| Bannie d'Athènes par le décret de Justinien en 529, forcée d'évacuer Alexandrie lors de l'invasion des Arabes en 640, la philosophie grecque (L'Ecole d'Athènes) se transplante dans la capitale de l'empire d'Orient (152 et 153). Elle s'y maintient pendant tout le Moyen âge, mais son développement est irrégulier, lent, comme la culture byzantine elle-même. Bien que les idées antiques aient été recueillies de première main et dans leur forme originale par la philosophie byzantine, leur infiltration y est beaucoup plus superficielle que dans la science arabe, qui les reçut par de nombreux intermédiaires. Prise dans son ensemble, l'oeuvre de la philosophie byzantine a été peu féconde; elle a des allures encyclopédiques; ses représentants se réclament quelques-uns de Platon, mais la cour de Byzance favorisa surtout la philosophie d'Aristote, sans avoir de personnalité bien marquée. Les discussions qui s'élevèrent dans l'Eglise avec les Ariens, les Nestoriens et cette foule d'hérétiques qui pullulèrent dans l'Orient au Ve siècle, réclamaient une doctrine polémique, qui pût fournir des armes contre les ennemis de l'orthodoxie. La dialectique d'Aristote y parut plus propre que tout autre système, et d'ailleurs le Péripatétisme ne renfermait apparemment aucune doctrine contraire à la religion chrétienne. Principaux représentants du VIIIe au XIIIe siècle. Déjà les derniers tenants du Néo-platonisme, Themistius et Proclus (151 et 152), ont des attaches avec Byzance. Quelques noms comme Themistius, Saint Nil ou Zacharie le Scolastique peuvent être mentionnés parmi les premiers philosophes proprement byzantins. Mais avant de rencontrer un nom frappant au Moyen âge, nous devons nous reporter au VIIIe siècle : la véritable philosophie byzantine commencera auve Jean Damascène. Thémistius. Thémistius, rhéteur célèbre, qui professait le péripatétisme à Constantinople, dsans la deuxième moitié du IVe siècle, n'était pourtant pas chrétien. Nous mentionnerosn ici de ses paraphrases de quelques ouvrages d'Aristote, dont il existe aussi une traduction d'Hermolao Barbaro. Saint Nil. Saint Nil, issu d'une famille noble de Constantinople, fut éparque de cette ville, et se retira ensuite avec son fils dans les déserts des monts de Sinaï, où il termina sa vie entre 420 et 450. Outre plusieurs ouvrages de théologie et de morale il est auteur d'une paraphrase du Manuel d'Épictète. Zacharie le Scolastique. Zacharie le Scolastique, évêque de Mitylène, vers 536, a écrit, sous le titre d'Ammonius, un dialogue dans lequel il défend l'idée que que le monde n'est pas éternel. Le même Zacharie a aussi commenté Aristote. Jean Damascène. La philosophie péripatéticienne, vague et obscure, du VIe au VIIIe siècle, eut à cette époque un habile et dernier interprète dans Jean Damascène (Damascenus ou Jean de Damas). En portant dans la théologie la philosophie péripatéticienne qu'il avait sans doute étudiée parmi les Arabes, Jean de Damas unit l'Antiquité au Moyen âge, la philosophie alexandrine à la philosophie scolastique. Ses Chapitres philosophiques ou didactiques, extraits des ouvrages d'Aristote et de l'introduction de Porphyre, furent la source et le modèle des compilations du Moyen âge. Photius. Photius, schismatique, également célèbre dans l'histoire religieuse et dans l'histoire littéraire, né à Constantinople au IXe siècle, mort en 891, était d'une ancienne et illustre famille. Il a été le savant le plus illustre de son siècle. Il joignait à un esprit rare et pénétrant l'érudition la plus vaste. On a de lui, sous le titre de Bibliothèque (ou Myriobiblon), une précieuse compilation qui contient une infinité d'extraits d'auteurs que nous ne connaissons que par elle. Il a aussi laissé de plus des Lettres; un Recueil des Canons de l'Église et le Nomocanon ou Accord des lois impériales et des canons; un Lexique grec; divers écrits théologiques, entre autres : Contre les Latins, Contre la Manichéens, De la procession du saint esprit, etc., Nicétas de Paphlagonie. Nicétas David, évêque de Dadybra en Paphlagonie, surnommé le Paphlagonien, le Philosophe ou le Rhéteur, mort en 800, est avec Photius le plus célèbre des auteurs de panégyriques du IXe siècle. Par ses éloges des martyrs, il est un précurseur de Syméon Metaphraste. Il a composé aussi une biographie du patriarche de Constantinople, Ignace, qui a une réelle valeur historique. Michel Psellus. Michel Constantin Psellus (Psellos), le jeune, qui professa avec éclat la philosophie à Byzance, et qui reçut de l'empereur Michel VII, dont il fut le maître, le titre de Prince des philosophes, a laissé, entre autres ouvrages, une Paraphrase du Traité d'Aristote sur l'interprétation, un Tableau synoptique de l'Organon du philosophe de Stagyre, un traité Sur les facultés de l'âme, où il expose très bien la doctrine de Platon et surtout celle d'Aristote; enfin la Doctrine variée. De tous les ouvrages philosophiques de Psellus, le plus important, c'est un traité en 93 demandes et réponses, où , après quelques questions théologiques, l'auteur en propose qui tiennent à la philosophie. Dans ces discussions, il rapporte surtout , et avec beaucoup de discernement, les opinions des anciens philosophes, en inclinant toutefois à la doctrine d'Aristote. Son traité de logique fit autorité au Moyen âge, et fut la source des Summulae logicales de Petrus Hispanus; c'est le premier qui renferme les mots mnémotechniques, si employés depuis. Psellus a laissé aussi des traités de musique et de rythmique. Jean Italos. Jean Italos, qui vivait sous Michel Ducas, a laissé plusieurs traités,, de rhétorique et de philosophie; comme Psellus, il se rattache à Aristote. Georges Pachymère George Pachymère, qui était aussi historien, a laissé une paraphrase de toute la philosophie d'Aristote. Michel d'Ephèse. Sous le nom de Michel d'Éphèse, disciple de Psellos, nous avons des commentaires sur plusieurs ouvrages d'Aristote. Eustratius de Nicée. Eustratius, évêque métropolitain de Nicée, vivait vers le milieu du XIIe siècle et s'est fait une certaine réputation comme philosophe péripatéticien. Cependant il est plus que douteux qu'il soit réellement l'auteur du commentaire qui nous est parvenu sous son nom sur l'Éthique d'Aristote.. Plusieurs fragments de ce commentaire` sont visiblement empruntés d'ailleurs. Nicolas de Méthone. Nicolas, évêque de Méthone (Messénie) appartient a la seconde moitié du XIIe siècle, ayant été un contemporain de Manuel Comnène, qui le chargea de diverses missions ecclésiastiques. C'est tout ce que l'on sait de sa vie. Ses écrits, en partie inédits, comptent parmi les plus originaux de la théologie du XIIe siècle. Nicolas lutte contre le platonisme antique, qui paraît avoir eu des défenseurs. Il justifie dialectiquemnent la rédemption et expose une théorie qui rappelle de loin celle d'Anselme. Nicéphore Blemmydas Nicéphore Blemmydas, moine de Constantinople, du milieu du XIIIe siècle, qui a écrit sur la procession du Saint Esprit et autres points de controverse, a laissé aussi un abrégé en deux livres; le premier sur la logique, le second sur la physique. Un autre ouvrage de ce moine, porte pour titre L'instruction d'un prince. Rapports de la philosophie byzantine et de la philosophie occidentale. Le schisme grec (858) fut le point de départ de malentendus séculaires entre l'Occident et l'Orient. Aussi, avant le XIIIe s., le contact des deux civilisations est superficiel et ces deux grandes familles humaines travaillent chacune de leur côté, sans échanger les résultats de leurs spéculations. Les croisades et surtout la prise de Constantinople en 1204 mettent fin à cet isolement : à partir du XIIle s., un fait caractéristique marque l'évolution de la philosophie byzantine : elle fait apport de ses idées à la philosophie occidentale. Les XIVe et XVe siècles. Pendant le XIVe s., et jusqu'à la chute de l'Empire grec en 1453, la philosophie byzantine ne secoue pas sa léthargie séculaire. Elle continue avant tout de commenter, sans originalité, les deux grands penseurs qui, depuis des siècles, alimentent ses controverses. Grégoire Palamas, archevêque de Thessalonique (vers 1347), souscrit à des solutions platoniciennes dans sa Prosopopée, qu'on peut appeler un réquisitoire de l'âme contre le corps, suivi d'une défense présentée par ce dernier. De même, Nicéphore Grégoras se déclare hautement pour Platon. Au contraire, l'empereur Jean VI Cantacuzène prône vigoureusement Aristote et paraphrase les premiers livres de l'Éthique à Nicomaque. Théodore Métochita et Sophonias commentent d'autres traités aristotéliciens. Léo Magentinus, métropolitain de Mitylène, vers 1340, écrit des commentaires sur l'Interprétation et les premiers Analytiques d'Aristote. Citons aussi, Démétrius Cydone, ou Cydonius, qui est un sophiste de Constantinople. Il accompagna l'empereur Cantacuzène dans le monastère où il se retira en 1355. Cydonius quitta cependant cette retraite, vint à Milan, et se rendit ensuite en Crète où il vivait encore en 1384. De ses nombreux ouvrages, la plupart philosophiques, nous ne citons ici que son premier discours philosophique Sur le mépris de la mort. Un personnage non moins remarquable de ce temps, Nicolas Cabailas, écrit une réfutation des Hypotyposes pyrrhoniennes de Sextus Empiricus qui, depuis le Ve s., sous l'influence des idées chrétiennes, avaient disparu de la circulation littéraire. Tous ces théologiens et ces philosophes ont contribué en même temps à la renaissance byzantine des lettres anciennes. Malgré les rapports de plus en plus nombreux entre Byzance et l'Occident, la philosophie byzantine n'a jamais reçu de la philosophie occidentale autant de services qu'elle lui en a rendus. Enregistrons néanmoins quelques traductions du latin en grec, qui perpétuent le mouvement inauguré par Maxime Planude. Georgius Scholarius (Gennadius, mort vers 1464), traduit les Summulae de P. Hispanus, le De sex principiis de G. de la Porrée et des traités de S. Thomas; de même Demetrius Kydones traduit plusieurs oeuvres de Thomas d'Aquin. (De Wulf). | |