| Les anciens Égyptiens se considéraient comme les premiers habitants de la vallée du Nil ou du moins comme les premiers humains qui la reçurent en partage, car ils croyaient qu'elle avait d'abord été habitée par des dieux (Religion égyptienne). Ils ne reconnaissaient, à vrai dire, ce titre qu'aux rois qui régnèrent pendant la période préhistorique. Leurs sujets étaient ces Chesou-Hor (serviteurs d'Horus), que les Égyptiens vénéraient comme les plus pieux des humains et comme les fondateurs des villes et des temples. Ce sont ces générations antéhistoriques qui conquirent patiemment le sol sur les marécages, fertilisèrent de véritables déserts, s'essayèrent les premiers à ce système savant d'irrigation au moyen de canaux et de digues qui est resté en usage jusqu'à nos jours. Ce sont elles aussi qui formèrent les premiers groupes de petits États indépendants, origine des circonscriptions administratives que les Grecs appelèrent nomes. Ces petits États se composaient des villes, dont la principale (nout) était le siège la cour, qui assurait un gouvernement civil et militaire, et d'un culte spécial; de terres cultivées (ouou) et de marais (pehou). Ils étaient désignés d'un nom formé avec l'emblème du dieu local. Les chefs héréditaires de ces États s'appelaient hiqou. Cette vaste mosaïque ne pouvait se maintenir en paix en permanence. Des querelles de voisinage suscitèrent des guerres d'où sortirent, avec un nouveau groupement des forces vives de l'Égypte, plusieurs royaumes bientôt réduits à deux : celui du Nord et celui du Sud. Ces deux grands États furent, pendant la plus grande partie de la période historique, réunis sous un même sceptre, ce qui permet de définir trois principales périodes pendant le pays est unifié (Ancien Empire, Moyen Empire, Nouvel Empire), et des périodes, plus troublées, pendant lesquelles dominent les tendances centrifuges, et qu'on a coutume d'appeler périodes intermédiaires : les deux premières s'intercalent entre les périodes impériales, la troisième prend place entre le Nouvel empire et une dernière période d'unité, mais aussi de déclin, appelée la Basse Époque. - L'Egypte pharaonique. (cliquer sur la carte pour l'agrandir). Les nomes Le nombre des nomes ou préfectures varie, selon les temps et selon les sources, de 36 à 44. La liste en était souvent dressée sur les murailles des temples où nous les voyons encore sous la forme symbolique de personnages venant faire au roi l'offrande des biens de la terre. Ces personnages disposés en longue procession sur le soubassement des murs ont toujours la tête surmontée de l'emblème divin qui leur sert de nom. La plupart ont pu être identifiés sûrement. Haute-Égypte. Ceux des nomes de la Haute-Égypte ne laissent place à aucun doute. A la frontière de la Nubieou Tokensit s'étendait le nome du même nom avec l'île d'Abou (Éléphantine) pour chef-lieu. Au temps de la domination romaine, elle céda ce rang à Noubit (Ombos). Syène de son nom égyptien Souanou (Assouan) s'élevait sur la rive droite en face d'Eléphantine, célèbre dans l'Antiquité à cause de ses carrières et du fameux puits que le Soleil éclairait verticalement le jour du solstice d'été (La géodésie antique; Ératosthène). Le nome se terminait au Sud par les deux îles saintes de Senem (Bigeh) et d'Hak (Philae), lieux de pèlerinages pendant toute l'Antiquité. Le temple d'Isis à Philae resta le dernier sanctuaire de l'ancienne religion égyptienne. Au Nord de ce nome était celui de Tes Hor (Apollonites) avec Debo (Apollinospolis Magna) pour chef-lieu. Cette ville, la moderne Edfou, avait au temps des Ptolémées (Époque ptolémaïque) assez d'importance pour être dotée par ces princes d'un grand et magnifique temple élevé sur l'emplacement de l'ancien sanctuaire du dieu Horhoud. A 27 kilomètres au Sud de Deb s'élevait Khennou (Cilcilis) célèbre par ses carrières de grès exploitées dès le temps de la XIIe dynastie et son école où l'on formait dès la même époque au métier de scribes les jeunes gens de bonne famille venus de tous les points de l'Égypte. Puis c'étaient le nome de Ten (Latopolites) et celui d'Ouas (Phatyrites). Le chef-lieu du premier fut d'abord Nekheb (Eilethya) puis Sni (Latopolis, auj. Esneh). Nekheb, aujourd'hui El Kab, était une ville très ancienne. Son nom est resté dans les textes religieux un des noms symboliques de la Haute-Égypte. Au temps des Hyksos (Moyen Empire), elle fut le dernier boulevard de la résistance. C'est dans une des grottes de sa nécropole que se trouve le tombeau d'Ahmos, chef des nautoniers, dont la grande inscription est un des documents les plus intéressants pour l'histoire de la libération de l'Égypte. Ahmos (Ahmosis), en effet, prit part à la bataille d'Avaris, qui consomma la défaite des Hyksos. Le nome d'Ouas avait pour chef-lieu Apit ou Tapit, la Thèbes des Grecs (Diospolis Magna), capitale sous de nombreuses dynasties, et particulièrement pendant le Nouvel Empire . Son histoire est en quelque sorte celle de l'Égypte. Grande et forte lorsque ses rois étendent leurs conquêtes depuis la cinquième cataracte du Nil jusqu'à l'Euphrate, elle est tour à tour prise et pillée par tous les envahisseurs de l'Égypte, Nubiens, Assyriens et Perses. Mais ce fut un cataclysme qui lui porta le dernier coup. À moitié détruite par un tremblement de terre en l'an 27 av. J.-C., elle n'offre plus aujourd'hui que les ruines imposantes, disséminées dans les villages de Karnak et de Louqsor (rive droite), de Medinet Habou, Gournah, Déir et Bahari (rive gauche). A l'époque romaine, le chef-lieu du nome avait été transporté à On du Sud (Hermonthis). Au Nord du nome Phatyrite, on entrait dans les nomes Coptites (Horoni) et Tentyrites. Le premier sur la rive droite avait pour chef-lieu Coubti (Coptos), la moderne Koft, qui paraît avoir balancé, au début de la Xle dynastie, l'influence de Thèbes, et qui lui succéda sous les Ptolémées, comme capitale commerciale de la Haute-Egypte. Elle fut alors et resta pendant toute l'époque romaine le grand entrepôt des marchandises de l'Inde. Le second, sur la rive gauche, avait pour chef-lieu Tentarer (Tentyris), la moderne Denderah, consacrée dès les temps les plus anciens à la déesse Hathor. Son grand temple, qui fait l'admiration des voyageurs, n'est qu'une reconstruction d'époque romaine. Le nome de Haskek (Diospolites) venait ensuite avec Hou (Diospolis Parva), la moderne Hâou. Le nome Thinites, qui s'étendait sur les deux rives, comme le précédent, fut le berceau de la monarchie. Sa première capitale, Thinis, aujourd'hui Kôm es Soultan selon les uns, et Bellianeh selon d'autres, céda le pas dès une haute antiquité à Aboudou (Abydos), la ville sacrée qui se vantait de posséder le tombeau d'Osiris et qui fut remplacée à son tour par Psaï (Ptolémaïs). « Les nomes de l'Egypte-Moyenne, entre Abydos et Memphis, a écrit Maspéro, sans avoir jamais obtenu une prépondérance marquée, ont pesé d'un grand poids dans les destinées du pays. Remplis d'une population nombreuse, couverts de places fortes situées avantageusement sur les différents bras du Nil, ils pouvaient couper à volonté les communications entre Thèbes et Memphis et arrêter longtemps la marche des armées.-» Le premier d'entre eux, le nome de Khemi (Panopolites), avait pour chef-lieu Apou (Khemmis), appelée aussi Panopolis pour les Grecs qui avaient identifié son dieu ithyphallique, Khem, avec Pan. Un autre nom du dieu était Mîn, lequel, fondu avec le premier, a donné à la ville son nom moderne d'Akhmin. Venaient ensuite le nom de Douf (Antaeopolites) dont le chef-lieu Toukaou (Antaeopolis) s'élevait sur l'emplacement de la moderne Gaou el-Kebir (rive droite) et le nome de Baar (Hypselites) avec Chachotpi (Nesl el-Chetoub) sur la rive opposée. On entrait alors dans le Iotef supérieur (Lycopolites), même rive, qui avait pour chef-lieu Lycopolis (Assiout) où l'on adorait le chacal Anubis comme dieu des morts, puis dans le lotef inférieur, chef-lieu Kousit (Cusae), la moderne Qossyeh. Ce nome se fondit avec les deux voisins à l'époque gréco-romaine. L'un d'eux, le nome de Ounou (Hermopolites) avait pour chef-lieu Kmounou (Hermopolis), aujourd'hui Achmouneïn. Il tirait son nom de son dieu principal (Thot, Hermès). Sur l'autre rive du Nil, Aménophis IV (Akhenaton) avait élevé la ville dont les ruines se retrouvent à côté de Tell el-Amarna. Le Mehi avait pour chef-lieu Hbennou (Théodosiopolis), ville obscure et qui a laissé moins de souvenirs que Nowrous (Khom el-Ahmar) où l'on voit encore des tombes de l'ancien empire, et surtout que Panoubt (Speos Artemidos) dont la nécropole forme une série de grottes réparties entre cette localité et Beni Hassan. Ces tombes qui sont celles de princes de la XIIe dynastie nous ont conservé les documents les plus précieux sur la vie et les moeurs de la féodalité à l'époque du premier empire thébain. Les plus anciennes villes du nome étaient Monaït Khoufou, fondée par Khoufou (Khéops) (Ancien Empire), sur l'emplacement de la moderne Minieh. Sur la rive droite les deux nomes de Pa, chef-lieu Haibonou, et de Maton (Aphrodites), chef-lieu Panibtepahe (Aphroditopolis), la moderne Atfleh, faisaient face au nome de Ouabon (Oxyrrhinchites), chef-lieu Pamadjit (Oxyrrhinchos Pemsje), aujourd'hui Behneceh, au Nouhit supérieur (Heracleopolites), chef-lieu Hakhnensou (Heracleopolis Magna), aujourd'hui Hnassieh, et au Nouhit inférieur, chef-lieu Miritoum, aujourd'hui Meïdoum. Le Fayoum, qui était attaché au premier, forma à son tour un nome nouveau, l'Arsinoites (Arsinoé), avec Chedou (Crocodilopolis) pour chef-lieu. Toute cette partie de l'Égypte comprise entre Lycopolis (Assiout) et Mitoum semble avoir eu la prépondérance pendant près d'un siècle, alors que les dynasties memphites étaient déchues de leur ancienne grandeur et que les princes de Thèbes n'avaient pas encore fait parler d'eux. La Basse-Égypte commençait au nome de Anbouhaït (Memphites), dont le chef-lieu Mannoouir (Memphis), appelé aussi Hakaphtah, a donné son nom à l'Égypte. Son histoire comme celle de Thèbes, sa rivale, est intimement liée à celle de l'Égypte. Puissante et prospère au temps où ses rois régnaient sur toute la vallée, puis délaissée pendant de longs siècles, elle reprit une partie de son importance au VIe siècle avant J.-C. (Basse Époque) et ne déclina tout à fait qu'à l'époque romaine. Ses ruines couvrent encore aujourdhui la vaste plaine comprise entre Bedrecheïn et Mitrayneh. Sa nécropole, encore plus grande que celle de Thèbes, comprend la série de pyramides qui s'étend d'Abou Roach à Dachour. Basse-Égypte. L'identification des nomes du Delta est loin de présenter le même degré de certitude que celle des provinces de la Haute et de la Moyenne-Égypte. Nous pouvons cependant citer les nomes Létopolite et Héliopolite, l'un à gauche, l'autre à droite de la pointe méridionale du Delta. Le premier avait pour chef-lieu Sokhmit (Létopolis), le second, On du Nord (Héliopolis) moins importante par sa population ou son rôle politique que par son collège de prêtres, fondateur d'un système théologique qui exerça la plus grande influence sur la religion de l'empire. Sa célébrité était telle dans le monde ancien que les Grecs s'imaginaient qu'il avait été l'école où s'étaient formés leurs plus grands philosophes. Les nomes Saïtes, chef-lieu Saïs, sur la rive droite de la branche canopique, Phteneotes ou Am inférieur, chef-lieu Bouto (Ouadijt), jouirent dès la plus haute antiquité d'une certaine importance. Le culte de Neith, à Saïs, qui eut surtout sa vogue sous les rois de la XXVIe dynastie (Basse Époque), remontait à l'Ancien Empire; quant à Bouto, elle n'a pu, comme Nekhab, symboliser le Nord de l'Égypte que grâce à une prépondérance politique ou religieuse dont l'histoire n'a pourtant conservé aucune autre trace. A défaut des nomes on a retrouvé l'emplacement d'un grand nombre de villes dont les principales sont Khsôou (Xoïs), aujourd'hui Sakhra, sur l'ancienne branche sébennytique, Panibdidou (Mendès), au Sud-Ouest du lac Menzaleh, Thebnoutir (Sebennytos), aujourd'hui Samanhoud, sur la branche de Damiette; Pa Bast (Bubastis), aujourd'hui Tell Basta, au Sud de Zagazig, et Tanis, où Mariette a mis au jour les curieux monuments qui nous font remonter au temps de la domination des Hyksos. (E. Revillout). | |