| Le lit est un meuble destiné au coucher (L'art du meuble). Le lit est une des principales pièces du mobilier, et son usage est aussi général que son aspect est variable. Chaque civilisation lui a donné la forme et la décoration qui lui étaient propres. Les premiers lits durent être des litières de paille ou d'herbe, des amas de joncs ou de roseaux jetés sur le sol, puis de simples planches, exhaussées sur des piliers pour éviter l'humidité du sol, et recouvertes de peaux de bêtes, d'herbes sèches ou de laine. Peu à peu le luxe embellit la forme des lits, et la mollesse, arrivant à la suite des richesses et des progrès de la civilisation, inspira l'idée de les garnir de coussins ou de matelas souples et moelleux, et de les couvrir de somptueuses étoffes. Dans l'ancienne Egypte, le lit ne se composait que d'un bâti de bois, garni d'un fond sanglé de bandes de cuir, avec un chevet de bois ou d'ivoire pour laisser circuler l'air. En Grèce et en Campanie, c'était un meuble de bronze ciselé et incrusté; mais, si la matière en était précieuse, la garniture en était aussi peu confortable que celles de l'Assyrie et de l'Egypte. Il y avait également des lits destinés aux repas qui étaient généralement construits en maçonnerie. Le Nord n'avait pas à se défendre de la chaleur; il la recherchait au contraire; aussi ses appartements étaient-ils soigneusement calfeutrés et les lits formaient de petits réduits dont les courtines et les rideaux conservaient une douce tiédeur. Dans les contrées scandinaves et dans la Grande-Bretagne, les lits forment des placards dont les volets fermés arrêtent les courants d'air froid. Les lits de l'Europe centrale étaient clos moins hermétiquement. Ils étaient placés, au Moyen âge et à la Renaissance, au milieu des chambres dont ils devenaient le principal motif d'ameublement. C'était une sorte de construction rectangulaire, dont les colonnes supportaient un baldaquin plat, entouré de courtines en étoffe et de rideaux qui venaient clore la couche. Cette dernière partie ou châlit formait une sorte de tombeau renfermant un sommier, des lits de plume et des matelas, ainsi qu'un traversin et des oreillers, sur lesquels était étendue une couverture de même étoffe que celle des rideaux. La couche des pauvres était taillée dans le bois de chêne ou de hêtre et tendue d'étoffes grossières; celle des riches bourgeois et des seigneurs était précieusement sculptée, tandis que le baldaquin et les rideaux étaient de velours brodé ou de tissus précieux. Vers la fin du XVIe siècle, la mode abandonna les lits en bois sculpté. On devenait chaque jour moins sensible aux oeuvres d'art pur pour rechercher tout ce qui portait le caractère du luxe et de la rareté. Les belles colonnes ciselées, les chevets à cartouches largement fouillés et composés par Ducerceau et par Sambin furent remplacés par des pentes de velours galonnés d'or avec des panaches de plumes surmontant les gouttières. Ce qui n'avait été jusqu'alors qu'une exception devint une règle générale, et les gravures d'Abraham Bosse, ainsi que les tableaux hollandais, nous montrent une foule de spécimens de lits de la première moitié du XVIIe siècle tout tendus de tapisseries, de drap et d'étoffes diverses. Les dames se mettaient alors au lit pour recevoir leurs visites. - Lit du XVIe siècle (Cluny). Les lits du règne de Louis XIV devinrent moins étouffés et plus dégagés que les précédents; on en a conservé de beaux modèles dus à D. Marot. Le châlit est isolé et recouvert de riches broderies ou de tapisserie et les courtines sont soigneusement repliées vers la muraille, pour laisser au meuble toute sa forme monumentale. C'était le type de la couche d'apparat dont le spécimen le plus complet existe à Versailles, dans la chambre à coucher du roi. Cette disposition persista jusqu'à la Révolution, et celle du lit de Marie-Antoinette, au château de Fontainebleau, est absolument la même, abstraction faite de quelques détails d'ornementation. La mode des lits destinés aux particuliers était moins heureuse. Si quelques-uns se distinguent par les délicates et gracieuses sculptures dont ils étaient ornés, on peut dire que les modèles composés par Ranson, par de Lalonde, par de Lafosse, par Roubo et par Boucher sont le plus souvent d'une forme mesquine. On trouve également dans leurs planches toutes les formes à la turque, à la polonaise, à la chinoise, à l'anglaise, à la dauphine, à l'impériale, etc. que les tapissiers et les ébénistes avaient mises à la mode. Percier dessina pendant le premier Empire des couches dites à bateau et des lits d'apparat pour la nouvelle cour, sur lesquels il plaçait des victoires en bas-relief, des cygnes, des attributs mythologiques et des souvenirs de la campagne d'Egypte. Ces meubles se recommandent sinon par leur style lourd, au moins par la bonne exécution de leur ébénisterie et par la dorure soignée de leurs bronzes. On est revenu de nos jours à des meubles plus simples, et le lit de notre appartement moderne est en bois d'acajou ou de palissandre, avec un encadrement à moulure, où le bronze et la sculpture font défaut. (A. de Ch.). | |