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La langue chippeway ou chippewa (ou Ojibwa, Ojibway, Ojibwe) est une des langues algonquines parlée par les Chippeways, qui habitent au sud du lac Supérieur, sur le sol des États-Unis, dans les territoires du nord-ouest et les États du Missouri et du Michigan. Cette langue abonde en mots dérivés et composés; elle a des règles pour transformer les verbes en substantifs et réciproquement, pour concentrer la signification des mots sur un petit nombre de syllabes et même sur une simple lettre; elle a des méthodes pour la contraction et l'augmentation des idées combinées sous la forme d'un mot. Les mots sont d'une nature si variable et si transpositive, que leurs syllabes élémentaires peuvent être changées de place à volonté pour former de nouvelles combinaisons et s'accommoder à de nouvelles circonstances. Les Chippeway / Ojibwa Il semble bien établi que quelques Chippewas ont vécu au nord du lac Supérieur dans des temps très anciens. Eux et les Maramegs réclament le rivage nord du lac comme leur pays. Selon Perrot quelques-uns des Chippewas vivant au nord du lac Supérieur en 1670-1699, bien que comptant surtout sur la chasse, cultivaient un peu le maïs, et étaient alors en paix avec leurs voisins Sioux. Il est étonnant que cet auteur oublie de mentionner le riz sauvage (Zizania aquatica) au nombre de leurs aliments puisque la possession de champs de riz sauvage fut une des principales causes de leurs guerres avec les Dakotas, les Fox et autres nations. Vers cette époque, ils acquirent des armes à feu et se firent un chemin vers l'ouest alternativement en paix et en guerre avec les Sioux et presque toujours en lutte avec les Fox. Les Français, en 1692, rétablirent un poste de traite à Shaugawaumikong, maintenant La Pointe, comté d'Ashland, Wis., qui devint une importante colonie Chippewa. Au commencement du XIXe siècle, les Chippewas réussirent à chasser les Fox, déjà abattus dans une guerre contre les Français, du Wisconsin nord, les forçant à chercher refuge chez les Sauks. Ils se tournèrent alors contre les Sioux les rejetant au-delà du Mississippi et au sud à la rivière Minnesota et poursuivirent leur marche vers l'ouest à travers le Minnesota et le Dakota nord jusqu'à ce qu'ils eussent occupé les sources de la Red river et eussent établi leur groupe le plus à l'ouest dans le district du mont Turtle. Ce n'est qu'après 1736 qu'ils purent s'établir à l'ouest du lac Supérieur. Tandis que les principaux groupes de la tribu agrandissaient ainsi leurs domaines du côté ouest, d'autres envahissaient la presqu'île entre le lac Huron et le lac Erié que les Iroquois ré clamaient depuis longtemps par droit de conquête. Les Iroquois durent l'abandonner et toute la région fut occupée par des bandes Chippewas dont la plupart sont maintenant connues sous le nom de Missisaugas bien qu'elles se nomment elles-mêmes Ojibwas. Les Chippewas prirent part avec les autres tribus du Nord-Ouest aux guerres contre les colonies des frontières jusqu'à la fin de la guerre de 1812. Ceux qui vivaient dans les Etats-Unis conclurent un traité avec le gouvernement en 1815 et depuis gardèrent la paix, tous habitant sur des réserves ou des terrains concédés dans leur ancien pays du Michigan, du Wisconsin, du Minnesota et du Nord Dakota à l'exception d'une petite bande de Crees Cygnes et de Chippewas de la rivière Noire qui vendirent leurs terres du Michigan sud en 1836 et vivent maintenant avec les Munsees dans le comté de Franklin, Kansas. Schoolcraft qui était en relations personnelles avec les Chippewas et épousa une femme de leur tribu décrit les guerriers Chippewas comme les égaux au physique des meilleurs qu'on peut trouver chez les Indiens du Nord-Ouest, à l'exception peut-être des Fox. Leurs longues et victorieuses luttes avec les Sioux et les Fox montrent leur bravoure et leur ténacité; cependant, ils furent toujours en bons termes avec les Français. Les Chippewas ont été un peuple des forêts. Bien qu'ils aient de longue date vécu en bons termes avec les Blancs, le christianisme a eu peu d'influence sur eux, dans une large mesure, par suite du conservatisme de leurs hommes de médecine. Warren, qui n'est pas enclin à admettre une affirmation qui pourrait nuire à la bonne renommée de son peuple, affirme que, selon la tradition, le groupe de la tribu habitant à La Pointe pratiquait le cannibalisme tandis que l'abbé Belcourt affirme que, bien que les Chippewas du Canada traitassent les vaincus avec une extrême cruauté et mangeassent alors de la chair humaine, ils avaient le cannibalisme en horreur excepté dans de telles circonstances. Selon le docteur William Jones (1906) les Pillards de l'île Bear affirment De même que les Ottawas, ils étaient experts dans l'emploi du canot et dans les premiers temps comptaient surtout sur le poisson pour leur alimentation. Il y a d'abondantes preuves que la polygamie était chose commune et à la vérité elle se produit encore chez les bandes les plus nomades (Jones). Leurs wigwams étaient construits d'écorce de bouleau et de nattes d'herbe; ils enfonçaient d'abord des poteaux dans la terre en forme de cercle, les têtes s'inclinant les unes vers les autres et liées ensemble, l'écorce et les nattes recouvrant la charpente, laissant au sommet une ouverture pour la fumée. Ils croyaient que l'ombre d'un défunt, après la mort du corps, prenait un large chemin aplani, allant vers l'ouest, conduisant finalement à un pays foisonnant en tout ce que désire l'Indien. C'est une croyance générale chez les Chippewas du Nord que l'esprit revient souvent visiter le tombeau aussi longtemps que le corps n'est pas réduit en poussière. Leur mythe de la création est celui qui est commun aux tribus algonkines du nord. Comme la plupart des autres tribus, ils croient qu'un mystérieux pouvoir habite dans tous les objets, animés ou non. De tels objets sont des manitous, toujours éveillés et prêts à tout entendre durant l'été mais tombant dans un état de torpeur après la chute de la neige en hiver. Les Chippewas considèrent les rêves comme des révélations et ils choisissent souvent comme une divinité tutélaire quelque objet apparu dans ce rêve. La Medewiwin, ou grande société de médecine était une puissante organisation de Chippewas qui contrôlait les mouvements de la tribu et était un formidable obstacle à l'introduction du christianisme. Quand un Chippewa mourait, c'était la coutume de placer son corps dans une fosse orientée vers l'Ouest, souvent assis, ou de creuser une fosse peu profonde dans la terre et de déposer le corps couché sur le dos ou sur le côté, le recouvrant de terre de manière à former un petit monticule sur les bords duquel on plaçait des poteaux et de l'écorce. Selon McKenney (Tour to the Lakes, 1827), les Chippewas de Fond du Lac, Wis., en hiver ensevelissaient sur des échafauds le corps du mort enveloppé d'écorce de bouleau. Le deuil d'un proche parent durait un an à moins d'être abrégé par le meda ou quelque exploit de guerre. Les historiens ne s'accordent pas sur le nombre et les noms des clans des Chippewas qui sont de 11 à 23. Warren donne 21 clans dont les suivants ne sont pas compris dans ceux énumérés par Morgan : Manumaig (Lamproie), Nebaunaubay (Triton), Besheu (Lynx), Mous (Chevreuil), Nekah (Oie), Udekumaig (Poisson blanc), Gyaushk (Mouette). Certains d'entre eux, dit Warren, n'avaient que quelques membres et n'étaient pas connus de la tribu toute entière. Les Maskégons venaient des clans Renne, Lynx et Brochet qui s'établirent au nord du lac Supérieur quand la tribu émigra, du Sault-Sainte-Marie, vers l'ouest. Chez certains Chippewas, ces clans sont constitués en cinq phratries : Awausee, Businausee, Ahahweh, Noka et Mousonee. La phatrie Awausee comprend les clans Lamproie, Triton, Esturgeon, Brochet, Poisson blanc et Suceur - tous clans poissons. La phratrie Businausee comprend les clans Grue et Aigle, businausee, 'fait l'écho' est un nom donné à la grue. La phratrie Ahahweh comprend les clans Grand Plongeon, Oie, Cormoran, ahahweh est un nom du grand plongeon, bien que le clan Grand Plongeon soit appelé Mong. Morgan fait de Ahahweh un clan distinct et l'appelle clan Canard. La phratrie Noka (No'ke, Ours) comprend les clans Ours qui autrefois avaient plusieurs noms tirés des différentes parties de l'ours, mais ils sont maintenant réunis et nulle différence n'est admise si ce n'est entre Il est difficile , sin impossible, de donner le nombre passé ou actuel des Chippewas car dans les premiers temps une petite partie des Chippewas seulement vint en contact avec les blancs et maintenant ils sont si mêlés aux autres tribus en tant d'endroits qu'on ne peut pas donner de chiffres spéciaux. Les principaux estimée faits sont comme suit : En 1764, à peu près 25,000; 1783 et 1794, à peu près 15,000; 1843, à peu près 30,000; 1851, à peu près 28,000. Il est probable que la plupart de ces estimés ne tiennent pas compte des groupes éloignés. En 1884, ils étaient 914 dans le Dakota, 5885 dans le Minnesota, 3656 dans le Wisconsin, 3,500 dans le Michigan plus 6,000 dénommés Chippewas et Ottawas dont peut-être un tiers sont Chippewas, 76 Chippewas et Munsees dans le Kansas. Leur population totale vers cette époque dans les Etats-Unis était donc d'à peu près 16,000. Au Canada, ceux de l'Ontario, y compris ceux du Nipissing, atteignaient le chiffre de 13,000 en 1911, tandis que les agences du même nom dans le Manitoba, la Saskatchewan et l'Alberta en renfermaient 8,000. En 1912, les Chippewas étaient probablement au nombre de 35,000 à 38,000 - 21,000 au Canada et 14,000 dans les Etats-Unis, sans compter à peu près 3,000 dans le Michigan. De nos jours, les Chippewas, répartis entre le Michigan, le Wisconsin, le Minnesota et le Dakota du Nord sont au nombre d'environ 100 000 personnes. Mais il ne reste parmi eux que 5000 locuteurs du chippewa. Kechegummewininewug, sur le rivage sud du lac Supérieur, dans le nord du Wisconsin; Munominikasheenhug, aux sources de la rivière Sainte Croix, dans le Wisconsin et le Minnesota; Wahsuahgunewininewug, à la tête de la rivière Wisconsin; Hommes du lac Ottawa, sur le lac Courtes Oreilles, Wis. ; Kitchisibiwininiwug, sur le haut Mississippi dans le Minnesota; Mukmeduawininewug, ou Pillards, sur le lac Leech, Minn.; Sugwaundugahwininewug, au nord du lac Supérieur; Kojejewininewug, sur le lac Rainy et la rivière Rainy dans les environs de la frontière nord du Minnesota; Omushkasug, sur le côté nord-ouest du lac Supérieur, côté canadien.Outre ces sous-tribus, on reconnaît que les noms suivants collectifs ou locaux appartenaient à différentes colonies, bandes ou divisions de la tribu au Canada : Nawash, Caradoc, Mississagi River, Spanish River, Beausoleil, Ile Cockburn, Sheshegwaning, West Bay, Maganetawan, Sheguiandah, Sucker Creek, Tahgaiwinini, Wikwemikong, Parry Island, Fort William, Lake Nipigon, Long Lake, Pays Plat, Pic River, Rama, Sarnia, Saugeen, Batchawana, Garden River, Mattawan, Dokis, Nipissing, Timagami, Manitou Rapids, Lac la Croix, Assabaska, Eagle Lake, Islington, Lac des Mille Lacs, Lac Seul, Wabigoon, Oueschekgagamioulimy, Walpole Island, Obidgewong, Michipicoten, Bagoache, Epinette (1744), Ouasouarini, Mishtawayawininiwak, Nopeming, et Nameulini, dans l'Ontario; Portage-la-Prairie au Manitoba; et Nibowisibiwininiwak dans le Saskatchewan.La langue chippeway, selon Schoolcraft. Nous ne pouvons pas faire mieux connaître le manière dont s'opère la formation des mots dans cette langue qu'en traduisant quelques extraits de ce que disait Schoolcraft dans l'ouvrage où il faisait une relation très intéressante d'un voyage d'exploration qu'il fit en 1832 par ordre du gouvernement pour découvrir les sources du Mississippi, qu'il a découvertes effectivement. Dans cette relation, il donne le commencement d'un cours de leçons sur la langue chippéway qui n'en contient malheureusement que deux, où il ne traite que du nom substantif, mais d'une manière qui permet déjà de se faire une idée de cette langue. Dans la première de ces deux leçons, Schoolcraft dessine à grands traits le caractère général de l'idiome dont il traite, caractère qu'on peut appliquer à toutes les langues de la famille algonquine. "Les inventeurs de cette langue, dit-il, a paraissent avoir en principalement en vue d'exprimer succinctement et avec le moins de mots possible, les idées qui ont prédominé dans leur esprit. De là la concentration est devenue le trait du langage : le pronom, l'adjectif, l'adverbe, la préposition, quoique dans certains cas on puisse s'en servir sous une forme disjonctive, sont principalement employés comme des matériaux au moyen desquels l'orateur est à même de remplir la trame compliquée du verbe et du substantif. Rien dans le fait ne peut être plus dissemblable que la langue considérée dans son état primitif et élémentaire, dans un vocabulaire, par exemple, où les mots sont donnés sous leurs formes simples, et la même langue, lorsque ces éléments sont amalgamés dans les formes usitées du discours. Cet amalgame peut être comparé à un tableau où l'opale, le carmin et la céruse ne sont plus reconnaissables comme des substances distinctes, mais où chacune de ces couleurs a contribué à l'effet général. Le peintre seul possède le principe par l'application duquel on a été à tel élément et ajouté à tel autre, de sorte que ces objets, discordants en apparence, forment un tout concordant et dont les parties sont en harmonie. On doit s'attendre, continue notre auteur, a qu'une telle langue ne peut qu'abonder en mots dérivés et composés, qu'elle a des règles pour transformer les verbes en substantifs et les substantifs en verbes, pour concentrer la signification des mots sur un petit nombre de syllabes et même sur une simple lettre ou signe alphabétique; qu'elle a des méthodes pour la contraction et l'augmentation des idées combinées sous la forme d'un mot; et enfin, si je puis m'exprimer ainsi, des routes secrètes, des chemins de traverse, pour arriver plus tôt à des modes d'expression également neufs et intéressants. Pour parvenir aux mots primitifs il faut suivre et démêler un fil entortillé, et l'analogie est notre seul guide. Il faut dépouiller les mots de ces syllabes ou particules accumulées qui, ainsi que les molécules de la matière physique, sont agglomérées autour des racines primitives; ce n'est qu'à l'aide d'un procédé semblable que le principe, la méthode, qui préside à cet amalgame, ce fil secret qui fait mouvoir toute la machine, peut être cherché non sans peine et avec quelque espoir de succès. " A la fin de la seconde leçon, l'auteur revient encore sur ce sujet. "Les mots de cette langue, dit-il, sont d'une nature si variable et si transpositwe que, de même que les pièces sur l'échiquier, leurs syllabes élémentaires peuvent être changées de place à la volonté du joueur pour former de nouvelles combinaisons et s'accommoder à de nouvelles circonstances, pourvu toutefois qu'il se conforme à certaines règles dont l'application, après tout, dépend beaucoup de la volonté et de l'habileté du joueur. Ce qu'il y a de plus surprenant, c'est que toutes ces combinaisons, toutes ces modifications de l'objet, ces distinctions de la personne, du temps et du lieu, n'empêchent pas qu'on ne fasse usage, sous leurs formes élémentaires et disjonctives, de l'adjectif, du pronom, du verbe et des autres parties du discours, qui sont ici entremêlées, sous des formes variées, dans la contexture du nom substantif. » Il est curieux de comparer ce que nous venons de lire avec ce que le P. Charlevoix, il y a plus de deux siècles, disait de la la langue des Hurons : " Cette langue,. dit-il, est d'une abondance, d'une énergie et d'une noblesse qu'on ne trouve peut-être réunies dans aucune des plus belles que nous connaissions. Dans le huron, tout se conjugue; un artifice que je ne vous expliquerais pas bien y fait distinguer des verbes, les noms, les pronoms, les adverbes, etc. Les verbes out une double conjugaison, l'une absolue, l'autre réciproque. Les troisièmes personnes ont les deux genres, car il n'y en a que deux dans ces langues, le genre noble et le genre ignoble. Pour ce qui est des nombres et des temps, on y trouve les mêmes différences que dans le grec. Par exemple, pour raconter un voyage, on s'exprime autrement si on l'a fait par terre ou si on l'a fait par eau; les verbes actifs se multiplient autant de fois qu'il y a de choses qui tombent sous leur action; comme le verbe qui signifie manger varie autant de fois qu'il y a de choses comestibles. L'action s'exprime autrement à l'égard d'une chose animée et d'une chose inanimée : ainsi, voir un homme et voir une pierre, ce sont deux verbes. Se servir d'une chose qui appartient à celui qui s'en sert ou à celui qui en parle ce sont autant de verbes différents. » (Charlevoix).Passant de là à la langue algonquine, il dit : « Il y a quelque chose de tout cela dans la langue algonquine; mais la manière n'en est pas la même et je ne suis nullement en état de vous en instruire. " (Charlevoix).Il semble qu'il avait peu de connaissance de cette tangue, car tout ce qu'il y dit de la langue huronne peut également s'y appliquer : il y a plus que quelque chose de tout cela. En comparant cette description avec celle de Schoolcraft, on voit le progrès qui a été fait, depuis le commencement du XIXe siècle, dans la connaissance du caractère et de la structure singulière de ces langues, qui auparavant n'attiraient aucune attention et qui cependant le méritent bien, sous le point de vue de la grammaire générale et de l'histoire du langage humain. Mais il ne faut pas nous écarter davantage de notre sujet. La formation des mots. Keetekwaa (kitikouaou), tu es une femme. Ce mot chippéway est formé de keen (kin), pronom personnel de la seconde personne, et de iquè, ikouè, femme; o, ou est une forme de l'adjectif qui réveille l'idée d'une manière être, ce qui fait que, dans la langue lénâpé, au lieu d'ikouè on dit ochqueu (ochquéou), ce qui est un substantif à forme adjective le t au lieu du n après ki est euphonique; c'est comme qui dirait, mais en un seul mot : toi être femme; en mauvais latin, tu mulierata, la terminaison adjective suppléant au défaut du verbe substantif, qui n'existe pas dans ces langues, De même, je suis un homme, se dit en chippéway eendaninneneew (indenininiou), de nin, je ou moi et inini, homme. La première lettre de nin est supprimée, et le d ou t (car les langues amérindiennes prennent souvent l'une de ces consonnes pour l'autre) est ajouté à cause de l'euphonie. Par la même raison, la première lettre d'inini est changée en e pour éviter la trop fréquente répétition de la même voyelle. La finale iou est la forme adjective et veut dire je suis. Les Lénâpés disent lenno n'hackey, un homme est mon corps ou mon corps (est) un homme. Mais cette différence ne fait rien au système général de formation des mots de la langue. Il est curieux d'observer les différents expédients que ces langues ont adopté pour suppléer au verbe dire, qui leur manque. Les Narragansetts disent n'inn ou ninin (ego vir), moi homme. Dans ces deux dernières langues, l'idée de l'existence n'est pas exprimée, ellipse y supplée. Nous allons maintenant donner un exemple tiré de la langue des Outawas, comparée avec celle des Ménoménis. Wachemaunet (ouatchimânet), à qui est ce canot? Ce mot outawa est composé du pronom relatif wahne (ouâni), qui; du mot chemaune (tschimâni), canot; et de la forme interrogative et; ce qui fait à qui canot? Dans la langue des Ménoménis, ce mot est différemment composé. Ils disent : wahotoshiawki (ouahotosoyâouik), dont le dérivation est celle-ci : wah, pronom relatif employé interrogativement; otos, formé de oos, canot; t intercalé pour l'euphonie; et ayawik, forme du verbe neendiah (nindayâ), je possède, habeo, possideo. Ce n'est pas le verbe auxiliaire avoir; ces langues ne l'ont pas. Revenons au chippéway. Oninjima signifie, dans cette langue, le mot main, pris dans le sens absolu et sans relation avec quoi que ce soit. On se sert rarement de ce mot dans cette forme; on en extrait des syllabes pour former d'autres mots; on dit nininj, ma main; kininj, ta main. Nous allons voir maintenant l'usage qu'on en fait. Kisoghéninjénin. je te prends par la main, Ce mot est formé de sogénaut (soghénât), rendre, gripper, serrer, et d'oninjtma, main; i est le pronom personnel de la seconde personne, toi : in est une forme verbale; la syllabe en qui précède n'a pas deo signification. Sogininjinitizoyan, si je me prends par la main. Forme du verbe au mode subjonctif. Dans cette langue, le mot retsi signifie main; en y ajoutant l'article ou le pronom préfixe, on fait méretsi, la main; néretsi ma main, etc. Avec un adjectif on le compose ainsi : de ouanbighen, blanc, et de retsi, on fait biretsi, main blanche, retenant seulement la syllabe bi du mot qui signifie blanc; avec la forme adjective, on dit biretsio, la main blanche; et avec des formes verbales, on fait niouanbiretsa, j'ai les mains blanches. Mais nous voulons faire voir comment ou extrait des racines d'autres langues. Nesaghipédinénan, je le prends par le main. Ici on voit que saghi est le sogi du chippéway, et signifie prendre; la signification de ce mot est la même dans, les deux langues; mais où est le mot main? il n'y a pas un vestige de retsi, pas une syllabe qui le rappelle; à sa place, on trouve ped, extrait de peden, qui dans la langue des Souriquois, signifie main (népéden, ma main). Ce mot ne se trouve plus dans la langue des Abénaquis dans sa forme simple; mais il y est demeuré dans les mots composés. La même chose arrive fréquemment dans les langues d'Europe. De cette manière de former des mots par l'accumulation des idées, il résulte qu'il existe dans ces langues des mots d'une longueur excessive, et il est très remarquable que ces mots sont le plus fréquemment des substantifs qui expriment, par abstraction, les émotions, ou les qualités morales, et en général ce que nous appelons des idées abstraites. (Duponceau / F.W. Hodge). |
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