Jalons | Fossiles et sédiments Fabio Colonna (1626) distingue ces coquilles en marines et fluviatiles, et les distribue en genres et en espèces. En outre, il fit voir que les dents trouvées avec ces coquilles sont, non pas des dents de serpents, comme on le supposait avant lui, mais bien des dents de squales. Sténon (1669) distingue lui aussi les fossiles terrestres et d'eau douce des fossiles marins. De plus, il affirme le premier que les fossiles végétaux sont les restes de plantes autrefois vivantes, et que la formation des montagnes est postérieure à la création de la Terre. Enfin, il introduit les concepts de stratification des terrains et de sédimentations, fondamentaux en géologie. Ces avancées ont parfois fait considérer Colonna et Sténon comme les précurseurs de la géologie et de la paléontologie modernes. L'oeuvre géologique de Sténon est assurément fondatrice. Mais encore convient-il de prendre la mesure de la connaissance bien modeste que l'on avait à cette époque de vertébrés fossiles - comme le laisse d'ailleurs entrevoir notamment que Scheuchzer, de Zurich, put présenter dans ces années-là comme un homo diluvii testis le squelette presque entier d'une salamandre gigantesque trouvée à Oeningen. (Scheuchzer aura cependant eu d'autres contributions plus plus durables, en étudiant la géographie physique et la tectonique des Alpes). En fait, à cette époque l'existence fossiles vont être considérés par la plupart des géologues comme un embarras que comme un possible auxiliaire de leur discipline. Les avants trouvaient difficile d'expliquer cette existence et de rester d'accord avec la Genèse; aussi, au lieu de voir en eux les vestiges d'une vie disparue, imaginait-on qu'une certaine force plastique avait imprimé à des sucs pierreux des formes organiques, ou encore que des pierres inertes avaient pris, sous l'influence des corps célestes, la configuration qu'elles présentaient. Les théories de la Terre René Descartes ouvre la voie et propose en 1644 une cosmogonie, fondée sur sa physique des tourbillons, et dans laquelle la Terre se forme par accumulation de matière selon des sphères concentriques, au centre de laquelle existe un noyau de feu. Les irrégularités à la surface - les montagnes aussi bien que la répartition des mers - résultent des aléas de cette formation. Le feux central de Descartes permet, selon lui, de rendre compte des phénomènes volcaniques. Mais sa solution est loin d'être la seule à être envisagée de son temps. Athanase Kircher, propose ainsi en 1665, une théorie dans laquelle le feu des volcans réside dans des poches souterraines relativement proches de la surface; des poches qui pour certaines peuvent être plutôt remplies d'eau, ce qui permet de rendre compte de l'origine depuis longtemps mystérieuse de l'eau des sources et des fontaines. Ce sera Pierre Perrault qui, finalement, en 1674, appliquera pour la première fois l'approche quantitative dans les sciences de la terre, et expliquera que la surface des bassins fluviatiles est suffisante pour recueillir l'eau de pluie nécessaire à l'alimentation de leurs sources. La question des eaux et des feux souterrains n'en sera pas réglée pour autant, puisque elle resurgira presque aussitôt, dans le contexte de l'élucidation de l'orogenèse. Thomas Burnet fit ainsi paraître en 1681 un ouvrage intitulé Telluris Theoria sacra, titre mettant tout d'abord en évidence l'intention formelle de l'auteur de ne rien avancer qui puisse paraître en contradiction avec la Bible. Sa théorie, qui adapte à sa façon celle de Descartes, est dite neptunienne : c'est à l'eau qu'il attribue les changements successifs survenus à la surface du globe. La Terre était d'abord une masse fluide, un chaos de matières diverses, qui ne revêtit une figure sphérique que lorsque les matériaux les plus lourds descendirent au centre pour former un noyau solide. L'eau, plus légère, enveloppa ce noyau, et fut enveloppée elle-même par l'atmosphère. Cependant des matières grasses surnagèrent, et les particules terreuses en suspens dans l'atmosphère recouvrirent ces matières grasses : ce fut la première terre cultivée par les humains avant le Déluge, terre légère, fertile, unie comme un miroir. Mais la chaleur du Soleil la dessécha peu à peu, et, au bout de quinze ou seize siècles, la crevassa de telle sorte que cette croûte tomba dans l'abîme des eaux qui se trouvaient au-dessous d'elle. Ce fut là la cause du Déluge. Nos continents actuels sont les restes de la croûte terrestre qui ne se sont pas enfoncés; les inégalités des montagnes furent produites par cet effondrement gigantesque. - Dans cette hypothèse, le Soleil est la seule source de la chaleur des planètes. Ce système eut une célébrité de quelques années; il recruta quelques partisans et divers commentateurs. Dans les mêmes temps John Woodward (Essay toward the natural History of the Earth, 1695) et William Whiston (A New Theory of the Earth, 1696) entassaient miracles sur miracles pour exposer un système de création tout à la fois scientifique et dogmatique. Le premier suppose qu'à l'époque du Déluge, Dieu fit que tous les corps terrestres furent réduits en poussière, et de là en pâte molle par les eaux diluviennes; les corps marins auraient facilement pénétré dans cette pâte. Le second suppose que la Terre était autrefois une comète, où la confusion des éléments ne formait qu'un vaste et ténébreux abîme (Chaos). Dès le lendemain de la création, au fameux Fiat lux, la Terre devint sphérique, s'épura et permit aux rayons solaires de l'illuminer. Le Déluge fut produit par une comète dont la queue aqueuse enveloppa la Terre pendant quarante jours. On voit donc combien les comètes étaient fort utiles à l'auteur. Pour expliquer comment les couches remplies de fossiles marins, recouvertes d'eau jadis, se trouvaient à sec aujourd'hui, Whiston admit un changement dans l'obliquité de l'écliptique, par suite duquel les mers auraient abandonné leurs anciens lits; mais Newton ayant déjà démontré l'impossibilité de cette hypothèse, l'auteur donne pour double cause à l'évaporation des eaux la chaleur solaire et la chaleur centrale du globe. La Terre ayant, dans son système, été tout d'abord une comète, avait acquis un haut degré de chaleur à son périhélie, comme il arriva pour la comète de 1680 (comète dite de Newton) qui passa si près du Soleil, qu'on eut lieu de lui supposer une chaleur deux mille rois plus élevée que celle du fer rouge, chaleur qui demanderait cinquante mille ans pour s'éteindre. La température intérieure du globe terrestre aurait encore dans ce système une grande intensité à la surface. En 1693, Leibniz, dans son Protogaea, avança l'hypothèse hardie de l'incandescence primitive de notre planète et de son refroidissement subséquent. Il voyait dans les planètes autant de petits soleils, jadis allumés comme le nôtre, maintenant éteints depuis l'époque où leurs éléments de combustion furent consumés. Ce sont, selon Leibniz, les forces plutoniennes qui dominèrent dans les révolutions du globe; c'est au feu qu'il faut attribuer les événements qui dans les systèmes précédents ont été attribués à l'eau. Lorsque la surface terrestre eut atteint un certain degré de refroidissement, la vapeur de l'atmosphère se condensa en partie et forma les mers et les divers amas d'eau qui baignent actuellement le globe terrestre. |