| L'idée de masse, en mécanique, est équivalente à celle de quantité de matière. Cela peut s'exprimer de deux manières différentes, selon que l'on considère la masse d'un corps en fonction des caractéristiques de son mouvement, ou en fonction de sa capacité à attirer et à être attirée gravitationnellement par d'autres corps. Selon la première approche, la masse sera une mesure de la résistance au changement d'état de mouvement d'un corps, autrement dit de son inertie. On pourra alors dire que deux points matériels, deux corps de dimensions négligeables, ont même masse s'ils se comportent de la même manière sous l'action de forces égales; dans le cas contraire, leurs masses sont différentes. Les masses des points matériels sont en raison inverse des accélérations éprouvées par ces points sous l'action d'une même force; réciproquement, diverses forces agissant successivement sur une même masse lui impriment des accélérations proportionnelles à leur propre grandeur. En choisissant convenablement les unités, on peut donc dire que la masse d'un point matériel est égale au quotient d'une force arbitraire par l'accélération que cette force est susceptible de lui imprimer. La masse d'un corps quelconque est la somme des masses élémentaires qui le composent. Suivant que les diverses parties du corps renferment ou non la même masse par unité de volume, le corps est homogène ou hétérogène. Dans la seconde approche, la masse d'un corps caractérise la part qu'un corps joue dans l'interaction de gravitation. Selon les lois de l'attraction newtonnienne (Newton), les corps s'attirent proportionnellement à leurs masses et en raison inverse du carré de leurs distances. On peut dès lors définir la masse d'un corps comme le nombre de points matériels identiques qui le composent. Si des corps ont des masses représentées par les nombres 1, 2, 3, et si l'on veut leur imprimer la même accélération, il faudra leur appliquer des forces proportionnelles aux nombres 1, 2, 3. Si l'on pouvait placer un corps successivement à la même distance du Soleil et de la Terre, il serait attiré vers ces deux astres par des forces proportionnelles à leurs masses. Le corps tomberait pendant la première seconde de sa chute, de 330 m vers le Soleil, et de 1 m vers la Terre; on en peut conclure que la masse du soleil est 330 000 fois plus grande que celle de la Terre. Comme il n'est pas nécessaire de placer le mobile à la même distance du Soleil et de la Terre, on peut, d'après les lois de l'attraction, remarquer que la chute est en raison inverse du carré de la distance. Pour déterminer les masses des différentes planètes, il faudrait mesurer les distances dont elles tombent en une seconde vers le soleil, puis exprimer que ces distances sont proportionnelles aux masses des planètes, et en raison diverse des carrés de leurs distances au soleil, ou mieux s'appuyer sur les mouvements de leurs satellites quand elles en ont. Ces deux manières d'aborder la notion de masse, longtemps jugées distinctes, faisaient dire aux physiciens qu'ils avaient affaire à deux grandeurs différentes, la masse inertielle, dans le premier cas, et la masse gravitationnelle dans le second. Les deux étant proportionnelles (dans un système d'unités cohérent la constante par laquelle on doit multiplier la valeur de l'une pour calculer la'utre étant égale à 1). Einstein a jugé qu'il s"agissait moins d'un coïncidence heureuse que d'une caractéristique essentielle de la nature. Le physicien a ainsi posé en principe, l'énoncé qui s'exprime déjà dans la théorie newtonienne, et selon lequel masse inertielle et masse gravitationnelle sont une seule et même chose (principe d'équivalence), il qu'il convient donc d'identifier (localement) les forces de gravitation et les forces d'inertie. Cette idée fonde la théorie de la gravitation d'Einstein, dite théorie de la relativité générale, pour laquelle un corps soumis à une "force de gravitation" doit se comprendre comme un corps en "mouvement inertiel" dans un espace courbe. (L. Lecornu). | |