| Camaïeu (de l'arabe camaa, relief), espèce de peinture monochrome, c.-à-d. d'une seule couleur, destinée à imiter les bas-reliefs. Les Italiens lui donnent le nom de clair-obscur; elle prend celui de grisaille, lorsque l'artiste, voulant imiter des bas-reliefs en pierre ou en marbre blanc, n'emploie que les dégradations du noir au blanc. Abel de Pujol s'est acquis une réputation méritée par les magnifiques grisailles dont il a décoré la voûte de la grande salle du palais Brongniart. La galerie de Versailles, le Louvre, les salles du Vatican, sont ornées de camaïeux dans lesquels on a employé diverses couleurs pour imiter te bronze, le porphyre, le lapis-lazuli, etc. Polydore Caravage a décoré de cette manière les frises extérieures de plusieurs maisons de Rome. La peinture en camaïeu a été peu pratiquée au moyen âge; on en conserve de curieux monuments au musée de Cologne; les revers des volets du triptyque de la cathédrale d'Aix portent une Annonciation en camaïeu, attribuée au roi René. Le camaïeu fut fort à la mode au XVIIIe siècle. On donne encore le nom de camaïeux aux dessins à la sanguine, à la sépia, à l'encre de Chine, au crayon noir relevé de blanc, à toute peinture enfin qui, s'écartant de l'imitation de la nature, ne prend qu'une teinte conventionnelle pour représenter les objets. Les Heures de Louis XIV, conservées à la Bibliothèque nationale de Paris, offrent à chaque page un camaïeu de couleur différente. On appelle également camaïeux les gravures à plusieurs tailles, dont le Parmesan passe pour avoir été l'inventeur. A son exemple, Andreani, Hugo de Carpi, Antoine Fautuzzi de Tarente, B. Coriolano, Burgmair, Jegher, et d'autres graveurs sur bois, au XVIe siècle, imprimèrent l'une sur l'autre trois planches ou tailles gravées, dont la 1re faisait le fond, laissant en blanc les parties en lumière, la 2e donnait les demi-teintes, et la 3e les tons foncés, les contours et les fortes ombres. Cette méthode a été reprise en France, vers 1740, par Lesueur, et pratiquée aussi en Angleterre par Jackson, et à Venise par Ant.-M. Zanetti. Mais alors on substitua souvent une planche de cuivre à l'une des planches de bois. Les gravures en camaïeu sont devenues rares. C'est le même procédé qu'on a employé pour l'impression des étoffes et des papiers de tenture. Au XIVe siècle, camaïeu était synonyme de camée, et désignait une pierre gravée à plusieurs couches. (E. L.) | |