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Le langage

Le mot langage s'applique à toute manière d'exprimer les pensées tandis que langue se dit seulement du système particulier de signes articulés ou parlés dont on fait usage à cet effet. Quelquefois cependant le mot langage, perdant ce sens général, est considéré comme une certaine façon de se servir d'une langue. C'est en ce sens qu'on dit : le langage d'un connaisseur, le langage des honnêtes gens, le langage de la passion. Deux humains, deux écrivains qui parlent la même langue tiennent différents langages quand ils sentent ou pensent d'une façon différente. 

Conformément à son étymologie, le mot langage ne devrait s'appliquer qu'à l'expression de la pensée par la parole mais, par une extension assurément fort légitime on l'applique à tout mode, à tout procédé au moyen duquel l'humain peut communiquer aux autres ses impressions, ses idées, ses volontés. En conséquence, on distingue, d'après la nature des signes employés, le langage d'action ou langage mimique, qui s'exprime par le rire, les pleurs, les gestes, les attitudes et les mouvements de la physionomie; le langage oral ou langage parlé, qui consiste en sons et en articulations produits par le larynx et le concours des organes de la cavité gutturo-buccale; et le langage écrit, qui traduit la pensée au moyen de figures conventionnelles. 

Les signes.
Un signe au sens le plus général du mot, est un phénomène sensible destiné à manifester un autre phénomène qui n'est pas sensible actuellement ou même qui ne peut jamais l'être. Par exemple, la fumée que je vois est un signe d'un feu que je ne vois pas. Le signe suppose donc une intelligence qui l'interprète, qui ait l'idée d'un rapport entre un fait perçu et un autre qui ne l'est pas, en un mot qui induise. L'école écossaise a supposé, chez les humains, une faculté interprétative; mais celle-ci se ramène à l'association des idées et à l'induction.

On distingue parfois les signes naturels et les signes conventionnels. Les seconds n'ont point par eux-mêmes un sens immédiatement clair; ils n'expriment une certaine idée qu'on vertu d'une entente et pour ceux qui ont connaissance de cette entente. Ainsi, les mots d'une langue ne sont compris que de ceux qui ont appris cette langue. Citons encore : la notation de la musique, la signalisation routière, etc. 

Les signes naturels réflètent par eux-mêmes le sentiment éprouvé, de telle façon que chacun en comprend immédiatement le sens; personne ne se trompe sur la signification des jeux de physionomie qui expriment la joie, la douleur, la colère, etc.

Il ne faut pas exagérer cette distinction et dire, avec Reid, que les signes naturels ont été institués par la nature et que tous les humains les comprennent d'instinct. S'ils sont aisément interprétés par tous les humains, c'est qu'ils sont liés de façon constante aux états qu'ils expriment; ce sont presque toujours des mouvements utiles et fixés par l'hérédité. De là vient que tous les humains les emploient et, par suite, les comprennent presque sans éducation. Ils ne sont pourtant compris que par un certain apprentissage spontané.

La parole.
On a dit que la parole est le signe à son plus haut point de développement. Max Müller appelait même la parole le fossé infranchissable, le « Rubicon » qui distingue l'humain de l'animal. On peut étudier la parole au triple point de vue physique, physiologique et psychologique.

Au point de vue physique, la parole relève de l'acoustique. Les sons vocaux, comme tous les sons, possèdent une hauteur, une intensité, une durée et un timbre. Ces quatre éléments sont facilement discernés par l'oreille l'accent tonique d'une langue quelconque est fondé soit sur la hauteur, soit sur l'intensité; la prosodie repose sur la durée des voyelles et des syllabes, et le timbre sert surtout à différencier les voyelles (il y a une différence de timbre entre a et i, entre e ouvert et é fermé). 

Au point de vue physiologique, les humains utilisent pour la parole d'abord l'appareil respiratoire : le poumon et la cage thoracique, sous l'action de muscles particuliers (intercostaux, surcostaux, scalènes, petit dentelé postérieur et supérieur, diaphragme, etc.), constituent un soufflet permettant d'aspirer ou de rejeter une colonne d'air (la parole est presque toujours formée par le courant expiratoire). 

L'air est conduit hors des poumons par un canal rigide, la trachée, qui se termine par le larynx, organe producteur du son proprement dit. C'est un certain degré d'occlusion de la glotte et de tension des cordes vocales qui produit les modulations de la voix. Les cordes vocales entrent en vibration pour les voyelles et les consonnes sonores; elles ne vibrent pas pour les consonnes sourdes. Arrivé dans le pharynx, l'air expiré se dirige vers l'extérieur soit par la bouche, soit par le nez, soit par les deux issues à la fois, par suite du jeu du voile du palais; qui peut obstruer l'une ou l'autre voie ou les laisser libres toutes les deux. Dans la bouche, toutes les parties ont un rôle important voûte, parois, langue, lèvres et dents. Elle peut se fermer brusquement et se rouvrir de même pour laisser passer l'air (consonnes explosives); elle peut rester un peu ouverte (fricatives ou continues), s'allonger pour prononcer la voyelle ou, se raccourcir pour l'i. Suivant que la langue, les lèvres ou les dents font obstacle à la colonne d'air, le phonème est dit lingual, labial ou dental. Quand l'air passe par les narines, le phonème est nasal.

La part du système nerveux dans la production de la parole a été l'objet de nombreuses recherches. Par l'étude des malades atteints d'aphasie totale ou partielle, on a pu déterminer dans quelles parties de l'encéphale les phénomènes de la parole sont localisés, c'est-à-dire ont leurs conditions. 

La psychologie du phénomène de la parole ne semble pas être faite d'une façon définitive. Il est certain qu'il y a incessamment action de la pensée sur la parole et réaction de la parole sur la pensée. La parole éclaire et précise, mais altère aussi quelquefois la pensée, dont elle "ne fait qu²²e jalonner de loin en loin les principales étapes" (Bergson).

La parole joue un grand rôle dans l'abstraction et la généralisation, et la logique elle-même semble avoir été constituée autant d'après les lois propres du langage que; d'après celles de l'esprit. (NLI).

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Dictionnaire Idées et méthodes
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