|
La famille des
langues élamo-dravidiennes, dont seul le groupe dravidien
est encore parlé, n'est plus aujourd'hui représentée
que par des langues du Sud de l'Inde (Dekkan) et de Sri Lanka (avec quelques
îlots survivant au Beloutchistan, au Népal, etc.). Au Néolithique,
le domaine de ces langues s'étendait, sur tout le Sud de l'Asie,
entre de la Mésopotamie et l'actuelle Birmanie. Les idomes de l'Elam
et de la civilisation de la vallée de
l'Indus (Harappa, Mohendjo-Daro) appartenaient à cet ensemble
linguistique, qui s'est progressivement disloqué et finalement réduit
à ce qu'il est maintenant, avec la progression des langues
Indo-européennes.
Le rattachement des langues dravidiennes
à d'autres familles de langues a ét longtemps débattu.
Ces langues ayant comme particularité caractéristique le
principe d'agglutination, c. -à-d. le principe d'agglomération
et de juxtaposition des radicaux pour exprimer les combinaisons d'idées
et les relations grammaticales, qui distingue également les langues
ouralo-altaïques, quelques linguistes du XIXe
siècle ont cru pouvoir affilier les langues dravidiennes à
la famille ouralo-altaïque. Telle était l'opinion de Max Müller,
R. Caldwell et R. Lepsius, tandis que d'autres linguistes, comme Weigle,
Pott, Fr. Müller, A. Hovelacque les considérèrent dès
cette époque comme une famille tout à fait indépendante,
n'ayant rien de commun avec la famille ouralo-altaïque. Opinion admise
aujourd'hui, parce que le principe d'agglutination, le seul point sur lequel
les deux groupes de langues se rencontrent en se séparant sur tous
les autres, ne suffit pas pour établir l'affinité des langues
dravidiennes avec la famille ouralo-altaïque.
La famille dravidienne comprend cinq langues
principales, auxquelles on peut ajouter encore un groupe d'autres idiomes
n'ayant pas de littérature écrite. On les réparti
en deux groupes principaux :
1° celles du Nord, dites vindhyennes,
parce qu'elles sont parlées dans les monts Vindhyas; ce sont le
male ou radjmahah, l'uraon, le kole et le gond;
2° celles du Sud, les seules
à avoir une littérature écrite, et qui dominent sur
la côte de Malabar, à Travancore, à Cochin, à
Cananor, à Calicut, à Mahé, etc.
Le
tamoul ou tamil est une langue parlée sur la côte orientale
depuis le cap Comorin jusqu'à Palicate, c.-à-d. sur les côtes
du Coromandel et du Malabar. Ce fut le missionnaire Barthol. Ziegenbalg,
qui a composé le premier une grammaire tamoule (Grammatica damulica,
1716), et qui a également traduit la Bible en langue tamoule. D'autres
grammaires ont été composées par Jos. Beschi (1813
et 1843), Rob. Anderson (1824), C. Rhenius (1836 et 1846), G.-W. Pope (1858).
ll existe également un certain nombre de vocabulaires, parmi lesquels
il faut noter le plus ancien de A. de Provenza (1676), de A. Blin (Dictionnaire
français-tamoul et tamoul-français; Paris, 1831); J. Nicholas
(1840) et J. Rottler (1834-1841).
Le canara, kanara, karnataca ou karnatique
est parlé à Mysore, en quelques districts du Nizam et sur
la côte de Malabar. Il diffère peu du tamoul. La plus ancienne
grammaires de cette langue est celle de Th. Estevano (1640); d'autres grammaire
sont été composées par W. Carey(4817), J. M. Kerrell
(1820), Hodson (1864). W. Hersa a fourni un vocabulaire (1832). Kittel
a donné des notions littéraires (Nagavarama's Canarese prosody,
with an essay on canarese literature, 1875).
Le télougou ou télinga
est parlé depuis Ghicacole jusqu'à Paliacate, et depuis la
côte orientale à peu près jusqu'à Mysore.
C'est de toutes la plus mélangée de sanscrit. Sa grammaire
et sa syntaxe ressemblent à celles du tamoul et du karnatique. Elle
a fourni un certain nombre de mots au malais et au,javanais. Cette langue
se distingue aussi par une littérature abondante, sur laquelle on
peut consulter les ouvrages de B. Schulz (Conspectus litteralurae Telugicae,
1747) et de Charles Brown (Essay on the language and litterature of the
Telugus, 1839-1840). Des grammaires ont été composées
par A. Campbell (1816, 1820 et 1849), W. Howell (1834), Ch. Brown (1840),
Brigel (1872) ; des vocabulaires par A. Campbell (1821 et 1848), J. Morris
(1835-1839).
Le talava, toulou ou toulouva est
répandu aux environs de Mangalore; il semble sur le point de s'éteindre
(?).
Le malayâla ou malâyalam
est parlé sur la côte de Malabar depuis le cap Comorin jusqu'à
Dilli et appelé aussi grantham ou grandonicum. On en a des grammaires
par Spring (Madras, 1839) et par Peet (1849), ainsi, qu'un dictionnaire
par Bailey (1864).
A ces deux ensembles de langues, R. Caldwell
a ajouté encore le koudaga, à l'Ouest de Mysore, comme langue
indépendante, après l'avoir autrefois regardé comme
un dialecte du kanara. Enfin, on attache à la liste des langues
dravidiennes quelques langues parlées par les monts Nilgherries
comme le touda (toda ou todava), kodagou des monts de Kourg, certains
dialectes des îles Maldives et Laquedives, qui y cotoient des langues
indiennes,, qui n'ont jamais été écrits, etc. Le brahoui,
parlé au Béloutchistan est également une langue dravidienne.
Parmi les caractères des langues
dravidiennes, on signalera, pour la la prononciation, l'abondance des consonnes
liquides, surtout l et r; elles se combinent fréquemment avec des
aspirées; pour le vocabulaire, une grande richesse, grâce
à la possibilité qu'ont les mots de s'agglomérer et
de s'unir entre eux de manière à produire des mots nouveaux.
Il y a beaucoup d'expressions pour rendre les moindres nuances des impressions
physiques, mais absence de termes abstraits et de cette flexibilité
qui permet les longues phrases et les périodes. II a huit cas, trois
genres, et, dans les substantifs, trois nombres. Les adjectifs sont invariables.
Généralement le pronom se place après le verbe, et
s'unit à lui par une désinence contractée. Un grand
nombre de verbes auxiliaires modifient le verbe principal. La conjugaison
n'a que trois temps; des affixes suppléent
à l'absence des modes autres que l'indicatif. Du reste, la plupart
des verbes sont défectifs.
Pour transcrire les langues dravidiennes,
on emploie trois alphabets différents, qui sont probablement d'origine
sanscrite, bien que les formes des lettres diffèrent de celles de
l'alphabet sanscrit. Le premier alphabet est celui du tamoul, le second
est celui du malayâla, dont on se sert aussi pour le toulou, et le
troisième est celui de télougou employé également
pour le kanara et le koudaga. Ce dernier alphabet présente
le même nombre de lettres que le dêvanâgari. L'écriture,
par ses formes arrondies, a un aspect tout différent de l'ancien
type indien à forme carrée. (J.
Israelsohn). |
|