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Dans le langage
courant, le bois est la partie de l'arbre
qui est recouverte par l'écorce.
C'est H. Mohl qui, le premier, a donné du bois une définition
botanique précise. Il a apliqué ce nom à la partie
interne du faisceau fibro-vasculaire des Monocotylédones,
qu'il divise en trois parties : le liber
à l'extérieur, le cambium au milieu,
le bois à l'intérieur. Le caractère du bois ainsi
compris est d'être constitué par des vaisseaux spiralés
et annelés d'un faible diamètre vers le centre de la tige,
ponctués et plus grands vers la périphérie, accompagnés
soit seulement de parenchyme-ligneux,
soit de fibres, soit de l'un et l'autre. Van Tieghem,
généralisant cette notion, a appelé cette partie faisceau
ligneux par opposition à la partie externe ou faisceau libérien,
caractérisée différemment. Comme il existe, dans toute
plante,
un plus ou moins grand nombre de faisceaux ligneux, le bois d'une plante
est donc l'ensemble de ses faisceaux ligneux. Cet ensemble a reçu
de Naegeli le nom de xylème.
Telle est la définition botanique du bois.
Voyons maintenant et avec quelques détails
sa structure. Dans une toute jeune tige ou jeune
racine
de Dicotylédone, telle qu'un Chêne,
un Orme, etc., les faisceaux ligneux se présentent en nombre relativement
petit, variant d'espèce à espèce, mais constant dans
les mêmes plantes, formés de faisceaux spiralés vers
la moelle, annelés vers l'extérieur, entourés de cellules
ligneuses et quelquefois de fibres. Ces faisceaux, isolés les uns
des autres par des rayons médullaires plus ou moins larges, sont
disposés en un anneau qui est le bois primaire. Dans quelques racines
ce bois primaire peut n'avoir qu'un seul faisceau; dans la tige il peut
en avoir très peu (Aroïdées) ou beaucoup (Fougères).
Les vaisseaux peuvent aussi être accolés sans interposition
d'éléments parenchymateux comme chez les Lycopodes,
Sélaginelles
et Marattiacées. Chez les Dicotylédones,
ces vaisseaux sont le plus souvent rangés en séries radiales
ou parfois en forme de Y. A mesure que la plante vieillit, il se forme
de nouveaux faisceaux ligneux ou bois secondaire entre les précédents,
si bien qu'au bout de la première année la tige est pourvue
d'un bois se présentant sous la forme d'un anneau complet et ayant
acquis presque toutes ses qualités.
Section
longitudinale d'un faisceau libéro-ligneux montrant en l le
liber; c, cambium; vr, vaisseaux réticulés, p, parenchyme
ligneux; va, vaisseaux annelés; m, moelle.
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Les choses en restent là pour bon nombre
de plantes, celles par exemple qui ne vivent qu'un an et qu'on désigne
ordinairement sous le nom d'herbacées.
Pour les plantes de longue durée, qui vivent dans des régions
à périodes végétatives interrompues par des
périodes d'arrêt dans le développement, ou d'hibernation,
on voit, pendant la seconde année,
se former, en dehors du premier anneau ligneux, un second, puis l'année
d'après, un troisième et ainsi de suite. Il en résulte
que le bois d'un arbre des climats tempérés offre un nombre
de couches annuelles correspondant à l'âge
de l'arbre. On observe, dans la disposition ou
l'aspect de ces couches, des variations, soit dans la même plante,
soit dans des plantes différentes, L'épaisseur de la couche
annuelle est plus grande si l'année a été plus humide;
elle est d'autant plus mince que l'arbre croît plus lentement, d'où
il résulte que, sous un même diamètre, deux arbres
de la même espèce peuvent présenter un nombre différent
de couches.
La largeur de la couche varie encore avec
l'âge de la plante : elle croît avec les années, atteint
un maximum, puis décroît. Il y a donc avantage pratique à
ne pas laisser les arbres sur pied passé un certain nombre d'années.
D'autre part, au point de vue industriel, le bois présentant d'autant
plus d'élasticité qu'il est formé d'un plus grand
nombre de couches, il y a encore avantage à n'avoir que des arbres
à croissance lente. Les couches annuelles sont moins épaisses
dans les branches que dans la tige. D'espèce
à espèce l'épaisseur varie assez; dans le Paulownia,
l'Ailante, les couches sont larges, dans le Citronnier (Agrumes),
le Pin, le Sapin, l'If, le Cornouiller, elles sont étroites. Si
l'on examine attentivement une rondelle de Chêne, de Sapin, de Hêtre,
etc., on ne tarde pas à remarquer dans la masse du bois, outre les
couches annuelles, des bandes radiales plus au moins larges et longues
ainsi qu'une coloration et une densité des éléments
différente sur la largeur d'une couche annuelle. Les bandes sont
des rayons médullaires qui vont en se multipliant dans les couches
successives. La différence de coloration et de densité dans
la même couche est due à la diminution progressive du diamètre
des vaisseaux, du printemps
à l'automne.
Le bois de printemps est caractérisé par des éléments
larges à parois minces, le bois d'automne est par des éléments
étroits à parois épaisses; ainsi, dans le Pin, la
membrane s'épaissit en proportion de la diminution du diamètre
de la cellule. Le bois de printemps se trouve du côté interne,
le bois d'automne du côté externe de la couche; il en résulte
entre deux couches contiguës une ligne de démarcation très
nette qui est ce qu'on appelle la veine du bois.
Section
transversale d'une jeune tige : b, faisceau ligneux; e, écorce;
rm, rayon médullaire; m, moelle.
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Au point de vue chimique, la nature du bois
est assez complexe. Chaque fibre ou celIule y est extérieurement
formée par de la cellulose, et
intérieurement tapissée par une matière incrustante,
la vasculose. Les matières textiles, et en particulier le
coton, le vieux linge, sont formés de cellulose presque pure; dans
les bois blancs et légers, la cellulose joue encore le principal
rôle; mais la vasculose devient d'autant plus abondante que le bois
est plus âgé, qu'il est plus dur et plus compacte, et, comme
elle est plus riche en carbone et en hydrogène
que la cellulose, elle dégage généralement plus de
chaleur par la combustion.
En dehors de ces deux substances principales,
le bois renferme en outre des matières gommeuses ou résineuses,
et des matières colorantes ou azotées tenues en dissolution
ou en suspension dans la sève qui imprègne
tout végétal à l'état frais, et jouent un grand
rôle dans l'altération ou la conservation des bois. Enfin,
les bois, quand ils sont verts, contiennent de 30 à 50 % d'eau ;
après un an de coupe, ils en gardent encore 20 à 25 %; ils
sont tous plus ou moins hygrométriques, et quand on est parvenu
à les dessécher complètement dans une étuve
chauffée à 120 ou 130°, ils reprennent 8 à 10
% d'eau par leur simple exposition à l'air dans une chambre sans
feu. Ces variations dans les quantités d'eau contenues dans le bois
en produisent de très marquées dans son volume. Le bois change
peu dans le sens de ses fibres, mais ses dimensions transversales aux fibres
s'accroissent ou diminuent d'une manière très marquée
par l'humidité ou la sécheresse.
Bois
de conifère offrant trois couches annuelles dans chacune desquelles
on distingue le bois de printemps p, le bois d'automne a; l'écorce
e et la moelle, m.
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Le bois se conserve indéfiniment dans
l'air sec et dans l'eau privée d'air; mais quand il est soumis alternativement
ou simultanément à l'action de l'air et de l'humidité
ou de l'eau, il s'altère peu à peu, absorbe l'oxygène
de l'air, dégage de l'acide carbonique, se désagrège
et se transforme en une poudre grise ou brunâtre : on dit qu'il se
pourrit. Le chlore blanchit le bois sans le dissoudre; l'acide nitrique
le jaunit ou le rougit; à l'état de concentration et bouillant,
il détruit sa cohésion et finit par le transformer en acide
oxalique. L'acide sulfurique le noircit rapidement, et quand il est en
excès, il le transforme en une matière gommeuse qui, sous
l'influence de l'eau bouillante, se change elle-même en sucre de
raisin. La potasse chaude et en dissolution concentrée dissout également
le bois en formant ainsi une liqueur brune qui renferme des acides oxalique,
acétique et ulmique. Le bois est plus dense que l'eau; mais comme
il est très poreux et que ses pores,
surtout quand il est sec, se trouvent remplis d'air, le plus souvent il
surnage l'eau.
On divise les bois en bois blancs, bois
durs, bois de travail et bois résineux. A chaque dénomination
se rattachent des idées de propriétés et d'applications
différentes. Le peuplier, à cause
de sa légèreté, est réservé particulièrement
à la fabrication des enveloppes grossières, caisses, tonneaux,
et des panneaux des menuiseries communes. Cependant le peuplier de la Caroline
serait supérieur aux bois les plus durs pour la menuiserie. Le bouleau,
dont le tissu est plus serré que celui du peuplier, sert à
faire des objets plus soignés, boîtes, tabatières,
etc. On l'emploie également à la confection de cercles pour
cuves, tonneaux, etc. On le distille également pour en tirer une
matière goudronneuse qui, mêlée avec des jaunes d'oeuf
et appliquée aux cuirs par le corroyage, leur communique l'odeur
et les qualités des cuirs de Russie. D'autres bois légers,
tels que aunes, bourdaines, tilleuls, fusains,
saules, tiges écorcées de chanvre, sont employés à
la préparation des allumettes ou d'un charbon très combustible.
Section
transversale d'une tige de Bignonia, montrant le bois entaillé
en gradins par le parenchyme.
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Les bois durs indigènes, que l'on utilise
le plus communément en Europe pour le chauffage et pour la menuiserie,
sont ceux de chêne, de hêtre, de charme, d'orme, de frêne,
de cormier, de noyer, de châtaignier et d'acacia.
Ce dernier bois, remarquable par la rapidité de sa croissance et
par son facile accommodement aux terres les plus médiocres, ne l'est
pas moins par sa grande dureté et par sa résistance au frottement
et à la pourriture. A ces bois de travail viennent s'ajouter les
bois exotiques employés surtout par l'ébénisterie
pour le placage ou le plein : l'acajou, l'ébène, le citronnier,
le palissandre, le gaiac, le bois de férule ou de feroè,
de Cayenne,
le thuya, et autres bois d'Afrique. Leur beauté tient aux matières
colorantes et incrustantes qui ont injecté leur tissu. Ils peuvent
se débiter en lames très minces et prennent un beau poli.
Plusieurs de ces bois répandent une odeur agréable, qui les
fait rechercher pour la confection de petits meubles et pour garnitures
et objets de luxe : tels sont les bois d'aloès, de cail-cédrat,
de citronnier, de cèdre, de girofle, de cannelle giroflée,
de gayac, de rose, de sassafras, de santal citrin, etc. Les bois dits résineux,
tels que le pin, le mélèze, le cèdre, etc. doivent
à la résine dont ils sont imprégnés de résister
longtemps aux agents atmosphériques, et de donner en brûlant
plus de chaleur que les bois blancs.
Section
transversale de la tige d'un palmier, montrant la disposition des faisceaux
fibro-vasculaires; e, écorce; b, massif ligneux.
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Le bois, quelles que soient sa dureté
et sa compacité, subit tôt ou tard une altération profonde
sous l'influence combinée de l'air et de l'eau. Le principe azoté
qu'il contient est le point de départ de cette transformation; il
se modifie et devient par rapport aux autres un véritable ferment.
Un travail lent s'établit, qui a pour effet la désorganisation
du bois, la décomposition de la cellulose et de la matière
incrustante, et leur transformation en une poudre brune, renfermant de
l'humus ou acide humique et du bois non encore entièrement transformé
en humus. Cette même substance azotée exerce encore une autre
influence également fâcheuse : pouvant servir de nourriture
aux insectes, elle les attire sur le bois qu'ils pénètrent
en tous sens et qu'ils détériorent rapidement; il forme également
l'un des aliments principaux de diverses végétations cryptogamiques
qui, se développant à la surface et jusque dans le centre
des bois les plus résistants, y occasionnent des dégâts
aussi grands que ceux produits par les insectes.
(A19). |
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