| L'empereur Hadrien s'était fait construire, à une trentaine de kilomètres à l'Est de Rome, au pied des collines de l'antique Tibur, aujourd'hui Tivoli, une villa aux proportions gigantesques, où pendant les dernières années de sa vie il vint se reposer des fatigues de l'empire. De cette magnifique résidence, il ne reste plus aujourd'hui que des ruines, auxquelles on a conservé le nom de villa Adriana : c'est un des ensembles les plus considérables et les plus intéressants qu'il y ait en Italie. Cette villa a dû être construite vers l'an 125 : elle traversa probablement tout l'empire sans souffrir d'autres dommages, que ceux de l'abandon et du manque d'entretien, car elle ne paraît pas avoir servi de résidence à un autre empereur qu'à celui qui la fit construire. Lorsque Totila, roi des Goths, ravagea Tibur au VIe siècle, la somptueuse résidence impériale ne dut pas être épargnée par les barbares. Avec le temps, le souvenir même de la villa finit par se perdre; ces ruines si considérables ne pouvaient avoir appartenu qu'à une ville ancienne : on imagina que Tivoli avait d'abord été bâtie à cet endroit dans la plaine, et ces ruines éparses furent baptisées du nom de Tivoli vecchio (= le vieux Tivoli). Lorsque la Renaissance eut éveillé partout la passion des monuments antiques, on se mit à fouiller ces débris, non pas pour reconstituer la topographie et l'histoire de la villa impériale, mais pour retirer des décombres toutes les oeuvres d'art que les invasions et que les siècles auraient respectées. A partir du XVIe siècle a commencé un véritable pillage. Ceux, du moins, qui ne voyaient dans ce gigantesque amas de ruines qu'une carrière d'oeuvres d'art, ont été récompensés de leurs recherches : car c'est de ces ruines que sont sortis quelques-uns des antiques les plus célèbres, comme le Faune en rouge antique du Capitole, le merveilleux bas-relief d'Antinoüs de la Villa Albani, les Muses et la Flore du Vatican, etc. - Reconstitution de la Villa d'Hadrien selon Daumet. A partir du XIXe siècle, le gouvernement italien fait faire à la villa d'Hadrien des fouilles méthodiques pour reconstituer le plan de l'ancienne demeure impériale. D'autre part, Daumet, lors de son séjour à l'Ecole de Rome, en 1860, a fait, d'une partie de ces ruines, appelée le palais impérial, une excellente restauration. Les historiens anciens rapportent qu'Hadrien fit construire sa villa de Tibur pour perpétuer le souvenir de ses voyages, en groupant sous ses yeux des reproductions de tous les monuments ou des lieux qui l'avaient le plus frappé; il voulait que sa villa fût en quelque sorte un album de ses courses à travers le monde, sans cesse ouvert devant lui. C'est ainsi que la villa, d'après cette idée singulière, renfermait le Lycée, l'Académie, le Prytanée, Canope, le Poecile, la vallée de Tempé, et même, pour ne rien oublier, l'empereur y aurait fait représenter les Enfers. L'identification de tous ces monuments présente les plus grandes difficultés. Il faut savoir que les ruines de la villa couvrent l'étendue énorme de sept milles romains : dans un pareil espace, au milieu de ruines de toute sorte, il est souvent malaisé de faire des identifications précises, alors surtout que les représentations des architectes d'Hadrien ne visaient pas et ne pouvaient viser à la fidélité. - Reconstitution de la Villa d'Hadrien. Source : KarensWhimsy.com L'on voit, au Nord-Est, la vallée de Tempé au milieu.de laquelle serpente un petit cours d'eau qu'on a décoré du nom de Pénée. Certes, les eaux ne se frayent pas un passage au milieu des parois étroites des rochers; mais l'endroit a bien son charme avec sa végétation puissante, avec son ombre épaisse, avec son panorama merveilleux; à côté, les montagnes de Tivoli, et Rome au fond du tableau. A l'ouest, on trouve le Poecile. On a donné ce nom à une énorme muraille de briques restée tout entière debout au milieu de ces ruines, longue de 230 mètres et haute de 40, De chaque côté, régnait un portique grandiose : on voit encore les bases des colonnes qui le supportaient. Au centre de la muraille, une porte monumentale permettait de passer d'un côté à l'autre. Les parois du mur devaient être couvertes de peinture, comme au Poecile d'Athènes; rien ne manquait à se lieu de promenade de la cour impériale, ni le paysage pittoresque, ni les beautés artistiques. - Canope, le temple de Sérapis de la Villa d'Hadrien. Source : The World Factbook. La vallée de Canope rappelait la magnificence du temple de Sérapis de Canope, tout près d'Alexandrie. Au fond d'une vallée de forme rectangulaire, se creuse une voûte artificielle : l'eau jaillissait des parois, baignait le pied d'une statue de Sérapis, et se répandait dans un vaste canal de 220 mètres sur 80 de large au milieu de la vallée. Le palais impérial est une des parties les plus somptueuses de la villa; le péristyle en est d'une ordonnance magnifique et d'une richesse de décoration inouïe; partout, les marbres les plus rares, les ornements les plus exquis. Ces ruines sont un monde : on a retrouvé encore trois théâtres, un odéon pour les lectures publiques, un théâtre pour le répertoire grec, un autre pour le répertoire latin, une bibliothèque, une basilique, etc. Une villa impériale ne pouvait pas ne pas avoir des thermes; ceux de la villa d'Hadrien forment une des parties les plus curieuses et les mieux conservées de ces ruines, on leur a donné le nom de natatorium. Au centre d'une construction circulaire, voisine du Poecile, se trouve une île artificielle, complètement isolée par un canal de marbre blanc, sur lequel étaient jetés deux ponts mobiles et tournants. Au centre de l'île, un atrium corinthien décoré d'une fontaine; aux angles, des salles de bains et des salles de repos, le tout décoré des marbres les plus riches, mais avec plus de richesse que de goût. (G. L.-G.). | |