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Soit un point matériel,
de masse égale à l'unité, attiré par les éléments
dm d'un ou plusieurs corps quelconques en raison inverse du carré de la
distance r. L'intégrale triple :
V =   dm/r,
étendue à toutes les masses attirantes,
a été désignée par Green
sous le nom de fonction potentielle et par Gauss
sous celui de potentiel; souvent aussi on l'appelle : potentiel
newtonien.
Si l'on rapporte le système à trois axes
de coordonnées rectangulaires, les trois dérivées partielles dV/dx,
dV/dy, dV/dz, représentent, à un facteur constant près, les composantes
de la force agissant sur la masse unité placée
au point x, y, z. La somme des trois dérivées secondes : d²V/dx² +
d²Vdy² + d²V/dz² est nulle si le point attiré ne fait partie d'aucune
des masses attirantes (équation de Laplace ).
Si le point attiré fait partie de l'une
de ces masses, et si r
est la densité en ce point, la même somme a pour valeur - 4 r
(équation de Poisson ).
La fonction potentielle est partout finie et
continue, ainsi que ses dérivées premières. Les dérivées secondes,
au contraire, varient brusquement quand le point attiré traverse l'une
des surfaces limitant les masses attirantes.
Si toutes les masses attirantes sont Ã
distance finie de l'origine, les produits Vx, Vy, Vz, x²dV/dx, y²dV/dy,
z²dV/dz tendent vers des limites finies lorsque x, y, z augmentent indéfiniment.
La théorie de l'attraction d'une figure
plane sur un point de son plan conduit à des résultats analogues, pourvu
que l'attraction soit supposée s'exercer en raison inverse non plus du
carré de la distance, mais bien de la distance elle-même. Le potentiel
est alors U = 
dm. log r, en désignant par dm la masse répandue sur l'élément superficiel
placé à la distance r du point attiré. La fonction U s'appelle le potentiel
logarithmique et vérifie l'équation d²U/dx² + d²U/dy² = - 2 r,
qui rappelle celle de Poisson.
La même fonction intervient dans la théorie
de l'attraction newtonienne exercée par un cylindre à base quelconque,
de hauteur indéfinie, et mérite par suite le nom de potentiel cylindrique.
Dans certaines recherches sur l'élasticité, Boussinesq
a été conduit à considérer une fonction qu'il a appelée le potentiel
logarithmique à trois variables, et qui a pour expression U = 
dm. log (z + r), en désignant par z la distance du point attiré au plan
des xy, sur lequel est supposée répartie la masse attirante, et r la
distance du même point à l'élément dm.
Revenons au potentiel newtonien. Les surfaces
le long desquelles le potentiel est constant sont les surfaces de niveau,
ou encore surfaces équipotentielles. En un point quelconque, la
force attirante est normale à la surface de niveau. Les trajectoires orthogonales
des surfaces de niveau sont des courbes partout tangentes à la direction
de la force : aussi Faraday
les a-t-il désignées sous le nom de lignes de force.
Une propriété fondamentale du potentiel
se déduit de l'équation dite de Green. Cette propriété est la suivante
: si l'on considère une surface fermée quelconque, et si M désigne la
somme des masses attirantes intérieures à cette surface; si dw est un
élément de la surface et dV/dn, la dérivée du potentiel prise normalement
à dw, l'intégrale double  dV/dn
. dw est égale à -4 M. Le potentiel
d'une couche sphérique homogène est constant à l'intérieur de cette
couche et, à l'extérieur, il est le même que si toute la masse était
concentrée au centre; on déduit aisément de là le potentiel d'une
masse sphérique homogène ou composée de couches homogènes.
Le potentiel des ellipsoïdes, très important
à connaître dans les recherches astronomiques, a donné lieu à de nombreux
travaux que nous ne pouvons analyser ici. Citons seulement un théorème
remarquable dû à Chasles ,
et d'après lequel, quand la masse attirante est une couche homogène comprise
entre deux ellipsoïdes concentriques et homothétiques, infiniment rapprochés,
les surfaces équipotentielles extérieures sont des ellipsoïdes homofocaux
à la couche. On sait, d'ailleurs, depuis Newton,
qu'à l'intérieur d'une pareille, couche l'attraction est nulle, et par
conséquent le potentiel est constant.
La notion de potentiel a reçu en mécanique
une extension considérable : chaque fois que les trois composantes rectangulaires
de la force agissant en un point de l'espace peuvent être considérées
comme égales aux dérivées partielles d'une même fonction, on dit que
cette fonction (prise avec le signe -) est le potentiel du système
de forces. Ce système prend lui-même le nom de champ de forces.
Le
travail de la force, pour un déplacement
quelconque de son point d'application, est dans tous les cas proportionnel
à la variation correspondante du potentiel.
Énergie
potentielle. En physique mathématique, on a fréquemment à faire
une distinction entre le potentiel des forces extérieures appliquées
à un système moléculaire, et le potentiel des forces intérieures, c.-à -d.
des actions mutuelles des molécules. Le potentiel des forces intérieures
reçoit alors le nom d'énergie potentielle, proposé par Rankine .
Dans les études relatives à l'élasticité des corps solides, cette même
fonction est fréquemment nommée potentiel d'élasticité.
Potentiel électrique.
En électrostatique, l'action des masses obéit à des lois analogues Ã
celles de l'attraction newtonienne : la principale différence est que
les électricités de même nom se repoussent, et que les électricités
de nom contraire s'attirent; ce qui conduit à envisager des "masses" électriques
positives ou négatives (que l'on appelle plus communément des charges.
Le potentiel d'un corps conducteur a la même valeur en tous les points
de la surface de ce conducteur : c'est cette condition qui détermine la
distribution de l'électricité.
En pratique, on n'a
à considérer que les différences de potentiel. Les différences de potentiel
électrostatique se mesurent au moyen des appareils appelés électromètres.
En électrocinétique, la notion de potentiel ,joue un rôle fondamental,
car, d'après, la loi de Ohm ,
l'intensité du courant électrique qui passe dans un fil de longueur donnée
est, toutes choses égales d'ailleurs, proportionnelle à la différence
de potentiel des extrémités. L'unité de différence de potentiel est
le volt.
Potentiel magnétique.
La notion du potentiel magnétique est tout à fait comparable à celle
du potentiel électrique : les masses électriques sont simplement remplacées
par des masses magnétiques. Mais il faut remarquer qu'il n'existe dans
le cas du magnétisme ni corps conducteurs, ni courants. En particulier,
la théorie des aimants envisage des surfaces équipotentielles définies,
comme nous l'avons fait en partant du potentiel newtonien, et des lignes
de force dont la forme est mise en évidence par l'expérience des fantômes
magnétiques.
Potentiel thermodynamique.
Dans la théorie mécanique de la chaleur intervient une fonction importante
qui a été d'abord envisagée par Massieu sous le nom de fonction caractéristique
et qui, depuis lors (simplement modifiée par l'introduction d'un facteur
constant), a reçu de Helmholtz
le nom d'énergie libre et, de Duhem, celui de potentiel thermodynamique.
Si l'on appelle U l'énergie interne du corps considéré, T sa température
absolue, S son entropie, et E l'équivalent mécanique de la chaleur,
le potentiel thermodynamique a pour expression E (U - TS). Helmholtz s'est
servi de cette fonction pour interpréter les phénomènes thermiques qui
accompagnent le travail de la pile. Duhem l'a appliquée à la mécanique
chimique et aux phénomènes électriques. (L. Lecornu).
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