| Conques est une commune du département de l'Aveyron, au Nord-Ouest de Rodez, sur les flancs d'une colline escarpée au bas de laquelle coule d'un côté un torrent, la Louche, et de l'autre une petite rivière, le Dourdou; 302 habitants. Conques doit toute sa célébrité à l'ancienne abbaye bénédictine de Sainte-Foy et à son trésor, un des plus riches qui nous aient été conservés. D'après un diplôme de Louis le Pieux, de 819, un ermite du nom de Dadon aurait relevé dans ce lieu un petit oratoire détruit par les Sarrasins et fondé le monastère. Louis le Pieux visita le nouveau couvent, y établit, avant 801, la règle de Saint-Benoît et lui fit don de plusieurs églises. Pépin d'Aquitaine et Charles le Chauve, et non pas Charlemagne, comme on l'a souvent dit, confirmèrent ses privilèges et lui abandonnèrent de nouveaux revenus. Pépin d'Aquitaine, en 838, lui fit don de Figeac, mais en stipulant que ses moines y bâtiraient un monastère, auquel il donna d'avance le nom de Nouvelle-Conques. Le monastère fut construit et des moines de Conques vinrent s'y établir. Des rivalités ne tardèrent pas à éclater entre les deux abbayes. Figeac aurait peut-être même fini, grâce à sa situation dans un pays plus hospitalier, par ruiner Conques, si le culte de sainte Foy n'avait donné à cette dernière plus de notoriété et une bien plus grande importance. L'abbaye de Conques avait été d'abord placée sous l'invocation du Christ, mais un de ses moines, Arinisdus, y ayant transporté, un peu avant 883, le corps de sainte Foy, qu'il avait volé à Agen, la dévotion à la jeune vierge prit une si rapide extension que le premier vocable fut bientôt abandonné. Dans certaines circonstances solennelles, les reliques de la sainte étaient promenées, souvent fort loin, pour être offertes à la vénération des fidèles. Elles furent ainsi conduites à Molompise, dans une procession mémorable dont le livre des miracles de sainte Foy fait connaître les détails. « L'empressement des populations à les posséder fut tel que les moines, dans la crainte de se voir enlever ce trésor, durent s'armer d'une bulle [Urbain II, 4 mai 1099, Jalfé, Regesta, 2e éd., n° 5802] pour résister aux injonctions quelquefois violentes qui leur étaient faites de les porter hors du monastère. » Les dons affluèrent de toutes parts et l'abbaye se trouva bientôt jouir de revenus considérables. On voit par son Cartulaire, dont la première partie a dû être faite au commencement du XIIe siècle, qu'elle avait des possessions, non seulement dans les environs de Conques et le Rouergue, mais dans l'Auvergne, le Limousin, la Provence, le Dauphiné, la Bourgogne, la Champagne, l'Alsace et jusqu'en Espagne et en Angleterre (G. Desjardins, Cartulaire, introd., pp. XLI-CXX). Elle perdit au cours du Moyen âge ses revenus les plus éloignés et la mense abbatiale ne cessa de s'accroître au détriment de la mense conventuelle. Au XVIe siècle, le pape Paul III sécularisa l'abbaye de Conques, par sa bulle du 1er septembre 1537, et y établit un chapitre qui subsista jusqu'à la Révolution. L'abbé de Conques siégeait aux Etats de Rouergue immédiatement après les évêques de Rodez et de Vabres. Tout ce qui reste des anciennes chartes de l'abbaye est aujourd'hui conservé aux archives de l'Aveyron. Son Cartulaire toutefois appartient à la Société des lettres. Les prémontrés, auxquels Mgr Bourret, évêque de Rodez, confia, en juin 1873 , l'administration de la paroisse de Conques, ont retrouvé dans des maisons particulières un certain nombre d'actes qu'ils ont recueillis. -- Conques et l'abbatiale Sainte-Foy. L'église de Conques est l'une des plus curieuses et des plus belles qui nous soient restées de la période romane. Elle est avec Saint-Sernin de Toulouse le meilleur type de l'école du Languedoc ou d'Aquitaine. Elle fut, croit-on, commencée vers 1035 par l'abbé Odobric et terminée, ou à peu près, à la fin du XIe siècle, par l'abbé Bégon (1087-1107). Celui-ci en effet put faire construire le cloître, détruit au commencement de ce siècle, qui était placé au Sud de l'église. On y voit son épitaphe encastrée encore dans la partie extérieure du mur du bas côté méridional. L'église n'a subi pendant le Moyen âge aucun remaniement important. Prosper Mérimée, alors inspecteur des monuments historiques, la visita, en 1838, et fit le premier à attirer l'attention sur elle. Il obtint les crédits nécessaires pour la faire vitrer et recouvrir, et pour faire déblayer le côté Nord et le chevet que les eaux pluviales et l'humidité dégradaient. C'est dans ce déblaiement qu'on a trouvé les sarcophages, peu intéressants d'ailleurs, qui sont aujourd'hui rangés le long du mur. L'église de Conques marque un perfectionnement très heureux sur les églises de L'école d'Auvergne dont elle dérive. Elle se compose d'une nef centrale avec bas-côtés et transept. La nef et le transept sont voûtés en berceau, les bas-côtés en voûte d'arête et ces voûtes sont partout renforcées par d'épais doubleaux. Au-dessus des bas-côtés est une galerie dont la voûte en demi-berceau vient contrebouter celle de la grande nef. Elle est moins haute au chevet que dans le reste de l'église et on a pu y percer au-dessus trois fenêtres pour éclairer le choeur. Trois chapelles s'ouvrent sur le déambulatoire et deux sur chaque bras du transept. La façade est flanquée de deux tours carrées. Le sommet de ces deux tours fut, ainsi que le toit de l'église, détruit, en 1561, par un incendie. Elles ne s'élevèrent plus dès lors qu'à la hauteur de la nef. On les a restaurées à la fin du XIXe siècle et terminées par deux flèches en pierre. A la croisée du transept est une troisième tour avec deux rangs de fenêtres; les fenêtres du dernier rang sont du XIVe siècle. Des vitraux dessinés par Pierre Soulages décorent cette église depuis le milieu des années 1990. - Portail de l'église de Conques. A l'origine, le même toit ne couvrait pas à la fois les bas-côtés et la nef; cette disposition ne fut établie qu'après l'incendie dont nous venons de parler. Le tympan du portail d'entrée est décoré d'un immense bas-relief qui représente le Jugement dernier. C'est, de l'avis de Darcel, la plus belle oeuvre de sculpture romane qui nous soit parvenue. Un dicton populaire le cite, avec le clocher de Rodez et l'église d'Albi, parmi les merveilles du monde. La profonde voussure qui l'abrite l'a heureusement protégé contre les injures du temps et il n'a subi aucune mutilation. Dans la sacristie sont des peintures murales du XVe siècle en mauvais état, accompagnées d'une légende de sainte Foy en vers romans. Le Trésor de Conques Aucune église de France ne possède un trésor qui lui soit comparable tant par le nombre que par l'importance des pièces. Signalé comme l'église par Mérimée, en 1838, il n'a été sérieusement étudié que par A. Darcel qui en a fait, en 1864, l'objet d'une monographie détaillée. Le curé de la paroisse lui cacha malheureusement deux pièces - le reliquaire de Pépin ou reliquaire de la Circoncision et une châsse du XIVe siècle, en argent, dite châsse de sainte Foy. Les pièces du trésor de sainte Foy ont sont conservées dans le musée créé en 1911 dans l'ancien réfectoire des moines. Nous signalerons la statue de sainte Foy (IXe s.), les reliquaires dits de Charlemagne, de Pépin d'Aquitaine (IXe s.), etc. | Avant d'en finir avec l'église, nous devons signaler le très curieux chapiteau dont on a fait le bénitier et l'admirable grille en fer forgé qui entoure le choeur. Ce chef-d'eeuvre de ferronnerie est de la fin du XIIe ou du commencement du XIIIe siècle. Darcel en a publié des dessins dans les Annales archéologiques de Didron, t. XI ; l'un d'eux a été reproduit par Viollet-le-Duc dans son Dictionnaire d'architecture, t. VI, p. 63. Les colonnes du choeur étaient autrefois reliées, par un mur épais. C'est en démolissant ce mur qu'on a trouvé, le 21 avril 1875, derrière l'autel qui y était adossé, la châsse renfermant les principales reliques de sainte Foy. Les reliquaires, qui composent le trésor, étaient exposés autrefois dans une grande armoire placée au-dessus de cet autel. Conques possède encore une vieille halle carrée dont le toit repose sur quatre piliers quadrangulaires. Des étalons de mesures à grains construits en pierre y sont engagés dans le mur d'appui. Sur un rocher isolé qui se dresse au bas du bourg, s'élève une ancienne chapelle dédiée autrefois à saint Roch. Elle a été réparée et mise sous le vocable de Notre-Dame de la Salette. On voit sur le flanc de la montagne, placée sur la rive gauche du Dourdou qu'on traverse sur un vieux pont, en face de Conques, une fontaine que sainte Foy, dit la légende, aurait miraculeusement fait jaillir, au IXe, siècle, lors de la translation de ses reliques. On y a construit une petite chapelle. (C. Couderc). | |