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Morale
La morale civique

La morale civique traite des devoirs de l'humain considéré comme membre d'un État ou citoyen. Un État, c'est une société organisée en vue de la justice et de l'utilité commune.

Une société, c'est, d'une manière générale, un ensemble d'houmains unis par des rapports généraux et permanents. Plus ces rapports sont nombreux, importants et durables, plus la société est réelle. Par suite des progrès de la civilisation, l'humanité tout entière tend à ne plus former qu'une seule société, du moins au point de vue économique et scientifique; mais cette société universelle est plutôt idéale que réelle.

La société la plus réelle est fondée sur une communauté d'origine, de territoire, de langue, de moeurs, d'intérêts, de souvenirs et de sentiments : c'est celle qu'on nomme une nation. Toute nation, libre et maîtresse d'elle-même, prend habituellement la forme d'un État.

La nation, considérée comme attachée à un certain sol, et comme subsistant à travers les siècles malgré les générations qui se succèdent en elle, c'est la patrie.

L'origine de la société. 
La société est un fait naturel elle ne résulte ni d'un artifice, ni d'une convention. Hobbes et Rousseau la font dériver d'un contrat. C'est qu'ils confondent l'État et la société. Encore l'État repose-t-il le plus souvent sur un contrat tacite et non formel. Il est impossible d'admettre que l'état primitif et naturel de l'humain soit l'isolement individuel. L'humain, a dit Aristote, est un animal sociable.

Tout d'abord, la société humaine n'est pas un fait sans analogue dans le monde : la plupart des animaux, surtout des animaux supérieurs, vivent aussi en société.
En outre, toutes les facultés de la nature humaine (sympathie, raison, langage, moralité) ou sont des moyens en vue de la vie sociale ou exigent elles-mêmes la vie sociale comme la condition nécessaire de leur développement. L'humain, en dehors de la société, est à peine égal à la brute. Enfin, sans l'association, l'humanité n'aurait pu évidemment subsister.

Mais la société humaine n'est pas seulement l'oeuvre de la nature elle est aussi l'oeuvre de la volonté. En fait, tout humain naît et vit dans une société déjà constituée; mais, au regard de la raison, est-ce un devoir d'appartenir à une société, à un État?

La raison morale de l'État. 
De l'idée même de la fraternité humaine dérive, ce semble, le devoir de s'associer avec ses semblables, de s'intéresser à leur destinée, de coopérer à leurs efforts. Il n'est permis à aucun humain de s'isoler volontairement, systématiquement du reste de l'humanité. Le devoir d'appartenir à un État n'est qu'une forme particulière de ce grand devoir.

D'autre part, chaque personne a le droit d'exiger qu'on la respecte et par conséquent de défendre sa vie, sa liberté, sa conscience, sa propriété, etc.; mais, il est impossible qu'elle exerce directement ce droit, sauf les cas de force majeure. De plus, toute personne a le devoir de défendre les autres personnes quand elles sont menacées dans leur vie, leur honneur, leurs biens, etc.

De là dérive l'obligation, pour des humains vivant en société, de se concerter en vue de la défense commune de leurs droits, et par conséquent l'obligation de constituer un État.

A plus forte raison est-ce un devoir, pour celui qui naît et vit dans un État, de lui appartenir volontairement.

Les fonctions de l'État. 
L'État remplit deux sortes de fonctions, les unes essentielles, les autres plus ou moins accidentelles :

1° Des fonctions de justice;

2° Des fonctions d'utilité publique.

En tant qu'il représente la justice, l'État assure à chaque citoyen la paisible jouissance de tous ses droits.

En tant qu'il représente l'utilité publique, l'État pourvoit à certains intérêts généraux : facilité des communications par le moyen des routes, des canaux et des postes, développement de l'instruction, assistance publique, etc.

Ces dernières fonctions pourraient à la rigueur être remplies
directement par des particuliers ou par des associations privées. Mais dans bien des cas, elles ne pourraient l'être sans danger pour l'existence même de l'État; et c'est la principale raison pour laquelle elles lui sont confiées dans la plupart des pays.

L'État et le gouvernement. 
Les trois pouvoirs.
Le gouvernement est l'ensemble des humains qui représentent l'État, qui en sont les mandataires. Il est donc distinct de l'État et doit lui être subordonné.

Il se compose de trois pouvoirs : pouvoir législatif, pouvoir exécutif, pouvoir judiciaire. Le premier fait les lois, le second en assure l'exécution, le troisième les applique aux circonstance particulières et punit ceux qui les enfreignent.

Ces trois pouvoirs, naturellement distincts, et réclamant des capacités différentes, doivent être maintenus distincts dans la pratique.

Le gouvernement en est le dépositaire, non le propriétaire.

La souveraineté nationale. 
L'ensemble de ces pouvoirs appartient, en effet, à la nation. La souveraineté nationale est le droit qui appartient à la nation de faire des lois et d'en poursuivre l'exécution. La nation peut déléguer l'exercice de ce droit à des individus; mais ce droit lui-même demeure en elle inaliénable et imprescriptible.

On appelle constitution la convention qui détermine le mode de formation et d'exercice des pouvoirs de l'État, principalement des pouvoirs législatif et exécutif.

Dans certains États, la convention est tacite et non expresse : la coutume, la tradition y tiennent lieu de constitution.

Même les constitutions écrites présupposent des conventions tacites. Telle est par exemple la loi des majorités, qui est un des principes les plus importants du droit politique. En vertu de cette loi, qui est censée admise à l'unanimité, l'avis de la majorité prévaut dans toutes les questions qui concernent l'État.

Origine du gouvernement et de la loi. 
Le gouvernement peut avoir en fait un grand nombre d'origines : la force, la tradition, etc. ; mais, en droit, il n'est légitime que s'il représente tout à la fois la justice et la volonté nationale.

De même la loi n'est obligatoire qu'autant qu'elle est conforme à la justice et acceptée par la nation.

Origine de la justice sociale. 
Le droit social de punir est une transformation du droit de légitime défense ou de contrainte physique qui appartient à l'individu. On sait quelles raisons empêchent l'individu de l'exercer lui-même directement. Il est donc transféré à la société, qui se trouve ainsi chargée de réprimer toutes les injustices.

Par cela même l'individu renonce à se faire justice; on ne peut donc admettre la légitimité de la vendetta ou du duel.

D'autre part, le droit de la société n'est pas un droit mystique d'expiation. Elle n'a pas mission de faire régner la vertu. Même en frappant les coupables, elle doit respecter en eux la dignité humaine et se reconnaître envers eux des devoirs non seulement de justice, mais encore de charité.

Toute rigueur qui n'est pas strictement nécessaire à la défense du droit et de l'ordre social est illégitime. La justice n'est pas la vengeance.

On voit par là combien le droit social de punir diffère du droit de punir qui appartient aux parents sur leurs enfants ou de celui que les croyances religieuses de l'humanité attribuent à Dieu sur les humains.

Les devoirs des citoyens envers l'État. 
L'obéissance aux lois.
Le premier devoir du citoyen envers l'État est l'obéissance aux lois et aux magistrats qui commandent au nom des lois.

La loi, en effet, n'est pas l'oeuvre d'une volonté injuste ou arbitraire : elle est l'oeuvre de la nation qui exprime en elle, sous des formes plus ou moins particulières, sa volonté d'assurer à tous la justice. L'obéissance à la loi n'est donc pas une servitude : elle est la condition même de la liberté.

Or la loi fondamentale, c'est la constitution dans laquelle se formule le pacte social. La méconnaître, la braver, conspirer contre elle, c'est travailler à la dissolution de l'État, à la ruine de la patrie. Le citoyen peut s'efforcer de la modifier, de l'améliorer par les voies légales; mais, tant qu'elle subsiste, il lui doit l'obéissance et le respect. Un pays où les partis mettraient sans cesse en question le pacte fondamental serait fortement fragilisé.

L'éducation des enfants. 
L'éducation, devoir des parents mais aussi devoir de l'Etat, des enfants est un devoir non seulement envers les enfants eux-mêmes, mais encore envers la société tout entière. La communauté nationale en effet ne traverse les siècles que grâce à la continuité des traditions morales, historiques et politiques. C'en est fait de son existence si les nouvelles générations qui s'élèvent dans son sein restent indifférentes à sa culture, ignorent son histoire et se désintéressent de ses institutions et de ses lois. Le devoir de l'éducation n'est donc pas seulement de faire des enfants des adultes autobnomes : elle doivent en faire aussi des citoyens, capables de comprendre la société dans laquelle ils vivent.

L'impôt.
Les services que l'État rend aux citoyens, les services publics, entraînent des dépenses qui ne peuvent être que publiques. Puisque tous profitent de ces services, il est juste que tous contribuent à les payer en proportion même de leurs ressources. L'impôt est une dette, et, dans les pays de suffrage universel, une dette voulue, consentie par les citoyens eux-mêmes : se soustraire à l'impôt, c'est à la fois commettre un vol et manquer à ses engagements.

Le vote. 
Chez les peuples libres, tout citoyen participe à la souveraineté nationale : il nomme plus ou moins directement les personnes chargées de faire les lois et de pourvoir à leur exécution. Le vote n'est pas seulement pour lui un droit : c'est un devoir. Aucune société ne peut prospérer ni durer si les associés se tiennent à l'écart des affaires communes. Mais le citoyen doit, en votant, se préoccuper moins de ses préférences et de ses convenances personnelles que des suprêmes intérêts de la justice et du bien public. (E. Boirac).

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