|
. |
|
La pensée et ses outils > Philosophie |
La classification des sciences La philosophie et les sciences |
La philosophie a commencé par être la science universelle, et les diverses sciences particulières sont successivernent sorties de son sein. Aussi, avant de définir la philosophie, convient-il de définir la science. La science, a dit Aristote, recherche le « comment » et le « pourquoi » ; c'est la recherche des causes ou des raisons des choses elle a pour origine le besoin de comprendre, naturel à l'humain, qui se confond avec sa raison même. Supérieure en perfection à la connaissance vulgaire, elle s'en distingue surtout par trois caractères essentiels : la certitude, la généralité, la méthode. Elle ne se compose en effet que de vérités évidentes ou prouvées; ces vérités sont générales, c'est-à-dire qu'elles s'étendent à un nombre indéfini de cas du même genre; « il n'y a pas de science du particulier », disaient tous les philosophes anciens; ces vérités enfin sont enchaînées entre elles dans un ordre tel qu'elles se soutiennent et s'expliquent les unes les autres. La science permet non seulement de comprendre les choses, mais encore de les maîtriser : savoir, c'est aussi prévoir et pouvoir. La puissance de l'homme, a dit Bacon, est en raison de sa science. Les sciencesMais la science se divise nécessairement en autant de sciences différentes qu'il y a, pour ainsi dire, de régions distinctes dans la réalité. De là le problème de la classification des sciences.Classer les sciences c'est les distribuer en groupes distincts et subordonnés; c'est déterminer les rapports qui les unissent de manière à montrer quelle place elles occupent dans l'ensemble des connaissances humaines. On peut faire une classification en se mettant au point de vue soit : A) subjectif, d'après les facultés mises en jeu par le sujet qui connaît ;Conditions d'une bonne classification. Elle doit se faire A) D'après la nature des objets connus et non d'après les facultés du sujet pensant : « La science, dit Aristote, se divise comme la chose, c'est-à-dire comme son objet. » A. Ccomte dit également : « La classification doit ressortir de l'étude même des objets à classer et être déterminée par les affinités réelles et l'enchaînement naturel qu'ils présentent.. »Avantages d'une classification naturelle. Bacon a dit d'une bonne classification qu'elle est : « Globus orbis intellectualis » (De dignitate et augmentis scientarum). D'Alembert l'a traduit ainsi : « C'est comme une mappemonde de l'univers scientifique (Discours préliminaire de l'Encyclopédie). » Une bonne classification montre : 1° l'unité et la diversité des connaissances humaines;Classifications subjectives. Classification d'Aristote. Les sciences ne faisait qu'un pour les anciens avec celui de la division de la philosophie. Aristote admettait trois grandes classes de sciences: les sciences poétiques, les sciences pratiques et les sciences spéculatives, distinguées moins par la nature des objets qu'elles étudient que par le but qu'elles se proposent dans leur étude. Les trois grandes sciences spéculatives sont la physique, les mathématiques et la philosophie première. Classification de Francis Bacon. Classification de d'Alembert. Classifications objectives. Classifications des Scolastiques. Classification d'Ampère. La classification d'Auguste Comte. D'où la série des sciences fondamentales : 1° mathématique; 2° astronomie; 3° physique; 4° chimie; 5° biologie; 6° sociologie, dans laquelle chaque science est plus simple, plus génerale, plus facile, plus ancienne que celles qui la suivent et dont elle est indépendante, plus complexe, plus spéciale, plus difficile et plus récente que celles qui la précèdent et dont elle dépend. Classification d'Herbert Spencer. 1° les sciences abstraites qui ont pour objet des rapports considérés indépendamment des phénomènes et des êtres réels (mathématiques);H. Spencer admet en outre (ce que ne fait pas Comte) la possibilité de réduire entièrement les sciences inférieures aux supérieures. Dès lors, on pourra augmenter ou diminuer le nombre des sciences fondamentales; mais, dans toute classification rationnelle, elles se succéderont d'après le principe et dans l'ordre établis par Auguste Comte. Tel est bien le caractère de la division consacrée des sciences en quatre groupes : mathématiques, physiques, naturelles, morales. 1° Les sciences mathématiques étudient le nombre, l'étendue et en général les grandeurs ou quantités, à part des choses mêmes; et c'est pourquoi elles sont les sciences abstraites par excellence. Fondées tout entières sur des abstractions, elles se développent par le seul raisonnement. Telles sont l'arithmétique, la géométrie, l'algèbre, le calcul infinitésimal. 2° Les sciences physiques étudient les corps bruts, et l'on peut les ranger en deux groupes; selon la part plus ou moins grande qu'elles font au raisonnement et à l'expérience; d'un côté la mécanique et l'astronomie, intermédiaires entre les mathématiques et les sciences physiques proprement dites; de l'autre, la physique, la chimie, la minéralogie et la géologie, où l'observation prédomine sur le calcul. 3° Les sciences naturelles ou biologiques étudient les corps organisés (ou organismes) et vivants. Les unes essayent de déterminer les lois générales de l'organisation et de la vie et se résument toutes dans la physiologie; les autres, comme la botanique, la zoologie et la paléontologie, essayent d'en décrire et d'en expliquer les formes particulières et plus ou moins fixes. 4° Enfin les sciences morales étudient l'humanité. On y distingue d'abord les sciences morales proprement dites, comme la psychologie et la morale qui appartiennent aussi à la philosophie, puis les sciences sociales qui comprennent la linguistique (sciences. des langues), l'économie politique (science des richesses), le droit (science des lois qui régissent les rapports des citoyens entre eux), la politique (science du gouvernement des États), le droit des gens (science des rapports des nations entre elles), la psychologie (science des conduites), la sociologie et l'anthopologie sociale (sciences des sociétés humaines), et enfin l'histoire (science des changements qui se produisent avec le temps dans les sociétés humaines). La philosophieTel est le tableau des sciences. On remarquera que la philosophie n'y a pas de place. C'est qu'elle n'est pas, à vrai dire, une science particulière, l'une des sciences elle est, de nos jours comme à son origine, mais dans un autre sens, la science universelle.En effet, si la philosophie ne contient plus dans son sein toutes les sciences, elle n'en a pas moins pour objet les principes universels, les premiers principes, comme les appelle Aristote, desquels dépendent les principes des sciences particulières. Toute science cherche les raisons des choses : la philosophie cherche les raisons suprêmes des choses. Mais ces premiers principes, ces raisons suprêmes, envisagés en eux-mêmes, constituent pour la philosophie des objets déterminés dont elle est proprement la science; et il redevient vrai de dire, à ce point de vue, que la philosophie est une science particulière, ayant son domaine propre, distinct et séparé de celui de toutes les autres sciences. Quel est ce domaine? Tout d'abord l'existence de la pensée est une vérité que toutes les autres présupposent, un principe vraiment premier, du moins dans l'ordre de notre connaissance. Comme Descartes l'a fait voir, je puis douter de tout le reste : je ne puis douter de ma pensée même; et c'est dans ma pensée que toutes choses m'apparaissent. La pensée, c'est-à-dire l'esprit, voilà donc un des objets de la philosophie, l'objet propre de la psychologie philosophique. A la psychologie se rattachent deux autres sciences : la logique, science des conditions de la science même et de la vérité, la morale, science du bien, vraiment philosophiques par leur portée universelle; car toutes les sciences recherchent la vérité, et la vérité est, en général, l'objet naturel et légitime de la pensée humaine, comme d'autre part tous les arts recherchent quelque bien, et le bien en général est le but de l'activité et de la vie humaine tout entière. Psychologie, logique, morale, se rapportent toutes trois à l'humain, sujet de la pensée et de l'action : elles composent la philosophie subjective. D'autre part, les différentes sciences aboutissent à un certain nombre de vérités générales où elles se résument et qui sont comme leur dernier mot sur la nature. Mais ce mot ne peut être dit que par une science plus générale que chacune d'elles, universelle et vraiment philosophique, la philosophie des sciences. A son tour, la philosophie des sciences ne peut se constituer avec les seuls matériaux des sciences mêmes: il lui faut le point d'appui d'une philosophie supérieure qui soit proprement la science des premiers principes et des premières causes. Les sciences en effet ne connaissent que le relatif, c'est-à-dire des abstractions, des phénomènes, des caractères indéfiniment relatifs les uns aux autres : elles ignorent l'absolu, c'est-à-dire la nature intime et l'origine première ,des choses. Voilà donc une nouvelle étude, l'étude de l'absolu qui constitue la métaphysique. La philosophie subjective se trouve ainsi complétée par une philosophie objective; et aux trois grandes régions de la réalité, l'esprit (= le sujet pensant), le monde extérieur, la cause première, correspondent respectivement les différentes parties de la philosophie, psychologie, logique, morale, philosophie des sciences et métaphysique. Ordre des parties de la philosophieCes parties peuvent se grouper soit d'après les objets auxquels elles se rapportent, soit d'après le point de vue où elles se placent pour les étudier.Dans le premier cas, on retrouve la disposition précédente, d'une part, la psychologie, avec la logique et la morale, qui se rapportent à l'esprit humain, d'autre part la métaphysique, avec la philosophie des sciences qui en est comme la préface. Dans le second cas, il est manifeste que la psychologie philosophique et la métaphysique ont ce caractère commun d'être des sciences purement théoriques ou spéculatives, tandis que la logique et la morale sont plutôt des sciences pratiques, à tel point qu'on a pu même les appeler des arts, l'une l'art de bien penser, l'autre l'art de bien vivre. La philosophie, de ce point de vue, se divisera donc en philosophie spéculative comprenant la psychologie et la métaphysique, et philosophie pratique comprenant la logique et la morale. Tout le monde accordera que la philosophie pratique doit suivre la philosophie spéculative; mais le problème de la coordination de la psychologie et de la métaphysique est plus délicat : c'est au fond le problème de la méthode générale de la philosophie. En effet, si la philosophie doit commencer par la métaphysique, c'est qu'on la suppose d'emblée en possession des premiers principes, et il ne lui reste plus qu'à en déduire l'explication de toutes choses et de l'âme humaine elle-même. Mais des principes ainsi affirmés sans preuve et comme tombés du ciel ne peuvent être que des hypothèses gratuites. Est-il sûr d'ailleurs que toutes choses puissent ainsi se déduire de quelques principes, sans recours à l'observation? C'est la thèse d'un certain système, par exemple du panthéisme, mais elle n'est nullement évidente, et elle a des conséquences redoutables, entre autres la négation de la liberté humaine. La vraie méthode consiste donc à remonter des effets aux causes, des conséquences aux principes. La raison doit s'appliquer à se connaître elle-même avant de s'appliquer à la connaissance des choses. La psychologie est le vestibule de la métaphysique. La philosophie des sciences. En effet, les principales questions dont elle traite concernent : 1° Soit la nature de la science, ses conditions, ses limites et ses différentes espèces;Or les sciences, si l'on envisage leur nature et leurs méthodes, ressortissent évidemment à la logique, de même qu'il appartient à la métaphysique d'étudier leurs premiers principes et leurs conclusions dernières. D'une manière générale, toutes choses, l'histoire, les beaux-arts, peuvent avoir des rapports, comme les sciences, avec les objets de la psychologie, de la logique, de la morale ou de la métaphysique. Déterminer ces rapports, c'est faire la philosophie de ces choses. D'où il suit que la philosophie des sciences et en général toute philosophie appliquée présuppose, contrairement à l'assertion des positivistes, l'existence de la philosophie proprement dite. (E. Boirac / G. Sortais ). |
. |
|
| |||||||||||||||||||||||||||||||
|