| Jacopo Sannazaro ou Sannazar est un poète italien, né à Naples le 28 juillet 1458, mort en août 1531. Issu d'une famille originaire d'Espagne, il tirait son nom d'un château de San Nazaro (Saint-Nazaire), propriété de cette famille dans la Lomelline. Pontano l'introduisit, non seulement dans son Académie, où il prit le nom d'Actius Sincerus, mais à la cour, où il fut bien accueilli, notamment par Alphonse, duc de Calabre (roi en 1494) et son frère Frédéric. Il suivit le premier dans ses campagnes contre les Turcs à Otrante (1480), contre Sixte IV et Innocent VIII; en 1486, il se rendit à Rome avec Pontano, qui négociait la paix entre le Saint-Siège et Naples. En 1501, il suivit en France le roi Frédéric, dépouillé de ses Etats par Louis XII, et ne revint en Italie qu'à la mort de son protecteur (1504). Sannazar s'occupa alors de réunir les ouvrages de son ami Pontano et de mettre la dernière main aux. siens. Sannazar dut d'abord sa réputation à des oeuvres de circonstance, destinées à embellir les fêtes de la cour : c'est dans ce but qu'il composa ses Gliommeri (ce mot signifie, en napolitain, écheveau) aujourd'hui perdus, sorte de monologues burlesques composés de proverbes en dialecte, la «-farce » allégorique (le mot farce n'impliquait alors aucune intention burlesque), Il Trionfo della fama, représenté le 4 mars 1492 pour célébrer la prise de Grenade par les Espagnols, le dialogue de la Giovane e la Vecchia, et l'idylle de Venere che cerca Amore, etc. Son ouvrage capital en langue vulgaire est l'Arcadia, commencé dès 1480, publié malgré l'auteur par B. de Vercelli (Venise, 1502), puis avec son assentiment par les soins de P. Summonte (Naples, 1504). C'est un poème mêlé de prose où l'auteur est censé venir se consoler de ses chagrins amoureux parmi les bergers d'Arcadie, dont il décrit la vie, les jeux, les amours, et dans la bouche desquels il place des pièces de vers où abondent les allusions contemporaines. Les morceaux en prose sont surtout descriptifs; ils alternent avec des sextines, des chansons, et surtout des églogues en terzines (quelques-unes des terzines sont en vers sdruccioli). Il n'y a dans l'Arcadie presque rien d'original. Le cadre, le ton et la physionomie des personnages sont empruntés à l'Ameto et au Ninfale fiesolano de Boccace, les détails à Théocrite, Virgile, Ovide, Calpurnius, etc. La forme métrique même n'est pas, quoi qu'on en ait dit, de l'invention de l'auteur. Les sentiments des personnages sont peu naturels, le style trop savant et souvent pédantesque. Le succès de l'Arcadie, qui nous surprend aujourd'hui, était précisément dû à ces défauts : on se plaisait à y retrouver l'Antiquité traduite ou imitée à chaque pas. L'Arcadie parut le chef-d'oeuvre du genre pastoral; elle eut, au XVIe siècle, 59 éditions, et exerça une grande influence sur les littératures étrangères; elle fut imitée, notamment en Espagne par Garcilaso (Églogues), Lope de Vega (Arcadia}, Cervantes (Galatée), et en France par Belleau (Bergeries). Dans ses Rime (Naples et Rome, 1530), médiocrement intéressantes, l'imitation de Pétrarque est flagrante. Dans la seconde partie de sa vie, Sannazar renonça à peu près à la poésie italienne, découragé, dit-on, par la perfection des écrits de Bembo. Ses meilleures oeuvres latines sont un long poème de Partu Virginis; auquel il travailla vingt ans, et cinq Eclogae piscatoriao, genre qu'il prétendait avoir inventé, mais où en réalité il imite Théocrite. Il faut citer enfin une Lamentatio de morte Christi, trois livres d'Elégies et autant d'Epigrammes. Les Opere volgari de Jacopo Sannazar ont été publiées intégralement à Padoue en 1723. La meilleure édition classique de l'Arcadie est celle de Scherillo (Turin 1888). (A. Jeanroy). | |