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Cherson
(auj. Kherson, en Ukraine) est une ancienne ville byzantine
de la côte de Crimée ,
située à peu de distance de la moderne Sébastopol,
là où s'élève aujourd'hui le monastère
de Saint-Georges. Quand au IVe siècle
les invasions des Goths et des Huns ruinèrent
toutes les cités romaines
de la Crimée, seule la colonie de Chersonesos, qui avait pris à
la fin du IIIe siècle le nom de
Cherson, échappa au désastre : et grâce à ses
fortes murailles, réparées et augmentées par le soin
des empereurs Zénon et Justinien,
elle forma avec son territoire, pendant tout le Moyen âge ,
une enclave byzantine au milieu du pays scythe et slave. Héritière
des privilèges conférés par Dioclétien
et Constantin à Chersonesos, Cherson
garda jusqu'au IXe siècle une grande
indépendance à l'égard de l'empire : véritable
ville libre, elle était administrée par un prince (proteuwon),
assisté d'un conseil de sénateurs. En 833, l'empereur Théophile
envoya un stratège à Cherson, et désormais la ville
forma avec son territoire un thème byzantin. Toutefois, les Chersonésiens
demeurèrent plutôt les vassaux que les sujets de l'empire.
Vedette avancée de Byzance
du côté du Nord, Cherson rendait à l'empire de nombreux
services; station principale de la flotte impériale dans le Pont,
elle était le point de départ de toutes les expéditions,
de toutes les négociations, de toutes les relations commerciales
qui mettaient Byzance en contact avec les Petchenègues, les Khazares
( Les Turkmènes),
les Russes .
C'est là que les ambassadeurs faisaient halte pour prendre langue
avant de s'engager sur la terre dite barbare, là que Cyrille
et Méthode s'arrêtaient avant d'aller évangéliser
les Khazares, là que se centralisait le commerce de Byzance avec
le Nord, auquel les Petchenègues servaient d'intermédiaire.
Les vaisseaux de Cherson parcouraient toute la mer Noire; sa prospérité
et sa richesse étaient considérables.
Cependant, en 987, la ville fut livrée
par trahison au prince russe Vladimir, qui
voulut y recevoir le baptême; mais, devenu chrétien ,
et ayant épousé la princesse Anne, soeur de Basile
II, il rendit la cité aux Byzantins, après l'avoir, au
préalable, dépouillée de ses reliques
et de ses vases sacrés, qu'il emporta
à Kiev. Sous la dynastie des Comnène,
Cherson demeura byzantine, et passa au XIIIe
siècle sous l'autorité des empereurs de Trébizonde;
mais dès ce moment sa prospérité commerciale diminuait.
La splendeur de la colonie génoise de Caffa
fut pour Cherson le coup de grâce. Au XVIe
siècle, des ruines considérables d'aqueducs,
de murailles, de palais et de tours attestaient son ancienne grandeur :
mais elle était vide d'habitants. La conquête de la Crimée
par les Russes dispersa ces ruines mêmes : ce qui restait de Cherson
servit à bâtir Sébastopol.
Cherson fut un des ateliers monétaires
de l'empire d'Orient
: treize empereurs, depuis Justinien Ier
jusqu'à Basile II, y ont fait frapper
monnaie. Elle était siège d'un archevêché et
possédait le privilège d'autocéphalie. Enfin Cherson
servait de lieu d'exil pour les personnages marquants de l'empire. Le pape
Martin Ier en 654, le césar Nicéphore
en 776 y furent déportés. L'empereur Justinien
II, détrôné en 693, y fut exilé; et quand
il fut remonté sur le trône, il se vengea cruellement de la
cité criméenne, qui avait refusé de l'aider à
reconquérir sa couronne. (Ch. Diehl). |
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