| Tapisserie de Bayeux ou Tapisserie de la reine Mathilde. - Cette "tapisserie" est en réalité une broderie. C'est le plus ancien monument de ce genre qui existe. Elle est constituée d'une toile de lin, de 50 cm de hauteur sur 70,34 m de long, à laquelle le temps a donné une teinte brune, et où l'on a représenté la conquête de l'Angleterre par Guillaume, duc de Normandie. L'histoire commence au départ d'Harold de la cour d'Édouard, et se termine à la bataille d'Hastings. Le sujet de chaque scène est indiqué par une courte inscription latine. Les figures sont travaillées à l'aiguille avec des laines de huit couleurs différentes : bleu foncé et léger, rouge, jaune, vert foncé et léger, noir, et couleur isabelle. Le dessin des figures est rude et barbare, et il ne paraît pas que l'on ait accordé une grande attention à l'exactitude des couleurs des objets représentés; mais la composition est toujours rendue avec une grande vérité d'expression. Les scènes réellement historiques n'occupent qu'une hauteur de 33 cm; le haut et le bas forment des bordures qui contiennent des lions, des oiseaux, des chameaux, des minotaures, des dragons, des sphinx, quelques fables ésopiennes, des scènes de labourage et de chasse, etc. Les figures sont couvertes par la laine posée à plat et reprise ensuite par des points de chaînettes, et les contours, les articulations et les plis sont arrêtés par une espèce de cordonnet. Cependant, les visages, les mains et les jambes nues sont seulement terminés par un contour bleu, rouge ou vert; souvent les traits du visage sont dessinés en jaune. On remarque, dans le haut de la tapisserie, qu'une toile un peu moins belle, mais néanmoins ancienne a été ajoutée au moyen d'une couture. Cette toile, qui à 20 cm, a peut-être été mise postérieurement pour faciliter l'exposition de la broderie. Elle ne porte pas de figures, mais des lisérés bleus, des croix simples, doubles, triples au-devant d'une espèce d'autel, une échelle dont les montants sont terminés par une croix, et un petit étendard rayé dont le bâton est surmonté d'une croix. - La Tapisserie de Bayeux (fragments). - On y voit des navires, des armes, des ustensiles, des costumes civils et militaires et une foule d'autres informations de plus haut intérêt historique. - La tradition a considéré la Tapisserie de Bayeux comme l'ouvrage de la reine Mathilde, femme de Guillaume le Conquérant. En l'absence de témoignages écrits, quelques auteurs anglais et français ont nié l'antiquité de ce monument. D'autres ont établi que la tapisserie a dit être exécutée immédiatement après la conquête c.-à-d. dans la deuxième moitié du XIe siècle : ils s'appuient sur les costumes qui y sont représentés, les armes, les caractères des inscriptions, le style de l'architecture, la vérité des détails, les usages, l'exactitude de l'histoire, et concluent que la tapisserie fut donnée à la cathédrale de Bayeux par son évêque Odon, frère utérin de Guillaume, soit qu'il l'eût reçue de la libéralité de Mathilde, sa belle-soeur, soit qu'il l'eût fait exécuter lui-même. D'autres l'attribuent à Mathilde, fille de Henri Ier. La tapisserie de Bayeux fut longtemps oubliée. On l'appelait la toilette du duc Guillaume; on voit dans un inventaire de l'année 1476 qu'elle servait à orner la nef de la cathédrale. Montfaucon appela sur elle l'attention publique. Pendant la Révolution, elle eût été détruite par des soldats du train, qui voulaient la couper pour emballer des effets militaires, si les autorités de la ville ne s'y fussent opposées. Napoléon Ier la fit transporter à Paris. Plus tard, elle fut rendue à la ville de Bayeux, qui vota, en 1839, la construction de la galerie de l'hôtel-de-ville. Après diverses péripéties, notamment pendant la guerre de 1870 et pendant la Seconde Guerre Mondiale, elle finit par trouver sa place actuelle au Centre Guillaume le Conquérant (rue de Nesmond). (P-s).
| En bibliothèque - On en voit la reproduction dans un ouvrage anglais de Ch. Stothard, Londres, 1816-1823, in-fol. ; dans les Monuments de la monarchie française, par Montfaucon; dans les Antiquités anglo-normandes de Ducarel; dans les Anciennes tapisseries historiées d'Ach. Jubinal, 1837-38, in-fol. Voir aussi : Une Dissertation de Lancelot dans les t. VI, VII et VIII des Mém. de l'Académie des Inscriptions, reproduite par Augustin Thierry dans son Histoire de la conquête de l'Angleterre par les Normands; H. Delauney, Origine de la tapisserie de Bayeux, Caen, 1824, in-4°, et 1825, in-8°; Plusquet, Essai historique sur la ville de Bayeux, Caen, 1829, in-8°; Bolton-Corney, Recherches et conjectures sur la tapisserie de Bayeux, trad. de l'anglais par Pillet, Bayeux, 1841; Lambert, Réfutation des objections faites contre l'antiquité de la tapisserie de Bayeux, 1841; l'abbé de La Rue, Recherches sur la tapisserie de Bayeux, 1841, in-4°. | | |