| L'usage d'écrire avec un style sur des tablettes de bois ou d'ivoire enduites d'une mince couche de cire remonte à une haute antiquité; les témoignages abondent dans les auteurs anciens et quelques spécimens de tablettes antiques se sont conservés. On en a retrouvé en assez grand nombre à Pompéi, notamment en 1876 dans la maison de L. Caecilius Jucundus. D'autres tablettes, grecques et latines, passent pour avoir été découvertes dans les mines d'or de la Transylvanie, mais leur authenticité a été contestée par Letronne et N. de Wailly (Journal des savants, 1841). Les tablettes de cire antiques latines ont été réunies et publiées par Detlefsen au t. III, 2e partie, du Corpus inscriptionum latinarum. Elles nous ont conservé de curieux exemples de l'écriture cursive des Romains. Ces tablettes, généralement de très petite dimension et qui remplissaient l'office de nos carnets de poche, étaient composées de deux feuillets, dont les pages 1 et 4, non enduites de cire, formaient la couverture; c'était le dyptique; si un troisième feuillet, enduit alors au recto et au verso, y était intercalé, c'était un triptyque; s'il y en avait plusieurs, c'était un polyptique ou codex. Ce sont ces codices qui ont donné naissance à la forme du livre moderne. On écrivait sur la cire à l'aide d'un style, espèce de poinçon de métal, pointu du côté qui servait à écrire, élargi et aplati à l'autre extrémité, qui servait à effacer l'écriture. L'usage des tablettes de cire s'est perpétué sans interruption au Moyen âge et presque jusqu'à nos jours. On conserve au Trésor des chartes quatorze tablettes de bois de platane, arrondies par le haut, réunies en codex par des bandes de parchemin, enduites de cire des deux côtés, à l'exception de la première et de la dernière qui forment couverture et n'ont reçu de cire qu'à l'intérieur. Elles contiennent les comptes de Jean Sarrazin, chambellan de Louis IX, pour une partie des années 1266 et 1257. Elles ont été publiées au t. XXI du Recueil des historiens de la France. La Bibliothèque nationale conserve des tablettes analogues pour les règnes de Philippe III et de Philippe IV (t.. XXII du Recueil des historiens de la France). Il s'en trouve encore à Genève, à Florence, au British Museum de Londres, à la bibliothèque de Lyon, aux archives municipales de Senlis, etc. Un monument extrêmement curieux de ce genre est conservé au musée archéologique de Namur; ce sont de petites tablettes d'ivoire enduites de cire rouge sur lesquelles sont écrits des vers d'une main du XIVe siècle; elles sont comprises dans un charmant dyptique dont les plats, finement sculptés, représentent l'histoire de Tristan et Yseult; le tout est enfermé dans une gaine en cuir gaufré sur le côté de laquelle est inséré le style. Tous les spécimens de tablettes de cire qui se sont conservés, ceux du Moyen âge comme ceux de l'Antiquité, sont d'accord avec les témoignages qui nous sont parvenus pour montrer qu'on n'écrivait guère sur la cire que les choses dont on ne tenait pas à assurer la durée, telles que des comptes et des notes. L'emploi de plus en plus général et le bon marché toujours croissant du papier en restreignit naturellement l'usage, mais ne l'abolit pas complètement, et, au milieu du XIXe siècle encore, on se servait au marché au poisson de Rouen, pour inscrire les adjudications, de tablettes de cire et de styles de tous points semblables à ceux qui remontent au Moyen âge. (A. Giry). | |