| Marie-Anne de La Trémoille, princesse des Ursins est une femme française célèbre, née en 1642, morte à Rome en 1722. Fille du "plus ancien duc de France" et de Renée-Julie Aubry qui appartenait à une honorable famille de robe, elle fut mariée à quinze ans (1657) au prince de Chalais, Adrien-Blaise de Talleyrand (l'aïeul du diplomate). Chalais, compromis dans un des duels du temps, se réfugia en Espagne, y demeura trois ans, puis se dirigea vers Rome, mais mourut pendant le voyage; sa femme, ne tarda pas à se remarier avec un grand seigneur italien, Flavio degli Orsini, duc de Bracciano (1675) et son salon devint un des centres de la société romaine et de l'influence française en Italie. Ses yeux bleus si expressifs, son charme irrésistible, plus grand que sa beauté, prêtaient des armes incomparables à son ambition. La duchesse faisait de fréquents séjours en France et s'entendait mal avec son mari, mais sans brouille ouverte en 1698, le duc de Bracciano mourut, lui laissant une fortune considérable, mais grevée de dettes. Elle prit le titre de princesse des Ursins et obtint une pension de Louis XIV. Grâce à des intrigues d'une finesse extrême, elle obtint la place de camerera mayor de la reine d'Espagne (Marie-Louise, seconde fille du duc de Savoie) lorsque le duc d'Anjou fut appelé à la succession d'Espagne (L'Espagne au XVIIIe siècle) par le testament de Charles Il. La faiblesse de Philippe V, gouverné par la reine, et l'ascendant pris sur celle-ci par la princesse des Ursins allaient donner à cette dernière un rôle à sa taille : ce fut elle qui gouverna l'Espagne dans ce moment si difficile où la guerre étrangère se compliquait d'une guerre civile, au milieu des intrigues de palais et d'une incroyable détresse financière. Appelée à Paris, à la suite d'une dénonciation du cardinal d'Estrées, qui l'avait surprise avec un certain d'Aubigny qu'elle logeait près d'elle au palais, elle produisit une sorte de fascination sur la cour et sur Louis XIV même; elle revint à Madrid toute-puissante, appuyée par Mme de Maintenon, et montra, pendant les années de crise qui suivirent, le génie d'un homme d'État ; elle songea à se faire donner une souveraineté dans les Pays-Bas lors du traité d'Utrecht; mais la fin de sa domination approchait. La reine d'Espagne était morte et Mme des Ursins choisit elle-même pour lui succéder cette Elisabeth Farnèse, princesse de Parme, qui cachait sous une lourde apparence une âme altière et ambitieuse. L a nouvelle reine écarta brutalement de suite la princesse des Ursins qui fut conduite de nuit en chaise de poste à la frontière et faillit mourir de froid et d'humiliation (24 décembre 1714). Reçue très froidement à la cour de France, elle se retira en Italie et se fixa à Rome jusqu'à la fin de sa vie. Sainte-Beuve a fait une vive peinture de Mme des Ursins qu'il considère comme la femme politique accomplie; le rôle pour elle était tout : tout se passait pour elle dans la sphère du compliment, de la cérémonie, de l'intrigue théâtrale; la galanterie, qui ne quitte jamais cette sorte de femmes, reste subalterne, au second plan. E. Combes a écrit sa vie en 1859 et A. Geffroy a réuni ses lettres (1859). | |