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Van Tieghem

Philippe Edouard Léon Van Tieghem est un botaniste né à Bailleul (Nord) le 19 avril 1839, et est mort à Paris le 28 avril 1914. Secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences depuis 1908, Van Tieghem était un des maîtres les plus éminents de la science française. A sa mort, on peut dire qu'il représentait depuis cinquante ans la botanique de la France et que, directement ou indirectement, presque tous les botanistes français étaient ses élèves (La Botanique au XIXe siècle).
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Van Tieghem.
Van Tieghem (1839-1914).

Le malheur, qui forme les esprits bien trempés, avait présidé à son entrée dans la vie. Il ne devait connaître en effet ni son père, mort de la fièvre jaune aux Antilles trois mois plus tôt, ni sa mère, qui, revenue en France, accablée de chagrin, ne tardait pas à rejoindre son mari dans la tombe. Le jeune Philippe n'avait que quelques jours; il fut recueilli par un oncle et une tante maternels, tous deux célibataires : Napoléon et
Stéphanie Rubbe, qui l'élevèrent ainsi que ses trois soeurs. La sévérité et le silence régnaient d'ordinaire dans la maison où le jeune enfant grandit, et la tristesse laissa une empreinte sur son esprit. Son caractère grave et sérieux, sa fermeté et sa décision apprenaient à tous qu'il avait su de bonne heure ne compter que sur lui-même.

Après de brillantes études au collège de Bailleul, il obtint une bourse au lycée de Douai, et se présenta à l'Ecole normale supérieure au concours de 1858; il y fut reçu et classé second. Il eut pour maîtres Joseph Bertrand, Henri Sainte-Claire Deville, Pasteur, et il réussit brillamment à l'examen d'agrégation des sciences physiques en 1861. A sa sortie de l'Ecole, il y resta attaché comme agrégé-préparateur de minéralogie et de géologie et fut le premier des élèves de Pasteur, déjà illustre par ses découvertes retentissantes sur la génération spontanée et sur les fermentations. 

En devenant ainsi botaniste sous cette forte discipline scientifque, Philippe Van Tieghem se trouva, sans le vouloir, placé dans une catégorie spéciale de naturalistes qui fut d'abord un peu suspecte et surtout non classée, et, lorsqu'il présenta à la Sorbonne ses recherches sur la fermentation ammoniacale, Duchartre se déclara incompétent pour juger un travail de chimie. Les conceptions de Pasteur bouleversaient la classification des sciences, et Van Tieghem, qui souhaitait être naturaliste, devint, un peu contre son gré, docteur ès sciences physiques en 1864.

Entraîné vers la botanique par une très ferme vocation, Van Tieghem prépara un second doctorat sous l'inspiration de Decaisne. Il conquit ce nouveau titre en 1867 par son travail sur les aroïdées, remarquable par ses aperçus nouveaux en anatomie et en physiologie. D'ailleurs, avant la conquête de ce nouveau diplôme, la chaire de botanique de l'Ecole normale, occupée autrefois par Payer, devint vacante par la mort de Dalimier, et Nisard n'hésita pas à mettre le nom de Van Tieghem en première ligne pour le poste de maître de conférences. C'est à vingt-trois ans que Van Tieghem fut nommé à cette importante fonction. 

Ses débuts y furent modestes, comme l'était la place des sciences naturelles dans l'enseignement secondaire d'alors : c'est dans une petite pièce, sous les toits, que Van Tieghem entreprit ses belles recherches sur les mucorinées, qui devaient faire connaître son nom à l'étranger aussi bien qu'en France. C'est l'ensemble des nombreux mémoires qu'il publia sur les champignons microscopiques (mucorinées, basidiomycètes, ascomycètes, myxomycètes) qui classèrent Van Tieghem parmi les premiers cryptogamistes de son temps et le conduisirent tout jeune (à trente-sept ans) à l'Académie des sciences (1877),où il remplaçait Brongniart, et bientôt au Muséum d'histoire naturelle, où il devint professeur en mai 1879.

Il avait, en réalité beaucoup d'autres titres justifiant les suffrages qu'il obtint alors. Il a contribué, plus que tout autre, à mettre en évidence les affininités des bactéries et des algues bleues. La découverte du Leuconostoc mésentéroïde, qui produit la gomme des sucreries en envahissant les cuves des fabricants de sucre, lui fournit un argument très décisif à cause de la ressemblance avec les nostocs, ces algues gélatineuses qui se développent fréquemment sur le sol. Le bacille amylobacter attira aussi son attention; il mit en évidence son grand rôle dans la destruction des végétaux, et fut un des premiers à signaler l'existence de bactéries fossiles, qui ont dû intervenir pour la formation de la houille.

L'attrait des recherches physiologiques devait, à maintes reprises, captiver l'attention de Van Tieghem et mettre en évidence toute la fertilité de son esprit original et chercheur : vie dans l'huile, germination fractionnée, maladie des pommiers se traduisant par l'apparition d'alcool dans les tissus, etc. Mais c'est surtout l'anatomie végétale qui absorba la plus grande partie de son activité. L'analyse de son oeuvre est impossible dans ce domaine, tant elle est immense. Il a publié plus de 600 mémoires. 

Parmi les sujets les plus importants qu'il a étudiés, on doit signaler son grand Mémoire sur la racine et la symétrie des plantes, son important travail sur le pistil, ses notes innombrables sur les applications de l'anatomie à la classification, ses recherches immenses sur les parasites. Ce sont surtout ces deux dernières séries de travaux qui l'ont conduit à formuler une nouvelle classification de l'ensemble du règne végétal, profondément originale, fondée sur l'ovule et la graine.

Certains traits primordiaux qui se manifestent dans cette classification nouvelle méritent une mention spéciale par leur caractère inattendu. Il semble que Van Tieghem aboutisse à une conclusion analogue à celle qui fait jouer aux invasions de champignons un rôle décisif dans l'évolution des plantes; sans la chercher, il est conduit à une synthèse plus vaste encore en mettant en lumière le rôle capital que le parasitisme a joué dans l'évolution des stigmatées. Cette vue profonde couronne dignement son oeuvre.

Le savoir universel de Van Tieghem, la clarté de son esprit, le charme de sa parole, faisaient de lui un maître très écouté partout où il a professé : à l'Ecole normale supérieure (1864-1879), au Muséum (1879-1914), à l'Ecole centrale (1873-1886), à l'Ecole normale de jeunes filles de Sèvres (1885-1912), à l'Institut agronomique (1898-1914). Son Traité de botanique (Paris, 1891, in-8., 2e éd.) est un véritable monument. On lui doit aussi : Eléments de botanique (Paris, 1898, in-8, 3e éd.). (J. Costantin).

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