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Accompagnement,
n. m. - Partie d'une composition qui est subordonnée à une
ou plusieurs parties principales; vocales ou instrumentales; dont elle
forme le soutien harmonique. Le mélange des voix et des instruments;
tel que l'opéraient les musiciens du Moyen
âge, n'était pas un accompagnement, mais une distribution
occasionnelle des parties entre les agents sonores dont on disposait au
moment de l'exécution.
Les traces les plus anciennes de l'accompagnement
s'aperçoivent dans le chant profane
à voix seule, où l'on s'accoutumait à se servir d'un
luth ou d'un autre instrument portatif pour
donner à la voix un point d'appui. Dès la première
moitié du XVIe s., les « chanteurs
au luth » étaient nombreux en Italie,
et Aron les distinguait des « chanteurs au livre », qui interprétaient
les oeuvres polyphoniques. Vers la fin du même siècle, l'épinette,
la lira da braccio; la guitare partageaient
avec le luth le rôle d'instruments d'accompagnement, et l'habitude
se répandait d'imprimer en France
les Airs de cour, en Angleterre
les Ayres, tantôt à quatre parties vocales et tantôt
à voix seule avec réduction des autres voix en tablature.
Lorsque s'accomplit, tant à l'église qu'à la chambre
et au théâtre, l'avènement du style monodique, on adopta
la figuration de la partie d'accompagnement sur une seule portée
de basse, chiffrée
ou non, dite basse continue ou continuo, que l'accompa gnateur
développait, selon des formules convenues, sur l'instrument qui
lui était familier.
On imprimait des méthodes spéciales
pour enseigner l'application de ces procédés qui consistaient
en successions très simples d'accords plaqués, brisés
ou arpégés, et en formules de cadences. Les ouvrages en ce
genre de Fleury (1669) et Bartolomi (1669), pour le théorbe, de
Delair (1690), pour le théorbe ou le clavecin,
de Saint-Lambert (1707) et Dandrieu (1719), pour le clavecin, précédèrent
la Dissertation où Rameau (1732)
se flattait de rendre habiles accompagnateurs ceux mêmes qui ne savaient
pas lire la musique. Il n'était pas d'amateur qui n'y prétendît,
et d'ailleurs, au dire de Nemeitz (1727), les Français savaient
accompagner « d'une façon charmante », se montrant à
la fois agiles à exécutera « d'une main prompte »
et discrets dans les dessins dont ils ornaient la basse sans y mettre «
rien de superflu ».
Quoique l'art de développer l'accompagnement
sur une basse soit toujours enseigné dans les Conservatoires à
titre de complément de la théorie élémentaire
de l'harmonie, il n'a d'application aujourd'hui
que dans les oeuvres de l'ancien répertoire, car, depuis l'époque
classique, les maîtres rédigent toujours entièrement
toutes les parties de leurs oeuvres.
Les accompagnements de piano
des mélodies
modernes, depuis Schubert et Schumann jusqu'à Fauré et Debussy,
Hugo Wolf ou Moussorgsky, sont de la qualité musicale la plus rare
et souvent d'une réelle difficulté d'exécution. On
y trouve réunies dans une acception nouvelle les caractéristiques
de l'accompagnement proprement dit, soutien harmonique du chant, et de
l'accompagnement obligé, qui consistait, au XVIIIe
s., dans l'association à la partie vocale d'une ou plusieurs parties
instrumentales concertantes, dialoguant avec elle au-dessus de la basse.
Les cantates de Bach,
les oratorios et les opéras
de Haendel et des maîtres italiens offrent
en abondance des exemples d'accompagnement obligés.
Vers la fin du même siècle,
on vit paraître, dans les publications destinées à
la clientèle des amateurs, des sonates et airs variés pour
le clavecin avec accompagnement de violon
ou autre instrument ad libitum. Ce seul titre disait assez que la
partie facultative ne faisait que doubler partiellement le clavecin. Cet
usage dura peu et fut abandonné par les musiciens mêmes qui
s'y étaient d'abord pliés et parmi lesquels on avait compté
Schubert, Dussek, Steibelt et Mozart.
Le nom de leçons d'accompagnement
données à des leçons de musique d'ensemble est impropre,
puisque l'on n'y comprend plus que l'exécution d'oeuvres concertantes
: c'est un souvenir, détourné de son sens véritable,
du temps où l'on écrivait les sonates pour violon et basse
et où l'accompagnement était le développement de cette
basse.
Accompagnement
du plain-chant.
L'oreille moderne est tellement accoutumée
à l'harmonie qu'elle a peine à goûter une exécution
entièrement homophone. Elle semble appeler un accompagnement pour
le chant liturgique, dont la modalité se refuse à l'harmonie.
Les orgues installées au Moyen âge dans les églises
n'y servaient pas à l'accompagnement, mais à l'exécution
de préludes, postIudes et versets alternant avec le choeur. Lorsque,
dans le XVIIe s., la nécessité
se fit plus vivement sentir de guider la maladresse des chantres par les
sous d'un instrument, on recourut au serpent ou au basson, qui doublaient
les voix à l'unisson. C'est de l'invention de l'harmonium, vers
le milieu du XIXe s., que datent la vulgarisation
et la tyrannie de l'accompagnement du plain-chant.
Dans le grand nombre de méthodes qui se sont répandues, les
unes consistaient en banales et perpétuelles successions d'accords
consonants, enchaînés mécaniquement et suivant la mélodie
note pour note, d'autres, par des emprunts faits aux procédés
de l'art contrepointique, s'éloignaient à la fois du but
premier de l'accompagnement et de la structure modale du plain-chant. La
restauration du chant grégorien a renouvelé
ces études et fait naître un style nouveau où sont
avant tout respectées la modalité et la souplesse rythmique
des mélodies. (Michel Brenet). |
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