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L'art italien ne date que de la fin du IVe siècle de l'ère chrétienne : c'est le moment où s'écroule la puissance romaine, et où le christianisme, devenu la religion dominante, ouvre aux artistes des sources nouvelles d'inspiration. Les monuments de l'Antiquité sont encore debout, comme autant d'exemples vivants, et les traditions de l'art païen se perpétuent toujours dans les écoles : mais le goût, transformé par un long commerce avec l'Orient, méconnaît les règles sévères du simple et du beau; on travaille hâtivement en vue du lucre, sans études lentes et profondes; les exigences du luxe, aussi bien que le débordement des imaginations, produisent une exubérance de détails et d'ornements sous lesquels les grandes formes disparaissent. Les modèles antiques vont périr, en même temps que les principes classiques. Déjà, au temps de Théodose, il ne reste plus à Rome que le baptistère de Saint-Jean-de-Latran et le mausolée de Sainte Constance qui remontent à Constantin; il faudrait réédifier la plupart des monuments, dégradés ou abattus; mais les premiers empereurs chrétiens, non moins que les Barbares venus de la Germanie au Ve siècle, poursuivent l'oeuvre de destruction : Constantin, Théodose, Honorius, ferment ou ruinent les édifices consacrés au paganisme. Sortie des Catacombes, où la persécution l'avait contrainte de chercher un asile, la religion nouvelle ne pouvait d'un seul coup enfanter un art nouveau. Elle commença par approprier à ses besoins quelques-uns des monuments encore existants : les basiliques romaines furent converties en temples chrétiens, et, jusqu'au IXe siècle, ce fut leur plan qu'on adopta pour la construction de toutes les églises de l'Occident. Constantin avait fait élever à Rome, avec les colonnes et les débris des monuments païens, les basiliques du Sauveur ou de Saint-Jean-de-Latran, de Saint-Pierre, de Saint-Paul-hors-les-murs, de Sainte-Croix, de Saint-André, de Sainte-Agnès, de Saint-Laurent, des Saints-Marcellin-et-Pierre; ces églises primitives, oeuvres hâtives d'un art fort imparfait, dûrent être reconstruites par Théodose ou par les papes des Ve et VIe siècles. Puis on bâtit Sainte-Marie-Majeure, Sainte-Agathe, Sainte-Bibiane, Saint-Pierre-ès-liens, Saint-Pancrace, Sainte-Pudentienne, Sainte-Sabine, Sainte-Praxède, Saint-Sylvestre, Sainte-Marie-Araceli, Sainte-Marie-in-Cosmedin, Sainte-Marie-in-Trastevere, Saint-Clément, toutes imitations de la basilique. Sous Valentinien III, la ville de Ravenne, où résidèrent la plupart des empereurs d'Occident, vit s'élever la basilique Majeure, Sainte- Agathe, Saint-François, Saint-Jean, la chapelle sépulcrale des Saints-Nazaire-et-Celse. Les seules modifications graves que l'on apporta au style de l'architecture furent : 1° la substitution de l'arcade à l'architrave qui régnait précédemment sur les colonnes;Les mêmes règles architecturales furent suivies pendant la domination des Ostrogoths. Le grand Théodoric, élevé à Byzance, où il avait pris le goût des arts, fit bâtir à Ravenne la basilique de Saint-Apollinaire, celle d'Hercule, Saint-Théodore, le baptistère de Santa-Maria-in-Cosmedin, un palais, et un mausolée dont la coupole était creusée dans une seule pierre d'Istrie, et qui paraît être aujourd'hui l'église de Santa-Maria della Rotonda. Symmaque nous a conservé le nom de l'architecte Daniel, qui construisit ces monuments. Un autre architecte, Aloïsius, fut chargé de restaurer les édifices de Rome. Beaucoup d'églises, de palais, de bains, s'élevèrent à Pavie, à Monza, à Naples. Lorsque Cassiodore, l'un des ministres de Théodoric, se retira du monde, il fonda la célèbre abbaye du Mont-Cassin. Amalasonthe, fille de Théodoric, continua à orner Ravenne : à son règne appartiennent l'église de Saint-Vital et le baptistère de Saint-Jean, construits dans le style byzantin, dont ils sont les seuls monuments purs en Italie, car la basilique latine resta le type universellement adopté. Toutefois la coupole byzantine demeura acquise à l'église chrétienne, et s'éleva, dans la suite, du milieu de la basilique. Le Moyen âgeBien qu'on emploie dans l'histoire des arts la dénomination de style lombard, les Lombards, qui occupèrent l'Italie septentrionale de 568 à 774, n'eurent pas un style d'architecture qui leur fût propre. Venus des forêts de la Germanie, ignorant les premiers éléments de la construction, ils ne purent qu'adopter l'art des vaincus, c.-à-d. l'art romain dégénéré. Les monuments, d'ailleurs assez rares, de cette période se reconnaissent à leurs formes courtes et trapues, aux colonnes basses reposant sur un simple bloc de pierre, aux chapiteaux coniques et ornés de feuillages ou d'animaux, aux voûtes en maçonnerie remplaçant les toits de charpente, à une grossière ornementation de colonnades et d'arcs engagés dans le mur, aux cordons qui marquent extérieurement les étages, aux fenêtres étroites comme des meurtrières. On voit dans les lois lombardes que la ville de Côme fournit alors les meilleurs architectes et tailleurs de pierre.Architecture romane. Jusqu'au XIe siècle, soit effet de l'habitude, soit inimitié contre les Grecs, soit rigidité des papes à ne pas laisser altérer sensiblement le type primitif de la basilique, les Italiens s'en étaient tenus au style latin. Mais les relations commerciales d'Amalfi, de Pise, de Gênes, d'Ancône et de Venise avec l'empire d'Orient amenèrent une alliance de l'élément latin et de l'élément byzantin, d'où résulta un nouveau style, appelé roman, romano-byzantin, et quelquefois lombard de la seconde époque. Par le contact de l'Europe avec l'Asie pendant les Croisades, le nouveau style, surtout à Venise et en Sicile, reçut l'empreinte du fantastique et du merveilleux oriental, visible principalement dans l'ornementation. Entre autres changements survenus dans l'architecture, on prolongea de plus en plus la partie transversale qui formait la croix latine, et on en garnit de chapelles les extrémités; l'abside fut agrandie, et le choeur plus ou moins exhaussé au-dessus de l'église; la crypte ou confession, dans laquelle on déposait les reliques, s'agrandit et devint une petite église souterraine; les ailes de la basilique, prolongées au delà du transept, prirent la forme absidale; une coupole s'éleva su point d'intersection de la nef principale et des transepts; les plafonds en solives horizontales firent place aux plafonds voûtés en bois ou à des voûtes d'arête; des piliers, souvent avec des colonnettes engagées, se substituèrent généralement aux colonnes; les formes de leurs chapiteaux varièrent à l'infini, et les socles s'élevèrent sensiblement; on fit les fenêtres plus nombreuses, plus ouvertes, et souvent géminées; les portes furent décorées de sculptures, et précédées de porches à jour; des clochers surmontèrent les édifices de moindre importance, tandis que les dômes ou cathédrales conservèrent, comme par le passé, des campaniles isolés; les arcatures ou arcades simulées ne servirent plus seulement à marquer les étages sur les murs extérieurs, on les prodigua sans raison; la façade principale s'orna d'une rose ou roue, vaste fenêtre circulaire; les églises prenant de jour en jour plus d'élévation, on en soutint les murailles par des contre-forts extérieurs; les pierres de différentes couleurs employées dans la construction, le mélange et les combinaisons de la pierre et de la brique, présentèrent à l'oeil une diversité agréable. Au nombre des monuments de cette période, qui s'étend jusqu'au XIIIe siècle, on peut citer Saint-Ambroise de Milan, Saint-Zénon, Saint-Fermo, et Saint-Antoine de Vérone, Saint-Étienne de Bologne, Saint-Ciriaque et Sainte-Marie d'Ancône, Sainte-Marie de Monza, les Dômes de Parme, de Plaisance, de Modène, de Côme, de Mantoue, de Crémone, de Ferrare, de Pise, etc., les Eremitani de Padoue, Saint-Michel de Pavie, Saint-Michel de Florence, Sainte-Marie de Bergame, les églises Sainte-Marie-Majeure, Saint-Jean et Saint-Paul, Sainte-Françoise à Rome, etc. Les cloîtres annexés aux monastères datent aussi de cette époque. Les plus remarquables sont ceux de Saint-Jean de Latran et de Saint-Paul à Rome, de Saint-Zénon à Vérone, de Subiaco, etc. L'architecture civile suivit le mouvement de l'architecture religieuse. Dans toutes les villes s'élevèrent des palais publics, dans lesquels on retrouve des principes communs de construction : c'est un carré enveloppant une cour intérieure, et dont un portique forme le rez-de-chaussée; au-dessus sont les salles d'assemblée, éclairées par de vastes fenêtres; des statues ornent ordinairement les façades. Les rivalités des villes entre elles ou des partis dans une même ville engendrant des luttes fréquentes, les édifices municipaux et même les hôtels des riches citoyens sont fortifiés, crénelés, de manière à pouvoir soutenir un siège. Tels sont les vieux palais de Florence, de Vérone, de Vicence, le palais ducal de Ferrare, le palais d'Eccelin à Padoue, le château Delle Torri à Turin. Malgré la multitude des monuments élevés en Italie pendant la période romane, c'est à peine si quelques noms d'architectes sont arrivés jusqu'à nous. A Pise, Buschetto fit le Dôme, Diotisalvi le baptistère, Bonanno la Tour penchée; Nicolas et André bâtirent Saint-Michel le Campo-Santo, et le campanile de Saint-Nicolas. On doit encore à Nicolas le palais des Anziani à Pise, la Trinité à Florence, et Saint-Antoine de Padoue. Giudetto éleva la façade de Saint-Martin à Lucques; Marchione d'Arezzo, les cathédrales de Pistoia et de Volterra, la Pièce d'Arezzo, et la tour des Conti à Rome; Egidio de Milan, le palais d'Eccelin; Leonardo Boccalecca, le Salone ou palais communal de Padoue; Lorenzo Maetani, le Dôme d'Orvieto; Augustin et Agnolo de Sienne, le palais de cette ville; frère Ristoro de Cambio, l'église Sainte-Marie Nouvelle à Florence; Arnolfo di Lapo, la cathédrale, et frère Jean, le pont de la Carraja, dans la même ville. A Rome, on remarqua la famille des Cosmates, ainsi appelés de leur chef Cosma, et qui , très habiles dans l'art des incrustations en mosaïque, furent aussi les architectes des ambons de Saint-Laurent, de Sainte-Marie-Araceli et de Saint-Césaire, du cloître de Subiaco, et du portique de la cathédrale de Civita-Castellana. Deux de leurs élèves, Pierre et Jean, construisirent les cloîtres de Saint-Jean de Latran et de Saint-Paul à Rome. Architecture gothique. La basilique Sainte Marie des Fleurs (Santa Maria del Fiore), à Florence. Sa construction a débuté en 1296 et s'est achevée en 1436. Source : The World Factbook. La RenaissanceAvec le XVe siècle commence un âge nouveau pour l'art italien, qui rompt les entraves dans lesquelles l'école romano-byzantine tendait à l'immobiliser. Les modèles antiques échappés aux ravages des hommes et du temps sont étudiés avec passion. Dans cette période qui a reçu le nom de Renaissance, on ne pouvait adopter les divisions, les dispositions architectoniques des édifices gréco-romains, puisque le plan des monuments modernes était résulté de besoins inconnus aux sociétés païennes mais on revint à l'Antiquité pour les proportions, les profils et la décoration. Le style de la Renaissance fut moins un système nouveau d'architecture qu'un mode de revêtement et d'ornementation. Brunelleschi, de Florence, en fut le promoteur; on lui doit la coupole de la cathédrale de Florence, les églises du Saint-Esprit et de Saint-Laurent, le palais Pitti, dans la même ville. L'alliance de l'art antique et du style roman, quelquefois aussi de l'ogive, qui distingue les oeuvres de ce grand architecte, caractérise aussi les travaux de ses élèves et de ses imitateurs : tels sont les palais Ricardi, Tornabuoni et Cafareggi à Florence, et le château de la Faggiuola, par Michelozzo Michelozzi; le palais Strozzi à Florence, par Benoît Majano et Cronaca; les palais élevés à Sienne et à Urbin par François di Giorgio et par Rosellini; les églises de Saint-Augustin et de Ste-Marie-du-Peuple à Rome, par Pintelli; les portiques intérieurs du palais dit de Venise, dans la même ville, par Julien Majano; le grand hôpital de Milan, par Antoine Filarète. Mais l'arrivée des Grecs fugitifs de Constantinople, en 1453, donna une nouvelle force au goût de l'antique, et l'on ne tarda pas à voir disparaître les dernières traces des styles du Moyen âge. Vers la même époque on retrouva les livres de Vitruve, qui, étudiés et commentés, devinrent l'unique code de l'architecture. Alberti écrivit son grand ouvrage De re aedificatoria, d'après les préceptes de l'auteur latin, qu'il mit en pratique dans le palais Ruccellai et le choeur de l'Annonciade à Florence dans les églises de Saint-André à Mantoue et de Saint-François à Rimini.De la Toscane le style de la Renaissance se répandit partout. A Venise, où les monuments de style byzantin s'étaient couverts d'ornements dans le goût oriental, l'art antique ne put pas conserver non plus la simplicité et la pureté de ses lignes, et les oeuvres conçues d'après ses principes offrirent également une grande richesse décorative. L'imitation de l'antique, qui n'était pas encore très sensible et n'étouffait pas l'originalité dans les oeuvres de Giovanni Giocondo, est manifeste dans les constructions dirigées par une célèbre famille d'architectes, les Lombardi : Pierre Lombardi élève Sainte-Marie-des Miracles, Sainte-Marie-Mère-de-Dieu, les palais Contarini, Vendramin et Corner, les monuments Zeno et Mocenigo; Martin Lombardi fait la scuola de Saint-Marc et la façade de Saint-Zacharie; Moro Lombardi, l'église Saint-Michel de Murano. A la même école appartiennent Barthélemy Buono, qui éleva les Procuraties vieilles; Bergamasco, architecte de la chapelle Émilienne et du palais des Camerlingues; Rizzo (Bregno) qui fit l'escalier des Géants, et la façade intérieure du palais des Doges; Scarpagnino, auteur de la façade de l'école Saint-Roch. Cependant, un élément nouveau, le pittoresque, allait s'introduire dans l'architecture, et en altérer la pureté. Jusques-là les édifices, créés dans un but d'utilité ou pour une destination sérieuse, avaient été grands et simples : maintenant, dans le dessein de satisfaire le goût des princes et des seigneurs pour le luxe, les architectes vont se livrer A la recherche de formes, d'arrangements et d'effets qui plaisent à la vue. Michel-Ange, avec toute l'autorité de son génie, consacra cette introduction de l'élément pittoresque dont les artistes vénitiens avaient déjà donné l'exemple : Saint-Pierre de Rome et son immense coupole, la décoration extérieure du Capitole, le cloître de Sainte-Marie des Anges, la bibliothèque Laurentienne à Florence, sont ses principaux ouvrages. Après lui, quelques talents supérieurs, Jules Romain à Mantoue, Fontana à Rome, Sansovino, Scamozzi et Da Ponte à Venise, soutinrent le système pittoresque, qui, cependant privé du souple puissant dont Michel-Ange l'avait animé, laissait déjà entrevoir une prochaine décadence. L'escalier et les galeries du palais Contarini del Bovolo, à Venise. Daté de 1499, cet édifice Renaissance est dû à G. Candi. Photo : © Odette Jodra, 2012. Les Temps modernesVainement Vignole, Alessi, Ammanati, San-Micheli, Palladio, s'en tenant aux préceptes antiques et à l'école de Bramante, protestèrent contre l'envahissement du pittoresque : on en vint, perdant le XVIIe siècle, à ne plus se préoccuper que de la pompe et de la richesse. On fit de la décoration qui étonnait les yeux; de là ce que les critiques italiens ont appelé le style des machinistes. En voulant constamment renchérir sur ce qui existait, l'art tomba dans l'extravagance; on eut le style baroque. Les cannelures des colonnes furent ornées; les chapiteaux, les architraves, les corniches, les frises, se chargèrent de volutes, de rinceaux, de guirlandes, de chapelets et d'oves, sous lesquels disparut la ligne droite. Carlo Maderno, qui acheva Saint-Pierre de Rome, fut un des promoteurs de cette architecture corrompue. Lorenzo Bernini, dit le Bernin, qui éleva la colonnade, le baldaquin et la chaire de Saint-Pierre de Rome, le grand escalier du Vatican, le palais Barberini, fit encore davantage du grandiose et de la décoration. Poulain et Ramaldi à Rome, Buontalenti, Parigi, Nigetti et Silvani à Florence, Meda et Mangoni à Milan, Vittoria et Campagna à Venise, suivirent la même voie. Mais ils furent tous surpassés, pour le dévergondage du goût, par Borromini , sur les traces duquel marcchèrent Guarini à Turin, Sardi, Pozzi, Rossi et Longhena à Venise.Ce qu'a produit le XVIIIe siècle ne mérite guère le nom d'art : les artistes italiens ne font qu'imiter les étrangers. Ivara et Vanvitelli, l'architecte du château de Caserte, s'efforcent, mais en vain, de ramener l'architecture aux anciens principes. Piranesi et Milizia furent plus heureux plus tard, et alors se forma une école meilleure, celle du marquis Cagnola, de Simonetti, de Campesi et de Stern, à qui Milan, Rome et Naples sont redevables de nombre d'édifices. (B.). |
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