| Dans l'Antiquité, les îles Ioniennes n'eurent qu'un rôle assez effacé; l'histoire de chacune d'elles est indiquée dans l'article qui lui est consacré. La plus importante fut Corcyre à laquelle se rapporte au moins en partie le mythe des Phéaciens, relaté dans l'Odyssée. Au VIIIe siècle, elle fut colonisée par Corinthe et bientôt capable de rivaliser avec elle; sa marine domina les côtes voisines durant plusieurs siècles. Leucade, colonie corinthienne, la pauvre Ithaque, Céphalonie divisée entre plusieurs cités rivales, Zante qui vécut dans une obscure prospérité, ne furent mêlées qu'indirectement aux grands événements de l'histoire grecque. Cythère dépendait de la Laconie. Les îles Ioniennes ne furent complètement assujetties à l'empire romain que par Vespasien qui leur retira la liberté qu'on leur avait laissée. Elles commencèrent de former un groupe et d'avoir une histoire à la fois collective et séparée de celle des provinces continentales à l'époque de la dissolution de l'empire byzantin. En 1147, le roi Roger de Sicile s'en empara; elles furent alors détachées de l'Empire et demeurèrent au pouvoir des rois de Naples. En 1401, Venise leur acheta Corfou pour 30,000 ducats; elle s'empara des autres îles qui furent régies par ses provéditeurs et formèrent avec les forts de la côte albanaise la province de Levante Veneto. Malgré les défauts de ce gouvernement qui fut une exploitation des insulaires par les Italiens, auxquels étaient réservées toutes les places, les îles, à peu près assurées de la paix, furent relativement prospères. En 1797, la France les occupa dans le démembrement de l'Etat vénitien; mais en 1799 les Turcs et les Russes s'en emparèrent, et l'empereur Paul ler, par un traité du 29 mars 1800 avec la Porte, créa un Etat libre des sept îles, autonome sous la suzeraineté ottomane. Les notables des îles ne purent organiser de gouvernement stable, et en 1807 la paix de Tilsit rendit les îles Ioniennes à la France. En octobre 1809, les Anglais s'emparèrent de Zante, puis des autres îles, excepté Corfou. En 1814, la France les abandonna aux alliés. Leur sort fut réglé à Paris le 8 novembre 1815. Les îles Ioniennes formèrent un Etat indépendant sous le protectorat de la Grande-Bretagne. Celle-ci était représentée par un lord-commissaire exerçant le pouvoir exécutif. Le premier fut Thomas Maitland; il élabora avec une assemblée de notables une constitution qui entra en vigueur en 1818; la langue officielle fut le grec; malgré une assez bonne gestion matérielle, les insulaires réclamèrent leur union avec la Grèce, dès qu'elle fut affranchie. Les lords-commissaires Maitland, puis Seaton, puis Ward luttèrent vainement contre le sentiment national. En toute occasion le parlement local réclamait l'annexion à la Grèce. Le dernier comprima péniblement l'insurrection de Céphalonie (1849). Le lord-commissaire Young finit par conseiller de céder aux voeux des populations (1858). Gladstone fut envoyé d'Angleterre pour faire une enquête. Le parlement qu'il convoqua rejeta toutes ses offres. Le cabinet anglais se prépara à fortifier Corfou d'une manière formidable. Son obstination fut enfin vaincue, après la chute du roi Otton. Le 14 novembre 1863 les représentants des cinq grandes puissances souscrivirent à Londres l'acte par lequel la Grande-Bretagne renonçait à son protectorat des îles Ioniennes, les cédant à la Grèce. On convint de raser les fortifications de Corfou et de neutraliser les îles. Une nouvelle conférence restreignit la neutralisation à Corfou et Paxo. Le traité définitif fut conclu le 29 mars et accepté par la Grèce le 8 avril 1864; le 30 mai s'opéra la transmission des pouvoirs. La séparation accomplie sept siècles auparavant était terminée. (A.-M. B.). | |