| Brooklyn est un des cinq boroughs (circonscriptions) qui composent depuis 1898 la ville de New York. Auparavant, c'était une ville distincte. Situé à l'extrémité occidentale de Long Island et séparée de Manhattan par le bras de mer très étroit appelé East River, Brooklyn a été fondé par des colons hollandais. Cette fondation remonte aux années 1620 : une bande de Wallons s'établit sur la rive orientale d'East River au temps où le Hollandais Peter Minuit achetait, pour 24 dollars, aux Indiens l'île de Manhattan sur l'autre rive. La rivière de l'Est était alors guéable, en face de l'île du Gouverneur, et les Wallons la faisaient passer chaque jour à leurs troupeaux qu'ils menaient paître sur cette île. Plus tard le canal a été creusé et les steamers les plus grands y trouvèrent aisément accès. L'établissement eut pendant cent soixante-quinze ans les destinées les plus modestes. En 1800 il n'avait encore que 3000 habitants, et ceux-ci étaient obligés, n'ayant pas d'église, de venir à New-York pour assister au service divin. En 1870 Brooklyn avait 396,000 habitants, en 1880 plus de 660,000, et, au moment de sa réunion avec le reste de New York, 1 000 000. Au point de vue du nombre des habitants, c'était alors la troisième ville des Etats-unis, n'étant distancée que par New York (c'est-à-dire, à cette époque Manhattan et le Bronx) et Philadelphie. Au cours du XXe siècle, la superficie occupée par Brooklyn a plus que doublé et la population, qui a atteint son maximum dans les années 1950 (2,74 millions d'habitants) est aujourd'hui les 2,5 millions d'habitants (2009). Aujourd'hui l'immense ville étend ses quais et ses docks sur plus de 12 km du rivage de Long Island, en face du port et de l'île de Manhattan, et s'étend à l'intérieur sur une largeur variant de 4 à 6 km. L'humble bac de Fulton Street, qui suffisait aux besoins du village il y a deux siècles, avait fait place au XIXe siècle à une douzaine de bacs à vapeur qui transportaient chaque jour d'une rive à l'autre un demi-million de personnes au taux d'un demi-penny, cinq centimes. Mais déjà ces immenses bacs ne suffisaient plus dans les années 1860 à la circulation entre les deux villes, malgré la brièveté du parcours (la rivière de l'Est est trois fois moins large que le fleuve Hudson, qui borde Manhattan du côté de l'Ouest; elle atteint encore cependant trois quarts de mille, plus d'un kilomètre). C'est pour suppléer à cette insuffisance, surtout dans les temps de brouillard et de gelée, que fut construit le pont de Brooklyn. Ce pont, une des merveilles de l'art de l'ingénieur, a été commencé en 1870 et inauguré en mai 1883. Projeté par John A. Roebling, il a été construit par le fils de celui-ci, Washington A. Roebling. Les énormes piliers, qui tiennent suspendu à 40 m au-dessus du niveau de la rivière de l'Est le tablier du pont, s'élèvent à une hauteur de 80 m, et sont édifiés sur des caissons que l'on a enfoncés dans le lit rocheux de la rivière à une profondeur moyenne de 20 m au-dessous de la surface. La distance entre les piliers, et par conséquent la longueur du tablier du pont, est d'environ un demi-kilomètre. Sa largeur est de 25 m et comprend des chaussées pour les voitures et des chemins pour les piétons. Le pont, tout fer et acier, est supporté par quatre câbles d'acier galvanisé de seize pouces, tendus sur les tours des piliers. L'approche du pont du côté de Manhattan commence dans Park Row, et du côté de Brooklyn à l'extrémité d'Old Fulton Street. La longueur totale du pont et de ses approches est de près de 2 km Les câbles de suspension sont composés, dit-on, de 23,000 km de fil d'acier, pesant 4000 tonnes. - Le pont de Brooklyn dans les années 1920; au fond : Manhattan. L'énorme extension prise dans la seconde moitié du XIXe siècle par la ville de Brooklyn est un résultat direct de l'impossibilité qu'éprouve celle de New-York de s'étendre indéfiniment vers le Nord, étant resserrée dans l'île étroite de Manhattan entre l'Hudson et la rivière de l'Est. Brooklyn n'a reçu qu'en 1834 une charte d'incorporation en City, qui implique l'organisation municipale sous l'autorité d'un maire élu. Par suite d'un acte de la législature de New-York, remontant à quelques années, la city ne comprend plus seulement Brooklyn, mais aussi toutes les communes de la partie occidentale de Long Island, c.-à-d. Wallabout, à l'Est de la baie du même nom, Waalboght (baie des Wallons) au Nord, Williamsburg au Nord-Est, South Brooklyn au Sud, Bedford et New Brooklyn à l'Est, dans l'intérieur des terres. C'est à South Brooklyn, sur le rivage qui fait face à l'île du Gouverneur et à la baie de New-York, au Sud et en aval du pont de Brooklyn, que se trouvaient autrefois les immenses bassins (Atlantic, Erié, Brooklyn), où les grands paquebots transatlantiques venaient charger et décharger leurs marchandises. Là se succèdaient en longue file les jetées, docks, bassins de carénage et de réparation, chantiers de construction, entrepôts, où s'accumulaient pour des fortunes des denrées de toute nature, charbon, fer, bois, grains, sucres, etc., et où se manipulait la plus grande partie du commerce extérieur de New-York, depuis le pont au Nord, jusqu'à Gowanus Bay au Sud, à l'extrémité de South Brooklyn. La principale rue de Brooklyn est Fulton Street, perpendiculaire à l'East river et qui s'éloigne de la rive, en continuant le pont, vers l'intérieur de Long Island, jusqu'à 7 ou 8 km, coupant à angles droits presque toutes les autres grandes voies, orientées dans une direction plus ou moins parallèle à la rivière. On a dit que New-York allait surtout à Brooklyn pour y dormir et s'y faire enterrer. On trouve, en tous cas, dans les faubourgs pittoresques de cette dernière ville, plusieurs cimetières dont la beauté est célèbre, notamment l'Evergreen, à l'extrémité de New-Brooklyn, et le plus beau de tous, the Greenwood Cemetery, véritable parc de 160 hectares sur les hauteurs de Gowanus, à South Brooklyn, près du quartier élégant et luxueux. Brooklyn est d'autre part une ville remarquablement pieuse, si l'on en juge par le nombre extraordinaire (près de 300) de ses édifices sacrés, qui lui a valu le surnom de « cité des églises ». Les monuments les plus intéressants de Brooklyn, au point de vue de l'architecture, des souvenirs populaires ou historiques qu'ils rappellent, ou de leur destination, sont les suivants; l'ancien City-Hall (hôtel de ville), édifice de marbre blanc, construit en 1846; l'ancien Tribunal du comté (1862) ; le palais des archives, de la fin du XIXe siècle; la modeste église «-Plymouth Church » dont le révérend Henri Ward Beecher, un des plus célèbres ministres et prédicateurs des Etats-Unis, mort d'une attaque d'apoplexie en mars 1887, fut pendant près de quarante ans le pasteur vénéré. La rue Clinton, qui conduit de Fulton Street vers le Sud aux hauteurs de Brooklyn (Brooklyn Heights) est la principale voie du quartier riche. Elle est bordée d'arbres, et les splendides résidences y alternent avec les églises; les plus remarquables parmi ces dernières sont la « Dutch Reformed Church » et la « Trinity Episcopal Church ». Citons encore dans le même quartier l'église des Pèlerins, l'église épiscopale de Sainte-Anne, le Tabernacle, dont le pasteur est le révérend de Witt Talmage. Une des plus belles promenades de Brooklyn est le « Prospect Park », qui couvre une surface de près d'un mille carré, au Sud-Est de la cité. Du point le plus élevé, Lookout Hill, la vue s'étend sur Long Island, Brooklyn, Manhattan, le New Jersey, les deux rivières, le port, les rivages de Staten Island, les collines Nevesink et l'Océan. Une splendide avenue, «-the Coney Island Boulevard », appelée aussi « Ocean Parkway », large de 60 m et ornée de six rangées d'arbres, conduit en droite ligne de Prospect Park à la station balnéaire de Coney Island, située à 5 km au Sud du Brooklyn historique, sur l'Atlantique, où se rendent chaque dimanche de l'été, par dizaine de milliers, les New-Yorkais et les Brooklynites. (A. Moireau). | |