| Le mot sujet (du latin subjectum, placé dessous), en philosophie, a trois sens principaux qui se rattachent, d'ailleurs, insensiblement les uns aux autres. D'abord, en logique, sujet se rapporte et s'oppose à attribut. Le sujet, c'est ce dont on affirme l'attribut, de même que l'attribut (ou prédicat) est ce qu'on affirme du sujet. En d'autres termes, dans tout jugement, dans toute pensée, il y a nécessairement deux idées; mais ces deux idées ne sont pas mises, pour ainsi dire, sur le même plan : elles ne sont pas seulement unies ; dans cette union, l'une est subordonnée à l'autre. L'idée principale, celle qui est d'abord posée en elle-même et pour elle-même, c'est le sujet, l'autre n'étant posée que comme une suite et dépendance de celle-là. En métaphysique, sujet est souvent synonyme de substance. Un sujet, en ce sens, c'est un être considéré dans son unité intégrale et permanente, comme constituant le lien, à la fois dans l'espace et dans le temps, de ses qualités multiples, de ses phénomènes successifs, Au fond, c'est la même notion que celle du sujet logique, mais transportée de l'ordre des idées abstraites dans celui des réalités concrètes. Enfin, dans la critique de la connaissance, sujet s'oppose à objet; et depuis Kant, ce nouveau sens tend à se substituer de plus en plus à tous les autres. Le sujet, désormais, c'est le sujet pensant, c.-à-d. la pensée elle-même, en tant qu'elle se distingue de toutes les choses quelconques qu'elle pose eu elle ou en face d'elle à titre d'objets; et ainsi compris, sujet deviendrait synonyme de l'âme et du moi, tels que les entendait Descartes, si Kant ne faisait expressément remarquer que l'on ne peut sans paralogisme identifier le sujet pensant, qui n'est lui-même à tout prendre qu'une pensée, avec la substance de l'ancienne ontologie, laquelle est supposée exister en soi indépendamment de toute pensée. (E. Boirac). | |