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Littérature |
Le roman américain |
Aperçu |
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Le roman | Genres divers |
Les
préjugés des puritains de la Nouvelle-Angleterre, qui proscriraient les
oeuvres d'imagination, encore plus en prose qu'en vers, ce sont bien affaiblis
ou ont beaucoup perdu de leur influence, puisqu'en 1847 Griswold possédait
700 volumes de nouvelles,
contes
et romans écrits par des auteurs américains
: dans les années suivantes ce nombre s'est singulièrement augmenté.
Les
pionniers.
Nommons aussi : R. H. Dana, le poète, qui montre de la force et de la passion dans son émouvant Paul Felton; Kirke Paulding, le railleur systématique de l'idée de progrès, fanatique américain, d'ailleurs, bien que d'origine hollandaise, doué, malgré ses bizarreries, d'un réel talent, et nous sommes arrivés à celui qu'on a parfois surnommé le Walter Scott américain, Fenimore Cooper. Chez Fenimore Cooper, sans doute ses Indiens solennels et discoureux, parfois chevaleresques, sont-il trop des fantasmes et pas assez des êtres vivants et observés. Mais les trappeurs sont meilleurs, quoique, eux aussi, encore assez invraisemblables. On a aussi critiqué son style. Il a cependant un mérite, celui d'avoir créé un genre, et à tout prendre, car, avec ses défauts, il a de belles qualités, il en reste le maître, quel que soit le talent de ceux qui ont marché sur ses traces. En tout cas, il resterait à Fenimore Cooper, si la domination des forêts et de la Prairie lui était enlevée, l'empire de la mer. Dans Ie roman maritime il est le premier de tous les temps et de tous les pays : rien ne vaut le Corsaire rouge ou les Deux Amiraux. C'est pourtant l'aspect de son talent sous lequel l'on connaît le moins en France. Le XIXe siècle Après avoir mentionné, en passant: le trop fécond W. G. Sims, Th. Sedgwick Fay, le spirituel Kennedy, R. Mongomery Bird, au jugement de Prescott, le Cooper des Indiens du Mexique; William Ware, qui mit l'Antiquité en romans, mais avec moins de succès que Bulwer; N. Parker Willis, poète, essayiste, critique, conteur et romancier de mérite, et enfin Silvester Judd, on arrive à l'un des noms le plus populaires de la littérature américaine au XIXe siècle, à Edgar Allan Poe. Edgar
Poe.
Edgar Poe est l'auteur d'un grand roman, les Aventures d'Arthur Gordon Pym, mais son oeuvre romanesque consiste surtout en nouvelles très courtes. Parfois, comme dans l'Affaire de la rue Morgue, un fait divers lui suffit comme point de départ des plus stupéfiantes déductions; ailleurs, comme dans le Roi Peste, il se lance dans un fantastique extravagant. Il rêve, mais ses rêves sont des merveilles de logique, et la fantaisie s'y mêle si bien à la réalité qu'on ne sait plus s'il faut douter ou croire. Il faut bien dire qu'il est sujet à des bizarreries qui frôlent l'insanité et que tout est loin d'être bon dans son oeuvre. Esprit compliqué, ici très clair, là très obscur, ici sérieux, là poussant jusqu'à la farce une ironie cruelle à force de mépris pour son lecteur, il peut être exécrable, il n'est jamais médiocre. Edgar Poe est un maître écrivain, son style (sans doute magnifié par ses talentueux traducteurs) est à lui et, s'il n'est pas exempt de procédés, il les avait inventés et il en a emporté le secret. Nathaniel
Hawthorne.
La Lettre rouge, est un point culminant dans la littérature américaine du XIXe siècle et son auteur ne l'a jamais égalé. Dans la Maison aux sept pignons, il lutte de pittoresque avec Dickens. Il s'y montre un Dickens moins amusant, mais aussi, comme aurait dit Sainte-Beuve, un Dickens plus rare, bien moins empoignant, mais plus délicat. Blithedale Romance nous donne un Hawthorne tragique et puissant; Transformation est le récit étrange et captivant d'un cas mystérieux de psychologie. On peut reprocher à Hawthorne de rechercher un peu trop l'extraordinaire, d'avoir de la vie une conception mystique, d'exagérer l'infuence des pensées sur le corps, de croire à certaines fatalités morales, fort problématiques. C'est qu'il avait très profondément subi l'influence du Transcendantalisme, qu'il était rêveur autant qu'observateur et grand abstracteur de quintessence. Ses analyses sont précises, larges, profondes, mais il en abuse, il fouille les caractères jusqu'à les vider, il les dissèque jusqu'à les émietter, et la synthèse ne parvient pas toujours à les reconstituer en unité parfaite. Les
successeurs de Hawthorne.
Son fils, Julian Hawthorne, est celui qui le continue le plus directement, mais ainsi que l'on continue un homme d'un pareil talent, non sans défaillances. C'est un esprit distingué, loin du vulgaire, doué de puissance, lui aussi, mais trop renfermé, trop énigmatique pour atteindre jamais la popularité. Le roman le plus original de cette école est assurément Edwin Brothertoft, de Théodore Winthrop (1828), un oublié qui méritait de vivre. Du même auteur est Cecil Dreme qu'on disait la version américaine du Comte Kostia de Victor Cherbuliez. Winthrop a de l'imagination, de la fantaisie, une tournure d'esprit très philosophique. Il a soutenu plus de thèses qu'il n'en faudrait pour faire la fortune d'un auteur dramatique, par exemple celle du pardon dans l'adultère. Deux romanciers cependant se sont partagé la succession de Hawthorne, Henry James et William Dean Howells. Henry James (1843-1916) n'a guère écrit que de romans internationaux, qui se passent n'importe où excepté en Amérique, et dont le type est l'Américain à Paris. On peut aussi lire avec intérêt Daisy Miller et Le Tour d'écrou (The Turn of the Screw). James a étudié Balzac autant que Hawthorne, il sait corser une action, varier les épisodes, trouver des caractères, disséquer avec finesse la moindre émotion de ses personnages, en particulier de ses figures féminines (Portrait of a lady ,1881). Il abuse moins de l'analyse que Howells, mais il en tire moins bon parti. William Dean Howells, auteur de romans, drames et nouvelles où il dépeint surtout la vie de la classe moyenne américaine, est un naturaliste de bon goût et de bonne compagnie. Il sait faire un roman avec rien et rendre ce rien intéressant, comme dans A Chance acquaintance, mais il sait aussi observer avec profondeur et peindre avec force comme dans A Modern Instance ou the Rise of Silas Lapham (1886). Dans leur sillage, on trouve : T. B. Aldrich, aussi exquis en prose qu'en vers; plus libres d'allure : Fawcett et Crawford; et, parmi les femmes : Cummins et son Lamplighter; Wetherel et son Waste, Waste World; Barnett, et sa Fair Barbarian, ou encore Louisa May Alcott (1832-1888), auteure du célèbre roman Little Women (Les quatre filles du docteur March), et dont les oeuvres oeuvres qui saisissent les défis et les joies de la vie familiale et féminine au XIXe siècle. Bret Harte et
les écrivains "écrivains régionalistes".
Ni la Louisiane, ni l'Indiana n'ont eu leur Bret Harte dans George W. Cable et dans Eggleston; les récits du premier, le plus connu, semblent, malgré leur frappante originalité, gâtés par un abus des patois les plus divers. Le lire c'est entreprendre une étude de linguistique populaire. On pourrait dire la même chose de Thomas Nelson Page, Joel Chandler Harris, Sidney Lanier Oden, Mary Noailles Murfree. Mais il convient d'accorder une place spéciale à trois de ces écrivains dits "régionaux" ou "régionalistes" : Harriet Beecher Stowe, Kate Chopin et Mark Twain. Harriet
Beecher Stowe.
Kate
Chopin.
Mark
Twain.
Mais ce point de vue n'est pas partagé par tous. Et même ses détracteurs en conviennent, il y a des trouvailles d'esprit, un langage direct et suggestif, et même de l'émotion dans le Pilote du Mississippi, the Idle Excursion et çà et là dans ses autres livres, dont le plus aboutit reste les Aventures d'Huckleberry Finn (Adventures of Huckleberry Finn, 1885). Ainsi, malgré tous les défauts de son oeuvre, son influence, au final, a-t-elle été profonde : Hemingway, Faulkner et T.S. Eliot s'en réclameront. Les Humoristes.
La première moitié du XXe siècle Avec la Première Guerre mondiale, plusieurs des écrivains américains qui vont marquer la première moitié du siècle ont séjourné quelque temps en Europe. Sherwood Anderson, Henry Miller, John Dos Passos, F. Scott Fitzgerald, Hemingway, pour ne citer que les romanciers, se retrouvent ainsi à Paris, au lendemain du conflit, autour de Gertrude Stein (1874-1946), elle-même romancière américaine (Three Lives, 1909), établie en France depuis 1902. Ils formeront ce qu'elle a surnommé la génération perdue. De retour aux Etats-Unis, ils y apporteront un vent de modernité. Sherwood
Anderson et Thomas Wolfe.
• Sherwood Anderson (1876-1941) a publié en 1919 Winesburg, Ohio, un recueil de nouvelles dont le dénominateur commun est une petite ville du Midwest, dont l'auteur s'emploie à faire ressortir tous les grotesques. D'autres nouvelles seront publiées en 1921, sous le titre de Triumph of the egg. On lui doit aussi plusieurs romans : Poor white, 1920; Horses and Men, 1023; Death in the woods, 1933, etc. Il y a quelque chose d'Anderson chez Thomas Wolfe, William Faulkner, John Steinbeck, Ernest Hemingway et Erskine Caldwell.Wiliam Faulkner. Wiliam Faulkner (1897-1962) est le romancier qui a le plus directement subi la double influence d'Anderson et de Wollfe. Il a situé la plupart de ses oeuvres dans la ville imaginaire de Jefferson, comté (tout aussi fictif) de Yoknapatawpha, Mississippi (Etat où il est né). Cet étroit territoire lui suffit à susciter tout un univers, extraordinairement complexe, aux dimensions d'une mythologie. La saga comprend : Sartoris (1929); Le Bruit et la Fureur (The Sound and the Fury, 1929); Sanctuaire (Sanctuary, 1931); Absalon! Absalon! (1936); L'Invaincu (The Unvanquished, 1938); Descends, Moïse (Go Down, Moses, 1942); L'intrus (Intruder in the Dust, 1948); Requiem pour une nonne (Requiem for a Nun, 1951). D'autres oeuvres, qui ont des liens plus où moins étroits avec les précédentes peuvent encore être citées : Monnaie de singe (Soldiers' Pay, 1926), Tandis que j'agonise (As I Lay Dying, 1930), Les Palmiers sauvages (The Wild Palms, 1939), Les Larrons (The Reivers, 1962)., etc. A Jefferson, tout commence à l'époque coloniale, avec la double descendance d'un Européen, l'une avec une Blanche, l'autre avec une esclave noire, d'où deux séries d'histoires que ne cesseront de s'entremêler et de s'entrechoquer ou de se répondre en écho. Au fil des générations chacun devra expier la faute de l'ancêtre. Chemin faisant, Faulkner aborde obsessionnellemnent quelques-unes des questions qui, avec leur ancrage chrétien (puritain), sont au centre de la culture américaine : la force du destin, le salut et la damnation, le rachat, l'innocence et le péché, la sexualité, la guerre, le racisme et, la violence. La complexité de cet univers trouve son pendant dans la complexité de la narration : enchevêtrement des récits, monologues intérieurs selon la technique des « flux de conscience » (stream of consciousness), symbolisme omniprésent; cela aboutit à une oeuvre à la lecture difficile, malgré toute la cohérence et rigueur d'une structure minutieusement élaborée et que seule une étude approfondie peut révéler. Henry Miller.
C'est, qu'au-delà du parfum de scandale que les puritains veulent voir dans ces romans qui ne sont pas tout à fait des romans, il y a bien davantage. Miller, comme Faulkner est un inventeur de nouveaux territoires. Non seulement ses textes renferment des innovations stylistiques (le recours, par exemple, à la technique surréaliste de l'association libre); mais ils sont aussi passionnants par la manière dont leur auteur brosse ce qu'on a appelé sa biographie spirituelle. Surtout, ils contiennent une critique sociale sans concession. Après son retour aux Etats-Unis, en 1940, Henry Miller va continuer, de sa plume toujours aussi vivante, lyrique et colorée, à stigmatiser l'hypocrisie morale de la société américaine, notamment dans le Cauchemar climatisé (The Air-conditionned nightmare, 1945), titre, qui désigne en même temps les Etats-Unis. Entre 1949 et 1960, il renoue d'une certaine manière avec ses Tropiques dans une trilogie, La Crucificxon en rose (The Rosy crucifixion), que l'on connaît surtout par les titres de ses trois parties : Nexus (1949), Plexus (1953), Sexus (1960). On lui doit aussi des récits de voyage et des essais sur la littérature. Les explorateurs.
John
Dos Passos.
Après avoir publié quelques romans et études qui l'ont peu à peu fait connaître (notamment Trois Soldats, 1921), pacifiste et anti-militariste; et le célèbre Manhattan Transfer, 1925), il publie, au moment de la Dépression des années 1930, son oeuvre majeure, une grande trilogie, USA (42e parallèle, 1930; 1919, 1932 et La grosse galette (the big Money),1936). Paraîtront ensuite beaucoup d'autres romans, parmi lesquels Numéro Un (1943) et, le Grand Dessein (1949). Au total une quarantaine de livres, pas tous très intéressants, mais où Dos Passos a largement exprimé ses préoccupations sociales. Quelque temps séduit par l'Union soviétique, il a pourtant (comme d'autres, au moment des procès de Moscou et du pacte germano-soviétique) perdu bien vite ses illusions, et a produit une oeuvre pessimiste et désabusée. John
Steinbeck.
Dans son texte le plus abouti, les Raisins de de la colère (The Grapes of Wrath, 1939, porté au cinéma l'année suivante), Steinbeck va encore plus loin, et aborde de front les questions sociales de son temps, qui est celui de la grande Dépression, en racontant l'histoire d'une famille pauvre de l'Oklahoma en route vers la Californie où elle espère trouver une vie meilleure. Dans ses oeuvres ultérieures, Steinbeck s'éloignera de ce qu'on a appelé « l'école prolétarienne », pour suivre des voies plus philosophiques. Parmi ses romans de l'après guerre, on relève : les Naufragés de l'autocar (The Wayward Bus, 1947) et surtout A l'Est d'Eden (East of Eden, 1952). Francis
Scott Fitzgerald.
Dorothy
Parker et Edith Warthon.
Ernest
Hemingway.
Hemingway est parti chercher en Europeet en Afrique cette violence qui le fascinait. Il a participé à la Première guerre mondiale comme ambulancier et en tirera plus tard L'Adieu aux armes (A farewell to arms, 1929), sans grande invention littéraire, mais émouvant. Il avait déjà publié Le Soleil se lève aussi (Sun also rises, 1926) et quelques autres romans et nouvelles. De ses safaris africains, il tirera ensuite Les Vertes collines d'Afrique (Green hills of Africa, 1936) et les Neiges du Kilimandjaro, première nouvelle d'un recueil paru en 1937. Pendant la guerre en Espagne, il s'engage dans les brigades internationales aux côtés des Républicains, expérience qui lui inspire Pour qui sonne le glas (From whom the bells tolls, 1940), dont Hollywood s'empressera de faire un mauvais western. Finalement, la meilleure oeuvre d'Hemingway, après l'Adieu aux armes, sera un récit de pêche en haute mer, Le Vieil homme et la mer, paru en 1952. Le polar.
Dashiell Hammett imagine ainsi ce personnage louche qu'il nomme le Continental Op, et dont on fait la connaissance dans La Moisson rouge (Red Harvest, 1929) pour le retrouver ensuite dans Sang maudit (The Dain Curse, 1930), ou encore Sam Spade, protagoniste du Faucon Maltais (The Maltese Falcon, 1930). Quant à Raymond Chandler, il est le créateur de Philip Marlowe, le héros du Grand Sommeil (The Big Sleep, 1939) et qui réapparaîtra plus tard dans Adieu ma jolie (Farewell my Lovely, 1940), La Grande Fenêtre (The High Window, 1943), Fais pas ta rosière (The Little Sister, 1949), Sur un air de navaja (The Long Goodbye, 1953) et Charade pour écroulés (Play Back, 1958). D'autres auteurs illustrent le roman noir : William Burnett, avec le Petit César (Little Caesar, 1929) et Asphalt Jungle (1949); James Cain, avec le Facteur sonne toujours deux fois (The Postman Always Rings Twice, 1934) et Assurance sur la mort (Double Indemnity, 1936), Horace Mac Coy, avec Un linceul n'a pas de poches (No Pocket in a Shroud, 1937); John Latimer, avec Quadrille à la morgue (Lady in the Morgue, 1936); et aussi Cornell Woolrich, Dorothy B. Hughes, Jim Thompson, David Goodis, Charles Williams, Elmore Leonard, Chester Himes, Mickey Spillane (créateur du détective Mike Hammer), etc. A eux tous, ils auront contribué à créer un genre véritablement nouveau, dont le reste de la littérature a subi l'influence, et qui aussi a touché un très large public grâce aux nombreuses adaptations cinématographiques. L'âge d'or de
la SF.
Les principaux auteurs font souvent leur apparition dans les circuits traditionnels de l'édition avec des livres composées de textes déjà publiés dans les pulps (sous forme de romans parus en feuilletons, par exemple) ou, plus rarement, avec des oeuvres originales. Une première génération réunit les noms de Abraham Merritt (Le goufre de la Lune, 1919; La nef d'Ishtar, 1924), Catherine Moore (Shambleau, 1933), Jack Williamson (La Légion de l'espace, 1934; Plus noir que vous ne pensez, 1940), Robert Heinlein (Histoire du futur, cycle commencé en 1939; L'homme qui vendit la Lune, 1950), Alfred E. Van Vogt (A la poursuite des Slans, 1940; Le Monde des non-A, cycle commencé en 1945). Entre 1938 et 1945, se forme à New York le groupe des Futurians, composé notamment de Isaac Asimov, qui commence à cette époque son cycle Fondation (1942), James Blish, Frederik Pohl et Damon Knight. Ces auteurs, qui se situent politiquement à l'opposé de la plupart de ceux que l'on a nommés dans le paragraphe précédent, portent aussi un tout autre regard qu'eux sur la SF. Pour eux une oeuvre de science-fiction doit avoir les mêmes exigences de qualité que n'importe quelle autre oeuvre littéraire. Même après la dissolution du groupe, ils auront tous une influence importante sur l'évolution du genre. La science-fiction progressiste n'est pas restée sourde non plus à la montée des fascismes en Europe et au déclenchement de la Guerre mondiale. Des auteurs tels que Nat Schachner, dans ses nouvelles, inaugurent une approche militante. Même la Guerre aux Invisibles (1943) d'Eric Frank Russell, sous des dehors de thriller paranoïaque et sans prétention, invite à une lecture plus politique. Après la seconde guerre mondiale, la science-fiction façon première époque continuera son bonhomme de chemin, avec des textes qui n'ont pas d'autre ambition de distraire, à l'image des Rois des étoiles, d'Edmond Hamilton (1949); elle commencera aussi à se moquer gentiment d'elle-même et de ses clichés, comme le fait Fredric Brown dans L'univers en folie (1949), parodie drolatique des pulps. Mais les auteurs de ce temps ne peuvent pas ignorer qu'il y a eu la bombe atomique et les camps de la mort. Pour la plupart d'entre eux, la SF va désormais devenir un terrain propice au questionnement de notre propre humanité. Témoins, le chemin douloureux emprunté par Théodore Sturgeon (Cristal qui songe, 1950) ou l'humanisme de Ray Bradbury dans ses Chroniques martiennes (série de textes commencés en 1946) et dans Fahreneiht 451 (1953), où il stigmatisera le totalitarisme qui brûle les livres. Un même humanisme vibrant de poésie s'exprime aussi dans l'oeuvre singulière de Cordwainer Smith (Les Seigneurs de l'Instrumentalité (cycle sous forme de nouvelles et d'un roman parus à partir de 1950). Parallèlement, le monde post-atomique et la fin programmée de l'humanité hantent les écrivains. Clifford Simak avait déjà commencé envisager un futur sans humains dans Demain les chiens (série de contes commencée avec City, paru en 1944, et continuée après Hiroshima). La renaissance
de Harlem.
Mais à partir des années 1920, une nouvelle effervescence culturelle se fait jour dans le quartier noir de New York. Cette renaissance de Harlem touche tous les domaines artistiques : la musique (avec Duke Ellington, Louis Armstrong, Count Basie, Billie Holiday et d'autres, qui font les belles heures du Cotton club, le célèbre club de jazz de Harlem); la peinture avec Aaron Douglas; la photographie; etc. En littérature, on rencontre des auteurs, qui ont souvent déjà une longue oeuvre derrière eux, et qui s'inscrivent souvent dans des perspectives très dissemblables, mais qui se reconnaissent désormais des préoccupations communes : en particulier, le questionnement des origines africaines de la population noire d'Amérique (qui, pour certains, ira de pair avec un retour sur l'oralité (chants, contes, devinettes), pour d'autres, à la suite de Dunbar, par l'invention d'une langue, d'une manière de parler, qui se voudra proprement afro-américaine), et la revendication de l'égalité politique et sociale (qui préfigure la "nouvelle renaissance" des années 1960, avec le Mouvement des droits civiques, puis celui du Black Power). Parmi les initiateurs de la renaissance de Harlem, deux auteurs déjà cités, William Edwards Burghardt Du Bois et James Weldon Johnson, impriment leur marque dans le nouveau courant. Du Bois, avec des ouvrages tels que Aux Noirs (1920), Le Don du peuple noir (1924) et La Princesse noire (1928); Johnson avec Manhattan noir (Black Manhattan, 1930). Quant à la génération qui éclôt seulement dans les années 1920, elle compte des romanciers tels que Chester Himes (né en 1909), auteur de polars violents (par exemple, The Five Cornered Square), John Oliver Killens, Ann Petry, William Gardner Smith et Richard Wright (1909-1961), qui s'impose vite comme la figure de proue de cette époque. Wright qui publie, notamment, et pour s'en tenir aux textes parus avant 1950 : Oncle Tom's Children (1938); Native Son (1940) et Black Boy (1945); etc. Plusieurs romancières abordent des thèmes plus intimistes. Jessie Fauset, apporte en 1924, dans Confusion, le regard d'une femme sur la classe moyenne afro-américaine; Dorothy West (1907-1998), auteur de The Living is Easy, s'intéresse pour sa part à la classe noire la plus aisée. Zora Neale Hurston (1891-1960), quant a elle explore les traditions orales et fait revivre le folklore des plantations, avec Des mulets et des hommes (Mules and Men, 1935); dans Their Eyes Were Watching God, elle installe le thème d'un féminisme afro-américain. Nella Larsen (1891-1964), avec ses romans Quicksand (1938), puis avec Passing, paru l'année suivante, se révèle elle aussi comme un des grands auteurs américains du moment. Parmi les poètes que l'on rattache à la renaissance de Harlem, à mi-chemin entre des références aux blues et aux spirituals et une écriture plus expérimentale, on signalera : Langston Hughes (1902-1967) (The Weary Blues,1926; The Negro Mother and Other Dramatic Recitations, 1931), Claude McKay (1889-1948), également romancier (Home to Harlem, 1928), mais surtout connu pour ses poèmes (If We Must Die, 1919, Harlem Shadows (1922), Banjo (1927); Countee Cullen (1903-1946) (Color, 1925; Copper Sun et The Ballad of the Brown Girl,1927), et aussi Gwendolyn Brooks, Sterling Brown (1901-1989), Frank Marshall Davis, Owen Dodson, Robert Hayden, etc. Dans Canne (Cane, 1923), Jean Toomer mêle prose et poésie. La renaissance de Harlem a aussi eu ses critiques. Rudolph Fisher (1897-1934) dans The Walls of Jericho (1928) et George Schuyler (1895-1977), dans Plus de Noir (Black No More, 1931), se moquent du dandysme qui s'est installé dans l'intelligentsia de Harlem. Shuyler en particulier renvoie dos à dos les racistes blancs et les extrémistes noir, qui eux aussi ont basculé dans le racisme. Le roman américain depuis 1950Anticonformisme et contre-culture.L'après-Seconde Guerre mondiale est marqué par la prospérité économique, mais aussi par une forte pression au conformisme, symbolisée par l'idéologie du rêve américain et la montée du maccarthysme. De nombreux écrivains réagissent à cette ambiance par des oeuvres qui critiquent les normes sociales, le matérialisme et la vacuité morale de l'époque. J.D. Salinger se distingue avec The Catcher in the Rye (1951), un roman qui donne la voix aux désillusions de la jeunesse américaine, notamment à travers son protagoniste Holden Caulfield, figure emblématique de la révolte adolescente. Ralph Ellison publie Invisible Man (1952), un roman clé sur l'expérience de la marginalisation des Afro-Américains dans une société profondément raciste. Saul Bellow, avec The Adventures of Augie March (1953), propose un regard plus humaniste et philosophique sur la quête de soi dans l'Amérique d'après-guerre. Vers la fin de cette décennie, le mouvement Beat Generation émerge, incarnant une rébellion contre la société de consommation et une quête de liberté par des moyens non conventionnels. Parmi les figures majeures de ce mouvement on trouve Jack Kerouac (On the Road, 1957), un roman semi-autobiographique sur la liberté, le voyage et la quête de sens, ainsi qu'Allen Ginsberg et William S. Burroughs. Le mouvement des droits civiques, la guerre du Vietnam et une contre-culture radicale qui rejette les valeurs traditionnelles sont la marque de la décennie suivante. Les romanciers de cette époque explorent la fracture entre l'individu et la société, ainsi que la complexité croissante de l'identité américaine. Ken Kesey avec One Flew Over the Cuckoo's Nest (1962) critique les institutions répressives à travers une satire des systèmes de santé mentale. Thomas Pynchon se lance dans une écriture plus expérimentale avec V. (1963) et The Crying of Lot 49 (1966), initiant le roman postmoderne avec son approche de la paranoïa et de la déconstruction des récits traditionnels. C'est aussi dans ces années qu'émergent de nouveaux auteurs afro-américains comme James Baldwin (Another Country, 1962) qui aborde les tensions raciales et sexuelles dans une Amérique en pleine mutation. Toni Morrison commence à publier, avec The Bluest Eye (1970), premier d'une série de romans qui vont redéfinir la place des Noirs dans la littérature américaine; elle remportera le Prix Nobel de littérature en 1993. Des réflexions profondes sur l'identité féminine commencent aussi à voir le jour, avec le développement du féminisme. Des auteurs comme Joan Didion (Play It As It Lays, 1970) et Margaret Atwood (bien que canadienne, ses oeuvres comme The Edible Woman, 1969, résonnent profondément avec le mouvement féministe américain) et offrent des perspectives nouvelles sur les rôles de genre et la société patriarcale. Postmodernisme
et réactions au consumérisme.
Thomas Pynchon poursuit son oeuvre avec Gravity’s Rainbow (1973), une oeuvre complexe et polyphonique, parfois considérée comme le summum du roman postmoderne, mêlant histoire, science et complot. Don DeLillo, dans Ratner’s Star (1976), puis plus tard avec White Noise (1985), se distingue comme l'un des principaux auteurs postmodernes, abordant l'aliénation dans la société de consommation et le rapport des Américains aux médias et à la technologie. DeLillo publiera encore d'autres romans critiques du monde contemporain, notamment Underworld (1997), une fresque historique et philosophique qui revisite la Guerre froide à la lumière des événements majeurs du XXe siècle. Au fil du temps, ces thématiques se développent, avec une attention accrue portée à la fragmentation, à la multiplicité des perspectives et aux récits non linéaires. Les romanciers postmodernes poursuivent la déconstruction des formes narratives traditionnelles tout en étudiant les effets de la société de consommation et des médias sur l'individu. Une tendance qui s'accentue dans les années 1980, qui voient l'ascension du néolibéralisme, avec l'ère Reagan qui prône le capitalisme triomphant et l'individualisme. Bret Easton Ellis publie Less Than Zero (1985), un roman qui dépeint le nihilisme et l'aliénation de la jeunesse dorée de Los Angeles, puis American Psycho (1991), satire brutale et controversée de la société consumériste et de la culture du capitalisme. Paul Auster publie sa Trilogie New-yorkaise (Cité de verre, Revenants, et La Chambre dérobée; 1985-1986) qui entraîne le lecteur dans la recherche d'une vérité qui sans cesse se dérobe. Don DeLillo écrit White Noise (1985), une oeuvre clé de la critique du consumérisme, qui traite de l'obsession américaine pour les médias, la technologie et la mort. James Ellroy, qui revivifie le roman noir, offre de son côté une plongée dans les ténèbres de la psyché humaine et de l'histoire américaine avec des oeuvres comme Le Dalhia Noir (1987) et L.A. Condidential (1990). Pendant la même période, Toni Morrison devient une figure majeure de la littérature américaine avec Beloved (1987), un roman qui réexamine l'héritage de l'esclavage et ses répercussions sur l'identité noire en Amérique. Un peu plus tard, Jonathan Franzen, avec The Corrections (2001), fait évoluer le postmodernisme vers une critique plus traditionnelle du dysfonctionnement familial et des tensions entre générations, tout en abordant lui aussi les questions de la dépression et du consumérisme. David Foster Wallace, avec Infinite Jest (1996), devient une des figures les plus importantes. Son roman, oeuvre postmoderne colossale, aborde la société contemporaine à travers les prismes de l'addiction, du divertissement à outrance et de la fragmentation sociale, tout en repoussant les limites du roman postmoderne. Explosion de la
diversité.
Junot DÃaz, avec The Brief Wondrous Life of Oscar Wao (2007), raconte l'histoire d'une famille d'immigrés dominicains en abordant les thèmes de l'exil, de la masculinité et du déterminisme historique. Il utilise une narration dynamique, pleine de références à la culture populaire. Chimamanda Ngozi Adichie, bien que d'origine nigériane, a une influence notable sur la littérature américaine contemporaine avec Americanah (2013). Ce roman traite de l'expérience des immigrés africains aux États-Unis, en abordant des questions sur l'identité liée à la couleur de peau, la perception de soi et les relations interculturelles. Colson Whitehead aborde lui quant à lui des thèmes liés à l'identité afro-américaine et à l'histoire des États-Unis. Son roman The Underground Railroad (2016), lauréat du Prix Pulitzer, réinvente le chemin de fer clandestin sous la forme d'une véritable voie ferroviaire souterraine et raconte ainsi l'histoire d'une esclave en fuite dans l'Amérique pré-guerre civile, qui utilise un chemin de fer métaphorique pour dire les horreurs de l'esclavage et la quête de liberté. Les suites du
le 11 septembre 2001.
Dans Falling Man (2007), Don DeLillo aborde le traumatisme national après les attentats du 11 septembre. Ben Fountain, avec Billy Lynn's Long Halftime Walk (2012), dépeint la déconnexion entre les soldats envoyés au combat et la perception de la guerre par la société américaine, en se concentrant sur le spectacle médiatique et la superficialité du patriotisme contemporain. Phil Klay remporte le National Book Award pour Redeployment (2014), une série de nouvelles sur les soldats américains de retour de la guerre en Irak. Le livre analyse les effets psychologiques de la guerre et l'aliénation ressentie par les vétérans à leur retour. La technologie,
la surveillance et la globalisation.
Jennifer Egan, dans A Visit from the Goon Squad (2010), examine les effets de la technologie sur les vies individuelles et collectives, avec une structure narrative innovante qui reflète la fragmentation et la multiplicité des identités à l'ère numérique. Ce roman a remporté le prix Pulitzer et a marqué la décennie par son expérimentation formelle. Dave Eggers, dans The Circle (2013), propose une dystopie critique du monde des réseaux sociaux et des entreprises technologiques qui envahissent la vie privée des citoyens, anticipant les dérives de la surveillance numérique et des données personnelles. Le renouveau du
féminisme.
Le roman climatique.
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