|
. |
|
Histoire de l'Europe > L'Espagne > Au Moyen âge > Les royaumes chrétiens |
|
Aperçu | Des origines au règne de Ferdinand III | D'Alphonse X aux Rois catholiques |
Aperçu |
Le pays qui a formé
la Castille fut habité primitivement par les Arevaci, les
Carpetani, une partie des Oretani et des Celtiberi; elle subit les destinées
du reste de l'Espagne et fut successivement soumise : par les Carthaginois,
229-220 av. J.-C.; par les Romains, 218-134;
par les Suèves, 409 ap. J.-C.; par
les Wisigoths (pour Rome d'abord, 417,
puis pour eux-mêmes, 468); enfin par les Arabes (Maures),
711; et c'est de cette époque que date le nom de Castille, qui viendrait
de ce qu'au IXe siècle, les seigneurs
chrétiens, pour se défendre contre les courses des Musulmans,
couvrirent les montagnes de ces contrées de châteaux
forts (castella, castillo), au Nord et à l'Ouest
de l'Ebre.
Les commandants de ces châteaux, nommés d'abord castillanos, prirent ensuite le titre de comtes, rendirent leur pouvoir héréditaire et indépendant de tous liens de vassalité à l'égard des successeurs de Pélage (Pelayo), roi des Asturies; cependant, le besoin de se défendre contre l'ennemi commun les détermina à s'unir aux rois de Léon. Ce pacte fut rompu par Ordoño II, l'un de ces rois, qui fit périr par trahison la plus grande partie de la noblesse de Castille, dans le but d'asservir leur pays; le projet d'Ordoño échoua; les nobles échappés au massacre se déclarèrent indépendants en 923, et s'organisèrent en une sorte de république aristocratique; les chefs, élus par les nobles seulement, portaient le nom de juges. Nuño Rasura et Julio Calvo furent investis de cette dignité; mais, après moins d'un siècle d'existence, gouvernement fut modifié par Fernand Gonzalès, l'un des juges de Castille, qui prit pour lui seul le titre de comte que portaient autrefois tous les seigneurs de la contrée, et rendit son titre et son pouvoir héréditaires dans sa famille, qui ne se composait plus que d'une fille au commencement du XIe siècle. Sanche
III, roi de Navarre, épousa l'héritière des comtes
de Castille, et érigea, en 1031, ce pays en royaume, qu'il donna
à son second fils, qui fut le premier roi de Castille, sous le nom
de Ferdinand Ier
(1034), Ferdinand, après la mort de son beau-frère Bermude
III, battu par lui et tué sur les
bords du Carrion, acquit le royaume de Léon et de Galice.
Après la mort de Ferdinand Ier
(1065), un partage et des luttes sanglantes entre les fils de ce prince,
semblèrent en vain compromettre un instant ses destinées.
L'un d'eux, Alphonse
VI, réunissait (1072-1073) toute la monarchie.
Le roi Ferdinand II de Léon au combat. En 1085, toute la Nouvelle-Castille était soumise, et Tolède en fut la capitale. Le mariage de la fille d'Alphonse VI, Urraca, avec Raymond de Bourgogne, donna naissance à une nouvelle dynastie. Sous cette maison, comme sous celle de Navarre, l'Etat castillan fut menacé par une troisième invasion musulmane, celle des Almohades, et par la défaite d'Alarcos (1195); mais la victoire de Las Navas de Tolosa écarta tout danger, en 1212. Après plusieurs partages temporaires qui retardèrent l'accroissement de la puissance castillane, les deux couronnes de Castille et Léon se trouvèrent de nouveau réunies sur la tête de Ferdinand III; il se rendit maître de tout le bassin du Guadalquivir, et atteignit même les côtes de l'Andalousie (Cadix). Alphonse
X s'empara de l'Algarve orientale, interdit les partages à
l'avenir, et parut ainsi, assurer la puissance de la Castille. Dans les
deux siècles qui suivirent, les progrès de la Castille furent
entravés par des querelles dynastiques : d'un côté
la rivalité des enfants de La Cerda, petit-fils
d'Alphonse X, contre leur oncle Sanche IV et ses successeurs. Les dissensions
qui s'élevèrent entre les grands vassaux sous le règne
d'Alphonse XI (1312), puis la tyrannie
de Pierre le Cruel (1350), plongèrent
ainsi le royaume dans une funeste anarchie dont il ne sortit qu'à
l'avènement de Henri II de Trastamare
(1369), chef de la troisième dynastie des rois de Castille.
Le meurtre de Pierre le Cruel par son demi-frère Henri de Trastamare. La contestation victorieuse d'Isabelle la Catholique contre sa nièce Jeanne la Beltraneja (1474-1476). D'autre part, les troubles survenus pendant la minorité de Ferdinand IV, d'Alphonse XI, de Henri III, de Jean II, et pendant le règne de Henri IV, qui se vit déposer par ses vassaux, qui mirent à sa place Isabelle, sa soeur et son héritière (1465), paralysèrent la puissance de la royauté et s'opposèrent à toute entreprise sérieuse au dehors. Le mariage d'Isabelle avec Ferdinand, roi
d'Aragon (1469); l'association des deux grands Etats qui en fut la suite,
et la conquête du royaume de Grenade,
qui fit sortir les Maures de l'Espagne (1492), soumirent, toute la péninsule
au même sceptre, préparant ainsi la puissance espagnole. Cependant,
la Castille fut encore une fois administrée séparément
de l'Aragon et des autres provinces espagnoles.
Les Rois catoliques : Isabelle de Castille et Ferdinand d'Aragon. A la mort d'Isabelle, en 1479, sa fille Jeanne fut reine de Castille; mais bientôt, sa raison s'étant dérangée à la suite de la mort de son mari, Ferdinand, son père, gouverna la Castille pendant la minorité de son fils Charles, qui prit ensuite la conduite des affaires. Sous ce prince, qui fut Charles-Quint, la Castille fut définitivement réunie aux autres couronnes d'Espagne. Là s'arrête l'histoire séparée de la Castille, qui se fond alors dans celle de l'Espagne. Ses antiques institutions avaient depuis longtemps succombé sous les prétentions royales. Souverains de la Castille
|
|||
Institutions Culture |
Les institutions de la CastilleRemarquons que le pays a changé plusieurs fois de capitale : aux premiers temps ce fut Burgos, puis Léon, puis Tolède, après les conquêtes d'Alphonse VIII. Aux successeurs de celui-ci, la vieille cité des Wisigoths et des Maures plaisait assez peu comme séjour; aussi, ils résidèrent le plus souvent à Valladolid; celle-ci, embellie par leurs soins, devint leur ville préférée, la ville de la cour, sauf au temps de Pierre le Cruel qui habitait Séville d'ordinaire. Un caprice de Philippe II, justifié dans une certaine mesure par la position plus centrale de Madrid, va décapitaliser Valladolid an profit d'une petite ville de la Nouvelle-Castille.La loi de succession
au trône était mal déterminée; de là
des compétitions assez fréquentes; l'usage finit par s'établir
que le fils aîné du roi lui succédait; à défaut
de fils, les filles étaient reconnues héritières;
par une dérogation ce ne fut pas la fille de Henri
IV qui lui succéda, mais à
la Beltraneja on préféra la soeur du roi, Isabelle.
On voit que de tout temps les femmes avaient été aptes à
hériter du trône. Quant aux enfants de la famille royale,
qui ne recevaient pas la couronne, on leur donnait de grands domaines,
avec des revenus importants et des places fortes et ils devenaient la tige
de quelques puissantes familles, comme les Castro, les Lara, les Medina
Celi, les Lemos, les Albuquerque, les Villena. Ces seigneurs, qui avaient
par les femmes ou par les mâles du sang royal dans les veines, étaient
à l'origine les vrais grands de Castille, noblesse hautaine, fière
de son origine, toujours rebelle à l'autorité.
On juge ce qu'un tel droit reconnu devait amener de troubles; aussi voit-on, que d'Alphonse X à Ferdinand le Catholique, c.-à-d. pendant plus de deux siècles, l'histoire de la Castille est toute remplie du récit des révoltes des ricos homes. Au-dessous d'eux, tous les hommes qui avaient du sang noble dans les veines étaient dits hijos d'algo ou hidalgos. Quant au peuple, réparti dans les domaines des seigneurs, les poblaciones et les behetrias, il était à peu près soumis aux mêmes obligations que le peuple dans les divers pays de l'Europe du Moyen âge; pourtant sa condition semble avoir été en général meilleure et plus indépendante. Dans les guerres perpétuelles contre les Maures ou dans les luttes de partis, les seigneurs et leurs vassaux vivaient côte à côte sous les armes, enduraient les mêmes souffrances, couraient les mêmes périls et cette vie en commun entretenait des relations intimes et de mutuelle affection. Les poblaciones,
que le roi organisait en pays conquis, ressemblaient beaucoup aux commune
de la France; leurs fueros
étaient comme les chartes de l'autre côté des Pyrénées
et le roi les favorisait pour s'en faire un appui dans la lutte contre
l'aristocratie. Quant aux behetrias, c'étaient des sortes
de communes qui payaient des redevances à des seigneurs, mais pouvaient
changer de suzerains quand elles voulaient. Les poblaciones, qui
relevaient directement du roi, devinrent chaque jour plus nombreuses; leurs
fueros traitaient à la lois des franchises qui leur étaient
accordées et de certaines parties du droit civil et criminel; les
plus remarquables sont ceux de Léon (1020), de Najera (1076), de
Sepulveda (confirmés en 1076), de Logroño (1095), de Cuenca
(1190), de Burgos (1073), de Tolède (1085), de Madrid (1202), de
Zamora (1208), de Quintanilla de Tolède (1236), de lznaioraf (1240).
de Séville (1250), de Arjona (1284), de Gibraltar (1310), de San
Vicente de Arana (1236).
Miniature du Fuero-juzgo. Quant à la
législation générale, elle était fixée
au début par le fuero-juzgo; aux Cortès de Najera (1138),
fut publié pour la noblesse : El Ordenamiento de los Hijos d'algo;
en 1212, on réunit une collection des privilèges des seigneuries
ou fueros nobiliarios, d'où sortit en 1356, le Fuero viejo
de Castilla; mais on doute qu'il ait été reconnu comme
ayant une valeur légale. Alphonse X le Savant, publia, comme on
sait, de nombreux textes législatifs, mais aucun d'eux ne peut être
appelé un code proprement dit; il y a de tout dans ses oeuvres,
des conseils, des dissertations philosophiques, des règlements,
des ordonnances; on ne sait pas dans quelle mesure les véritables
lois qu'on y trouve furent en réalité appliquées.
L'ordonnance d'Alcala (1348) donna force de
loi aux dispositions contenues dans le Libro de las leyes, le Fuero
de las leyes, et Las leyes de Villareal (décisions des
Cortès de Villaréal, 1346). La compilation intitulée
el Becerro (cartulaire), et publiée
au temps de Pierre
le Cruel, donne la liste des redevances
que chaque groupe d'habitations doit au roi ou au seigneur; on doit à
ce même souverain l'Ordenamiento de los menestrales (l'ordonnance
des artisans). Mais on comprend qu'au milieu des guerres civiles, les diverses
lois étaient d'une application difficile et qu'il faudra l'autorité
de Ferdinand pour fixer la législation et surtout en obtenir l'observation
exacte.
Façade de l'université de Salamanque. Une autre preuve d'une certaine prospérité pourrait être tirée du grand nombre de somptueux monuments qui datent de cette période. Citons parmi les plus remarquables : la vieille basilique de Salamanque (Xe siècle?), l'église de San-Isidoro à Léon (1005, reconstruite en 1050), la cathédrale de Santiago (1082-1128), l'église de Cormellana (XIIe siècle), la Camara-Santa de Oviedo, Santa Maria la Antigua, à Valladolid, la cathédrale d'Avila (1107), les murailles de cette ville, regardées comme les plus belles fortifications du Moyen âge (1090), la cathédrale de Lugo (1129-1177), la collégiale de Ciudad-Réal, le célèbre monastère de San-Pedro de Cardeña, l'église de Santo-Domingo de la Calzada (1180), le couvent de las Huelgas-Reales (1180), l'église de Ciudad-Rodrigo (1190), la collégiale de Talavera-la-Reina, la grande église de Cuenca (1190), la merveilleuse cathédrale de Burgos (1121), l'église de San-Esteban dans la même ville, la cathédrale de Léon (1199-1303), la vaste cathédrale de Palencia, celle d'Osma (1232), celle de Tolède (1227), celle de Badajoz qui servait de forteresse (1284), le pont de Saint-Martin à Tolède (1212), la cathédrale d'Oviedo (1488), l'église Santa-Maria de Vitoria, la belle église des dominicains à Palencia. les églises des monastères de Benevivere (1382), de Santa-Maria-la-Real de Najera (1340), de Guadalupe (1342), la fameuse chartreuse del Paular, celle de Valdecoristo, le couvent de Lupiana (1354), la majestueuse cathédrale de Séville (1403-1517), la nouvelle cathédrale de Salamanque, les clochers de la cathédrale de Burgos (1442), le château de la Mota à Medina del Campo, la chartreuse de Miraflores (1454), la cathédrale d'Astorga (1471). etc. La Castille n'était pas non plus sans une certaine culture littéraire; on trouvera à la page sur la littérature espagnole, les noms d'un grand nombre de théologiens, philosophes, chroniqueurs et poètes. Outre les écoles abbatiales et diocésaines, il y avait plusieurs Universidades de estudios, dont les chaires nombreuses étaient occupées soit par des nationaux, soit par des étrangers illustres. On sait que celle de Palencia avait été fondée au temps d'Alphonse VI, et qu'elle fut augmentée plus tard par l'évêque D. Tello. Celle de Salamanque, fondée par Aphonse VIII, devint bientôt très importante; celle de Valladolid fut établie en 1250; enfin, on en créa une à Murcie en 1310 et une à Sigüenza en 1472. (E. Cat). |
. |
|
|
|||||||||||||||||||||||||||||||
|