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L'écriture cursive romaine |
La paléographie latine de l'Antiquité comprend une écriture cursive, de même que la paléographie grecque. Il est probable que l'influence hellénique s'est fait sentir dans le développement, et peut-être même la création, de l'écriture cursive latine, comme dans le développement de l'onciale romaine. On ne possède plus de documents latins en cursive aussi anciens que les textes en grec, mais les découvertes faites à Pompéi ont permis de constater que l'écriture cursive était pleinement constituée en Italie, au moins dès le Ier siècle de notre ère. L'écriture cursive romaine était de plusieurs sortes, mais la rareté des documents que l'on en possède, surtout pour les écritures des manuscrits et des chartes, fait que l'on ne peut pas établir de classification très sûre parmi ces différentes espèces. - 22. - Ier siècle ap. J.-C. - Cursive romaine. Tablette de cire de Pompéi. - Lettres caractéristiques : B, E, G, M, R, S. On désigne habituellement ces diverses espèces de cursive par le genre de documents qui nous les ont fait connaître, qui constituent des groupes offrant chacun des caractéristiques très distinctes et qui sont la meilleure base pour l'étude générale de la cursive romaine. Ces documents se répartissent en deux groupes : 1° les tablettes de cire (fig. 22) et les graffiti (fig. 24), auxquels on peut rattacher l'écriture des diplômes militaires, certaines formes de l'écriture des inscriptions (Epigraphie) et même l'écriture des fragments sur papyrus provenant d'Herculanum (fig. 23);La minuscule primitive ou minuscule cursive, dont il a été parlé à propos de l'écriture semi-onciale, forme un groupe intermédiaire entre la cursive et la semi-onciale. - 23. - Ier siècle ap. J.-C. (?) - Cursive romaine. Papyrus d'Herculanum contenant des fragments de discours. - Lettres caractéristiques : R, S. Ecriture des tablettes de cire et des graffiti. La nature des matières sur lesquelles cette cursive était tracée excluait l'usage des courbes et des combinaisons de lettres compliquées et n'admettait que des lignes droites, des angles ou des lignes n'offrant qu'une légère ondulation. C'est dans l'écriture des tablettes de cire que se révèle le mieux la tendance à détacher les différents traits des lettres et à leur donner une direction dirigée de bas en haut. L'aspect général de l'écriture a l'apparence d'une suite de traits verticaux isolés; placés les uns à côté des autres et rejoints par quelques petites courbes de distance en distance. C'est qu'en effet un certain nombre des lettres les plus importantes sont formées de deux ou plusieurs traits droits et parallèles. 24. - Ier siècle ap. J.-C. - Cursive romaine. Graffiti de Pompéi contenant des noms. Lettres caractéristiques : E, P, R, S. La forme cursive de la lettre E est l'exemple le plus remarquable de ce mode de graphie. La figure 22, ainsi que le graffiti reproduit dans la figure 24, en offrent des exemples à presque toutes les lignes. L'F a aussi une forme à deux traits parallèles dont le second est plus court que le premier. L'M est formé de quatre traits dont le premier est un peu plus long que tous les autres (fig. 22, ligne 5, où se trouvent deux m à la suite l'un de l'autre dans le mot nummos). Trois lettres, G, R et S, sont surtout importantes pour la classification des écritures des tablettes de cire. R et S ont toujours la forme cursive qui a passé plus tard dans l'écriture semi-onciale et dont de nombreux exemples se trouvent dans les figures ci-jointes. Le G a tantôt exclusivement la forme onciale (fig. 22, l. 2, tablettes de Pompéi et tantôt la forme cursive (tablettes de Transylvanie). Comme les tablettes de Transylvanie sont restées entachées du soupçon de faux tant qu'elles étaient les seules de leur espèce et qu'on n'avait pas fait la découverte des nombreuses tablettes de Pompéi, on ne leur a accordé aucune valeur et l'on faisait, du genre d'écriture déjà représenté par de nombreux graffiti, une espèce d'écriture, minuscule ou une écriture onciale mélangée de minuscule. Mais la présence seule des lettres G, R, S, avec une forme de tracé rapide si distincte, suffirait pour faire La lettre A de l'écriture des tablettes de cire n'est qu'une modification de l'écriture capitale où l'on reconnaît déjà la forme primitive de l'A oncial (fig. 22, l. 1, 2, 3, etc.). Des tableaux très exacts des formes des lettres de l'écriture des tablettes de cire se trouvent dans le Corpus inscr. latt., t. III et IV, et dans le manuel de Thompson, pl. de la p. 216, reproduite ci-dessous : Ecritures cursives latines, d'après Thompson. Les premiers exemples des ligatures, qui prirent plus tard un si grand développement dans l'écriture cursive du Moyen âge, se rencontrent dans l'écriture des tablettes de cire, mais seulement dans la mesure où l'instrument du tracé de l'écriture, le stile ou stylet , pouvait le permettre. Les tablettes de cire de Pompéi n'en offrent que peu d'exemples (fig. 22, et, à la l. 3), mais les graffiti en ont souvent davantage (fig. 24, ch et et), surtout dans les graffiti des catacombes de Rome, tels que les inscriptions de la crypte de saint Corneille, et enfin quelques tablettes de cire de Transylvanie nous révèlent tout un système de lettres conjointes et enclavées ayant pour but de diminuer le nombre des traits à tracer sur la cire : c'est ainsi que les groupes de lettres ea et er sont réduits de quatre traits à trois seulement, em de six traits à quatre, etc. (Arndt, Schrifitafeln, pl. 1). 25. - Ve siècle. - Cursive romaine. Fragment d'un rescrit impérial adressé à un fonctionnaire de la Haute Egypte. - Lettres caractéristiques : A, B, E, M, N, P, R. De très beaux fac-similés des tablettes de cire se trouvent dans la Pal. univ. (pl. du n° 63) et dans la Pal. soc. 1re sér., t. II, pl. 159). La collection complète des graffiti a été faite plusieurs fois, notamment par Garrucci (Graffiti de Pompéi, 2e, éd., 1856: in-19) et dans le Corp. inscr. latt. Les diplômes militaires, qui forment une classe de documents épigraphiques très importants et assez nombreux montrent, dans les fac-similés qui en ont été donnés, pour les extraits de ces actes qui étaient gravés sur les côtés extérieurs des tablettes, un grand développement des formes cursives, procédant pour ainsi dire naturellement des formes de l'écriture capitale, qui était l'écriture du texte même de l'acte, toujours écrit d'une façon plus soignée que le simple extrait. Germanus [hic] fui, anno M (pour µ' = 46) regnante Childeberto (Cahier et Martin, Mél. d'archéol., t. I, pp, 135-137).Les formes des lettres R, S, F, etc., dans cette inscription, font voir que l'écriture des tablettes de cire antiques était encore à cette époque l'écriture journalière des lettrés, exactement comme au temps des Romains. Enfin, suivant la nature des matières subjectives des inscriptions et suivant que la pierre ou le métal se prêtait plus ou moins facilement au tracé des courbes et des ligatures des lettres, on a quelquefois sur les documents épigraphiques une véritable écriture cursive qui offre tous les caractères de l'écriture des chartes de Ravenne et documents analogues. Un des spécimens les plus curieux de ce genre est un plat d'argent découvert dans le Dauphiné et portant à son revers la mention de son possesseur, gouverneur du pays de Vienne au commencement du VIIIe siècle, écrite en latin (Agnerico som) avec des ligatures cursives pour les lettres gn, eri, co, so (Le Blant, Nouveau recueil des inscriptions chrétiennes de la Gaule, 1892, t. 1). On a aussi, en lettres cursives, des lames de plomb, découvertes en Italie, contenant des formules d'exorcismes chrétiens, etc. Enfin, on a découvert des briques romaines portant des alphabets cursifs, accompagnés de modèles tracés en cette écriture, qui ne laissent pas de doute sur le fait que l'écriture cursive romaine était enseignée dans les écoles de l'Antiquité, pour les usages journaliers et commerciaux. - 26. - 565 ap. J. -C. - Cursive romaine. Charte de Ravenne, dite Charta plenariae securitatis, contenant un règlement de comptes entre particuliers. - Lettres caractéristiques : G, R, S, et ligatures AC, AE, AR, CI, EU, ED, EM, EN, EP, ER, ES, GR, ST, TA, TE, TI, TR, TS. Une phase tout à fait ancienne de l'écriture cursive antique nous est fournie par quelques-uns des papyrus découverts à Herculanum (fig. 23) et ou le caractère de la cursive ne se révèle que par les formes de deux lettres seulement, l'R (lignes 6 et 8), et I'S (l. 3, 6, et surtout l. 7, dans le mot fragmentaire nnius). Des fac-similés photographiques de ces fragments se trouvent dans les Ex. codd. latt., pl. 2. Ecriture des rescrits et des chartes de Ravenne. Les formes des lettres cursives sont identiques, par leurs caractères essentiels, dans l'écriture des rescrits et dans celle des chartes de Ravenne. Les principales différences se remarquent seulement pour les lettres A, B, P, R, qui gardent dans les rescrits leurs formes primitives, telles qu'elles sont données dans les tablettes de cire. La lettre E (fig. 25, ligne 4 [portionem debitam, etc.], l. 2 [nec, etc.]), dérive de I'E à deux traits parallèles, qui sont tracés ici d'une manière continue, de sorte que la lettre prend l'apparence d'une boucle longue et étroite, terminée à sa partie supérieure par un petit crochet, qui tient lieu de la barre ou traverse de l'E. Les lettres O et V (consonne et voyelle) sont toujours de dimensions beaucoup plus petites que les autres et sont placées près de la ligne de sommet de l'écriture (fig. 25, l. 1, 2, etc.). Dans la lettre M, la caractéristique de l'allongement du premier jambage s'est conservée (fig. 25. 1, etc), de même que dans la lettre, N (même ligne), de sorte que ces deux lettres ressemblent exactement au et au de la minuscule et de la cursive grecques. Les autres lettres (C, D, F, G, H, I, L, O, Q, T) sont les mêmes dans les rescrits et dans les chartes de Ravenne. Un autre caractère général de la cursive antique est de n'avoir ni pleins ni déliés, comme l'onciale et surtout la capitale. On peut voir, dans les deux figures 25 et 26, que tous les traits de l'écriture sont toujours exactement de la même force ou de la même grosseur. La principale différence entre les deux variétés de la cursive antique ne se trouve pas dans les formes des lettres, mais plutôt dans l'aspect général et la direction du tracé de l'écriture. La cursive des rescrits (fig. 25) se distingue d'abord par ses dimensions, réduites de plus de moitié dans la figure 25, mais qui ont plus de 2 cm de hauteur moyenne. C'est une écriture beaucoup plus posée et plus uniforme, dont tous les traits offrent la même inclinaison régulière vers la droite et qui n'est rompue que par le développement des hastes et des queues, notamment pour la lettre H (fig. 25, l. 4, au mot hoc), et par les lignes de fioriture qui forment les sommets de quelques lettres, comme R et T (fig. 25, ligne 3, au mot narratione). A première vue, cette écriture ressemble à une série de lignes droites ou de bâtons d'écriture tracés les uns à la suite des autres et accompagnés de quelques autres traits accessoires. Dans les chartes de Ravenne, au contraire, l'écriture est interrompue, à de très courts intervalles, par des traits contournés et renversés, tracés en sens contraire de la direction générale de l'écriture, inclinée vers la droite comme dans les rescrits, ou par des hastes et des ligatures qui s'élancent irrégulièrement par-dessus la ligne de l'écriture (fig. 26). Ligatures. Dans les rescrits, les ligatures ne sont pas compliquées et se font toujours par les sommets des lettres, dont la position et l'aspect normal ne sont jamais modifiés, par exemple pour PO (fig. 25, l. 1, au mot portionem), PS (même ligne, au mot ipsi), TO (l. 2), TA (l. 3, memorata), TI (l. 3), etc. Dans les chartes de Ravenne, le principal caractère des ligatures est de faire perdre souvent presque complètement aux lettres leurs formes originaires, par suite des changements de position auxquels les traits des lettres sont soumis pour faciliter la rapidité du tracé. Les ligatures les plus remarquables sont celles de ET et TE (fig. 26, l. 2, dans le mot civitate), et TI (fig. 26, l. 1, premier ti de notitia), dans lesquelles le T est complètement retourné, sa ligne de tête au sommet servant de base à sa haste. On sait que la ligature ET, tout à fait avec la forme qu'elle a dans la cursive antique (&), s'est conservée et est encore d'un usage fréquent comme caractère typographique : les deux panses du 8 sont l'E, la ligne oblique d'en bas est la barre du T retourné, et l'autre ligne montante est la haste même du T. Les ligatures AC (fig. 26, l. 1, dans accepit) et AT (l. 1, dans Gratianus) sont fondées sur le même principe du renversement de la seconde des deux lettres qui composent chacune de ces ligatures. Dans les ligatures où la lettre T conserve sa position verticale, la barre du T se prolonge et se confond avec la lettre qui le suit, comme dans TI, en certains cas (fig. 26, l. 1, deuxième ti de notitia, et dans Gratianus, et l. 2, dans rustica) et TR (l. 2, dans le mot intra). Il en est de même pour la traverse ou barre médiane de l'E, dans les ligatures EM (fig. 26, l. 1, dans Item), EN (I. 2, dans Ravenna), EP (l. 1, dans accepit), ES (l. 2, dans les mots quae sunt), etc. Comme la séparation des mots dans les textes n'existe pas encore à l'époque de l'écriture des chartes de Ravenne, les ligatures se font aussi bien d'un mot à un autre, que dans l'intérieur du même mot, comme on peut le voir par le dernier exemple qui vient d'être cité, ainsi qu'aux mots accepit suprascriptus (fig. 26, l. 1), sunt intra (l. 2) et proedia rustica (l. 2), qui présentent les ligatures de T à S, de T à I et de A à R entrae ces différents mots. Les ligatures de la cursive antique sont surtout, nombreuses à l'époque la plus ancienne de cette écriture. Elles y ont toujours subsisté, en plus ou moins grand nombre, dans les modifications qu'elle a reçues aux siècles suivants. VOYELLESLa principale caractéristique à tirer des signes auxiliaires, pour la cursive romaine, est l'indistinction des mots, comme dans les autres écritures latines, avec, en plus, les ligatures des lettres d'un mot à un autre, et l'absence complète de toute ponctuation. Les abréviations sont rares, ne consistant que dans les abréviations les plus simples connues de l'Antiquité ou des sigles, simples ou composés, tels que sstus pour suprasciptus (fig. 26, l. 1). La cursive romaine a été d'un emploi très général jusqu'au VIIe siècle et s'est conservée ensuite plus ou moins longtemps suivant les différents pays. Quoique l'usage des tablettes de cire ait subsisté dans toute l'Europe pendant le Moyen âge, il n'a pas entraîné avec lui la conservation de l'écriture qui était usitée dans l'Antiquité pour ce genre de documents. Dans les chartes, la cursive romaine proprement dite a subi des modifications suivant chacun des pays où se sont développées les écritures nationales et a produit les difrentes variétés d'écriture cursive mérovingienne, lombardique, wisigothique, etc. C'est dans la Grande-Bretagne que la cursive a cessé le plus tôt (VIIe siècle), puis en France (VIIIe, s.). Elle s'est conservée beaucoup plus tard en Espagne (XIe s.). Enfin, dans son pays d'origine, l'Italie, elle a subsisté encore plus longtemps, sous les trois formes principales qu'elle a prises dans l'écriture lombardique, l'écriture de la chancellerie des pages et l'écriture des notaires de l'Italie méridionale, qui l'ont, conservée jusqu'au milieu du XIIIe siècle, en n'y introduisant que quelques simplifications dans le système des ligatures, dont ils ont réduit graduellement le nombre, mais en conservant jusqu'à la fin les ligatures em, er, es,ct, st, re, ri, te, ti. Ecriture cursive. Fragment d'une lettre autographe de Christophe Colomb (1502).
Manuscrits et documents célèbres en cursive romaineOn a vu qu'aux manuscrits proprement dits il faut joindre, pour l'écriture cursive romaine, deux autres catégories de documents, les tablettes de cire et les inscriptions.Une tablette de cire découverte à Pompéi est une quittance portant une date qui correspond à l'année 55 après J.-C. Sur ces tablettes de cire, qui sont des comptes de banquier, on a non seulement l'écriture cursive antique tracée au stylet, mais aussi des spécimens de la cursive tracée à l'encre et au pinceau sur le bois, dans les endossements et les listes de noms de témoins qu'elles portent inscrits sur leurs revers extérieurs. Les chartes comprennent les rescrits, dont l'écriture a été étudiée ci-dessus. On a découvert, également dans la Haute Egypte, comme les rescrits, un rouleau de papyrus dont le texte est un diplôme militaire romain, écrit par exception sur une autre matière que le métal, et qui offre le même genre d'écriture que les rescrits, avec des proportions moins régulières (Palaeographical society, 2e série, t. II, pl. 165), ainsi qu'une vente d'esclaves sur papyrus, de l'année 166 après J.-C., ou l'on retrouve les formes caractéristiques de l'A et de l'R (Pal. soc., 2e sér., t. Il, pl. 190). Le second groupe de documents est connu sous le nom de Chartes de Ravenne. Ces chartes doivent leur dénomination au lieu d'origine des plus importantes d'entre elles, la ville de Ravenne, qui était, au Ve et au VIe siècle, un des centres de l'administration impériale (Exarchat de Ravenne). Elles sont toutes sur papyrus. La plus célèbre des chartes de Ravenne a passé longtemps pour le testament même de Jules César : elle portait, en tête du document, deux lignes en caractères cursifs romains assez bien contrefaits (à l'exception de quelques E, T et V et de quelques ligatures incorrectes) qui donnent pompeusement à l'acte ce titre fallacieux. Cette falsification est probablement l'ouvrage d'un très habile faussaire, Hamon, qui fut maître d'écriture de Charles IX et finit par être pendu en 1569. Cette charte était encore à Ravenne au commencement du XVe siècle, comme nous l'apprend un érudit italien de cette époque, Pontius Virunius; elle passa en France, probablement au moment de la prise de Ravenne par les Français, en 1512, et fut placée à la bibliothèque royale, alors à Fontainebleau. Au XVIIe siècle, un bénédictin lui-même, Mabillon, se laissa d'abord tromper par l'inscription du faussaire, et ce n'est qu'en étudiant le contexte qu'il découvrit la supercherie. Cette charte est un simple règlement de comptes, que l'on trouve souvent mentionné, dans les ouvrages de diplomatique, sous le nom de charta plenariae securitatis, qui lui est donné dans un passage du texte même du document, dès la seconde ligne. Fut autre charte très importante, ayant la même provenance et qui se trouve aussi à la Bibliothèque nationale, est un acte officiel d'ouverture de plusieurs testaments de négociants de Ravenne, teinturiers, marchands de soieries ou d'étoffes, etc., fait en 552. Le plus ancien des testaments que renferme cette charte, qui est un rouleau de 5,90 m de longueur sur 0,30 m de hauteur, et qui devait même être originairement un peu plus long, remonte à l'année 474. Au milieu du XVIIIe siècle, cette charte se trouvait en la possession d'un orfèvre de Paris nommé Gallé et fut donnée par sa famille à la Bibliothèque royale dont l'administration fit faire un fac-similé du rouleau, sur sept planches de cuivre, pour servir à une édition qui ne put être publiée. Ces planches gravées furent retrouvées, après la Révolution, à la chalcographie du Louvre, par Champollion-Figeac, qui s'en servit pour une édition lithographique de ces papyrus (Chartes et manuscrits sur papyrus de la Bibliothèque royale, 1840, in-fol.). Un assez grand nombre de chartes et surtout de fragments se rencontrent dans différentes bibliothèques et dans les collections particulières (Pal. soc., 2e sec., t. I, pl. 54-53 : donation à l'église de Ravenne du commencement du VIIe siècle; Anc. charters Brit. Mus., 1878, t. IV; Archivio pal. ital., t. I, pl. 1-5; etc.). Une des pièces les plus curieuses est une charte émanée du roi des Hérules, Odoacre, remontant par conséquent jusque vers l'année 476, et dont la suscription est ainsi conçue : Viro inl. ac magnif. fratri Pierio, Odovacar rex (Marini, Pap. dipl., n° 82 et pl. 6). On a considéré comme la plus ancienne des chartes de Ravenne un document de l'année 444, relatif à une restitution de biens ordonnée par un tribun de l'administration impériale, mais d'autres découvertes, faites en Egypte, ont fait connaître des papyrus latins qui remonteraient à la fin du IVe siècle de l'ère chrétienne (Bibliothèque de Vienne). L'application de l'écriture cursive romaine aux manuscrits fut relativement rare. On en vit d'abord apparaître l'usage, comme pour l'onciale penchée et la minuscule primitive dans les annotations marginales de certains manuscrits, comme les textes bibliques et théologiques ou des ouvrages des Pères de l'église, par exemple dans les manuscrits de saint Jérôme (V. Fac-similés de l'École des chartes, pl. 152). Les recueils juridiques ou de nature analogue en firent d'abord un emploi plus étendu, comme un manuscrit des canons des conciles du VIe siècle (Delisle, Cab. des inss. de la Biblioth. nation., pl. 2, 3 et 4, et Bastard, Peint. et orn. de mss., pl. 7). Le plus beau spécimen de la cursive dans un manuscrit est fourni par le manuscrit des homélies de saint Avit, évêque de Vienne en Dauphiné, du VIe siècle (Biblioth. nation.), dont les fac-similés se trouvent dans la Pal. univ., dans la Pal. soc., etc. Les homélies de saint Maxime, évêque de Turin, se trouvent également dans un manuscrit en cursive romaine, du VIIe siècle (Bibliothèque Ambrosienne de Milan), ainsi qu'une traduction latine de l'historien Josèphe (même bibliothèque). Dans la Gaule du Nord, la cursive romaine a produit une variété spéciale dans la minuscule mérovingienne. (A. Giry et E.-D. Grand). |
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