| Suétone, C. Suetonius Tranquillus, est un écrivain latin qui vivait à la fin du Ier et au début du IIe siècle ap. J.-C. La vie de Suétone est peu connue. Deux ou trois passages de ses oeuvres, quelques lettres de Pline le Jeune, une mention de Spartien dans la Vita Hadriani, tels sont les seuls documents que nous possédons sur la biographie de cet historien. Suétone naquit, peut-être à Rome, entre les années 65 et 80 de l'ère chrétienne, d'après Mommsen en 77, selon Macé, en 69. Son père, Suetonius Laetus, fut tribun légionnaire et assista à la bataille de Bedriacum, où Vitellius triompha d'Othon. Suétone fit ses études à Rome. Plus tard, il semble avoir enseigné la grammaire; il voulut aborder le barreau, mais il n'y réussit pas. Lié d'amitié avec Pline le Jeune, il connut chez lui Tacite et de nombreux sénateurs. Sous Hadrien, il fut secrétaire ab epistolis, c.-à-d. directeur du bureau de la correspondance impériale. En 122, il fut disgracié par l'empereur, sans que l'on puisse se rendre un compte bien exact des causes de cette disgrace. Il est peu vraisemblable que Suétone ait manqué de respect à l'impératrice Sabina, pendant une absence d'Hadrien, comme on a voulu le conclure d'une phrase peu claire de Spartion. Il est plus probable que Suétone se trouva mêlé à quelque intrigue de cour, d'un caractère politique. Quoi qu'il en soit, il vécut dès lors dans la retraite et se consacra tout entier à ses travaux de grammaire, de littérature et d'histoire. Macé pense qu'il mourut vers 141; quant au personnage appelé Tranquillus et cité dans une lettre écrite par Fronton en 161, il n'a, d'après Macé, rien de commun avec Suétone. - Page d'un manuscrit de Suétone, daté du XVe s. L'oeuvre de Suétone. Suétone fut un polygraphe très fécond. Suidas nous a transmis une longue liste d'ouvrages qu'il attribue à cet écrivain. On y remarque surtout des ouvrages d'histoire outre les Vitae Caesarum et le De Viris illustribus, deux ouvrages sur les Jeux d'enfants chez les Grecs, sur les Spectacles chez les Romains; un traité des Institutions et des moeurs romaines, une étude sur l'Année romaine, etc.. La liste de Suidas ne mentionne pas diverses oeuvres qui ont été retrouvées on dont nous possédons quelques fragments, par exemple le De Institutione officiorum, le De Rebus variis, le De Regibus. De tout ce qu'a écrit Suétone, il n'y a lieu de retenir que les Vies des douze Césars (Vitae Caesarum) et le De Viris illustribus. Dans le premier de ces ouvrages, Suétone nous a raconté la biographie de César, Auguste, Tibère, Caligula, Claude, Néron, Galba, Othon, Vitellius, Vespasien, Titus et Domitien. Il a puisé aux sources contemporaines; pendant qu'il exerçait à la cour d'Hadrien les fonctions de secrétaire ab epistolis, il a pu consulter les archives impériales; il lui a été de même facile de recourir aux collections des sénatus-consultes, aux procès-verbaux des séances du Sénat (Acta Senatus). Il cite plusieurs fois des lettres et des testaments d'empereurs. Outre les documents écrits et officiels, il a recueilli dans le monde, dans la société de Pline, nombre de renseignements, d'anecdotes, d'épisodes dont l'authenticité est parfois douteuse, mais qu'il n'a certainement pas inventés et qui nous donnent une idée de ce que pouvait être la chronique politique et scandaleuse de Rome. On a dit que, pour écrire son livre, Suétone avait écouté aux portes et qu'il avait souvent mal entendu ce que l'on disait. Cela est fort possible; néanmoins, après Tacite et Dion Cassius, ses Vies des Césars nous donnent sur le premier siècle de l'Empire romain des renseignements précieux, qui ne se rencontrent pas ailleurs. Il importe de lui appliquer une critique sérieuse; mais on ne saurait écrire, sans le consulter, une histoire des premiers successeurs d'Auguste et des Flaviens. Les biographies de grammairiens, de rhéteurs et de poètes attribuées à Suétone, présentent le même caractère. Elles valent surtout par les indications de détail, que l'on chercherait vainement dans d'autres ouvrages. Elles permettent de compléter par un trait de moeurs, par un épisode biographique, ce que nous savons de quelques grands écrivains latins. En un mot, ce que nous avons conservé de Suétone est une mine de documents, où il faut puiser avec prudence, en s'efforçant de dégager le métal précieux des scories qui l'enveloppent, mais qu'un historien soucieux de connaître toute la vérité ne peut pas ignorer ou négliger. Suétone n'a pas une grande valeur littéraire. Il vise à l'élégance, mais son style vaut d'abord par la simplicité et la clarté. Ses oeuvres sont plutôt des compilations, des recueils de notes, que des livres à proprement parler. Il n'y a pas de composition, pas d'idées générales. Pendant le Moyen âge, la gloire de Suétone fut très grande. L'historien de Charlemagne, Eginhard, le prit pour modèle. (J. Toutain).
| Editions anciennes - Dès le début de la Renaissance, les oeuvres connues de Suétone furent imprimées. L'édition princeps fut publiée à Rome en 1470. Depuis lors, de très nombreuses éditions se sont succédé; nous citerons en particulier : l'éd. Casaubon (Genève, 1595); l'éd. Burmann (Amsterdam, 1736); l'éd. Baumgarten-Crusius (Leipzig, 1816-1818; l'éd. Hase (Paris, 1828); l'éd. Roth (Leipzig, 1858) ; l'éd. Reifferscheid (Leipzig, 1860). Suétone a été trad. par La Harpe (1770), Delisle de Sales, sous le pseudonyme d'Ophellot de La Pause (1771), Maurice Lévesque (1807), Golbéry, 1832-33, dans la collection Panckoucke, Th. Baudement, dans la coll. Nisard, et par E. Pessonneaux, 1856 (collect. Charpentier). On doit à Krause des recherches De Suetonii fontibus et auctoritate, Berl., 1831. | | |