève et maître brillant dans l'art si populaire encore de la parole, Augustin juge les études de sa jeunesse avec une sévérité chrétienne que l'on retrouvera dans Bossuet. II condamne la vanité du savoir humain, le danger des livres des poètes, et de cette éducation païenne qui mettait tous les vices sous le patronage des dieux. Converti d'abord à la philosophie par un traité de Cicéron (l'Hortensius, auj. perdu), plus tard à la religion chrétienne par une inspiration divine, il invite les chrétiens à chercher la solide espérance, la connaissance de Dieu, seule capable de nous rendre heureux. II est pathétique et sublime dans l'effusion de son amour pour la vérité, comme Fénelon dans le Traité de l'existence de Dieu. Treize ans après sa conversion, il faisait l'examen de son âme; il ne cache pas qu'il est encore sensible malgré lui aux impressions d'un passé coupable; il passe en revue les plaisirs des sens, les juge avec une rare sagesse, et revient à J.-C., vrai médecin et vrai médiateur. Voilà une idée incomplète de ce grand livre des Confessions, histoire admirable des faiblesses humaines rachetées par la pénitence et l'amour de Dieu sous l'action irrésistible de la grâce. On a cité souvent la charmante histoire des poires volées par Augustin et ses camarades, les tentations des spectacles, l'amitié du saint pour Alype et Nébride, l'admirable portrait de sa mère, Ste Monique. Il y a bien d'autres beaux récits encore, celui, par exemple, de sa conversion et de celles qui la préparèrent, la profession de foi du rhéteur Victorin, la retraite des amis de Potitien dans la solitude, etc. Le style de l'ouvrage exprime merveilleusement tous les mouvements de cette âme ardente, toutes les nuances de cette imagination mobile à l'infini, et l'incorrection même de la langue, qui s'altérait en Afrique au moment de l'invasion des Barbares, ajoute encore à l'originalité de l'écrivain. (A19).
| En bibliothèque - La traduction des Confessions par P. Janet, Paris, 1860, in-8°, et l'Essai sur les Confessions de St Augustin par A. Desjardins, in-8°. | . | |