| La sigillographie ou sphragistique est une science auxiliaire de l'histoire, qui a pour objet l'étude des diverses marques apposées, comme signes authentiques ou personnels, aux actes publics et privés. L'usage des sceaux est constaté chez les Babyloniens, Assyriens, qui se servaient de cylindres en pierres précieuses, chez les Hébreux, chez les Egyptiens, chez d'autres populations anciennes de l'Asie, etc. L'anneau et le cachet se retrouvent parmi les formes les plus anciennes du sceau. Chez les Grecs, sphragis, désignait le chaton de la bague, et boulla s'appliquait à l'empreinte. Les Romains donnèrent indifféremment à l'empreinte et à la matrice les noms de sigillum et de bulla. En ancien français, buller signifiait sceller. Comme discipline historique, la sigillographie ne remonte guère au delà des bénédictins du XVIIe siècle. Les premiers collectionneurs apparaissent au XVIIIe siècle des sceaux figurent dans les dessins réunis par Gaignières. Un ancien officier de l'armée royale, Desmarets, forma une collection de dessins d'environ quatre mille sceaux, dont la publication fut empêchée par la Révolution. Un recueil partiel fut édité par De Migieu (Recueil des sceaux du Moyen âge dits sceaux gothiques; Paris, 1779, in-4). Les collections de moulages du musée de la Monnaie (1832) et des Archives nationales (1842-1863) donnèrent une grande impulsion aux études sigillographiques au XIXe siècle. Les principales archives et bibliothèques des différents pays possèdent des musées de moulages. Classification sigillographique La classification la plus utile au point de vue des études historiques est celle qui range les sceaux suivant les personnes ou les institutions dont ils émanent. Classés ainsi suivant un groupement qui correspond au fonctionnement même des institutions du Moyen âge, les sceaux acquièrent toute leur valeur pour tous les genres de recherches historiques dans lesquelles ils peuvent être mis à contribution. Ils peuvent servir à compléter des noms, à combler des lacunes dans les listes chronologiques, à préciser des dates, à définir la nature de certaines institutions locales ou même à mieux fixer les attributions d'institutions déjà connues. Au lieu de prendre comme base les institutions, comme on le fera dans cette page, un sigillographe éminent, le prince de Hohenlohe-Waldenburg, a inventé un système de classification des sceaux d'après les types ou effigies. Pour mémoire : - Classification par types ou effigies I. Sceaux à légendes A. Avec le nom du propriétaire; B. Sans le nom du ropriétaire. II. Sceaux à sujets : A. Sans noms; B. Avec noms. III. Sceaux à portraits : A. Sans armoiries: 1° tête ou mi-corps; 2° en pied [debout; assis; à genoux]; 3° à cheval; B. Avec armoiries 1° tête ou mi-corps; 2° en pied [debout; assis; à genoux]; 3° à cheval). IV. Sceaux héraldiques : A. Avec armoiries : 1° dans le champ du sceau; 2° dans un écu ou une bannière); B. Avec casques ou cimiers : 1° dans le champ du sceau; 2° dans un écu); C. Avec armoiries, casques et cimiers. La classification par types ou effigies est susceptible à son tour d'être répartie en un certain nombre de subdivisions : Type de majesté (fig. 1-5, etc.); Type équestre (fig. 10); Type armorial (fig. 9); Type personnel aux femmes (fig. 6 et 7); Type ecclésiastique (fig. 11); Type hagiographique (fig. 16); Type légendaire (fig. 14); Type collectif (fig. 14); Type topographique; Type monumental (fig. 12); Type naval (fig. 13) ; Type arbitraire (objets usuels, etc.). | Types des sceaux Les types sont, dans les sceaux, ce que les effigies sont dans la numismatique. Mais, tandis que les effigies des monnaies et même celles des médailles sont relativement peu variées, les sceaux présentent une variété presque infinie de sujets représentés dans le champ de l'empreinte. Le musée des moulages des Archives nationales contient une collection de plus de 10.000 spécimens de sceaux, classés d'après les subdivisions suivantes, en combinant dans chaque section l'ordre chronologique et l'ordre alphabétique. - | | 1. - Sceau de Henri Ier, roi de France (1035). | 2. - Sceau de Saint-Louis (1240). | Sceaux royaux. Les Mérovingiens sont représentés à mi-corps, avec une tête chevelue. Sous les Carolingiens, le type se perfectionne, comme dans le sceau de Charles le Chauve. Avec les Capétiens, apparaît le type de majesté, représentant le roi sur le trône (fig. 1-5). Les Carolingiens ont souvent fait usage d'intailles ou pierres gravées antiques, rapportées de leurs expéditions d'Italie et représentant Bacchus (Pépin), Jupiter (Charlemagne), etc. Les reines sont représentées, sur leurs sceaux, presque toujours debout, sous un dais d'architecture et tenant le sceptre. - | | 3. - Sceau de Charles V, roi de France (1365). | 4. - Sceau de Louis XII, roi de France (1500-1515). | Les fils du roi ou « enfants de France » et les princes du sang avaient aussi leurs sceaux particuliers. Outre le grand sceau, les rois de France avaient aussi diverses autres sortes de sceaux. Un sceau spécial était affecté à chaque régence. Le sceau ordonné (en l'absence du grand sceau) servait pendant que le roi était absent. Enfin, les rois avaient un sceau privé, généralement appelé sceau secret (secretum), qui était beaucoup plus petit que les autres et qui avait souvent gardé la forme de l'anneau. - | | 5. - Sceau de Louis XIV (1643). | 6. - Sceau de la République Française (1793). | Sceaux des grands feudataires (Alsace, Artois, Auvergne, Berri, Bourgogne, etc.). Le type équestre, représentant le seigneur, armé, avec la lance ou l'épée à la main, sur un cheval au galop, est le plus répandu (fig. 10). Le type de majesté fut aussi employé, notamment par les comtes de Toulouse, puis, à leur instar, par la famille de Simon de Montfort (1217, 1221). Avec le développement du type armorial, le type équestre fut accompagné des blasons des pays relevant de la suzeraineté du grand feudataire (fig. 10). Sceaux des seigneurs. Le type équestre prédomine (fig. 10). Le seigneur est aussi representé équipé pour la chasse, à pied ou sur un cheval allant au trot (Lusignan). Le château féodal est quelguefois figuré, comme sur les sceaux des comtes de Foix (1241), de Guillaume des Barres (1200, 1246), de Pierre du Donjon (1225), etc. C'est dans les sceaux seigneuriaux que le type armorial ou héraldique s'est le plus développé, au XIVe siècle. L'écu héraldique, primitivement placé seul dans le champ du sceau (XIIIe siècle), a été ensuite entouré, à partir de la fin du XIIIe siècle, d'un cadre formé de triIobes, quadrilobes ou rosaces posé de biais dans le champ du sceau (milieu du XIVe siècle) et, enfin entouré des supports et surmonté du timbre ou casque et du cimier héraldiques. Le type armorial apparaît dans les sceaux allemands dès 1157. Il se rencontre couramment dès la fin du XIIe siècle en France et en Angleterre. - | | 7. - Sceau de la France en 1848. | 8. - Sceau de la France (IIIe République). | Les dames nobles ont aussi, pour leurs affaires personnelles, des sceaux qui les représentent généralement debout, sous un dais, ou en costume de chasse, le faucon sur le poing. Sceaux des hommes de fief, des maires, des bourgeois et des paysans. Outre les sceaux administratifs qui représentent les bourgeois des villes en qualité d'échevins ou les maires, à pied ou sur un cheval allant au pas, la plupart des bourgeois ont leurs sceaux particuliers. Dans certaines régions, notamment en Normandie et en Angleterre, les paysans ont aussi leurs sceaux, dont la gravure, plus ou moins soignée, est un indice certain de la situation sociale et financière que son possesseur occupait. Ces sceaux représentent des objets symboliques de l'agriculture, arbres, gerbes, faucilles, étoiles, etc. (V. Demay, Inventaire des sceaux de la Normandie, pl. 6-10, n° 637 à 1614). Les femmes non nobles ont quelquefois aussi leurs sceaux, comme Olive, fille de Robert de Vire (1222). On sait que les bourgeois avaient le droit de porter des armoiries, mais sans les surmonter de couronnes ou de cimiers. - | | 9. - Contre-sceau de Louis XII, roi de France. | 10. - Sceau de Charles le Téméraire, duc de Bourgogne (1468). | Sceaux des cours et tribunaux. Chaque institution avait un sceau particulier pour sceller les actes administratifs qu'elle promulguait. Cours souveraines. Le Parlement de Paris avait, depuis le milieu du XIVe siècle, un écusson a trois fleurs de lis, surmonté de la couronne royale et supporté par deux anges. Les autres parlements eurent un sceau d'un type analogue. Le sceau spécial aux affaires des juifs remonte à la fin du XIIe siècle : on possède ceux des juifs de Paris (1206) et de Pontoise (1204). Pour les grandes foires de Champagne, de Bretagne, du Lendit, etc., il y avait des juridictions et des sceaux spéciaux. Ceux des foires de Champagne sont particulièrement remarquables (1292, 1332, 1388). Cours provinciales (gouvernance d'Artois, cours d'Arbois, de la Terre d'Auvergne, etc.). Elles ont des sceaux héraldiques, à armoiries locales. Bailliages et sénéchaussées. Les sceaux de ces juridictions sont généralement du type armorial et représentent les fleurs de lis de France, seules ou combinées avec les armoiries locales. Prévôtés, Vicomtés et Vigueries. Elles ont également des sceaux fleurdelisés. On peut citer ceux de la prévôté de Paris ou « Châtelet » (1238), de Chaource (1315), de Janville-en-Beauce (XIVe siècle), parmi les plus remarquables et les mieux conservés. Châtellenies et baronnies. Leurs sceaux appartiennent également au type héraldique, comme ceux des châtellenies de Chartres (1314), de Blois (1385), de Châteaudun (1397), etc. Tabellionages. Les notaires et tabellions faisaient usage de sceaux surtout dans les régions de l'Est de la France : Pont-à-Mousson (XIVe siècle), Rambervillers (XVe siècle), Montbéliard, Belfort, Joinville (XVIe siècle), etc. - | | 11. - Sceau de Maurice de Sully, évêque de Paris (1170). | 12. - Sceau de la ville de Cahors (1309). | Sceaux des offices. A côté des sceaux administratifs, qui font l'objet du paragraphe qui précède, il faut tenir compte des sceaux personnels aux titulaires des différents offices. Ils se reconnaissent surtout à leurs légendes (V. ci-après). Leur usage était principalement pour les affaires particulières de leurs possesseurs (V. le pargraphe Ancien droit, en bas de page). L'emploi des sceaux personnels se rencontre à tous les degrés de la hiérarchie de l'Ancien régime : officiers royaux (baillis, sénéchaux, prévôts, etc.), officiers de justice (juges, notaires, greffiers, sergents, etc.), officiers de guerre (gouverneurs, châtelains, hommes d'armes, etc.), officiers de finances (généraux des aides, trésoriers de France, commissaires, receveurs, etc.), etc. Parmi les plus curieux, on peut citer celui du châtelain de Lille (1287), celui des arbalétriers du roi (1227) et celui du bourreau Henri Chaillau (XIVe siècle). Sceaux des métiers et professions. Chaque corporation avait, sur son sceau particulier, ses armoiries « parlantes » ou l'image de son patron : rasoirs (barbiers), pains (boulangers), haches (charpentiers), fers à cheval (maréchaux ferrants), fourrures (pelletiers), etc. Le sceau des orfèvres représentait saint Eloi, celui des ménétriers, saint Julien, etc. Les confréries et autres associations n'ayant pas de caractère administratif avaient aussi leurs sceaux, par exemple la célèbre Basoche. Sceaux des villes. Le type monumental, représentant l'ensemble de la ville ou ses principaux monuments, est le plus fréquent. Le sceau de Cahors représente le célèbre pont de cette ville, avec un poisson entre chaque arche (fig. 12). Les sceaux de villes offrent quelquefois le type hagiographique et représentent les saints qui étaient leurs patrons; saint Eloi, pour Dunkerque; la Vierge et l'enfant Jésus, pour Strasbourg; saint Antonin, pour Pamiers, etc. Le type naval se rencontre dans les sceaux de tous les grands ports de mer, et même sur celui de Paris. Le sceau de Biarritz représente la pêche à la baleine, alors pratiquée par les ports du golfe de Gascogne (fig. 13). Les fonctionnaires municipaux sont quelquefois représentés. Enfin, les petites localités représentaient souvent sur leurs sceaux le seigneur qui leur avait concédé leur charte communale. - | | 13. - Sceau de la ville de Biarritz (1351). | 14. - Sceau de l'université de Paris (1292). | Sceaux du clergé séculier. Les papes avaient leur propre sceau. Les cardinaux ont fait usage de sceaux dans lesquels on déploya, au XIVe siècle, un grand luxe d'ornementation, et où l'emploi des dais et niches ogivales, pour y placer les personnages représentés, prit une grande extension. Le cardinal est généralement figuré dans la petite niche inférieure, et les trois ou quatre dais qui la surmontent sont occupés par la Vierge, divers saints ou autres personnages. Ce mode de division du champ du sceau se retrouve dans les sceaux universitaires (fig. 14). Les conciles avaient des sceaux spéciaux représentant les prélats en session, surmontés du Saint-Esprit. Les archevêques et évêques sont généralement représentés sous un type (fig. 11) correspondant au type de majesté des sceaux royaux : l'évêque bénit de la main droite et tient la crosse de la main gauche. L'un des plus anciens sceaux épiscopaux est celui de Roricon, évêque de Laon (961). Tous les autres offices du clergé séculier ont des sceaux, dans lesquels prédominent le type hagiographique et le type héraldique : officialités diocésaines, vicariats, chapitres, etc. Sceaux des Universités. Les universités avaient un grand nombre de sceaux différents : sceau rectoral (fig. 14), sceaux des Facultés, sceaux des « nations », sceaux des collèges. En outre, chaque membre de l'Université avait souvent son sceau individuel. Le grand sceau de l'Université de Paris représente deux professeurs en chaire, dans les deux compartiments du milieu, des écoliers, au-dessous de ces compartiments, la Vierge et l'enfant Jésus, dans le dais supérieur, ayant, à sa droite, un évêque mitré et crossé, et à sa gauche, un saint nimbé et tenant une palme et un livre (fig. 14), Le sceau de la Faculté des Arts représente, sous trois dais en ogive, la Vierge et l'enfant Jésus, entourés des écussons des quatre nations dont la Faculté était formée (France, Normandie, Picardie, Allemagne). - Sceaux du clergé régulier. Les abbayes représentent sur leurs sceaux leurs abbés assis avec la crosse et un livre, la tête nue, jusqu'au XIIIe siècle (fig. 16), ensuite debout, mitrés et bénissant, depuis le XIVe siècle. Il y a des sceaux pour chacun des différents offices claustraux (chambrier, chantre, sous-chantre, doyen, grénetier, hôtelier, official, grand prieur, etc.), et pour toutes les charges administratives rattachées aux abbayes (prieurs, sous-prieurs, prévôts, rentiers, sacristains, sergents, trésoriers, vicaires, etc.). Ordres militaires et religieux. Le sceau des Hospitaliers représente le grand maître agenouillé devant une croix plantée sur le crâne d'Adam et placée entre l'A et l'. Il y avait aussi des sceaux particuliers pour les commanderies et préceptoreries que les Templiers et les Hospitaliers avaient en Europe. Hôpitaux et maladreries. On possède les sceaux des établissements de ce genre à Arras, Cambrai, Corbeil, Noyon, Reims, Rouen, etc. Le sceau de l'hospice du mont Saint-Bernard représente saint Nicolas et saint Bernard de Menthon, tenant le diable enchaîné par le cou. (Mém. de la Soc. de sphragislique, t. IV, p. 89). Angleterre. De tous les pays d'Europe, l'Angleterre est celui où les sceaux ont pris le plus de développement. Le sceau royal, dont le type présente une histoire analogue à celle du sceau royal en France, atteint une grande richesse d'ornementation au XIVe siècle. Le roi est placé sous un dais, ogival de grandes dimensions et entouré d'autres niches plus petites, dont le nombre augmente jusqu'au XVe siècle. Dans le sceau de Henri V, le nombre des figures qui accompagnent le roi est de plus de quinze. Sous Henri VIII, le type gothique est remplacé par le type de la Renaissance. Le type équestre était aussi en usage, comme dans le sceau de Charles Il. Le type naval est fréquent dans les sceaux administratifs, par exemple dans le sceau de l'amirauté d'Angleterre, qui représente une nef gréée et à voile armoriée. Parmi les sceaux de villes, l'un des plus intéressants est celui de Rochester, qui représente son donjon du XIe siècle. - 15. - Sceau en or de Ferdinand III, empereur d'Allemagne (1654). Allemagne. Les sceaux impériaux offrent également le type de majesté, depuis le Moyen âge jusqu'aux Temps modernes (fig. 15). On rencontre aussi différents spécimens du type monumental, du type topographique représentant le plan de la ville de Messine, etc. Pour les sceaux seigneuriaux et locaux, il y a une beaucoup plus grande variété en Allemagne qu'en France. Le sceau des juifs existait en Allemagne dès le XIIIe siècle (V. Hohenlohe-Waldenburg, Sphrag. Aphorism., pl. XXIV et p. 99). Italie. Il y a également en Italie une grande variété de sceaux. Celui de la république de Venise représente le doge et saint Marc tenant la bannière de la république. Forme La forme ronde ou la forme ovale prédominent dans les empreintes des sceaux. Les sceaux royaux et impériaux sont presque toujours, complètement ronds. La forme ovale ou ogivale, qui ne devient fréquente qu'au XIIe siècle seulement, est presque constante dans les sceaux ecclésiastiques (fig. 11 et 16) depuis le XIIIe jusqu'au XVIe siècle. Les autres formes sont exceptionnelles en France et ne se rencontrent d'une façon courante qu'en Allemagne (sceaux en forme d'écussons, de coeurs, de triangles, de rosaces, de carrés, etc.). Le sceau de Rodolphe de Habsbourg est en forme, de poire (1240). La cour du duc de Lorraine a un sceau en forme de triangle équilatéral (1319). Les sceaux carrés; qui étaient en usage dans l'Antiquité, sont très rares au Moyen âge et, quand on les employait, on les dirigeait avec la pointe en bas, ce qui leur donnait l'aspect de losanges, comme dans le sceau des seigneurs de Lunel (1242) et celui de la ville de Dunwich (XIIIe siècle). Les dimensions des sceaux étaient très variables. Très petits sous les Mérovingiens, les sceaux royaux augmentent graduellement de volume et atteignent 100 mm au XIVe siècle. En Angleterre, ces proportions sont dépassées dans les sceaux de la reine Elisabeth (145 mm) et de la reine Anne (177 mm). Le plus petit sceau connu n'a qu'un diamètre de 25 mm (Hugues de Montfort, 1337). Au dos du sceau, se trouve le contre-sceau. Matière La cire a été la matière la plus généralement employée pour les sceaux du Moyen âge. La cire vierge était rarement à l'état complètement pur. On la mélangeait de poix blanche, de graisse, d'huile de lin et de térébenthine, suivant diverses proportions, conservées dans quelques recettes qui nous sont parvenues. A partir du XIe siècle, on recouvrait l'empreinte de cire d'un vernis qui devenait très dur et qui empêchait la cire de s'effriter trop rapidement. La cire d'Espagne ou cire à cacheter, dont la recette fut rapportée de l'Inde par les marchands hollandais, au milieu du XVIe siècle, commença à être mise en usage dans les Pays-Bas, d'abord pour fermer les lettres, puis pour recevoir les empreintes des sceaux et des cachets. Le plus ancien document ou elle est employée est de 1553. Le plomb a été employé comme matière des sceaux dès l'Antiquité. Il a été exclusivement en usage dans la chancellerie pontificale jusqu'au XIVe siècle. On le trouve surtout dans les régions méridionales de l'Europe et en Palestine. Les métaux précieux ont été employés par presque tous les souverains, depuis l'Antiquité, pour les actes tout à fait solennels, comme les grands traités, les confirmations de privilèges importants, etc. On donnait aux sceaux en or (très rarement massifs) et en argent le nom de bulles. Les sceaux faits d'autres matières que la cire, le plomb, l'or et l'argent sont très rares. Les Romains employaient l'argile ou terre sigillaire. Le pain à cacheter remonte au XVIe siècle. Il était recouvert d'une feuille de papier pour recevoir l'empreinte des cachets et servait dans les affaires sous seing privé seulement. On le trouve pour la première fois dans un document de 1571. Couleur des sceaux Les principales couleurs qui se rencontrent dans les sceaux sont les couleurs blanche, verte, rouge et jaune. Elles ont souvent une signification, suivant les pays et les institutions. Blanche. La cire blanche est exclusivement employée jusqu'au XIIe siècle. Son usage se restreignit après l'invention des cires colorées. Dans la chancellerie des rois de France, la cire blanche fut réservée exclusivement aux actes à effet temporaire, à partir du milieu du XIIIe siècle. Verte. La cire verte était en usage chez les Byzantins, principalement pour les empereurs et les patriarches. Elle apparaît en France, en Angleterre et en Allemagne, au XIIe siècle seulement. Dans la chancellerie royale, la cire verte fut réservée aux actes à effet perpétuel, c.-à-d. aux actes les plus importants de l'administration générale. Rouge. La cire rouge était également usitée chez les empereurs d'Orient. Elle n'apparaît en France qu'au XIIe siècle : sa teinte est d'abord d'un rouge vineux et elle ne devient vermeille qu'au XIVe siècle. Les actes de l'administration financière et militaire, lettres, quittances, montres d'hommes d'armes, etc., sont généralement scellés en cire rouge. A partir du XIVe siècle, la chancellerie royale scellait toujours en rouge les actes relatifs à la Provence, au Dauphiné et aux autres pays qui n'étaient pas réunis directement au domaine royal. En Allemagne, les princes de l'Empire, les comtes et les villes scellaient en rouge. A partir du XIVe siècle, les ecclésiastiques faisaient un usage fréquent, mais non exclusif, de la cire rouge, à l'imitation de la cire de l' « anneau du pécheur » des papes. Jaune. La cire jaune, quelquefois difficile à distinguer de la cire blanche brunie par le temps, est répandue chez les laïques aux XIVe et XVe siècles. La chancellerie des rois de France réserve la cire jaune aux déclarations royales interprétant les édits ou pourvoyant à l'exécution d'actes antérieurs. Les autres couleurs. Les couleurs autres que celles qui viennent d'êtres indiquées sont très rares dans la cire des sceaux. La cire noire était employée par l'ordre Teutonique et quelquefois par les Hospitaliers. La cire bleue se rencontre parfois, à partir du XVe siècle, principalement pour des actes d'un caractère privé. Enfin, on combinait quelquefois deux cires de couleurs différentes, avec deux empreintes superposées : on faisait un sceau de cire blanche, au milieu milieu duquel on creusait une cuvette, qui recevait une couche de cire rouge, sur laquelle était appliqué le sceau lui-même. Modes d'attache des sceaux Les sceaux sont attachés aux chartes par application sur le document même (sceaux plaqués) ou par suspension à ce document (sceaux pendants). Pour la conservation de ces derniers, on a inventé, en outre, différentes sortes d'enveloppes et de boîtes. Sceaux plaqués. L'application du sceau sur le document fut le seul mode d'attache employé pour les sceaux de cire jusqu'au milieu du XIe siècle. La cire, formant une masse assez épaisse ou gâteau de cire, était préalablement ramollie dans l'eau chaude et appliquée à un endroit du parchemin sur lequel on avait pratiqué une fente, de manière qu'une portion de la cire passait de l'autre côté du parchemin. Pour donner plus de consistance à la cire, on y mélangeait quelquefois des brins de paille; des filaments de chanvre, des poils, etc. A partir du XIIIe siècle, le sceau plaqué ne resta plus en usage que pour les actes courants de l'administration financière, lettres missives, mandements sur les aides, actes des commissaires extraordinaires, etc. Au XIVe et au XVe siècles, la cire plaquée est souvent étalée, sur le parchemin ou le papier, en forme de croix, pour la rendre moins cassante. Les évêques et les abbés conservèrent l'usage des sceaux plaqués jusque vers la fin du XIIe siècle. Les sceaux plaqués forment quelquefois des cuvettes assez profondes, afin que l'empreinte soit mieux protégée par les rebords formés par la cire. Les rebords du sceau sont quelquefois eux-mêmes entourés de collets ou torsades formés de tresses de parchemin, de paille, de jonc ou de cordelette de chanvre. Les cachets des lettres modernes sont un dernier reste des sceaux plaqués du Moyen âge. Sceaux pendants. Les sceaux métalliques ont toujours été pendants. Les plus anciens sceaux pendants en cire remontent à la fin du Xe siècle, et leur usage se généralisa au commencement du XIIe siècle. Ils sont suspendus au bas des chartes, quelquefois sur les côtés, quand il y a un grand nombre de sceaux, mais très rarement par le bord supérieur. Il y a quelques exemples de chartes scellées de 25 à 40 sceaux (testaments, arrêts de cours féodales, etc.). Les attaches des sceaux pendants sont généralement en cuir, en chanvre, en soie ou en parchemin. Dans la chancellerie pontificale, l'emploi des cordelettes de chanvre et des lacs de soie a une signification. Dans la chancellerie des rois de France, les lacs de soie rouge et verte sont réservés aux actes les plus importants, qui sont également scellés en cire verte (V. ci-dessus). Les lanières de cuir ne furent usitées que jusqu'au XIIe siècle. Les empereurs d'Allemagne employaient les lacs de soie jaune et noire. Les princes allemands avaient les couleurs de leurs principautés. On faisait passer les lacs de soie dans le repli du parchemin au moyen de trois ou quatre trous disposés en triangle ou en carré. L'usage de sceller sur queue de parchemin se généralisa au XIIIe siècle. La simple queue consiste en une bande de parchemin, coupée le long de la partie inférieure de la charte et portant le sceau à son extrémité flottante. Cette bande de parchemin est quelquefois passée dans une petite incision horizontale faite dans le bas de la charte. La double queue consiste en une double bande de parchemin passée successivement à travers deux incisions du bas de la charte. Enveloppes des sceaux. Pour mieux préserver les sceaux, on les entourait de diverses enveloppes protectrices avant de les suspendre aux actes. Les sachets de toile, de parchemin ou de cuir bouilli, dans lesquels on plaçait le sceau, après l'avoir entouré d'étoupe; remontent au XIIe siècle. On en a conservé de très beaux spécimens en étoffe brodée (Demay, Cost. d'ap. les sceaux, p. 16). Au XIVe siècle, on inventa les boîtes en fer-blanc, en bois, en argent, en ivoire, etc. La cire était souvent coulée au fond de la boîte, pour recevoir l'empreinte, et les attaches passaient par un trou ménagé sur un côté de la boîte. Les boîtes en fer-blanc, d'un usage général au XVIIe et au XVIIIe siècles, ont été cause de la destruction d'un grand nombre de sceaux en cire. Enfin, on plaçait souvent, depuis le commencement du XVe siècle, la couche de cire entre deux feuilles de papier, et celui-ci recevait directement l'empreinte. Légendes des sceaux La légende des sceaux est, comme l'exergue des monnaies; presque toujours placée sur le pourtour de l'empreinte. Chez les Byzantins, les légendes des sceaux étaient placées sur plusieurs lignes horizontales au milieu du champ, usage qui s'est perpétué dans la chancellerie des papes. Les monogrammes sont très rares (chapitre de l'église Notre-Dame de Paris en 1216). Les légendes sur deux lignes ne se rencontrent guère qu'en Allemagne et sur les sceaux des ducs de Bourgogne (fig. 10). La légende commence par une croix grecque (fig. 11, etc.). L'écriture capitale est employée jusqu'au milieu du XIIIe siècle, la majuscule gothique depuis Philippe le Hardi jusqu'au milieu du XIVe siècle, la minuscule gothique depuis cette époque jusqu'au milieu du XVIe siècle, et enfin la capitale de la Renaissance après cette date. Depuis le commencement du XIIIe siècle, les mots sont séparés par des points isolés où superposés. Les fautes de gravure ne sont pas rares dans les légendes (lettres retournées ou transposées). Les abréviations sigillaires, qui diffèrent quelquefois notablement des abréviations ordinaires, ont été recueillies en forme de dictionnaire par Demay (Inventaire des sceaux de la Normandie, p.11, et Paléographie des sceaux, pp. 34-73). Sceaux-matrices Les matrices des sceaux (Boullôtérion, typus, typarium) sont les poinçons servant à produire les empreintes. Pour les sceaux métalliques ou bulles, on faisait usage d'un coin bullaire, analogue au coin monétaire de l'Antiquité. Dans les sceaux en formes d'anneaux, l'empreinte était formée par le chaton. Les pierres précieuses ou intailles servaient souvent à former des matrices de sceaux (Camée). Le sceau-matrice du Moyen âge fut d'abord plat, avec une saillie longitudinale au dos, donnant prise à deux ou plusieurs doigts de la main pour appuyer le sceau sur la cire. Un trou était percé dans cette partie du sceau-matrice, et servait à passer une chaîne, à l'extrémité de laquelle était attaché le contre-sceau (fig.16). 16. - Matrice de sceau avec chaîne et contre-sceau. (Abbaye de Saint-Denis, XIIe s.) A partir du XIIIe siècle, il y eut des sceaux à poignées. Le musée de Cluny possède une très belle collection de sceaux-matrices des XVIIe et XVIIIe siècles. On a fait quelquefois usage au Moyen âge de sceaux composés de plusieurs partie démontables, dont chacune était gardée par un fonctionnaire particulier. Les sceaux-matrices étaient souvent en argent. Charles ler, roi d'Angleterre, en avait un en diamant. Les sceaux-matrices étaient généralement détruits après la mort de leurs possesseurs, quand ils étaient gravés nominalement pour ceux-ci, ou déposés dans leurs tombeaux. Un certain nombre de matrices originales sont parvenues jusqu'à nous (Université de Paris, Etats de Bretagne, reines de France; etc.). Ancien droit Le sceau donnait aux actes un caractère public et authentique, au nom de l'autorité dont il était le symbole. A l'époque mérovingienne et carolingienne, il était signe d'exercice de fonction pour les officiers de justice royaux. Le Moyen âge distinguait les sceaux administratifs des sceaux personnels. Les abbayes n'avaient pas primitivement de sceau conventuel,, mais seulement le sceau de leur abbé, qui pouvait servir à plusieurs titulaires successivement (abbaye de Saint-Denis au XIIe siècle, fig. 16). La garde des sceaux était confiée à des personnages importants. Il y avait un office religieux spécial pour la bénédiction du sceau (Maskell, Monumenta ritualia, 1882; t. III). Les actes étaient scellés quelquefois assez longtemps après avoir été écrits. La légalisation du sceau remonte au XIIIe siècle. Le blanc-seing était quelquefois usité au Moyen âge, principalement dans les instructions remises aux ambassadeurs. (E.-D. Grand). | |