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Histoire de la Bourgogne
Le duché de Bourgogne de 1361 à 1477
La seconde dynastie des ducs de Bourgogne (Valois)
Antiquité et Haut-Moyen âge
De 1032 à 1361 De 1361 à 1477
De 1477 à la Révolution
Philippe de Rouvres était mort en 1361 sans laisser aucun héritier direct; il n'avait ni frères, ni soeurs, ni descendants d'eux; le dernier de ses ascendants, sa mère, Jeanne de Boulogne, était morte le 29 septembre 1360. Sa succession revenait à ses collatéraux. Les deux comtés de Boulogne et d'Auvergne que Philippe tenait de sa mère revinrent à Jean de Boulogne. Les comtés de Bourgogne et d'Artois, avec la terre de Champagne, furent assignés à Marguerite de France, parce que ces terres avaient jadis appartenu à sa mère, Jeanne de Bourgogne, femme de Philippe le Long. Quant au duché, le roi Jean le réclama à titre d'héritier le plus proche. Il eut pour compétiteur le roi de Navarre, Charles le Mauvais, parent du feu duc au même degré que le roi de France; il insistait surtout pour obtenir la terre de Champagne qui se composait des prévôtés de Villemaur, Maraye-en-Othe, Vaucharcis, Chaource, Ile-en-Champagne, et de la châtellenie de Juilly. Le roi de Navarre n'avait pas encore renoncé à ses prétentions sur l'héritage de Philippe de Rouvres en 1365, car cette année-là il convint avec le roi de France de soumettre l'objet du litige au pape et de s'en remettre à sa décision. Le pape n'eut pas à se prononcer, la guerre ayant à nouveau éclaté entre Charles de Navarre et Charles VI avant qu'aucun ambassadeur n'eût été envoyé par les parties à la cour de Rome. Quoi qu'il en soit, dès le 30 novembre 1361, le comte de Tancarville reçut ordre de se rendre en Bourgogne pour prendre et recevoir au nom du roi Jean la possession et saisine du duché. Tancarville, aidé de deux autres conseillers du roi, que le souverain avait jugé bon d'adjoindre à l'ancien conseil ducal,  réorganisa l'administration de la province, prit les mesures nécessaires pour résister aux Compagnies qui menaçaient la Bourgogne (La Criminalité au Moyen âge). Jean vint lui-même visiter ses nouvelles possessions; il arriva à Dijon le 23 décembre 1361. Le roi de France laissa le gouvernement de la Bourgogne au comte de Tancarville jusqu'au 27 juin 1363, date à laquelle il nomma son fils Philippe le Hardi, duc de Touraine, « lieutenant par-dessus tous autres » au duché de Bourgogne. Le duc de Touraine était né le 15 janvier 1341. Il était trop jeune et avait trop peu de maturité d'esprit pour faire face aux dangers qui menaçaient la Bourgogne, alors ravagée par les Grandes Compagnies. Celles-ci, à la suite de la bataille de Brignais (avril 1362), avaient occupé le Mâconnais. Mais dès le 8 août 1363, le duc de Touraine retourna en France après avoir délégué ses pouvoirs à Jean de Montaigu, sire de Sombernon.

Le 6 septembre 1363 il reçut de son père le duché de Bourgogne à titre d'apanage réversible à la couronne faute d'héritiers mâles. Plus tard, après la mort du roi Jean, Charles V confirma cette donation par lettres du 2 juin 1364. Au commencement de cette année 1364 la guerre avait éclaté entre les Bourguignons et les Francs-Comtois, Philippe le Hardi envahit la partie de la Franche-Comté qui touchait à la vallée de la Saône; mais il fut obligé de rétrograder, car, comme il avait dû dégarnir de troupes les places fortes de son duché, l'audace des Compagnies s'en était accrue. Une bande avait pénétré jusqu'à Grandchamp, dans le Châtillonnais. Le duc de Bourgogne vint lui-même reprendre cette place. Le 12 février il apprit que les Bretons et les Gascons de La Charité-sur-Loire avaient décidé de prendre Châtillon-sur-Seine. Le Châlonnais était menacé par un routier nommé Guillamput qui parvint à pénétrer jusque dans la basse-cour du château ducal d'Argilly. Malgré tant de dangers qui menaçaient la Bourgogne. Philippe le Hardi quitta son duché emmenant avec lui l'élite de ses hommes d'armes pour aider le dauphin contre le roi de Navarre. Après la mort du roi Jean, Charles V, comme on l'a dit plus haut, confirma son frère dans la possession du duché de Bourgogne. Celui-ci stipula qu'en cas d'éviction totale ou partielle il reprendrait le duché de Touraine, qu'il toucherait dans son fief le reliquat à percevoir des aides pour la rançon du roi Jean, qu'à son titre ducal il ajouterait celui de lieutenant du roi de France des villes et diocèses de Lyon, d'Autun, de Mâcon, de Chalon, ainsi que dans tout le duché de Bourgogne. 

D'autre part, Charles V déclara que Philippe et ses successeurs, les ducs de Bourgogne, souffriraient que toutes les impositions générales édictées en France fussent applicables au duché de Bourgogne. Philippe le Hardi ne rentra à Dijon que le 17 novembre 1364. Pendant son absence les Bourguignons avaient dû soutenir le choc d'une invasion franc-comtoise dirigée par le comte de Montbéliard. L'explosion de la guerre entre Charles V et Charles le Mauvais éloigna de la Bourgogne une grande partie des Compagnies qui, répondant à l'appel du captal de Buch, se dirigèrent sur la Normandie. Mais les compagnies que les Bourguignons entretenaient à leur solde n'étaient pas celles qui leur donnaient le moins d'inquiétude. C'est ainsi qu'on dut financer pour obtenir le départ de la garnison de Pontailler-sur-Saône, composée de Gascons et de Bretons. Du Guesclin entraîna en Castille un grand nombre de gens des Compagnies. En 1365 l'Archiprêtre tenta d'entraîner les Compagnies contre les Turcs en Hongrie; l'empereur avait promis le passage libre à travers ses domaines; mais quand les Compagnies se présentèrent devant Strasbourg, elles trouvèrent portes closes. Enfin la guerre avec l'Angleterre qui éclata à nouveau en 1370 débarrassa la Bourgogne de ces hôtes redoutables. Le 19 juin 1369, le duc Philippe le Hardi épousa à Gand Marguerite de Flandre, veuve de Philippe de Rouvres, qui lui apporta les comtés de Bourgogne, d'Artois, de Flandre, de Rethel et de Nevers, dont il prit possession en 1384 après la mort de Louis de Male.

Charles le Mauvais ayant menacé la Bourgogne, le duc dut garnir de troupes les places de son duché; il établit capitaine à Dijon Olivier de Jussey, à Châtillon Etienne de Bremur, à Monlbart Huguenin de Sully, à Vergy Jean de Villers-la-Faye. Le gouvernement du duché fut confié à Eudes de Grancey. La mort de Charles le Mauvais délivra la Bourgogne de ce nouveau danger. Les guerres que Philippe le Hardi eut à soutenir soit pour son propre compte soit pour aider son frère Charles V ou son neveu Charles VI, contre les Anglais l'obligèrent à établir la gabelle dans son duché et une imposition de douze deniers pour livre sur le débit de toutes les denrées. Pour apaiser la mécontentement de ses sujets il déclara par lettres patentes données à Talant le 18 mai 1370 que son intention n'était pas de porter atteinte aux privilèges des habitants. Philippe le Hardi organisa la Chambre des comptes de Dijon et y introduisit en 1386 les us, styles et ordonnances de celle de Paris.

Le comte de Nevers, Jean, fils de Philippe le Hardi, avant été fait prisonnier à Nicopolis en 1396, les Etats du duché s'imposèrent pour payer sa rançon. Des ordres de chevalerie furent fondés en Bourgogne à cette époque.

Vers 1400, Philippe de Molan institua l'ordre ou confrérie de Saint-Georges qu'on nommait encore « ordre de rouge manteau ». La noblesse du Chalonnais institua une semblabla confrérie dans l'église de Saint-Georges de Chalon, celle du Mâconnais dans l'église de Saint-Georges de Mancey et celle du comté d'Auxonne à Seurre. Philippe le Hardi mourut à Hall le 27 avril 1404; son corps fut transporté et enterré dans le couvent des Chartreux de Dijon qu'il avait fait construire; sa femme Marguerite de Flandre mourut le 16 mars 1405.

Jean sans Peur, comte de Nevers, fils aîné de Philippe le Hardi et de Marguerite de Flandre, né à Dijon le 28 mai 1371, succéda à son père comme duc de Bourgogne en 1404. Tout occupé de ses querelles avec la maison d'Orléans il résida peu en Bourgogne. Il séjourna davantage dans ses Etats du nord de la France. Car, aux provinces que possédait son père, il avait ajouté par son mariage avec Marguerite de Bavière, célébré à Cambrai en 1385, les comtés de Hainaut, de Hollande et de Zélande. Il fut assassiné le 10 septembre 1419 sur le pont de Montereau; sa femme ne mourut que le 23 janvier 1423; son douaire consistait dans les revenus de la prévôté d'Auxonne, des châtellenies de Vieux-Château, de Montréal, de Châtel-Girard, de Verdun, de Saint-Romain, de Pontailler et de l'étang de Périgny.

Jean sans Peur eut pour successeur au duché de Bourgogne son fils Philippe le Bon, né à Dijon le 30 juin 1396. Il se tint presque constamment éloigné de la Bourgogne. L'administration du duché fut de 1419 à 1424 entre les mains de la duchesse douairière Marguerite de Bavière. Une Chambre du conseil fut établie en 1422, puis supprimée en 1431. En 1446 fut créé un Conseil à qui fut confiée l'administration de la province. C'est en Bourgogne, à Auxerre, que se tinrent en 1432 des conférences pour la paix entre Philippe le Bon et la roi Charles VII; elles restèrent sans résultat. La paix ne fut conclue qu'en 1435 à Arras. On sait que les comtés d'Auxerre et de Mâcon furent alors cédés par le roi de France au duc de Bourgogne.

Vers le même temps, le duc de Bourbon, qui avait envahi le Mâconnais et le Chalonnais, à la suite de quelques succès remportés sur lui par le duc de Bourgogne, signa le 20 janvier 1435 à Nevers une suspension d'armes. Mais les compagnies de gens d'armes qui étaient à la solde de Charles de Bourbon se répandirent en Bourgogne, semant la terreur sur leur passage; les contemporains les appelèrent les Ecorcheurs; l'histoire leur a conservé ce nom. Ils apparurent en même temps dans l'Auxerrois et aux environs de Langres. La terreur s'empara des habitants de Dijon. Les Etats convoqués en février 1435 accordèrent un subside de 20,000 livres, grâce auquel le gouverneur de Bourgogne put établir des garnisons sur les frontières de Champagne. Les gens d'armes du duché lurent convoqués à Is-sur-Tille. Les Ecorcheurs, après s'être emparés de Langres, s'approchèrent de Dijon et vinrent occuper Ruffey et Talmay. En 1436 ils approchèrent du Châtillonnais. L'un de leurs chefs, Rodrigue de Villandrando, envahit le Mâconnais en novembre 1437.

En février 1438 le gros des bandes se trouvait dans le Charolais sous les ordres du bâtard de Bourbon, de Louis de Beuil, de Tempête, de Brusac, de Robinet le Maure, de Mathelin et de Blanchefort. Le gouverneur de Bourgogne, Jean de Fribourg, s'efforçait en vain de les chasser. Le 13 septembre 1438 Charles VII publia des lettres royaux bannissant les chefs des Ecorcheurs; Philippe le Bon en ordonna l'exécution. La même année la poste ravageait la Bourgogne. A Dijon, elle sévit si fort que le cours de la justice fut interrompu; l'hôpital du Saint-Esprit reçut quinze mille pauvres dont il mourut dix mille; à Auxerre le fléau ne fit pas moins de victimes. Puis vint la famine; à Autun le boisseau de froment coûtait trente sous et les pauvres trompaient leur faim en mangeant du pain d'argile. Cependant les Ecorcheurs continuaient leurs ravages. Au mois de février 1440 la Montagne, le Tonnerrois, l'Auxois et l'Avallonnais furent envahis. Le bâtard de Bourbon apparut avec 8000 Ecorcheurs à La Charité-sur-Loire et à Cosne, d'où il gagna la Lorraine. Toutes les forces bourguignonnes furent convoquées à Varennes près de Pontailler. Les Etats accordèrent les subsides nécessaires à leur solde. En mars 1440, le bâtard fut défait près de Langres par Jean de Vergy, Antoine de Ghellet et Phelippot de Saingnis. Le seigneur de Ternant infligea aux Compagnies une autre défaite. Cependant les Ecorcheurs vinrent encore occuper le Chalonnais et le Mâconnais. Le roi de France étant allé pacifier la Champagne (janvier 1441), les Compagnies qu'il avait amenées avec lui ravagèrent l'Auxerrois et le Tonnerrois. Cependant le bâtard de Bourbon fut exécuté. Les Ecorcheurs perdaient de plus en plus de terrain. Le seigneur de Blammont défit Blanchefort près d'Avallon, battit un corps de Bretons près de Chitry, força (novembre 1441) les bandes à passer la Loire, tandis que Jean de Fribourg remportait sur elles un avantage à Vézelay. Cependant en 1442 les Ecorcheurs reparurent dans le Charolais; en 1443 ils tentèrent un assaut sur Mâcon, mais furent repoussés. En 1444 Thibaud de Neufchâtel remporta une victoire sur les Ecorcheurs à Saulieu. Ce n'est qu'en 1445 et grâce à l'intervention du Dauphin que la Bourgogne fut débarrassée de ces bandes de pillards (La Criminalité au Moyen âge).

Les malheurs qui s'étaient abattus sur la Bourgogne n'avaient pas complètement arrêté les réjouissances. C'est ainsi qu'en 1443 un grand tournoi, convoqué par le seigneur de Beaufremont, eut lieu à l'arbre de Charlemagne, dans la forêt de Marsannay-la-Côte, près de Dijon; la tête dura quarante jours. En 1430, Philippe le Bon, à l'occasion de son mariage avec Isabelle de Portugal, avait institué l'ordre de la Toison-d'Or. C'est à lui qu'on doit la fondation de l'Université établie à Dôle pour les deux provinces de Bourgogne. Le même duc, en 1459, fit rédiger la coutume du duché; Ferri de Cluny, official d'Autun, Jean de Beaufremont, seigneur de Mirebeau, J. Georges, maître des requêtes, Guillaume de Sercey, bailli de Chalon, et quelques autres officiers de justice, furent préposés à cette rédaction. Philippe le Bon mourut à Bruges en 1467.

Son fils, Charles le Téméraire qui lui succéda, né en 1433, porta d'abord le titre de comte de Charolais  et ne fit son entrée à Dijon qu'en 1473. Il se signala de bonne heure par son courage et sa haine contre Louis XI. Il entra dans la Ligue du Bien-Public formée contre ce prince, et lui livra la bataille de Montlhéry (1465). Devenu duc de Bourgogne en 1467, il punit avec rigueur les Liégeois qui s'étaient révoltés contre leur évêque, son parent et son allié. Ayant appris que Louis XI, qui négociait avec lui à Péronne, excitait de nouveau les Liégeois à la révolte, il attira ce prince dans une conférence à Péronne et le força à l'accompagner contre eux et à l'aider à les soumettre (1468). 

Tout le règne de Charles le Téméraire fut rempli par ses guerres avec le roi de France (dont il était le plus puissant vassal, et contre lequel il chercha à susciter l'empereur et le roi d'Angleterre), et par les efforts qu'il fit pour agrandir ses États aux dépens de ses voisins, surtout de la Suisse et de la Lorraine. Il fut battu par les Suisses en plusieurs rencontres, notamment à Granson, puis à Morat, où son armée fut exterminée (1476), et il trouva peu après la mort sous les murs de la ville de Nancy qu'il disputait au duc de Lorraine (1477). Il laissa une fille, Marie de Bourgogne, qui hérita de ses États et en porta une partie dans la maison d'Autriche, par son mariage avec Maximilien, fils de l'empereur Frédéric III. (M. Prou).

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Dictionnaire Territoires et lieux d'Histoire
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