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Le Prunier
(Prunus) est un genre de plantes Dicotylédones,
de la famille des Rosacées, croissant
dans les pays tempérés de l'hémisphère nord.
C'est un arbre ou un arbuste à feuilles
alternes, bistipulées à la base, à limbe
convoluté dans le bourgeon. La
fleur, solitaire ou géminée, ou encore
en grappe pauciflore, a cinq sépales
quinconciaux, s'insérant sur les bords d'un réceptacle
plus ou moins concave, et une corolle imbriquée; ses étamines,
au nombre de vingt en général, sont formées par un
filet libre et une anthère biloculaire,
introrse, à deux fentes longitudinales; l'ovaire
est uniloculaire, et le placenta, dont la situation
est indiquée par un sillon vertical, pariétal; les ovules,
au nombre de deux, sont collatéraux, descendants, anatropes; leur
micropyle est extérieur et ils
sont munis d'un obturateur. Le fruit est une drupe.
Ces caractères sont communs à toutes les espèces du
genre Prunus. Il comprend, outre les Pruniers proprement dits, dont nous
devons nous occuper ici plus spécialement, les types suivants, qui
en sont considérés généralement comme
des espèces (mais dont certains botanistes font, dans certains cas,
des genres distincts) et dont nous n'indiquons que quelques caractères
distinctifs, renvoyant, pour le surplus, aux articles spéciaux qui
leur sont consacrés :
1° Abricotiers
(P. Armeniaca L.). Réceptacle court et large, épicarpe velouté,
mésocarpe succulent, noyau creusé d'un sillon sur chaque
bord.
2° Amandiers
(P. Amygdalus Bn). Épicarpe velouté, adhérent au mésocarpe,
d'abord charnu fruit sec, noyau criblé. Peuvent également
se considérer comme un genre distinct (Amygdalus).
3° Pêchers
(P. Persica Bn) Réceptacle allongé, épicarpe volonté,
mésocarpe charnu noyau rugueux.
4° Cerisiers
(P. Cerasus L.). Fruit semblable à celui du Prunier proprement dit,
mais non cireux. Peuvent également se considérer comme un
genre distinct (Cerasus).
5° Lauriers-Cerises
(P. Lauro-Cerasus L.). Réceptacle court, drupe peu charnue. Peuvent
également, selon les auteurs, se rattacher au genre Cerasus (Cerasus
laurocerasus) ou même se considérer comme un genre distinct
(Laurocerasus).
Quant aux Pruniers véritables, on en
distingue, dans la nature, trois espèces ou variétés,
dont la première, le P. spinosa, est plus connue sous les noms de
Prunellier et d'Epine noire. Les deux autres, le P. domestica L. ou Prunier
domestique et le P. insitilia L. ou Pruneautier ont donné naissance
aux nombreuses variétés aujourd'hui cultivées. Ils
diffèrent surtout du premier en ce qu'ils ne sont pas, comme lui,
épineux, en ce que leurs fleurs naissent en même temps que
les feuilles et en ce que leurs fruits sont de saveur douce, au lieu d'être
acerbes. Entre le P. domestica et le P. insititia, les seules différences
facilement appréciables sont les suivantes: chez le P. domestica,
les jeunes rameaux sont glabres, les fleurs d'un blanc légèrement
verdâtre, les fruits oblongs ; chez le P. in sititia, les jeunes
rameaux sont pubescents et veloutés, le fleurs d'un blanc pur, les
fruits globuleux ou légèrement ellipsoïdes. Le P. domestica
serait la souche des variétés; fruits allongés, le
P. insititia, celle des variétés à fruit arrondis.
Chez l'un et chez l'autre, la drupe présente sa surface un revêtement
cireux : la fleur ou pruine; le mésocarpe est charnu; l'endocarpe
forme un noyau ovoïde ou comprimé, renfermant une ou deux graines
à gros embryon charnu, sans albumen.
Histoire.
Les Pruniers sont connus de toute antiquité.
Pline
parle dans son Histoire naturelle, de l' « ingens turba prunorum
». Le P. domestica a été trouvé à l'état
sauvage dans toute l'Anatolie ,
la région au Sud du Caucase, l'Iran septentrional. On l'a aussi
rencontré, à cet état, dans les haies et les bois
voisins des habitations, en Crimée, en Grèce, et en quelques
autres points du midi de l'Europe .
Mais l'espèce n'y est que subspontanée, et cette demi naturalisation
a commencé tout au plus en Europe depuis 2000 ans. On n'en a pas
découvert de noyaux dans les restes des palafittes d'Italie, de
Suisse, de Savoie. Le P. insititia, au contraire, croît, à
l'état, spontané, malgré sa dénomination (insititia
veut dire étranger), dans le midi de l'Europe, particulièrement
dans la Turquie d'Europe, et peut-être aussi en Italie et en Espagne.
On le trouve également au Sud du Caucase et dans la province de
Talysch, vers la mer Caspienne. Heer a décrit
des noyaux de P. insititia provenant des palafittes de Robenhausen.
Arboriculture.
Le prunier est peu difficile sur la qualité
du sol. Presque tous les terrains cultivables lui conviennent, pourvu qu'ils
soient de moyenne consistance : ni argileux en excès, ce qui entraverait
l'aoûtement de ses rameaux, ni trop sablonneux. ce qui lui donnerait
la jaunisse. La combinaison de ces deux extrêmes, ou encore un mélange
de calcaire et d'humus constitueraient, au contraire, une excellente terre
à prunier. Ce ne sont pas du reste des engrais qu'il lui faut, mais,
comme aux autres arbres à noyaux, des amendements légers,
salpêtreux, salins. Il se trouve bien, en outre, d'une humidité
modérée, constamment entretenue, et d'un climat tempéré.
A ce dernier égard, il se rapproche de la vigne
et, comme elle, il redoute, pour sa fleur, les gelées printanières
et les brouillards. Il réussit toutefois encore, surtout en espalier,
là où celle-ci ne mûrit plus, et la prune Victoria,
par exemple, se cultive en Angleterre. Enfin, c'est essentiellement un
arbre de plaine. Il vient bien aussi sur le versant des collines, à
bonne insolation et à l'abri du vent. Dans les endroits privés
d'air et à températures excessives, comme les gorges des
montagnes ou les cours entourées de hautes murailles, il végète
mal ou noue difficilement son fruit; sa fleur « coule ».
On multiplie les pruniers par le semis
des noyaux, par les drageons et la greffe. Le semis reproduit assez fidèlement
certaines variétés de Reine-Claude, Mirabelle, Quetsche,
Damas. On sème les noyaux dès la récolte ou, après
stratification, au printemps suivant. On repique le jeune plant en pépinière,
ou bien on le transplante à demeure un an environ après le
semis, en automne, après la chute des feuilles ou à la fin
de l'hiver. D'autres variétés s'élèvent de
drageons, mais il est rare que ce procédé de multiplication
donne de beaux arbres. Le greffage donne seul, en somme, la reproduction
exacte du type. L'écussonnage et la greffe en fente sont usités
pour les jeunes plants. On laisse ordinairement les arbres se développer
librement en plein vent, mais on peut aussi les conduire, en pyramide,
en gobelets, en éventail, en palmette. La taille du prunier en haute
tige consiste à couper la flèche à la hauteur fixée
pour le couronnement de l'arbre. Les yeux situés en-dessous de là
section se développent en rameaux; on conserve les mieux placés,
au nombre de trois ou quatre, et on les rogne à leur tour l'année
suivante. On double ainsi le nombre des branches charpentières de
l'arbre. Pendant les premières années du développement,
on taille les rameaux latéraux des branches de charpente, puis on
cesse de diriger les arbres et on ne prend plus que le soin de supprimer
les gourmands, les branches mortes ou mal placées de la cime des
arbres.
Le prunier acquiert, à quinze ou
vingt ans, sa force de production. Il peut conserver pendant une cinquantaine
d'années sa fertilité. Le fruit est d'ailleurs d'autant plus
beau que l'arbre est plus âgé et plus vigoureux. La récolte
se fait par un temps sec et chaud. Suivant l'usage auquel le fruit est
destiné, on le cueille plus ou moins mûr : très peu
mûr pour la prune à l'eau-de-vie, la prune à conserve
Appert, celle à glacer au sucre ; moyennement mûr pour la
prune de table; très mûr pour la prune à faire cuire
et le pruneau.
Variétés.
On estime à plus de trois cents
le nombre des variétés cultivées. On distingue d'ailleurs
les prunes de dessert et les prunes de séchage.
Prunes
de dessert.
Destinées à être consommées
surtout à l'état frais, elles trouvent néanmoins aussi
leur emploi dans la confiserie, la pâtisserie, le séchage,
la cuisson. Les meilleures variétés, pour le jardin fruitier
et pour le verger, sont, d'après Ch. Baltet, dans leur ordre de
mérite-:
JARDIN
FRUITIER
(Variétés
en basse tige)
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Petite
Mirabelle.
Reine-Claude.
Monsieur
jaune.
Grosse
Mirabelle.
Mirabelle
précoce.
Des
Béjonnières. |
Favorite
hâtive de Rivers.
Monsieur
hâtif.
De
Kirke.
Reine-Claude
de Wazon.
Mirabelle
tardive.
Goutte
d'or de Coé. |
VERGER
(Variétés
en haute tige)
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Reine-Claude.
Petite
Mirabelle.
Des
Béjonnières.
Monsieur
hâtif.
Monsieur
jaune.
Grosse
Mirabelle.
Damas
violet.
Favorite
hâtive de hivers.
De
Kirke.
Reine-Claude
diaphane. |
Reine-Claude
d'Althan.
Reine-Claude
violette.
Reine-claude
de Wazon.
Goutte
d'or de Coé.
Précoce
de Tours.
Mirabelle
précoce.
Tardive
musquée.
Jaune
tardive.
Mirabelle
tardive.
Jaune
hâtive. |
La Reine-Claude est une prune jaune doré
ou vert d'eau, souvent nuancée ou tachetée de carmin ou de
violet clair, à chair juteuse, sucrée, parfumée, délicieuse;
l'arbre, robuste et très fertile, résiste suffisamment aux
grands hivers; elle mûrit en août. La Goutte d'or, ou Coe's
golden drop, est grosse, ovoïde, dorée, piquetée de
carmin, juteuse et sucrée; elle mûrit en fin septembre. Les
Mirabelles sont d'excellentes prunes, petites, jaunes ou verdâtres,
souvent pointillées ou teintées de rose; l'arbre est en général
très fertile, mais résiste plus ou moins bien au froid, suivant
les espèces ; les précoces, à fruit très petit,
mûrissent dans la seconde quinzaine de juillet, les tardives, à
fruit moyen, enfin septembre et octobre, la petite et la grosse Mirabelle
dans le courant d'août. La prune de Monsieur est assez grosse, arrondie,
d'un pourpre . violacé ou gorge de pigeon, poudrée de nacre,
à chair tendre, juteuse, parfumée, sucrée; elle mûrit
à la mi-août. La De Kirke est grosse, presque ronde, d'un
pourpre noir cendré glauque, à chair très juteuse,
sucrée, bien parfumée; elle mûrit en fin août
et au commencement de septembre. La Favorite hâtive de Rivers est
moyenne. noir bleuâtre, juteuse, sucrée, acidulée;
elle mûrit à la mi-juillet. La Des Béjonnières
est moyenne, souvent mamelonnée, jaune ambre picoté de carmin
et fleuri de blanc carné, à chair assez ferme, juteuse, sucrée,
à saveur abricotée; elle mûrit au commencement d'août.
Le Damas est moyen, ovalaire, rose violacé, à chair ferme,
juteuse, acidulée, sucrée, à arôme particulier;
il mûrit dans la seconde quinzaine d'août.
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Description
de quelques variétés de prunes
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Abondance.
- Prunier du Japon. Prune rouge, arbre vigoureux. Fruit excellent.
Niagara. -
Fruit très gros, de couleur bleu sombre, arbre très rustique
et d'un bon rapport.
Perdrigon.
- Prunier de France, acclimaté au Canada. Prune jaune rouge, délicieuse.
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Prunes
de séchage.
Elles servent plus particulièrement
à la confection des pruneaux et elles forment la base des grandes
plantations commerciales; mais on les consomme aussi à l'état
frais et on les emploie dans les préparations ménagères.
De même, ainsi que nous l'avons déjà fait remarquer,
on utilise également pour le séchage les variétés
de dessert. Les meilleures prunes de séchage sont, d'après
Ch. Baltet : la prune d'Agen ou d'Ente, moyenne, pyrifornie ou ovoïde,
violet rosé, à chair juteuse, sucrée, mûrissant
en fin août et septembre; les Quetsches (d'Allemagne, hâtive,
d'Italie), ovoïdes ou allongées, assez grosses, d'un violet
foncé ou pourpre, bien pruinées, à chair ferme et
assez juteuse, mûrissant, suivant les variétés, en
août ou en septembre; la Sainte-Catherine, moyenne, ovoïde,
jaune, à chair mielleuse et assez juteuse, mûrissant en septembre;
la Reine-Claude de Bavay, grosse, sphérico-ovoïde, vert d'eau
sur fond jaunâtre, quelquefois teinté de lilas, mûrissant
enfin septembre; le Perdrigon, assez gros, sphéroïdal, blanc
terne sur fond verdâtre ou rouge violacé, suivant qu'il s'agit
du Perdrigon blanc ou du Perdrigon violet, à chair juteuse, sucrée,
mûrissant en août.
Citons encore, plutôt pour leur beauté
que pour leur qualité, les variétés suivantes, recherchées
surtout par les restaurateurs comme prunes d'apparat : la prune Pêche,
d'un rose vineux, ronde; la Ponds's Seedling, ovoïde, rose carminée
nu violacée, pyriforme; la Jeflerson, grosse, jaune, ponctuée
de carmin; la Washington; la Dame-Aubert.
Culture commerciale.
Les pruniers entrent pour une part importante
dans la production fruitière de la France. . Le seul dép.
de Lot-et-Garonne figure, dans ces nombres, pour plus de la moitié.
Viennent ensuite les départements voisins : Tarn-et-Garonne, Dordogne,
Gironde, Lot, Tarn. C'est la prune d'Ente, dite aussi Robe-Sergent ou d'Agen,
qui y est principalement cultivée pour la fabrication des pruneaux.
Les arbres sont plantés en lignes bordées de treilles de
vigne et séparées par des céréales;
l'intervalle est de 8 à 10 m d'un arbre à l'autre. C'est
dans les sols légers, sablonneux ou argilo-calcaires du bassin du
Lot et sur les coteaux qui bordent la Garonne, à Villeneuve-d'Agen,
Castelmoron, Clairac, Monclar, Le Temple, Sainte-Livrade, Aiguillon, Tonneins,
Castellar, etc., que la prune d'Agen est le plus cultivé. Les propriétaires
exploitants font souvent eux-mêmes la transformation, à la
fois cultivateurs et industriels. Le pruneau de Tours s'obtient avec la
Sainte-Catherine, particulièrement dans l'arr. de Chinon, de Huismes
à Saumur .
Il est très réputé mais sa production est relativement
faible. Dans le Nord-Est, au contraire, principalement dans le département
de la Meurthe-et-Moselle et des Vosges, il y a de grandes plantations de
Quetsches. On en fait les pruneaux de Thiaucourt et de Pont-à-Mousson.
Pour la table, les variétés
préférées dans les plantations commerciales sont la
Reine-Claude et la Mirabelle. Aucune ne rivalise avec elles pour la qualité
du fruit à l'état frais et pour les préparations culinaires
et industrielles autres que le séchage. Pour la première,
les communes voisines de Bar-sur-Aube ,
de Sainte-Menehould ;
de Meaux ,
de Béziers ,
de Pézenas, de Tarascon, celles de Beaudrieux, dans l'Aisne, de
Vitry-le-Brûlé ,
dans la Marne, de Montussan, dans la Gironde, les hauteurs de la vallée
de la Marne, entre Presles et Condé, sont particulièrement
réputées. La seconde provient surtout du Nord-Est de la France;
des villages d'Amagney, de Deluz, de Laissey, dans le Doubs,
et de nombreuses localités de la Champagne et de la Lorraine, entre
Apremont et Damvilliers.
Ailleurs en Europe, on cultive plus spécialement
le prunier en vue du séchage : en Allemagne ,
où les vergers de la Hesse ,
du pays de Souabe ,
du Wurttemberg ,
produisent des Quetsches renommées; en Hongrie, où le prunier
est l'arbre fruitier le plus répandu; en Roumanie ,
où il y a aussi d'immenses vergers. En Angleterre ,
on ne cultive guère que des prunes de table : Reine-Claude et Reine-Victoria,
celle-ci plus belle que bonne.
Usages.
La prune est peut-être le fruit
qui trouve le plus d'emplois dans les usages domestiqùes. A peu
près toutes les variétés que nous avons décrites
conviennent, aux degrés indiqués, pour la table. On en fait
aussi des confitures, des marmelades, des tartes. On les conserve glacées
à l'eau-de-vie. On fabrique, avec les prunes jaunes très
mûres, un vin de prunes liquoreux. L'eau-de-vie de prunes est, d'autre
part, excellente : 2 hectol. de prunes soumises à la distillation
donnent, d'ordinaire, 12 litres d'eau-de-vie à 50°. La parfumerie
utilise également la prune sous forme d'essence. Enfin on en fait
des pruneaux. Le bois du prunier est rouge. brun, lourd, dur, à
grain fin. Il est susceptible d'un beau poli et on l'emploie tant en ébénisterie
que pour les ouvrages de tour. (G. B. et L. S.). |
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