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Les
galaxies spirales reprentent environ les trois-quarts des galaxies
répertoriées dans la classification de Hubble. Leur structure
est plus complexe que celle des galaxies elliptiques. D'un point de vue
morphologique, se composent d'un bulbe qui définit leur région
centrale, et qui ressemble à une petite galaxie elliptique. Ce bulbe
est prolongé par un disque très plat, étalé
sur leur plan équatorial, et dans lequel se développent dans
deux directions opposées à partir du bulbe deux bras spiraux
(ou davantage), et dans certains cas une barre, qui est structure linéaire
analogue aux bras spiraux, et qui joint ceux-ci au bulbe. Ces deux morphologies
définissant les galaxies spirales ordinaires (S) et les galaxies
spirales barrées (SB). Enfin, cet ensemble est immergé dans
sphéroïde, aussi appelé halo, et où les étoiles
sont très dispersées, ou, au contraire, très concentrées
dans des amas globulaires.
La composition des galaxies
spirales est également assez différente de celle des galaxies
elliptiques. Le bulbe (sauf dans sa partie la plus centrale, le noyau)
et le halo renferment des étoiles de population II, c'est-à-dire
âgées, chimiquement déficitaires en éléments
lourds. Le disque et le noyau, au contraire sont peuplés d'étoiles
de population I, jeunes et chimiquement riches. |
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Mise
en ordre |
Le
milieu interstellaire - Les galaxies spirales contiennent plus de matière
interstellaire que n'en contiennent généralement les galaxies
elliptiques (seules les galaxies irrégulières sont plus riches
qu'elles de ce point de vue. Le gaz y existe sous différentes formes,
appelées phases. Il s'agit principalement de gaz froid, et plus
spécialement d'hydrogène atomique
et d'hydrogène moléculaire.
L'hydrogène
atomique (c'est-à-dire composé d'atomes neutres et indépendants
les uns des autres) nimbe de façon assez diffuse le disque. On peut
aussi le rencontrer, en tout cas dans notre Galaxie, sous la forme de petits
nuages compacts, dans le halo, qui sont appelés desnuages à
grande vitesse ou HVCs (= High velocity clouds). L'hydrogène
atomique peut également former de très grandes structures
en formes annulaires, à l'intérieur du disque.
La
composante moléculaire du milieu interstellaire se trouve presque
exclusivement sur le plan équatorial du disque des galaxies spirales.
Mélangé à des poussières, il forme d'immenses
concentrations, appelées des nuages moléculaires géants,
eux-mêmes disposés le long des bras spiraux. Comme ces nuages
représentent le territoire privilégié pour les sites
de formation stellaire, les très jeunes étoiles, parmi lesquelles
on rencontre les étoiles massives, très chaudes et très
lumineuses des types O et B, se rencontrent dans ces structures en spirales.
Elles expliquent aussi pourquoi celles-ci sont si lumineuses, et également
les nébuleuses les bras spiraux sont ponctués de nébuleuses
très brillantes. Ces dernières signalent leur exposition
aux rayonnement ionisants des étoiles les plus chaudes, qui les
environnent.
Les
nébuleuses brillantes, composées d'atomes ionisés,
et donc chauds, représentent un troisième phase du milieu
interstellaire, dite HII. Mais on peut en définir d'autres, soit
excessivement chaudes, soit de températures intermédiaires.
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Rouages |
La
rotation et ses problèmes
Lorsqu'on parle de la rotation d'une galaxie,
on peut entendre plusieurs choses. Il peut s'agir du mouvement d'ensemble
de la matière (étoiles et nuages) qui la compose. Mais, quand
on considère les galaxies spirales, il peut aussi s'agir de la rotation
des structures qui lui confèrent sa morphologie (bras spiraux, barre).
Ces deux types rotations s'effectuent dans le plan du disque, mais répondent
à des modalités différentes.
La matière
Les étoiles comme le reste de la
matière contenue dans une galaxie sont soumises à la gravitation
globale que chacune contribue à façonner. Il en résulte
pour tous ces corps un mouvement de révolution autour du centre
de masse de la galaxie, qui correspond aussi à son centre géométrique.
Rotation
différentielle
En première approche, on peut s'attendre
à ce que la période de révolution de chaque étoile
soit définie en fonction de la distance à ce centre par la
troisième loi de Kepler. Les corps proches du centre doivent ainsi
accomplir une révolution complète beaucoup plus rapidement
que ceux qui sont plus éloignés. Et un constat peut être
fait : si une galaxie a bien une rotation globale quand on considère
la matière qu'elle contient, cette rotation, contrairement à
ce que l'on observerait pour un corps solide, n'est pas la même selon
la distance à laquelle on se trouve. On parlera alors d'un mouvement
de rotation différentielle, qui fait prendre du retard, aux astres
les plus éloignés.
Halo
sombre
Les astronomes ont cependant eu la surprise
de constater que ce retard n'est pas aussi important que le laisseraient
prévoir les lois de Kepler. De façon très générale,
les galaxies spirales obéissent à une même logique.
Jusqu'à un tiers environ du rayon de leur disque stellaire, la
vitesse linéaire croit proportionnellement à la distance
au centre (la vitesse angulaire reste constante). Mais
ensuite, le ralentissement de la course des corps plus éloignés
se stabilise. Et en définitive, les parties externes du disque -
et jusque dans le gaz qui se trouve au au-delà du disque stellaire
- tournent plus rapidement que ce qui était escompté. Les
courbes de rotation, qui représentent la vitesse linéaire
en fonction de la distance montrent que cette vitesse se stabilise. Dans
la Voie lactée, ce "plateau" commence à ce constater à
la hauteur de l'orbite du Soleil, et se confirme ensuite aussi loin que
l'on puisse détecter de la matière appartenant à la
Galaxie.
Plusieurs possibilités ont été
invoquées pour expliquer cette discordance. Mais la plus généralement
acceptée consiste à admettre que lorsqu'on envisage ce que
devrait être la rotation de la galaxie, on sous estime sa masse,
et l'on se trompe sur sa distribution. Mieux vaut dès lors admettre
que les galaxies spirales sont immergées au coeur d'un vaste halo
de matière sombre, indétectable autrement que par les effets
gravitationnels qu'elle induit. Ce halo auquel les meilleurs modèles
de structure galactique donnent une forme ellipsoïdale, relativement
aplatie aux pôles, prend "en sandwich" la matière lumineuse
des galaxies et peut parfaitement expliquer leur courbe de rotation : la
rotation globale du disque reste différentielle, mais elle est en
quelque sorte rigitifiée par rapport à ce qu'elle serait
en l'absence de matière sombre.
Les spirales
Les spirales présentent une rotation
bien différente : elles tournent autour du centre des galaxies d'un
bloc, comme un corps rigide. Pour en comprendre la raison un point doit
être souligné au préalable : les bras spiraux ne sont
pas des régions des disques où seraient concentrées
toutes les étoiles (et les nuages de gaz interstellaire), alors
que les régions inter-bras seraient pratiquement vides. Il y a des
étoiles partout. Les étoiles ne sont sans doute pas réparties
uniformément sur tout le disque. Il y a bien, comme on le verra
plus loin, une surdensité d'étoiles et de nuages le long
des bras spiraux. Mais ce n'est pas elle qui explique le dessin des bras.
Les bras spiraux sont avant tout des régions où sont concentrées
certaines étoiles excessivement brillantes, et que l'on ne retrouve
pas dans les inter-bras : les étoiles les plus jeunes, à
peine sorties du nid, et parmi elles les étoiles massives bleues,
à très faible durée de vie. On voit des bras spiraux
en premier lieu parce que ces étoiles y dominent par leur éclat,
et parce que leur intense rayonnement UV suscite autour d'elles de grandes
nébuleuses brillantes, aussi appelées régions II.
Les bras spiraux sont donc en première instance des régions
dans lesquelles se déroulent de façon privilégiée
le processus de formation stellaire.
Dès lors, lorsqu'on parle de la
rotation des bras spiraux, on ne vise pas le mouvement de révolution
de corps matériels, mais plutôt le mouvement de propagation
d'un certain processus.
Aspects
d'un découplage - Le découplage de la rotation des bras
spiraux et de rotation globale des étoiles peut encore s'exprimer
autrement : l'enroulement des bras spiraux relativement au sens de rotation
peut être, soit tel que la matière aborde les bras par leur
partie concave (enroulement dit "trailing"), soit (plus rarement)
que la matière les aborde par leur partie convexe (enroulement "leading").
Reste encore à
dire en quoi consiste exactement ce processus, et pourquoi les formations
stellaires ont-elles lieu dans des zones particulières de forme
spirale. Les astronomes sont conduits à suivre ici deux
pistes, largement complémentaires. La première invoque la
propagation de perturbations, appelées ondes de densité,
dans le potentiel gravitationnel global des
galaxies; la seconde en appelle directement à l'effet de la propagation
des formations stellaires par un mécanisme analogue à celui
des feux de forêt.
Les
ondes de densité
Le champ gravitationnel de chaque étoile
prise individuellement diminue rapidement en intensité à
mesure que l'on s'éloigne de l'étoile, si bien que deux étoiles
particulières sont généralement trop éloignées
l'une de l'autre dans une galaxie pour ressentir les effets de leur l'attraction
mutuelle. Reste que le potentiel gravitationnel d'un corps ne s'annule
exactement nulle part, et au total, les milliards, ou plutôt les
centaines de milliards d'étoiles que comptent une galaxie finissent
par contribuer, chacune pour sa très petite part, à la constitution
d'un potentiel gravitationnel global, dont le rôle ne pourra plus
être négligé.
Ce champ global est normalement très
lisse. Sa valeur varie uniformément d'un point à un autre,
sans discontinuité brusque. Mais comme l'ont montré en particulier
C. C.Lin et F. H. Shu dans les années 1964-70, il n'est pas stable.
La moindre perturbation, qui peut être l'influence d'une galaxie
voisine, va susciter des changements abrupts dans ce champ. Les modèles
numériques montrent que cela commence par l'apparition d'une discontinuité
linéaire dans le potentiel gravitationnele qui se développe
à partir du bulbe. Une barre que le mouvement de rotation de la
galaxie conduit dans les parties extérieures à s'enrouler
en forme de bras spiraux. La discontinuité gravitationnelle que
ceux-ci continuent de représenter va modifier abruptement la vitesse
de rotation des corps (étoiles et nuages) qui traversent les bras.
Il s'ensuit une sorte d'embouteillage,
qui explique que l'on désigne cette perturbation sous le nom d'onde
de densité. Rien de bien grave pour les étoiles dont la concentration
augmente un peu, mais qui ne vont pas en être autrement affectées.
En revanche les nuages de gaz qui traversent ces zones perturbées
se trouvent destabilisés, ce qui met en route les processus de formation
stellaire. Des étoiles de toutes masses se forment, mais les plus
grosses se font davantage remarquer leurs distributions le long de l'onde
de densité en dessine le contour.
Les galaxies où dominent les ondes de densité
offrent souvent un beau spectacle, ce sont des galaxies dites à
"grand design" à l'exemple de M 51 (Chiens
de Chasse), ou de NGC 4622 (Centaure), ci-dssous;
NGC 4622
: les jeunes étoiles bleues et les régions HII tracent les
contours
des ondes
de densité. (Crédit : G. Byrd, R.
Buta, (Univ.Alabama),
T. Freeman (Bevill State College), NASA).
Le
feu de forêt galactique
Quel que soit le mécanisme déclencheur
d'un processus de formation stellaire, celui-ci aura tendance à
se propager de proche en proche. Les étoiles massives ont des relations
violentes avec leur environnement pendant toute leur existence. Mais surtout,
après quelques millions d'années, elles explosent en supernovae.
Ces cataclysmes engendrent des ondes de choc qui destabilisent les portions
de nuages interstellaires situés dans les régions voisines
: de nouvelles naissances groupes d'étoiles se mettent en route,
et très vite, les explosions de nouvelles supernovae reproduisent
le même schéma, jusqu'à épuisement de la matière
première. Une situation très similaire à la propagation
d'un feu de forêt, et qui est susceptible, à cause de la rotation
différentielle des galaxies, de donner lieu ici encore à
l'apparition de structures en spirales.
NGC 2841
: une structure de spirale grumeleuse, typique des galaxies stochastiques.
On parle dans ce cas de galaxies
à spirales stochastiques ou de galaxies floculentes. Un bon exemple
en est donné par NGC 2841 (Grande
Ourse) (ci-dessus). Mais si l'on note que les ondes de densité
fournissent un excellent déclencheur pour le processus d'astration,
on comprend que les deux sortes de spirales puissent cohabiter dans une
même galaxie.
On peut le constater entre autres dans les morphologies
plutôt floculentes, mais apparemment déjà organisées
par des ondes de densité de galaxies telles que M 33 (Triangle),
et de M 63 (Chiens de Chasse), ou dans les morphologies
de galaxies plutôt marquées par des ondes de densité,
mais où le feu de forêt laisse clairement une empreinte, comme
c'est le cas pour M 61 (Vierge), et certainement
aussi notre Voie lactée, si l'on pouvait
la voir de l'extérieur. Une galaxie comme M100 (Chevelure
de Bérénice) pourrait, quant à elle, constituer
un juste milieu entre les deux morphologies.
Le
problème de l'enroulement
La rotation différentielle
des galaxies spirales explique sans doute pourquoi des structures se développant
dans leur disque doivent nécessairement finir par s'enrouler et
former les spirales observées. Mais, si l'on s'en tient à
cela, il apparaît que, pour la même raison exactement, ces
spirales auront une durée d'existence limitée. Elles doivent
finir par se dissoudre progressivement "dans la masse", comme un nuage
de lait versé dans une tasse à café disparaît
lui aussi après quelques tours de cuillère. Les
ondes de densité elles-mêmes s'épuisent. Elles disparaissent
au bout de quelques centaines de millions d'années. Si, donc, les
spirales n'étaient pas régénérées ou
revigorées d'une manière ou d'une autre, la
population dominante des galaxies serait formée de galaxies lenticulaires
et non de galaxies spirales. Les mécanismes invoqués ici,
et qui s'avèrent être une fois de plus la clé principale
de la morphologie des galaxies, sont les interactions permanentes des galaxies
dans leurs amas.
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