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L'étude
des étoiles doubles a été le point de départ de l'extension à tout
l'univers des lois de la gravitation universelle et de l'affirmation de
le généralité absolue du coefficient d'attraction qu'elles renferment;
depuis que le premier Savary l'a démontrée par le fait, deux mathématiciens
célèbres, Darboux et Halphen, répondant à une question académique
posée par Bertrand, ont fait voir d'une façon tout à fait générale
et abstraite que :
« Une force
centrale qui, agissant sur une particule matérielle lui fait décrire
une conique, a nécessairement la même expression que la force de la gravitation
de Newton ».
Les astronomes se sont
ainsi trouvés en droit de comparer les systèmes stellaires doubles entre
eux et au Système solaire.
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La méthode
Soient donc rapportés
à des unités déterminées de masse, de longueur et de temps :
M, et M'
les masses de deux étoiles,
r
le
demi grand axe de l'orbite stellaire,
P la durée de la
révolution,
On aura pour tous les
systèmes doubles et d'après la troisième loi
de Kepler :
r3
/ (P² (M+M')) = Cte.
Soient, par rapport
aux mêmes unités :
m
la masse du Soleil,
m'
la masse de la Terre,
R le demi grand
axe de l'orbite terrestre,
T la durée de l'année
sidérale,
on aura, par suite de
l'universalité de la loi de gravitation,
r3
/ (P² (M+M')) = R3 / (T² (m+m'))
équation qui donne
une relation entre les éléments d'un système stellaire quelconque et
ceux du Système solaire.
Soit maintenant D
la distance de l'étoile au Soleil rapportée à la même unité, cette
équation pourra s'écrire :
(r/D)3
/
(P² (M+M')) = (R/D)3
/
(T² (m+m'));
or, r/D
= (a") = demi grand axe de l'orbite stellaire, exprimé en secondes d'arc,
et R/D= p = parallaxe de l'étoile, exprimée en secondes
d'arc; on a donc :
(M+M') /
(m+m') = (a"/p)3
/ (P/T)²
d'où cet énoncé remarquable
:
Le rapport
de la masse totale d'un système stellaire double, à la somme des masses
du Soleil et de la Terre est égal au quotient du cube du rapport du demi-grand
axe à la parallaxe exprimé en secondes, par le carré du rapport de la
durée de révolution du système à celle de l'année sidérale.
Choisissons maintenant
les unités et prenons pour unité de masse, la somme des masses
du Soleil et de la Terre (m+m'
= 1), unité de longueur, celle du demi grand axe de l'orbite terrestre
(R = 1), unité de temps, la durée de l'année sidérale (T = 1),
la relation précédente prendra la forme simple :
(M+M') =
(a"/p)3 / p²,
et l'énoncé ci-dessus
se réduira au suivant :
La masse
totale d'un système stellaire double est égale au quotient du cube du
rapport de son demi grand axe à sa parallaxe, exprimée en secondes par
le carré de sa durée de révolution exprimée en années.
Comme la parallaxe d'une
étoile est le quotient du demi grand axe (a") exprimé en secondes par
le même demi grand axe a exprimé en unités astronomiques ,
la relation précédente peut encore s'écrire :
(M+M') =
(a)3 / P²,
et le théorème précédent
s'énoncer :
La masse
totale d'un système stellaire double est égale au quotient du cube de
la longueur de son demi-grand axe par le carré du temps de sa révolution.
Sous cette forme, d'ailleurs
moins pratique, l'analogie avec les lois du Système solaire est beaucoup
plus évidente.
On peut donc peser
les étoiles de même que l'on a pesé les planètes; et, dans les deux
cas, les seuls éléments qui interviennent réellement dans la mesure
sont les angles et le temps.
La détermination
de la masse des binaires spectroscopiques introduit une complication, car
les caractéristiques de l'orbite, déterminées sur la base de la mesure
des vitesses radiales ,
qui sont les projections de vitesses réelles sur la ligne de visée. Partant,
les dimension réelles de l'orbite ne sont connues qu'à un facteur sin
i près (i étant l'inclinaison du plan de l'orbite par rapport à la ligne
de visée). Cela admis, le reste est simple. Reprenons l'équation donnée
plus haut : r3
/ (P² (M+M')) = R3 / (T² (m+m'))
et
désignons par a la distance r exprimée en unités
astronomiques, par M + M' la masse totale mesurée avec m+m'
comme unité et supposons P exprimé en fractions d'année sidérale. Il
viendra :
M+M' = 1/p².
a3,
d'où
(M+M').sin3
i
= 1/p².(a.sin i)3
de sorte que (a sin
i) étant connu en unités astronomiques, on aura la valeur de (M +M')
sin3 i; la méthode spectroscopique ne
donne donc qu'une fraction de la masse totale. mais l'inclinaison i, différant
évidemment toujours un peu de 90°, on peut, avec une approximation suffisante,
remplacer le premier membre par M + M' et écrire :
(M+M') =
1/p².(a.sin i)3
Appliquée aux étoiles
b du Cocher et a de la Vierge, qui ont été
parmi les premières à avoir été reconnues comme binaires spectroscopiques,
cette formule donnait pour M + M' aux astronomes de la fin du XIXe
siècle : 4,5 et 2,5. Avec ce résultat,
ils pouvaient conclure que quoique les systèmes binaires soient en apparence
très différents des systèmes ordinaires par les faibles dimensions dimensions
de leurs orbites et la petitesse de leur période, leurs masses n'en sont
pas moins absolument comparables aux leurs et, par suite, Ã celle du Soleil. |
Les binaires spectroscopiques, qui de surcroît
sont des binaires à éclipses
se sont avérées très précises, car il est possible d'en connaître
l'inclinaison de l'orbite. Ces objets ont ainsi été le principal outil
employé par les astronomes du XXe
siècle pour comparer les masses qu'ils en déduisaient avec
les modèles numériques d'évolution stellaire .
Ils sont en particulier à l'origine de l'établissement de la relation
masse-luminosité (empirique) valable pour un grand nombre d'étoiles.
En 2004,
pour la première fois, la masse d'une étoile a pu être mesurée directement
sans qu'il soit nécessaire qu'elle possède un compagnon. La méthode
utilisée a fait appel à la déflexion de la lumière par le champ de
gravitation de cet objet (effet de microlentille gravitationnelle, constaté
dès
1993, lorsqu'elle s'est interposée
devant une étoile du Grand Nuage de Magellan ). |