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L'Antiquité > le Croissant fertile > la Mésopotamie > la Société, les institutions |
On connaît sous le nom de Code d'Hammourabi un corpus législatif consigné dans la pierre et que le souverain babylonien entendait appliquér à l'ensemble de son royame. Cette législation prévoit un certain nombre de pénalités : la mort par l'eau, par le feu, par l'empalement; diverserses mutilations, le fouet, le bannissement, des dommages-intérêts. Ces peines diffèrent non seulement d'après les crimes ou les délits mais encore d'après la condition des personnes. La loi du talion, par exemple, s'applique seulement quand le dommage a été subi par un noble. Le dieu Shamash dicte ses lois à Hammurabi. (Sommet de la stèle d'Hammurabi; environ 2000 av. J.-C.; Louvre). La société se divise en effet en classes : les nobles (amelu), les plébéiens (mushkinu, d'où nous est venu meschin mesquin, par l'intermédiaire des Arabes), les esclaves (ardu). Il y a en outre des personnes privilégiées : le rid-rsabê, le ba'iroum, jouissent d'un bénéfice, terrain, maison, animaux, concédé par le roi en échange des services qu'ils rendent à l'Etat; ils forment les cadres de troupes réunies par leurs soins pour les grandes corvées et pour les expéditions militaires, doivent le service personnel et ne peuvent en aucun cas se substituer un remplaçant. Leur bénéfice est exempt des charges publiques; ils ne dépendent en aucune manière des gouverneurs civils et, quand ils sont tombés aux mains de l'ennemi, le temple de leur ville ou la cassette royale s'impose le paiement de leur rançon, si leurs ressources personnelles n'y peuvent subvenir. Cette rançon est remise entre les mains d'un de ces hommes d'affaires qui, à cause de l'insécurité des chemins, ont coutume d'envoyer en caravanes dans les pays voisins des commis-voyageurs avec lesquels ils ont traité sous forme de contrat de commission (Le commerce). La loi exige pour ce contrat un document écrit, avec fixation des devoirs du commis, indication exacte des marchandises ou de l'argent remis, et des sommes avancées pour la mise en route. Le commis est tenu d'avoir une comptabilité très stricte; à son retour il remet l'actif aux mains de son mandant, exige un reçu régulier et retire sa part des bénéfices; s'il a été négligent, incapable, il peut être condamné à verser le double de la valeur à lui confiée; mais s'il a subi un détriment, soit par suite de l'insécurité des routes, soit par toute autre cause de force majeure, il se libérera définitivement par l'affirmation des faits, appuyée d'un serment. La fraude est gravement punie; le commis qui a trompé peut être condamné à payer le triple; l'agent d'affaires, le sextuple. L'agent d'affaires est parfois une personne morale, résultant d'un contrat de société; on s'associe pour exploiter un capital, un fonds de commerce, le travail d'esclaves; la dissolution de la société ne peut se faire que devant l'autorité judiciaire; la liquidation doit être universelle et le détenteur des biens sociaux déclare avec serment n'avoir rien dissimulé de l'actif. Comme sous les premiers rois amorrites, les ventes se font au comptant, mais à partir de Hammurabi on ne se borne plus à signaler en termes généraux dans le contrat le paiement du prix convenu; on indique ce prix et il ne comporte plus les suppléments, cadeaux et bonnes-mains en usage au temps de la dynastie d'Akkad. Le délai dans lequel l'acheteur d'un esclave peut réclamer, délai jadis laissé à la libre appréciation des vendeurs et acheteurs, est maintenant limité par la loi et fixé à un mois. La législation prévoit le prix des locations les plus diverses : esclaves, animaux, barques, chariots, greniers, maisons, terrains, etc.; elle règle le prêt à intérêt en fixant à 33,33 % l'an, suivant un usage déjà en vigueur au temps de Shulgi, le taux pour les produits de la terre; pour l'argent à 20% seulement, chiffre qui n'a jamais varié en Babylonie. Des circonstances exceptionnelles peuvent permettre d'exiger un rendement plus élevé; la coutume est de se contenter le plus souvent d'un revenu moindre; l'État prête parfois à 12 %, les temples sont encore moins exigeants et leurs ressources leur permettent d'organiser le prêt d'honneur. Pour éviter les opérations usuraires Hammurabi exige la rédaction d'un contrat de prêt devant un certain fonctionnaire, à un jour déterminé et, sous peine de nullité, en tels termes que le taux ne puisse être porté au-dessus du maximum légal. Et si, malgré ces précautions le prêteur trouve moyen de tourner la loi, des sanctions sont prévues contre ces manoeuvres frauduleuses. Quand le débiteur ne petit restituer à l'époque convenue, le créancier devra accepter la substitution d'un autre bien de valeur égale proposé devant témoins, avec l'intérêt légitime; le débiteur pourra réduire sa femme ou ses enfants en servitude pour une durée maxima de trois années ou, avec l'agrément de son prêteur, déléguer par écrit ses dettes à son, fils; enfin, s'il n'a absolument aucun moyen de libération, il sera lui-même réduit en esclavage. La famille se constitue par le mariage et celui-ci a pour base indispensable la rédaction d'un acte unilatéral par lequel le mari fixe les obligations de sa future femme et le plus souvent indique le prix de la répudiation. D'ordinaire la fiancée, choisie par les parents du jeune homme, reçoit de lui une tirhatou, petite somme d'argent offerte sur un plat. A partir de ce moment, sans qu'il y ait encore d'engagement définitif, elle peut habiter dans la famille de son futur époux et sa situation juridique est déjà modifiée. Quand la tablette de mariage a été rédigée, en présence de témoins, la nouvelle épouse est en général pourvue par son père d'une shériqtou ou dot. Cette dot sera transmise à ses enfants ou reviendra à la maison paternelle s'il n'y a pas d'enfants. Pendant le mariage le mari peut y ajouter une donation, un noudounnou; elle en a l'usufruit, la nue-propriété appartient à ses enfants ou aux héritiers naturels du mari. La femme mariée administre ses biens propres sans le concours de son mari. Quand celui-ci est absent s'il n'a pas, pour régler ses affaires, de fils majeur, c'est à elle qu'incombe légalement la gestion de la fortune familiale. Dans tous les cas elle est solidaire des dettes contractées pendant le mariage, car son mari ne saurait disposer des acquêts sans son consentement, et même elle est responsable des dettes antérieures si elle n'a pas pris la précaution de s'en faire exonérer dans la teneur de sa tablette conjugale. Si du mariage il n'est pas issu d'enfant, le mari peut répudier son épouse ou prendre une femme de second rang; souvent cette femme est une esclave, choisie parmi celles de l'épouse ou achetée par elle d'accord avec le mari; elle sera affranchie de droit par la maternité, mais sa maîtresse conservera indéfiniment le pouvoir de la réduire de nouveau en esclavage en cas d'agissements contraires à sa situation subordonnée, et de la vendre si elle n'est pas devenue mère. Le mari, pourvu par les soins de son épouse d'une concubine dont il a eu des enfants, ne saurait désormais introduire une autre femme au domicile conjugal. Suivant une tradition ancienne, l'épouse légitime peut être répudiée sans aucun motif; s'il n'y a pas faute de sa part, elle se retire en emportant sa dot, le juge lui confie la garde des enfants avec une pension alimentaire et, en toute propriété, une part dans les biens de son mari; quand tous ses fils sont devenus majeurs, c'est-à-dire âgés de plus de dix ans, elle peut contracter un nouveau mariage. La maladie chronique ou l'infirmité n'autorise pas la répudiation, mais l'époux peut prendre une autre femme à condition de traiter la première sur le pied d'égalité. La femme mauvaise ménagère, si elle n'est pas répudiée, peut être réduite en esclavage chez son propre mari qui obtient le droit de contracter une nouvelle union. La femme adultère, prise en flagrant délit, est punie par son mari et peut être condamnée à l'immersion ainsi que son complice; accusée seulement de mauvaise conduite, elle a la faculté de recourir à l'ordalie pour se justifier. L'absence de son mari emmené en captivité autorise toute femme, dont les moyens d'existence sont insuffisants à contracter un nouveau mariage, sans encourir la peine de l'adultère; si plus tard le premier époux revient, elle retournera chez lui, laissant à leur père les enfants du second lit. La femme abandonnée n'est jamais obligée de reprendre la vie conjugale. Les enfants de l'épouse suivent la condition sociale de leur mère. Ceux des concubines naissent affranchis mais jamais n'ont de droits égaux à ceux de leurs frères germains, fils de l'épouse. Ceux des prêtresses mariées sont légalement considérés comme enfants de la divinité, et ceux de la concubine servante de la prêtresse, comme les enfants légitimes et naturels de cette prêtresse, L'adoption est largement pratiquée, même par des personnes qui ont déjà une progéniture, et en particulier par un mari en faveur des enfants de la concubine que lui a procurée son épouse. Hammurabi prévoit un statut légal de l'adoption; il règle aussi la situation de l'adopté qui renonce à sa famille adoptive ou rejeté par elle. Les filles reçoivent une dot quand elle entrent en ménage, l'usufruit d'une part d'enfant, si elles deviennent prêtresses, ou un tiers de part en toute propriété si elles sont au service du dieu Marduk. Au décès du père, la mère qui ne jouit pas d'un noudounnou et chacun des fils prennent une part de l'héritage les fils de la concubine n'ont droit à rien s'ils ne justifient pas d'une tablette d'adoption; s'ils peuvent en présenter une ils ont également leur part, mais seulement après que les enfants de l'épouse ont eux-mêmes choisi leurs lots. S'il y a des enfants de deux femmes légitimes, chacun a personnellement les mêmes intérêts. S'il n'y a pas d'enfants, la succession revient aux frères. (L. Delaporte). |
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