| Récitatif, n. m. - Déclamation musicale du texte, dans les parties d'un opéra ou d'une autre composition vocale qui servent à relier l'un à l'autre les airs et les morceaux d'ensemble, et à maintenir le sens de l'oeuvre littéraire dont ceux-ci sont le développement musical. « Le récitatif n'est pas, chez Lulli, une partie accessoire de l'oeuvre, une sorte de lien factice qui rattache les différents airs, comme une ficelle autour d'un bouquet : c'en est vraiment le coeur, la partie la plus soignée et la plus importante [...]. Dans ce siècle de l'intelligence, le récitatif représentait la partie raisonnable de l'opéra, le raisonnement mis en musique. » (R. Rolland). Le récitatif de Lulli et ses premiers successeurs est, selon Le Cerf de la Viéville, « un juste milieu » entre la déclamation de la tragédie et le dessin mélodique. Il se modelait sur le vers; et repoussait toutes les additions d'ornements mises à la mode dans les airs de cours ou acceptées de la main des Italiens. Lulli exigeait que son récitatif fut chanté « tout uni ». Mais il en résulte une grande monotonie, qui tient pour une part à cette sévérité des formes, mais éga lement à la trop grande étendue des scènes disposées en récit, et non moins à la structure des vers de Quinault; où « l'accentuation exagérée de la rime dans les vers courts, de la césure et et de la rime dans les vers de douze syllabes », amène forcément une raideur et une monotonie constantes. Le récitatif était exécuté, au temps de Lulli, d'une façon beaucoup plus vive et moins traînante qu'il ne le fut depuis. Le récitatif français de Lulli, maintenu par ses successeurs, est fortement déclamé sur des rythmes libres, les chiffres de mesure changeant sans cesse. Le récitatif accompagné remonte aux premiers temps de l'opéra vénitien. Mais, à partir de Léonard de Vinci et de Hasse, aux environs de 1725-1730, les grands monologues dramatiques, récités avec orchestre, se développèrent d'une façon inattendue et magnifique. C'est le récitatif avec orchestre dramatique. Il ne fut pas accepté sans résistance par les poètes, par les vieux musiciens, par le public même. On se plaignait de voir les instruments empiéter sur les voix, de ne plus entendre les paroles (1710). Jommelli, sur ce point, tient tête obstinément à Métastase. Tosi distingué trois sortes de récitatifs, d'église, de théâtre, de chambre, pour lesquels il prescrit trois manières d'exécution : la notation était alors tellement succincte pour le récit, que les chanteurs pouvaient et devaient y collaborer selon leur goût et leur talent par le style d'exécution qui permettait l'usage de formules ornementales. Pour le récitatif d'église, il fallait « une belle, mise de voix, des appoggiatures fréquentes et une continuelle noblesse de style ». Le récitatif de théâtre était inséparable de l'action scénique, mais devait conserver « ce ton noble et élevé qui sied aux princes et à leur entourage ». Le récitatif de chambre exigeait plus d'expression et laissait plus de libertés. Les critiques très vives que fait Tosi de la manière de chanter les différents récitatifs montre que l'initiative des chanteurs s'y donnait carrière, souvent au détriment de l'art. II blâme aussi la monotonie qui résulte de « l'ennuyeuse cantilène » et de l'abus des « cadences rompues ». | |
| Le récitatif liturgique, dans le chant romain, héritier de la cantillation juive, est une lecture chantée, des prières liturgiques, ou des extraits de la Bible et du Nouveau Testament. On a distingué trois sortes de récitatif liturgique : 1. Le chant recto tono, sur une seule note, sans inflexion d'aucune sorte : manière devenue assez commune, mais qui ne paraît pas avoir été pratiquée par les Anciens, et qui est antinaturelle, puisqu'elle supprime les accents de la parole. 2. Le récitatif sur une seule note, mais, avec séparation des principales divisions du texte par des formules qui le ponctuent, en reposant la voix sur la médiante à chaque division et en amenant le repos final par une terminaison conclusive. 3. Le récitatif varié par des inflexions multiples qui suivent et amplifient celles de la parole. Tous ces récitatifs se meuvent autour de la corde récitante, ou son central pris dans le médium de la voix. Des formes analogues ont été constatées dans le chant ambrosien et le chant mozarabe, ainsi que dans ceux des diverses communautés chrétiennes orientales. (M. Brenet). |