|
. |
|
L'âge d'or de la littérature espagnole II - Le XVIIe siècle |
Aperçu | | L'âge d'or : XVIe s.; XVIIe s. | Le XVIIIe s. | Le XIXe s. |
Au XVIIe siècle, l'activité de la pensée est suspendue tout à coup : la poésie lyrique, genre qui témoigne le mieux d'une originalité forte, semble frappée de mort; ce ne sont plus que batteries de mots, flots de rimes sonores, le vide, le néant. Poésie. Parmi les cultos (esprits cultivés) de l'école de Gongora, il faut placer le comte de Villamarina et Paravicino, prédicateur de la cour, qui introduisit le cultisme dans l'éloquence sacrée. Poésie Lyrique. Poésie didactique. Quelques épîtres des frères Lupercio et Bartolomé Argensola contiennent des passages qui peuvent être classés dans ce genre. Bartholomé raille agréablement les chantres d'Iris en l'air, et donne d'utiles conseils sur la nécessité d'être sévère à soi-même l'emploi des mots et des pensées. Poésie dramatique. Tirso de Molina, dont le nom véritable est Gabriel Tellez, a créé un type éminemment dramatique, qui a été reproduit sur les divers théâtres de l'Europe, Don Juan, le libertin audacieux et sacrilège. Il est le héros du drame intitulé : el Burlador de Sevilla. Des légendes du peuple de Séville, et de la chronique d'Andalousie, Tirso a tiré la composition originale et forte qui, dès son apparition, frappa si vivement toutes les imaginations. Ici, la vie d'un libertin sans scrupules amène un dénouement à la fois religieux et moral. On n'a qu'une idée bien affaiblie de l'original dans le Don Juan de Molière, qui n'osa peut-être pas serrer son modèle de plus près. El Burlador de Sevilla, qui a inspiré si heureusement lord Byron et Mozart n'est pas, entre les drames de Tirso de Molina, la pièce favorite des Espagnols : ils lui préfèrent Don Gil de las Calzas verdes, que certains critiques considèrent comme le type de la comédie espagnole d'intrigue; ils font aussi grand cas d'el Vergonzoso en palacio, pièce fort différente des précédentes, et, à certains égards, supérieure à toutes deux. Moreto, mort en 1669, surpasse Lope de Vega et Calderon dans l'art de conduire un sujet et de développer un caractère, et se montre encore plus remarquable par la délicatesse et la finesse ingénieuse de sa touche, que nous comparerions à celle de Marivaux et d'A. de Musset. II a créé un genre particulier de comédies, dites de figuron, ce qui signifie que le principal personnage de la pièce y joue un rôle ridicule. De ce nombre est la Tia y la Sobrina, el Lindo don Diego, titre qui est devenu un proverbe en Espagne : c'est l'amusante peinture d'un fat, qui finit par épouser une soubrette rusée qu'il prend, pour une riche comtesse. Mais le chef-d'oeuvre de Moreto, une des perles de la scène espagnole, c'est la charmante comédie intitulée : Dédain pour dédain, d'où Molière a tiré sa Princesse d'Elide. Après Moreto, qu'il est loin d'égaler par la composition et par le style, vient don Francisco de Rojas, l'auteur de Garcia del Castañar, drame du genre Calderon, qui conserve sa popularité encore aujourd'hui. Rojas a souvent été imité en France : Scarron l'a presque traduit dans son Jodelet. En empruntant à l'Espagne la Verdad sospechosa (la Vérité suspecte), dont il fit le Menteur, P. Corneille attribuait à Lope de Vega cette oeuvre qu'il appelle la merveille du théâtre; elle appartient à un écrivain trop peu connu en France, à don Juan Ruiz de Alarcon. Né au Mexique au commencement du XVIIe siècle, il passa en Europe vers 1621. Parmi les drames qu'il donna sur le théâtre de Madrid, trois s'élèvent bien au-dessus des autres : la Verdad sospechosa, puis le Tisserand de Ségovie, et Comment on se fait des amis. Alarcon estimait beaucoup son Examen de Maridos (les Maris passés en revue); on y trouve des scènes heureuses et des parties de dialogue charmantes. Alarcon, esprit élevé, plein de mépris pour les masses ignorantes, a pris l'art dramatique plus au sérieux qu'on ne l'a jamais fait en Espagne, et par là il se rapproche particulièrement de Moreto. Le théâtre espagnol n'a guère peint que des Espagnols : de là son extrême valeur au point de vue historique. II révèle les sentiments les plus intimes de la culture qui l'a produit. Il présente aussi d'éminentes qualités : l'intérêt, l'invention dramatique, la passion, la noblesse. Le drame espagnol vise toujours à la grandeur, et l'exagère quelquefois; mais il n'idéalise jamais le crime; s'il outre-passe le naturel, il ne dore pas ce qui est immonde. Enfin l'art du dialogue y est porté au plus haut degré : Guilhem de Castro, Lope de Vega, Calderon, ont enseigné le secret de cet art aux autres littératures; Corneille surtout leur en est redevable. Prose. Historiens. Francisco Manuel de Mello (1611-1666) est l'auteur d'une Histoire du soulèvement de la Catalogne sous Philippe IV. L'Histoire du soulèvement de la Catalogne est une oeuvre incomplète : Mello ne raconte que la première année de la guerre qui dura 13 ans. Son travail, qui lui fut commandé par Philippe IV et son ministre Olivarès, est remarquable au point de vue littéraire. La manière de Mello est la complète alliance des formes grecques et latines avec la tradition littéraire espagnole. Après les deux historiens qui précédent, nous placerons Antonio de Solis, qui publia, en 1684, une Histoire de la conquête du Mexique. Au XVIIIe siècle, l'Espagne comparait Solis à Florus et à Tacite; les étrangers, moins sensibles aux beautés propres du style, voient surtout en lui un historien artiste, une sorte de Quinte-Curce, qui, moins soucieux d'instruire que de plaire, subordonne la vérité aux ornements du discours, et semble moins écrire une histoire qu'une nouvelle. Les Espagnols modernes reconnaissent ces défauts de Solis, mais ils se montrent extrêmement sensibles à la parfaite élégance de son style, qui n'a nullement vieilli tant l'auteur a bien saisi le vrai caractère de la langue castillane. D'autres historiens sont encore très estimables, bien que loin du premier rang; tel est don Carlos Coloma, marquis del Espinar, qui fit les guerres de Flandre, dont il publia l'histoire sous ce titre : las Guerras de los Estados bajos, etc. Avant lui, un très illustre personnage, D. Luiz de Avilay Zuñiga, avait écrit des Mémoires sur les campagnes de Charles-Quint en Allemagne. Pedro Mexia, historiographe du même empereur, composa l'Histoire impériale, résumé de la biographie de tous les empereurs et rois des Romains depuis J. César jusqu'à Maximilien d'Autriche. Sandoval se borna à la Vie de Charles-Quint; Cabrera, à la Biographie de Philippe Il. (E. Baret). |
. |
|
| ||||||||
|