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Une croix, en architecture, est un petit édifice isolé, partie d'édifice ou même motif d'ornement rappelant, par sa forme, l'instrument de la passion du Christ. En dehors de la matière qui les compose ou de l'ornementation peinte et sculptée qu'elles peuvent recevoir, deux sortes de croix sont à considérer au point de vue de l'architecture : celles constituant de petits monuments isolés et celles faisant corps avec l'architecture des églises et des autres édifices religieux. Croix isolées. Croix devant l'église Saint-Jacques, à Dieppe. Les soulèvements populaires et la révolution de 1792 détruisirent en France beaucoup de croix commémoratives et de croix de marché et, parmi les premières, les croix que Philippe le Hardi avait fait élever sur la route qu'il suivit, de Paris à Saint-Denis, en portant les restes du roi saint Louis sur ses épaules, croix qui étaient de pierre de liais et posées sur de hauts emmarchements. Cependant, nombre de villes de provinces conservent encore des croix qui, sans attribution positive et peut-être provenant de cimetières abandonnés, donnent une idée de ces monuments de l'art à diverses époques. Ainsi, à Limoges, devant la porte de la chapelle Saint-Aurélien, on voit une croix du XVesiècle, haute de 5 m, faite d'un seul bloc de granit et sur laquelle sont représentés, deux par deux, les douze apôtres avec leurs attributs. Croix de carrefour, à Mauran (Haute-Garonne). Les croix de cimetière étaient, en revanche, fort nombreuses et, en dehors de celles si célèbres et si historiées qui sont plutôt des calvaires et que l'on rencontre dans beaucoup de localités de Bretagne, on en trou vait naguère dans presque tous les enclos funéraires. Une des plus anciennes et des mieux conservées, datant du XIIIe siècle, se voit dans le cimetière de Jouarre (Seine-et-Marne). Elle est faite de pierre dure et se compose d'un socle portant une colonnette mince avec base et chapiteau, et de ce dernier s'élève une croix dont les bras fleuronnés sont entourés d'un encadrement quadrilobé au centre duquel sont représentés, d'un côté, le Christ, et de l'autre, la Vierge tenant l'enfant Jésus. D'après Viollet-le-Duc, il existait à Troyes, proche de l'église Saint-Jean, une croix de confrérie des plus curieuses en ce sens qu'elle était, sauf le socle, entièrement de bronze. Cette croix, élevée en 1495 et fondue en 1793, était ornée de nombreuses figures, parmi lesquelles la Vierge, la Madeleine et saint Jean, des prophètes et des saints, Mahomet, Simon le Magicien et Satan. On trouve encore dans les campagnes de nombreuses croix de métal, généralement en fer forgé et souvent décorées d'ornements de cuivre repoussé, croix qui remontent au XVIIIe siècle et sur lesquelles sont gravées en creux les noms des personnes qui les ont fait élever. Croix faisant corps avec des édifices religieux. Croix incrustée dans la maçonnerie de la Basse-Oeuvre, à Beauvais. De très anciennes croix de pierre, à branches égales, incrustées dans la maçonnerie sur laquelle elles font saillie, se voient encore dans le pignon de l'église de la Basse-Oeuvre, à Beauvais, dans le pignon de l'église du prieuré de Montmille, près de Beauvais, et à la cathédrale de Paris sur le dais qui protège la Vierge assise du tympan de la porte Sainte-Anne. Depuis ce temps reculé et encore de nos jours, on a fréquemment sculpté des croix, et le plus souvent des croix grecques, aux quatre branches égales, sur les pignons ou le long des murs des édifices religieux, de même que, à l'intérieur des églises ou des chapelles, on a peint ou doré des croix en signe ou en souvenir de consécration, croix qui ont affecté les formes les plus diverses. C'est surtout depuis le XIe siècle et dans le centre de la France (Berry, Nivernais et Auvergne) que des croix, pleines ou ajourées, assez souvent à branches égales, mais rectilignes, perpendiculaires ou obliques ou curvilignes, furent sculptées comme couronnement des pignons des églises; et nous figurons l'une des croix des pignons du transept de l'église Saint-Urbain de Troyes, croix taillée et sculptée dans la pierre dure, dont les morceaux sont reliés par des crampons de cuivre scellés au plomb et dont deux tètes saillantes d'évêques, ajoutant du poids à la branche médiane de la croix, contribuent à la solidité et à la résistance de l'ensemble. Mais bien plus nombreuses et élevées sans interruption, depuis le Moyen âge jusqu'à nos jours, sont les croix de fer forgé placées au sommet des clochers ou des flèches de pierre, de bois ou de métal, terminant et couronnant les tours des églises. Ces croix, la plupart d'un riche dessin, d'assez grande dimension, surmontées d'une boule ou d'un dragon au-dessus desquels tournent un coq ou une girouette, et parfois dorées, sont des plus curieuses à étudier au point de vue de la construction métallique et aussi de la façon toute idéale et aérienne dont elles prolongent la pointe de ces aiguilles. On distingue encore, au sujet du plan des églises, celles dont le plan imite la croix grecque et celles dont le plan imite la croix latine. Dans les premières, qui appartiennent pour la plus grande partie à la religion grecque et au style byzantin, le transept et la nef se coupent de façon à former en plan une croix à branches égales, tandis que, dans les secondes, qui appartiennent pour la plus grande partie à la religion catholique ou à la religion protestante et aux divers styles de l'Antiquité ou du Moyen âge, la croisée du transept ou de la nef est placée aux deux tiers environ de la longueur de l'axe de l'église. Un certain nombre des églises chrétiennes, construites pendant le Moyen âge dans l'Europe occidentale, présentent même cette particularité que, soit imitation voulue de la position du Christ sur la croix, soit défaut de plantation de certaines parties de l'édifice, par suite de reconstructions partielles successives, le choeur, que l'on considère comme la tête de l'église, a son axe infléchi sur le croisillon de gauche du transept. (Ch. Lucas). |
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