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Vaiçéshika.
- Nom d'un des Darsanas (systèmes classiques
et orthodoxes) de philosophie indienne.
C'est celui qui fait de l'étude des « différences »
(viçesha) son principal objet. Il se caractérise lui-même
(Aphorismes de Kanâda, I, 1, 4), comme étant
«
le moyen d'arriver au souverain bien par la connaissance de la réalité,
connaissance qui survient grâce à des mérites particuliers,
et qui est obtenue au moyen de la mise en rapport et en opposition des
catégories qui sont : l'objet, la qualité, l'action, la ressemblance,
la différence, l'inhérence ».
C'est donc essentiellement un système
logique,
une théorie des catégories.
Aussi le considère-t-on dans l'Inde
et en Europe
comme une sorte d'annexe de la philosophie logique indienne, le Nyâya,
ou théorie du raisonnement, avec
laquelle il soutient en effet des rapports étroits. Le principal
ouvrage de la philosophie Vaiçeshika sont les aphorismes
(sûtras) de Kanâda. On ne peut dire si cet auteur a
existé, ni même assigner une date précise au texte.
En tout cas, il est certain que les éléments les plus importants
du système étaient fixés avant le IIe
siècle de notre ère. Quelques sources tibétaines,
peut-être dignes de foi, parlent de moines
bouddhistes qui en auraient été instruits au Ier siècle
de notre ère.
Les caractéristiques de cette école
philosophique sont : la classification
des catégories; puis la classification,
dans chaque catégorie, des diverses choses. Le point où elle
s'oppose le plus aux autres systèmes indiens, c'est la théorie
des substances. Il y aurait neuf substances
dont l'ordre serait le suivant : la terre, l'eau, la lumière, le
vent, l'espace (atmosphère subtile, substance
du son), le temps, les régions, l'Atman
et le Manas. Ces deux derniers termes sont soigneusement distingués;
l'un désigne l'âme comme « organe
interne », l'autre l'âme comme principe
spirituel de la personne et du monde. De ces neuf substances, les quatre
premières sont « non éternelles ». Elles sont
des corps matériels qui sont en réalité des agrégats
instables d'atomes invisibles et d'ordres divers. Cette notion de l'atome
(anu) est très spéciale, dans sa précision,
à notre système, mais elle a des équivalents, moins
précis dans quelques autres philosophies
indiennes.
Quoique réaliste, cette école
est, en fin de compte, orthodoxe, c.-à-d. idéaliste
et panthéiste (Kanâda, IX, 2,
II et suiv.). La connaissance des sages
mène au souverain bien, et « elle ne provient que d'un mérite
particulier, lequel se fonde sur l'autorité du dieu personnel, du
seigneur », disent les commentateurs. Elle consiste essentiellement
dans la méditation, dans la connaissance mystique
de l'ascète, dans la concentration de
la conscience, réduite à l'aperception
du brahman, principe
universel. (M. Mauss). |
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