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Histoire de l'art > La peinture
L'histoire de la peinture
La peinture française au XIXe siècle
Le paysage : romantisme, école de Barbizon
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Le XIXe siècle : Néo-classicisme, Romantisme, Paysage, Réalisme, Impressionnisme
Les paysages romantiques

Le renouveau du paysage s'est exprimé dès le lendemain de la Révolution de 1789. Cet intérêt était aussi déjà présent dans l'école Néo-classique chez certains élèves de David. Mais il se renforce surtout avec le Romantisme, courant dont sont issus les peintres orientalistes et italianistes. Après eux viendra viendra, dans les années 1830, l'école de Barbizon, à la charnière de deux autres nouveaux mouvements : le Réalisme et le Naturalisme d'une part, et l'Impressionnisme d'une autre.

L'Orientalisme.
Delacroix et Chassériau exprimèrent, dans plusieurs de leurs oeuvres, la nostalgie de l'Orient lumineux et bariolé. Cette hantise de pays mystérieux ne fut jamais plus forte que chez les écrivains ou artistes romantiques, inquiets, insatisfaits de leur condition, en proie au désir de tout ce qui ne se trouvait pas sous leurs yeux et à leur portée. Mais ils n'ont pas inventé l'exotisme, qui avait apparu dans l'art français bien avant le XIXe siècle. Sans remonter plus loin que le XVIIIe siècle, les Turqueries, les tableaux de Van Noor et de Favray, peints d'après nature, les illustrations de Moreau le jeune et d'autres dessinateurs pour le Voyage au Levant de Choiseul-Gouffier prouvent l'attrait qu'exerçaient sur les Français les pays d'outre-mer. En pleine période davidienne, nous avons vu Gros évoquer le Levant dans ses Pestiférés de Jaffa, en même temps que le lettré et curieux Girodet cherchait dans son Atala, après Chateaubriand, à représenter les solitudes d'Amérique.
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Vernet : Judah et Tamar.
Juda et Thamar, par Horace Vernet (1840).

Si les romantiques n'ont pas inventé l'exotisme, ils l'ont perfectionné. Jusqu'au XIXe siècle, les artistes français avaient partout cherché dans l'Orient un prétexte à déguisement. A présent, ils s'enfoncent dans un Islam plus farouche et brûlé, l'Islam du désert et des douars. La conquête de l'Algérie (1830) où, dès lors, s'approvisionneront les orientalistes, constitue un événement capital pour le développement de la peinture exotique en France. Horace Vernet (1789-1863) y a suivi l'armée française  pour retracer ses exploits avec une facilité banale. Quelques années plus tard, Delacroix, qui avait peint d'imagination ses sujets grecs, voyagea en Algérie et au Maroc pour se documenter plus exactement. Chassériau, Hédouin (1820-1889), surtout Fromentin (1820-1876), à la facture délicate mais un peu anémiée; Dehodencq (1822-1883), Henri Regnault (1843-1871), coloristes plus vigoureux; Coomans, qui rapporte quelques paysages d'Algérie; enfin, un peu plus tard, Guillaumet (1840-1887) et Dinet ont peint l'Afrique du Nord.
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Fromentin : Arabes.
Arabes, par Eugène Fromentin (1871).

L'Orient levantin continua à inspirer Decamps (1803-1860), chercheur d'effets pittoresques; Marilhat (1811-1847) et, à une époque plus tardive, Benjamin-Constant (1845-1902) et Ziem (1821-1911). James Tissot (1836-1902) évoqua la Syrie et Alfred de Curzon (1820-1895) les ruines de Grèce.

L'italianisme.
Pour les artistes qui redoutaient un voyage lointain, l'Italie demeutait un foyer d'exotisme. Ce pays conservait, surtout dans les États pontificaux, dans les Deux-Siciles, des moeurs anciennes et pittoresques. C'était, comme on devait le dire de Marseille, la porte de l'Orient. Les artistes français y allaient, auparavant, copier les maîtres anciens et peindre des ruines; ils vont maintenant étudier le peuple romain ou napolitain, que désormais ils représenteront inlassablement sous ses haillons. Granet (1775- 1849), le comte de Forbin (1777-1841), Thomas (1791-1814), auteur d'un amusant album de lithographies sur Rome, se trouvent à l'origine de l'italianisme. Vers 1830, deux principaux représentants de cette tendance sont deux amis d'origine suisse : Schnetz (1787-1870) et Léopold Robert (1794-1835), dont les compositions, au dessin vigoureux et lourd, au coloris cru, ont connu successivement le succès, puis la défaveur. Par la suite, l'Italie inspira Hébert (1817-1908) qui, au cours d'une longue existence, peignit la Campagne romaine et ses habitants. 

L'Espagnolisme.
Quant à l'Espagne, malgré le prestige que lui conférait la littérature romantique, dédaignée de ses propres artistes, Fortuny en tête, elle ne fut interprétée en France que par Dauzats (1804-1868) et par Ulmann (1829-1884). Puis, dans les années 1920 seulement, des peintres comme William Laparra et Achille Zo se spécialiseront dans les sujets espagnols.

L'école de Barbizon

Il restait enfin aux peintres français à découvrir leur propre pays. Jusqu'à cette époque, on connaissait surtout le paysage historique dans la tradition de Nicolas Poussin et de Claude Lorrain, tradition qu'à l'époque de David conservaient le peintre Valenciennes (1750-1819) et, à sa suite, Bidault (1758-1846), Michallon (1796-1822), Victor Bertin (1775-1842), Aligny (1798-1871). A un degré au-dessous on plaçait le style pastoral ou champêtre; ses représentants, Watelet (1782-1866) en tête, peignaient avec un soin méticuleux des paysages de France, agrémentés d'accessoires tels que chaumières, moulins, cascades. Ces peintres proprets, à côté d'artistes plus originaux, mais méconnus, comme Moreau l'aîné (1740-1806), d'autre part les Anglais-Constable (1776-1837) et Bonnington (1802-1828), inspirés par la France, furent les précurseurs de des grands paysagistes français du XIXe siècle. Gustave Michel (1763-1843) et Paul Huet (1804-1869), formés par l'étude des Hollandais et des Flamands, jouèrent le rôle d'éclaireurs. Hommes de leur époque, ils ne se bornent pas à voir le paysage, mais ils cherchent à lui donner une âme. Le mérite de l'exploration du nouveau territoires qu'ils ont ainsi découvert va revenir aux artistes qu'on a groupés sous le nom d'école de Barbizon  :

Th. Rousseau.
Théodore Rousseau (1812-1867) débute au moment où l'école du paysage historique et mythologique domine encore, mais il n'en est guère influencé; il vit retiré à Barbizon, dans la forêt de Fontainebleau; au reste, nombre de ses tableaux sont très faits; l'exécution souvent en est précieuse; les arbres sont dessinés presque feuille à feuille, sans cependant que le détail nuise à l'harmonie de l'ensemble. Rousseau analyse d'abord minutieusement la nature, ce qui lui permet plus tard de synthétiser si magistralement, ne prenant d'un site quelconque que juste ce qu'il faut pour l'effet général. Citons : Lisière d'un bois coupé; Une Avenue; le Printemps; Sortie de forêt à Fontainebleau; Groupe de chênes à Apremont. Rousseau, dit Théophile Gautier, est très varié dans son oeuvre; sa manière n'est jamais reconnaissable : tantôt il esquisse, tantôt il finit minutieusement. Ce fut, en somme, le chef de l'école romantique dans le paysage. Dessinateur consciencieux et habile, il a un coloris séduisant et vigoureux, une facture large, une touche grasse et solide (d'Halle).
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Théodore Rousseau : Paysage.
Paysage, par Théodore Rousseau (ca. 1848).

Millet.
Jean-François Millet (1814-1875), comme son ami Théodore Rousseau, passe sa vie à Barbizon. C'est, à proprement parler, un peintre de genre. Dans la plupart de ses tableaux, le paysage n'est que le décor, décor essentiel, puisque les acteurs sont des hommes des champs, des laboureurs et des bergers.  Il est attaché à l'homme, qu'il suit à toutes les heures de sa vie pénible. C'est, à la fois, un observateur précis et un poète délicatement sensible, plein de sympathie pour son modèle. En général, le dessin, quoi qu'on ait dit, est magistral et savant, la couleur sobre, comme dans les Botteleurs et le Retour des champs. On sait les prix fabuleux qu'ont atteint dès le XIXe siècle les oeuvres de Millet. Vivant comme un paysan, Millet, avec son génie, était né pour peindre les paysans; il les a étudiés jour à jour, a su rendre leur caractère propre : Paysan greffant un arbre, l'Angélus, la Mort et le Bûcheron, les Moissonneurs. Il a admirablement rendu la physionomie, la poésie de l'homme des champs, encadrant ses personnages dans des paysages superbes de couleur, d'intensité, d'au delà.

Corot.
Camille Corot (1796-1875) conçoit ses paysages de France ou d'Italie avec un lyrisme rêveur. Il se différencie de Rousseau et de Millet en ceci qu'il lui resta toujours quelque chose de son éducation classique, car il étudia d'abord chez Michallon et Bertin, les apôtres du paysage classique. Voyez ses premiers tableaux : Une Matinée, le Petit Berger, l'Etoile du soir, Diane et ses nymphes; il manque rarement d'y placer des nymphes, des naïades et des dryades. Au reste, s'il devait plus tard s'annoncer comme un maître, ses premières toiles sont souvent moins bien venues, avec des personnages peu dessinés, gauches et mous. Mais où Corot est vraiment supérieur, c'est dans les petits tableaux représentant un coin de bois encore embrumé, un bout de prairie, un bouquet d'arbres près desquels coule un ruisseau. Ses ciels vaporeux sont pleins de poésie, les brouillards transparents, laissant à peine deviner le soleil. Voyez Un Matin à Ville-d'Avray. Les peintures de Corot, dit Charles Blanc, semblent pâles, grises, et, dans leur délicatesse, elles ne pouvaient attirer que des délicats. Ceux-ci, du moins, étaient touchés de ses tableaux parce qu'on y sentait une âme, une âme de poète.
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Corot : Pont de Nantes.
Pont de Nantes, par Camille Corot (ca. 1848).

Flers.
Camille Flers (1802-1868), s'il n'a pas le talent des précédents, a brossé de magnifiques toiles, tantôt d'une poésie sombre et navrante comme ses Environs de Paris, tantôt des tableaux naïfs, simples, d'une simplicité grandiose, comme les Saules sur la Beuvronne. Il avait, dit Théophile Gautier, dès 1830, quitté le bois sacré du paysage historique, ne voulant plus avoir pour modèle que la nature.

D'autres noms encore...
Après la campagne, ses habitants. A côté des interprètes de la nature, nous rencontrons les peintres du paysan et des animaux qui l'entourent. Constant Troyon (1810-1865) est surtout un animalier. Il nous fait suivre les grands boeufs au long des sillons, et il a des effets de paysage puissants comme effets de vérité. Baudelaire lui a reproché l'aplomb imperturbable de sa manière et le papillotage de sa touche. Brascassat (1804-1887), Rosa Bonheur (1822-1899), Charles-Emile Jacque (1813-1894) représentent les animaux de la ferme. 

Diaz de la Peña (1808-1876), après avoir peint de grandes et emphatiques toiles, s'aperçut qu'il était né paysagiste. Un peu à la manière de Decamps, il apporte dans des paysages des préoccupations d'expression dramatique et de relief coloré. Peu de peintres ont rendu comme lui le soir dans sa grandeur farouche. Voir le Coucher de soleil par un jour d'orage. Il est plus malheureux quand il veut s'attaquer aux figures, la Rivale, l'Education de l'amour, mais se revanche dans la Mare aux vipères, véritable chef-d'oeuvre, page d'une incontestable puissance.

C'est la seconde génération, celle des artistes nés après 1810, qui va s'imposer pour règle d'observer et de traduire objectivement la nature : la génération de Jules Dupré (1811-1889), de Chintreuil (1814-1873), de Français (1814-1897), Cabat et de Daubigny (1817-1878). Jules Dupré aime la nature et sait en rendre la poésie intime et mystérieuse : Intérieur d'une cour rustique, Entrée d'un hameau dans les Landes. Chintreuil (1816-1873), après des essais insignifiants, à force d'étudier la nature, se défait de l'imitation de Corot et devient un maître : les Bruyères, la Mare aux Biches, Lever de l'aurore. Cabat est élève de Flers; quand il est resté sincère, il a traité ses tableaux avec une finesse qui rappelle celle des maîtres flamands. L'imitation de Poussin a failli gâter ce beau talent; il était resté original à Saint-Cloud et à Bellevue, il devint convenu en Italie. Charles-François Daubigny se recommande par une exécution large, un effet rendu juste et vrai. Voir le Printemps, Vue de Dieppe, Un Sentier. Monet et Cézanne travailleront avec lui.

Théophile Gautier disait à propos de Daubigny : 

« Il est difficile de rencontrer un talent plus sincère, plus naturel, plus agreste et absolument neuf que celui de Daubigny. Lorsque tant d'autres se tortillent comme des mandragores pour atteindre l'originalité, M. Daubigny a eu cette idée ingénieusement simple, mais qui n'est venue à personne depuis le temps qu'on fait de la peinture, d'ouvrir les yeux, de regarder devant lui, et de rendre ce qu'il voyait, sans y chercher malice. Le premier parmi les paysagistes, il s'est aperçu que les arbres se couvraient de fleurs au printemps, de fleurs roses et blanches qui produisent entre les petites feuilles vertes un fort joli effet, et, tout tranquillement, sur un carré de toile, il a peint les petites feuilles vertes avec leurs fleurs roses et blanches: voilà; cela s'appelle le Printemps, et c'est un chef-d'oeuvre. » 
On pourrait appliquer ces mots à presque toute cette famille de peintres.
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