| D'après son étymologie, et contrairement à la sympathie, l'antipathie (du grec pathos, passion, sentiment, et anti, en sens opposé) devrait désigner proprement cet état singulier de la sensibilité, né d'une affection malveillante, où nous nous réjouissons de la peine et souffrons du plaisir d'autrui, où nous prenons enfin le contre-pied des sentiments et des passions an développement desquelles nous assistons. Cependant, l'usage applique de préférence ce nom aux affections elles-mêmes, à la malveillance que nous ressentons ou croyons ressentir instinctivement à l'égard de certaines personnes. On comprend ainsi, sous cette désignation un peu vague, toutes les répugnances dont on aurait peine à se rendre compte, qui ne sont ni le ressentiment légitime d'une injure, ni l'indignation raisonnable qu'excite une mauvaise action, répugnances que l'on devrait étouffer comme puériles et blâmables, lorsqu'on ne peut leur assigner aucun motif plausible, ou qu'on les trouve fondées, comme cela arrive souvent, sur des associations d'idées fortuites ou sur des analogies trompeuses. On a noté une foule d'antipathies singulières, qui sont d'ailleurs à ranger plutôt au rang des phobies (Peur). Hippocrate cite un certain Nicanor qui ne pouvait entendre sans malaise une flûte. L'empereur Héraclius, dans sa vieillesse, éprouvait à la vue de la mer une frayeur insurmontable. Jacques Ier, d'Angleterre pâlissait à l'aspect d'une épée nue. Le philosophe Hobbes ne pouvait supporter les ténèbres. Il ne fallait ni prendre du tabac, ni demander l'âge d'une personne, en présence de Lope de Vega. Anne d'Autriche et Louis XIII ne pouvaient voir une rose, même en peinture. Scaliger était pris d'une crise nerveuse à l'aspect du cresson, Bayle au bruit d'un robinet, Henri III devant un chat. Tycho Brahé ne pouvait regarder un lièvre. (B-e). | |