| Orchomène est le nom de deux cités de la Grèce antique : Orchomène d'Arcadie et Orchomène des Minyens en Béotie. Orchomène d'Arcadie. Elle était située au Nord de la plaine fermée de l'Arcadie orientale, les petites collines d'Anchisia isolant au Sud son bassin de celui de Mantinée, tandis que le mont Oligyrtus au Nord le séparait des territoires de Phénée et de Stymphale, les montagnes atteignaient près de 1800 m à l'Est, 1300 à l'Ouest. Au milieu de la plaine ainsi encadrée s'avancent deux contreforts issus des montagnes de l'Est et de l'Ouest, qui ne laissent entre eux qu'un étroit ravin par lequel les eaux s'écoulent du Sud au Nord; sur le promontoire occidental très escarpé, nommé Tracho, était l'acropole d'Orchomène, à une altitude de plus de 900 m, commandant les deux moitiés septentrionale et méridionale du bassin. Au Sud de la ville était un temple d'Artémis Hymnia très anciennement vénéré. Orchomène paraît avoir eu une grande importance aux premiers temps de l'histoire grecque. Les légendes attribuaient sa fondation à un éponyme, fils de Lycaon, soit à Elatos, fils d'Arcas. Ses rois avaient commandé à presque toute l'Arcadie, et c'est à ce titre que Pausanias en donne la liste. Les derniers furent Aechinis, son fils Aristocrate lapidé pour avoir violé une prêtresse d'Artémis Hymnia; son fils Hicétas et le fils de celui-ci, Aristocrate Il, qui décida la ruine des Messéniens en les abandonnant à la bataille du Grand Fossé et fut lapidé pour cette trahison. Ce fut la fin de la prépondérance d'Orchomène; mais, sans régner sur l'Arcadie, ses rois s'y perpétuèrent plus longtemps que dans les autres cités helléniques, jusqu'à la guerre du Péloponnèse où Pisistrate fut mis à mort par l'aristocratie. La vieille cité avait envoyé 120 soldats aux Thermopyles, 600 à Platées. Elle fut prise en 448 par les Athéniens. La fondation de Mégalopolis dépeupla les bourgades de Theisoa, Methydrium et Teuthis qui lui obéissaient. Elle continua pourtant de guerroyer avec sa voisine Mantinée. Sa citadelle fut plusieurs fois occupée par les Macédoniens dans les guerres des IIIe et IIe siècles, par Cassandre (313), par Antigone Doson. Pausanias trouva la vieille ville du haut abandonnée, ses murailles et l'agora en ruines; une petite ville végétait au pied. L'abandon de la ville haute doit remonter au VIe ou Ve siècle av. J.-C. La ville basse possédait des temples d'Aphrodite et de Poseidôn, une statue en bois d'Artémis dans un cèdre. On en voit les ruines au village moderne de Kalpaki. Orchomène des Minyens. Cette cité est une des plus célèbres villes de la Grèce, centre du peuple légendaire des Minyens. Elle se trouvait au bord Nord-Ouest du lac Copaïs, sur une colline triangulaire contournée au Sud et à l'Est par le Céphise, au-dessus du village actuel de Skriou; sur le versant Nord jaillissait la source Akidulia formant le Mélas, qui arrosait une plaine très fertile, entre la colline et le lac. A l'extrémité Ouest de la colline, celle-ci se termine à angle aigu par un roc escarpé, séparé du mont Acontion par un ravin; sur ce rocher de 36 m de diamètre, on voit encore les ruines du château qui formait la citadelle d'Orchomène, à laquelle on accédait par un escalier de 92 marches taillé dans le roc. A partir de ce point, la colline s'élargit graduellement vers l'Est, et les murailles de la ville qui en longent les crêtes, après n'être d'abord distantes que de 20 à 30 m, s'écartent. La muraille Sud, dominant le Céphise, est encore visible sur 1200 m de développement; du côté Nord, la muraille est incomplète, l'escarpement naturel suffisant à empêcher l'accès. Ces remparts sont pour la plupart de date relativement récente, de l'époque où Alexandre le Grand fit relever la ville détruite par les Thébains. La ville ancienne s'étendait sur le versant oriental de la colline jusqu'au Céphise, aux lieux où sont le monastère et le village actuels de Skripon; c'est entre eux et la colline qu'est le fameux trésor de Minyas, tombe à coupole du même genre que celles de Mycènes; la partie supérieure est détruite, mais dans la chambre carrée latérale on admire l'élégant dessin du plafond dont les dalles de schiste vert ont été ciselées en relief. Schliemann a fouillé en 1880-1881 et 1886 les ruines d'Orchomène et y a découvert de très anciennes poteries monochromes. Pausanias mentionne des temples de Dionysos, des Charites (Grâces), une statue de bronze enchaînée au roc qu'on disait figurer Actéon, et près de la source du Mélas un temple d'Héraclès. On a trouvé sous le monastère le piédestal d'un trépied consacré aux Charites et dans son église de vieilles inscriptions en dialecte éolique avec emploi du digamma. Orchomène des Minyens est l'une des plus antiques cités de la Grèce, fameuse par ses richesses si l'on en croit Homère (Iliade, IX, 380). Ce fut un des centres du peuple légendaire des Minyens, qui y seraient venus de Thessalie; le premier roi d'Orchomène aurait été Andreus, qui aurait partagé le territoire avec l'Etolien Acharnas; ce dernier adopta les deux petits-fils de son frère Sisyphe, appelés Haliarte et Coronée (c.-à-d. héros éponymes de ces deux cités béotiennes). Andreus eut pour successeur son fils Etéocle, le premier propagateur du culte des Charites. A sa mort, le royaume passa aux descendants d'Halmus, fils de Sisyphe, lequel avait eu deux filles, Chrysé et Chrysogeneia. Chrysé avait engendré, des oeuvres du dieu Arès, le héros Phlegyas, qui régna sur Orchomène, donna son nom à la contrée, expliquent encore les mythes; la bande sacrilège des Phlégyens, qui se réclamait de lui, entra en conflit avec Delphes et fut exterminée par le dieu Apollon. Phlegyas, mort sans enfants, eut pour successeur son cousin Chryses, fils de Chrysogeneia et du dieu Poseidôn. Le fils de celui-ci fut l'opulent Minyas, père lui-même d'Orchomenos. C'est à cette époque antémycénienne qu'on peut faire remonter les grands travaux de canalisation et de drainage qui avaient asséché la plaine marécageuse emplie par le lac Copaïs. On cite encore un roi Erginus, lequel imposa aux Thébains un tribut dont ils furent affranchis par Héraclès, vainqueur des Orchoméniens. A la guerre de Troie, ceux-ci envoyèrent trente navires. On disait que soixante ans plus tard les Minyens furent renversés et supplantés par les immigrants Béotiens venus de Thessalie. Orchomène fit partie de la confédération béotienne et ne joua plus qu'un rôle secondaire. Il est surtout question de ses grandes fêtes des Charites avec concours de musiciens et de poètes. Gouvernée par le parti aristocratique, elle se soumit aux Perses dans les guerres médiques. Lorsque, après la guerre du Péloponnèse, la démocratie prévalut à Thèbes, Orchomène devint son ennemie. En 395, elle aida Lysandre au siège d'Haliarte; en 394, les Orchoméniens combattaient dans l'armée lacédémonienne contre les Thébains et les Athéniens à la bataille de Coronée. La paix d'Antalcidas assura son autonomie (387). Mais après la bataille de Leuctres, et malgré l'opposition d'Epaminondas qui retarda cette violence, les Thébains détruisirent Orchomène; la ville fut brûlée, les hommes égorgés, les femmes et les enfants vendus comme esclaves (368). Reconstruite durant la guerre sacrée par les Phocéens, qui avaient conquis la Béotie septentrionale, elle fut occupée par Onomarchos, de même que Coronée et Corsiae. Mais, lorsque Philippe de Macédoine eut terminé la guerre sacrée, Orchomène fut de nouveau détruite sous ses yeux (346). Toutefois, après la bataille de Chéronée, ou plutôt après la prise de Thèbes par Alexandre, elle fut restaurée. Elle disparut à l'époque romaine, désertée comme presque toutes les villes de Grèce. (A.-M. B.). | |